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EAN : 9791021046832
352 pages
Tallandier (18/02/2021)
4/5   26 notes
Résumé :
Où sont allés les plus aventureux des Phéniciens, des Égyptiens, des Grecs, des Romains ? Certains ont-ils déjà fait le tour de l’Afrique ? Ces questions sont essentielles pour connaître l’étendue et l’intensité des relations entre les grandes civilisations.

Dès l’Antiquité, Europe, Afrique et Asie étaient en contact. De l’Islande au Vietnam, poussés par le vent de mousson comme le bateau du Palmyrénien Honaînû en route pour l’Inde ou au rythme lent d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Le titre de ce livre est "Le bateau de Palmyre, quand les mondes anciens se rencontraient" : nul bateau de Palmyre sur la couverture affichée par Babelio. Maurice Sartre aborde le sujet passionnant des contacts entre le monde classique et méditerranéen, et les autres espaces et continents entre le VI°s av.J.-C. et le VI°s après J.-C. : Europe du Nord, Afrique, Asie proche ou lointaine. Il rencontre dans son entreprise deux obstacles principaux : d'abord, le grand naufrage de la culture gréco-latine nous a fait perdre beaucoup de textes et témoignages précieux de voyageurs et de géographes ; ensuite, les civilisations contactées soit ignorent l'écriture, comme en Afrique ou en Europe du Nord, soit l'utilisent à d'autres fins, comme en Perse et en Inde. Ces autres mondes enfin ne semblent pas animés de la même curiosité pour les cultures étrangères que les anciens Grecs. L'information est donc lacunaire du point de vue occidental, et souffre d'un déséquilibre documentaire au profit du peu qui nous reste des auteurs classiques.

Maurice Sartre prend soin de signaler ces points, et nous avertit qu'il ne s'agit en aucun cas d'histoire globale au sens où l'entendent Patrick Boucheron et son école, puisque les contacts entre le monde méditerranéen et les autres espaces sont épisodiques. Il ne peut y avoir d'histoire globale car ces mondes ne dépendent pas les uns des autres. Maurice Sartre préfère parler d'histoire connectée, ce qui est plus fidèle à l'état des sources et peut-être à la réalité. Cette prudence, en tous cas, le préserve de faire un ouvrage trop grossièrement idéologique.

A l'aide de l'archéologie et des textes qui nous sont parvenus, Maurice Sartre retrace les dangereuses navigations grecques vers la Baltique, autour de l'Afrique et vers l'Inde du sud (quand on a su exploiter les vents de mousson). Il ne s'agit pas d'exploration scientifique, même avec Hannon et Pythéas : le motif est d'abord commercial. Si Grecs et Romains ont tenté d'aller en Inde du sud par la mer, c'est que l'empire perse (ou avant, parthe) gênait les routes terrestres et prélevait trop de taxes. L'auteur décrit donc, à partir des traces matérielles et textuelles (objets importés, monnaies, stèles, graffitis etc), ce que l'on peut savoir de ces routes du poivre, des perles, de l'ambre etc ... La tête de pont des royaumes gréco-indiens et bactriens fondés par Alexandre permet aussi de se procurer de la soie par voie de terre, mais l'auteur tente de réfuter l'expression reçue "route de la soie". Il termine son enquête par le cas chinois et par une étude des usages commerciaux et diplomatiques de cette étoffe si recherchée.

Le livre se présente comme une énumération de routes, d'objets archéologiques commentés, de textes : la forme adoptée est donc fatigante, et la langue de l'historien, pleine de fautes et de clichés, n'arrange rien. Ceci n'a pas dérangé les journalistes qui ont recommandé chaudement cet ouvrage mal écrit.

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Maurice Sartre est un excellent professeur d'histoire antique. Je me souviens encore de ma lecture de son précis d'histoire grecque qui m'avait donné le gout de l'histoire antique et que j'avais dévoré comme un roman. Dans ce nouvel ouvrage, il développe les liens entre les "mondes antiques" : entre grecques , romains et les pays du Nord (Islande, Baltique), l'Afrique subsaharienne, les pays frontaliers de l'Océan Indien, l'Inde ou encore la Chine. C'est dons sur ces zones charnières que se porte le regard au travers des traces matérielles du commerce et des échanges. Mon seul regret est que un bon nombre dé développement consiste à repérer sur une carte les emplacements géographiques cités par les auteurs anciens. L'ouvrage est cependant très intéressant et permet de jeter un nouveau regard sur des textes anciens comme des passages de Pline ou d'Hérodote ou encore le récit de voyage de Pythéas. Il subsiste peu de doute par exemple que la première circumnavigation de l'Afrique fut faite par des Phéniciens missionnés par un pharaon et les traces matérielles montrent que des peuples celtibères avaient sans doute également l'habitude de ces routes maritimes.
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Les historiens interrogent toujours l'histoire en fonction du moment présent. La science historique s'est passionnée au cours des dernières décennies pour la mondialisation qui nous occupe tant. Ils en ont cherché les origines et les prémices, illustrant la précocité du désir des hommes pour la recherche de l'ailleurs, les échanges de biens et d'idées ; le tout en sortant enfin du regard européo-centré.

Maurice Sartre poursuit cet effort en scrutant sa période d'études : l'Antiquité. Il recherche dans les textes et l'archéologie les traces les plus anciennes de découvertes, de voyages au-delà des mondes connus, de circulation de biens et de marchandises parfois entre des mondes qui s'ignoraient.
Les sources sont bien sur la difficulté essentielle : une allusion dans un texte antique, un témoignage de troisième main qui mêle une vérité probable à cent fantasmagories ; un bas-relief représentant Héraclès avec un geste évoquant Bouddha, une inscription latine en hommage à l'empereur Antonin dans une île tout au sud de la Mer Rouge...

Pourtant à partir de ces traces, Maurice Sartre nous entraine dans un véritable voyage d'aventure. Nous y rencontrons quelques personnages fascinants; comme ce Pythéas, grec de Marseille de la fin du IVe avant JC qui a probablement atteint l'extrême nord de l'Europe, même si les géographes de l'Antiquité le traite de " grand menteur". Pythéas affirme avoir vu le soleil briller sans discontinuer ce qu'il n'a pu inventer.
L'auteur anonyme du " périple en mer d'Erythrée" livre un témoignage sur la navigation le long des côtes de l'Afrique et vers l'Inde.
Une mention a particulièrement retenue mon attention : l'auteur Marin de Tyr relate les voyages d'un marin appelé Diogène, qui, revenant d'Inde, fut repoussé par des vents, à hauteur des "lacs d'où coule le Nil" , lacs qui se situent à 800 km à l'intérieur des terres, indiquant ainsi que l'information des sources du Nil était parvenue aux méditerranéens de cette époque.
Le chapitre " la vie mouvementée de Sôphytos" débute sur une inscription en grec, provenant d'Afghanistan, qui retrace les mésaventures d'un Indien issu d'un riche famille lui ayant donné une éducation grecque.

Le chapitre 14 "l'ambassade d'Andoun" fait référence à "l'histoire des Han Postérieurs" de Fan Ye qui relate une improbable ambassade envoyée par l'empereur Marc-Aurèle au IIe siècle de notre ère à la cour de Chine. Il n'y a pas de traces de cette ambassade dans la documentation de l'empire romain.

Aussi loin que la mémoire des hommes puissent remonter, ceux-ci ont toujours été poussés vers la découvertes de nouvelles terres, la volonté de voir où le monde finissait et aussi de rencontrer d'autres cultures. C'est bien ce que l'auteur voulait montrer. le monde d'aujourd'hui est né de cette envie puissante dont il ne faut pas négliger les effets positifs. Pour autant, les mécanismes de la mondialisation actuelle ne sont peut être pas les mêmes que ceux des échanges antiques, si on se réfère à la littérature économique.
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Maurice Sartre est un historien français, spécialiste de l'histoire du monde grec et du monde romain oriental. Il a suivi des études d'histoire et a participé à des fouilles archéologiques notamment au Proche-Orient. Il fait partie des principales références pour la vulgarisation de l'Histoire Antique.
Jusqu'où sont allés les plus aventureux des Phéniciens, des Égyptiens, des Grecs, des Romains? Que connaissent-ils à la fin de l'Antiquité du reste de la Terre habitée, l'οἰκουμένη comme disent les Grecs? Et jusqu'où sont arrivés Indiens et Chinois? Au-delà des trafics commerciaux que l'on peut repérer, quels autres échanges peut-on déceler?
Maurice Sartre tente de répondre à ces questions en s'appuyant, pour chaque chapitre, sur un document qui suscite une interrogation à laquelle il tente de répondre et à partir de laquelle il élargit les perspectives.
Il suit un plan géographique en partant du monde méditerranéen et proche-oriental, en passant par l'Europe septentrionale et l'Afrique pour finir par l'Asie centrale et le monde chinois.
Il retrace la mobilité des Anciens ainsi que la connectivité qui s'établit entre ces différents espaces. Il met également en évidence certains aspects de ces échanges qui permettent d'éclairer les liens existant entre les civilisations de la Méditerranée et des terres plus lointaines. En effet, il s'interroge sur les divers types d'échange: échanges de marchandises, échanges d'hommes, échanges d'idées et de savoirs. Ce livre est ainsi complet et ludique, bien documenté puisqu'il s'appuyé à la fois sur les textes mais aussi les découvertes archéologiques. Je recommande cet ouvrage pour ceux qui s'intéressent aux interactions et aux différents échanges internationaux dans l'Antiquité.
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En conclusion, j'ai eu un énorme coup de coeur pour le bateau de Palmyre! L'ouvrage est parfaitement bien documenté et son auteur reste prudent face aux sources. le livre est également agrémenté d'outils (notes, cartes, dossier photographique) pour aider le lecteur à appréhender le propos et il s'avère passionnant en raison de nombreuses connaissances que j'ai pu acquérir. Bref, ouvrage que je conseille amplement!

Pour une chronique plus complète, rendez-vous sur mon blog :
Lien : https://labibliothequedaelin..
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
[Ambassade indienne auprès d'Auguste, en l'an 13, rapportée par Nicolas de Damas et Strabon, XV-i-73)] Sartre p. 149-150 :

73. Cet historien [Nicolas de Damas] eut la chance de rencontrer à Antioche près de Daphné les ambassadeurs indiens envoyés à César Auguste. La lettre mentionnait clairement plus de trois ambassadeurs mais seuls trois avaient survécu (il dit qu'il les avait vus), les autres, surtout en raison de la longueur du voyage, étaient morts. La lettre était écrite en grec sur une peau et, à l'évidence, Pôros [le roi qui envoie l'ambassade] l'avait écrite lui-même ; bien qu'il ait été le maître de six cents rois, il s'inquiétait d'être l'ami de César et était disposé non seulement à lui autoriser le passage à travers son pays où qu'il souhaitât aller, mais aussi à coopérer avec lui en toute chose honorable. Nicolas écrit que tel était le contenu de la lettre à César, et que les cadeaux apportés à César étaient présentés par huit serviteurs nus, portant seulement un pagne court (perizôma), aspergés de parfums. Les cadeaux consistaient en un hermès, un homme né sans bras que j'ai moi-même [Strabon] vu, et de grandes vipères, un serpent long de 10 mètres, une tortue de rivière longue de trois coudées, une perdrix plus grosse d'un vautour. Et ils étaient accompagnés par un homme qui s'immola par le feu à Athènes ; tandis que certains se suicident ainsi pour échapper à la maladie, d'autres agissent de même quand tout va bien, comme c'était le cas de cet homme. Car, ajoute-t-il [Nicolas de Damas], bien que tout allât bien pour cet homme jusque-là, il pensait qu'il lui fallait quitter la vie de peur que quelque chose de fâcheux ne lui arrivât s'il tardait. Il bondit donc dans le feu en souriant, le corps nu oint et parfumé, portant seulement un perizôma. Et l'on écrivit sur sa tombe :
"Ici repose Zarmanochegas, Indien de Bargosa (Baryzaga, Bharuch), qui a acquis par lui-même l'immortalité selon la coutume des Indiens."

73] Φησὶ γὰρ οὗτος ἐν Ἀντιοχείᾳ τῇ ἐπὶ Δάφνῃ παρατυχεῖν τοῖς Ἰνδῶν πρέσβεσιν ἀφιγμένοις παρὰ Καίσαρα τὸν Σεβαστόν· οὓς ἐκ μὲν τῆς ἐπιστολῆς πλείους δηλοῦσθαι, σωθῆναι δὲ τρεῖς μόνους, οὓς ἰδεῖν φησι, τοὺς δ´ ἄλλους ὑπὸ μήκους τῶν ὁδῶν διαφθαρῆναι τὸ πλέον· τὴν δ´ ἐπιστολὴν ἑλληνίζειν ἐν διφθέρᾳ γεγραμμένην, δηλοῦσαν ὅτι Πῶρος εἴη ὁ γράψας, ἑξακοσίων δὲ ἄρχων βασιλέων ὅμως περὶ πολλοῦ ποιοῖτο φίλος εἶναι Καίσαρι, καὶ ἕτοιμος εἴη δίοδόν τε παρέχειν ὅπῃ βούλεται καὶ συμπράττειν ὅσα καλῶς ἔχει. Ταῦτα μὲν ἔφη λέγειν τὴν ἐπιστολήν, τὰ δὲ κομισθέντα δῶρα προσενεγκεῖν ὀκτὼ οἰκέτας γυμνούς, ἐν περιζώμασι καταπεπασμένους ἀρώμασιν· εἶναι δὲ τὰ δῶρα τόν τε ἑρμᾶν, ἀπὸ τῶν ὤμων ἀφῃρημένον ἐκ νηπίου τοὺς βραχίονας, ὃν καὶ ἡμεῖς εἴδομεν, καὶ ἐχίδνας μεγάλας καὶ ὄφιν πηχῶν δέκα καὶ χελώνην ποταμίαν τρίπηχυν πέρδικά τε μείζω γυπός. Συνῆν δέ, ὥς φησι, καὶ ὁ Ἀθήνησι κατακαύσας ἑαυτόν· ποιεῖν δὲ τοῦτο τοὺς μὲν ἐπὶ κακοπραγίᾳ ζητοῦντας ἀπαλλαγὴν τῶν παρόντων, τοὺς δ´ ἐπ´ εὐπραγίᾳ, καθάπερ τοῦτον· ἅπαντα γὰρ κατὰ γνώμην πράξαντα μέχρι νῦν ἀπιέναι δεῖν, μή τι τῶν ἀβουλήτων χρονίζοντι συμπέσοι· καὶ δὴ καὶ γελῶντα ἁλέσθαι γυμνὸν λίπ´ ἀληλιμμένον ἐν περιζώματι ἐπὶ τὴν πυράν· ἐπιγεγράφθαι δὲ τῷ τάφῳ

Ζαρμανοχηγὰς Ἰνδὸς ἀπὸ Βαργόσης
κατὰ τὰ πάτρια Ἰνδῶν ἔθη ἑαυτὸν ἀπαθανατίσας κεῖται.
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[L'Afrique (= la Libye) est entourée de mers, Hérodote IV-42 ], Sartre chapitre 2.

La Libye montre elle-même qu'elle est environnée de la mer, excepté du côté où elle confine à l'Asie. Nécos, roi d'Égypte, est le premier que nous sachions qui l'ait prouvé. Lorsqu'il eut fait cesser de creuser le canal qui devait conduire les eaux du Nil au golfe Arabique, il fit partir des Phéniciens sur des vaisseaux, avec ordre d'entrer, à leur retour, par les colonnes d'Hercule [Gibraltar], dans la mer Septentrionale [Méditerranée], et de revenir de cette manière en Égypte.

Les Phéniciens, s'étant donc embarqués sur la mer Érythrée [Mer Rouge], naviguèrent dans la mer Australe. Quand l'automne était venu, ils abordaient à l'endroit de la Libye [Afrique] où ils se trouvaient, et semaient du blé. Ils attendaient ensuite le temps de la moisson, et, après la récolte, ils se remettaient en mer. Ayant ainsi voyagé pendant deux ans, la troisième année ils doublèrent les colonnes d'Hercule, et revinrent en Égypte. Ils racontèrent, à leur arrivée, que, en faisant voile autour de la Libye, ils avaient eu le soleil à leur droite. Ce fait ne me paraît nullement croyable ; mais peut-être le paraîtra-t-il à quelque autre. C'est ainsi que la Libye a été connue pour la première fois.

Λιβύη μὲν γὰρ δηλοῖ ἑωυτὴν ἐοῦσα περίρρυτος, πλὴν ὅσον αὐτῆς πρὸς τὴν Ἀσίην οὐρίζει, Νεκῶ τοῦ Αἰγυπτίων βασιλέος πρώτου τῶν ἡμεῖς ἴδμεν καταδέξαντος· ὃς ἐπείτε τὴν διώρυχα ἐπαύσατο ὀρύσσων τὴν ἐκ τοῦ Νείλου διέχουσαν ἐς τὸν Ἀράβιον κόλπον, ἀπέπεμψε Φοίνικας ἄνδρας πλοίοισι, ἐντειλάμενος ἐς τὸ ὀπίσω δι᾽ Ἡρακλέων στηλέων ἐκπλέειν ἕως ἐς τὴν βορηίην θάλασσαν καὶ οὕτω ἐς Αἴγυπτον ἀπικνέεσθαι. Ὁρμηθέντες ὦν οἱ Φοίνικες ἐκ τῆς Ἐρυθρῆς θαλάσσης ἔπλεον τὴν νοτίην θάλασσαν· ὅκως δὲ γίνοιτο φθινόπωρον προσσχόντες ἂν σπείρεσκον τὴν γῆν, ἵνα ἑκάστοτε τῆς Λιβύης πλέοντες γινοίατο, καὶ μένεσκον τὸν ἄμητον· [4] Θερίσαντες δ᾽ ἂν τὸν σῖτον ἔπλεον, ὥστε δύο ἐτέων διεξελθόντων τρίτῳ ἔτεϊ κάμψαντες Ἡρακλέας στήλας ἀπίκοντο ἐς Αἴγυπτον. Καὶ ἔλεγον ἐμοὶ μὲν οὐ πιστά, ἄλλῳ δὲ δή τεῳ, ὡς περιπλώοντες τὴν Λιβύην τὸν ἥλιον ἔσχον ἐς τὰ δεξιά.
43. Οὕτω μὲν αὕτη ἐγνώσθη τὸ πρῶτον ...
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[Les "routes de la soie" n'existent pas]
Ainsi, la soie a fait l'objet d'un commerce à l'intérieur de la Chine : cela ne fait aucun doute. Mais, à la périphérie, elle sert principalement de cadeau diplomatique : l'essentiel de ce que l'on trouve lors des fouilles montre qu'elle échappe au système des échanges. On ne peut exclure qu'il y ait aussi des achats, mais ils ne sont attestés ni par les textes, ni par l'archéologie, et il serait imprudent de s'imagine un commerce de la soie que rien ne documente. En revanche, on perçoit très bien, à partir des tombes de type Kourgan dispersées dans toute la Sibérie sud-orientale jusqu'en Asie Centrale, que les versements de l'empereur chinois sont ensuite largement redistribués aux membres de la cour Xiongnu [hunnique], aux féodaux locaux, qui eux-mêmes peuvent l'utiliser à leur gré...

La soie qui parvenait en Méditerranée était donc acquise ailleurs qu'en Chine, probablement en Asie Centrale et dans le bassin du Tarim chez les Sères [Tokhariens], où il s'agit pour une part importante de la soie chinoise offerte ... et revendue... De plus, Rome se procure une partie non négligeable de la soie qui lui est nécessaire en Inde du Nord-Ouest, dans les ports de Barbarikon et de Baryzaga... Les populations d'Inde du Nord-Ouest, largement habituées aux productions grecques ou hellénisantes, fournissaient une clientèle sensible aux importations venues de la Méditerranée. Leurs achats de vins, d'étoffes, de bijoux et de vaisselle en métal etc, compensaient les dépenses effectuées par les marchands romains pour la soie...

Si la soie vient bien de Chine, ce n'est pas là que les Occidentaux se la procurent, mais au Sinkiang ou en Inde pour l'essentiel. De plus, pour les Chinois, ce n'est guère un produit de commerce, et les routes qu'elle suit à la sortie de la Chine, reflètent surtout les relations diplomatiques de la cour des Han. L'idée de "routes de la soie" où s'activerait tout un peuple de caravaniers et de marchands pressés de répandre le produit phare de l'artisanat chinois convient peut-être à un régime plus soucieux de propagande que de vérité historique. Mais l'historien peut l'apprécier autrement et essayer de montrer la complexité d'un processus où s'entremêlent diplomatie et commerce.

pp. 221-224
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[Stèle latine trouvée en Arabie]
Ce texte apporte enfin de précieuses indications topographiques, non seulement sur le nom antique de l'archipel des Farasân, qui portait le même nom dans l'Antiquité - le porte où est installé le camp romain se nomme Portus Ferresanus - mais sur le nom particulier de ce secteur de la Mer Rouge, la mer d'Héraclès. A l'intérieur de la "mer Erythrée", qui désigne le vaste ensemble englobant mer Rouge, océan Indien et golfe Arabo-Persique, Grecs et Romains distinguaient donc des mers particulières ; on connaissait déjà le "mare Azanium", au sud des côtes de Somalie et du Kenya, grâce à Pline, et voici qu'apparaît une mer d'Héraclès au sud de la mer Rouge. Les Anciens pratiquaient de même en mer Méditerranée qu'ils divisaient en une foule de petites mers, de Crète, de Chypre, de Cilicie etc. Il reste quelque chose avec les mers Egée, Adriatique, Ionienne ou Tyrrhénienne. Pourquoi Héraclès dans cette région lointaine ? Probablement en souvenir du voyage légendaire de ce dieu en Ethiopie et en Inde, puisqu'il faut franchir cette mer pour se rendre dans l'une et l'autre de ces deux contrées.

pp. 111-112.
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Oikouménè, un mot unique pour désigner le monde habité : les Grecs marquaient ainsi leur conscience de l'unicité du genre humain en dépit de la variété des peuples et des coutumes. Leur découpage en trois continents, en revanche, relève plus de la réflexion philosophique et mathématique que de l'observation géographique, et ils avaient parfaitement conscience du caractère artificiel d'un tel découpage. Pour l'historien qui parcourt à leur suite l'univers que pouvaient connaître à la fois les Grecs, les Indiens, les Arabes ou les Chinois, ce ne sont pas trois continents qui semblent s'articuler entre eux, mais plutôt cinq mondes qui se recouvrent partiellement. Le plus vaste peut-être, celui qui suscite le plus de fantasmes, c'est l'immense monde des steppes qui court de la Scandinavie à l'extrémité de la Sibérie, que l'on redoute autant à Rome et à Alexandrie qu'à Xi'an et à Bactres. Le monde subsaharien reste plus mystérieux pour tous, et les tentatives de circumnavigation de l'Afrique en dépit de quelques réussites probables, ne sont pas parvenues à en faire un monde familier, sauf sur quelques marges. Entre ces deux mondes courent les trois grands ensembles que j'ai la tentation de nommer les mondes des empires : le monde méditerranéen et proche-oriental que dominent successivement ou/et concurremment les Gréco-Macédoniens, Rome, les Perses (Achéménides puis Sassanides), les Parthes, de l'Atlantique à l'Iran oriental et à l'Asie centrale ; le monde de l'océan Indien, de la côte orientale de l'Afrique à l'Asie du Sud-Est, en passant par l'Arabie, l'Inde et ses bordures, la péninsule Malaise et les îles de la Sonde ; le monde chinois enfin, du Turkestan à l'Indochine, sur lequel les Han exercent longtemps une tutelle qui n'est pas que formelle.
Aucun de ces mondes n'est isolé, et tous mordent sur les voisins, créant ainsi ces zones que l'on a tendance à nommer des marges mais qui sont davantage des charnières, des zones de contact, riches de leur cosmopolitisme.
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Vidéo de Maurice Sartre
[PODCAST] Au théâtre, le crime politique trouve son illustration dans la tragédie. de l'antiquité jusqu'à nos jours, les mises en scènes successives dotent les drames d'antan d'un sens nouveau.
Retrouvez l'épisode sur toutes les plateformes de podcast : https://urlz.fr/pZag
Modérateurs :  Sylvain BELLENGER, historien de l'art, alors directeur du château et conservateur des musées De Blois Maurice SARTRE, professeur d'Histoire ancienne à l'université de Tours. 
Participant·e·s :  Gérard FONTAINE, philosophe spécialiste d'esthétique et d'opéra Gildas LE BOTERF, alors directeur de la Scène nationale de la Halle aux grains Claude MOSSÉ, historienne spécialiste de la cité grecque à l'âge classique Anne UBERSFELD, historienne du théâtre  
Débat issue de la première édition des Rendez-vous de l'histoire, en 1998, sur le thème "Crime et Pouvoir". 
© Sylvain Bellenger, Gérard Fontaine, Gildas le Boterf, Claude Mossé, Maurice Sartre, Anne Ubersfeld, 1998.
Nous cherchons à entrer en contact avec les ayants droit de Gildas le Boterf, Claude Mossé et Anne Ubersfeld : écrivez-nous à l'adresse archives@rdv-histoire.com si vous avez des informations.
Voix du générique : Michel Hagnerelle (2006), Michaelle Jean (2016), Michelle Perrot (2002) https://rdv-histoire.com/
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