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EAN : 9782911686931
260 pages
MEET (06/11/2014)
4.5/5   2 notes
Résumé :
On nous amène en première ligne. Partout, boue et brouillard. Je vois à peine le type devant moi. C'est tout juste si on ne se tient pas les uns aux autres par la ceinture pour ne pas se perdre. Autour de nous, des maisons incendiées. La colonne s'étire le long de palissades branlantes. On patauge dans la bouillasse, qui se colle aux bottes en mottes gluantes. Les lignes les plus belles sont celles qu'on prend pour la première fois.

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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique

« On nous amène en première ligne. Partout, boue et brouillard. Je vois à peine le type devant moi. C'est tout juste si on ne se tient pas les uns aux autres par la ceinture pour ne pas se perdre. Autour de nous, des maisons incendiées. La colonne s'étire le long de palissades branlantes. On patauge dans la bouillasse, qui se colle aux bottes en mottes gluantes. »

Faruk Sehic ou la guerre en ex-Yougoslavie,(1994) une expérience vécue, bien loin de son désir d'Écriture comme mode de vie. Pourtant, de ce menu (« l'horreur, c'est notre truc ») il extrait en courts épisodes « l'essence immémoriale des choses » : les cadavres, les ruines, la guerre comme un alcool fort, qui nourrit ses textes.

La vie normale n'existe plus, on vit dans l'immédiat, « comme si on allait partir en pique-nique on monte à l'assaut ». Attaque, repli, Les phrases sont rapides, brèves, comme des salves. Parfois des énumérations (« il y avait » suivent les noms des morts), un questionnaire administratif chez le neuropsychiatre, un « flash back du temps de paix » sur un air de David Bowie.

Il relate les trêves trompeuses, les trocs d'alcool ou de tabac entre adversaires, les marches forcées, le désir de « réduire son cerveau à la taille d'une bille ».

Point de pathos ou de « belles phrases ». le jet dru de l'instant, « un film qui casse en pleine projection ». du vécu, des témoignages aussi, qu'il met en forme, poèmes bruts des données immédiates, où « les balles explosives font un crépitement de pop corn. »

La pulsion de l'instant : « il me reste cinq à six cartouches dans ma kalachnikov. Assez pour me faire sauter le caisson ».

Imaginer la paix relève du fantastique. Que faire ? Collectionner les obus ? Garder dans le corps des fragments de mitraille, mobiles sous la peau, qu'on prendrait pour des grains de
beauté ?

On est plus près de Cendrars que d'Apollinaire, les fragments, souvent durs et secs, prennent le rythme des détonations, jusqu'à la folie.
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Quinze rudes et belles nouvelles de la guerre civile yougoslave, côté bosnien.

Sur mon blog : https://charybde2.wordpress.com/2017/08/15/note-de-lecture-sous-pression-faruk-sehic/
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Encore le même plan. Sauf qu’on attaque de jour. Comment est le ciel ? Y a-t-il du soleil ? Je ne me souviens pas. L’uniforme a l’odeur monotone des choses unisexes. L’herbe humide est du même vert-de-gris que les parois des chiottes publiques. Pendant ces quelques minutes qui précèdent l’assaut règne un silence total. Même les bruits de la nature s’éteignent. Ou alors les sens ne les perçoivent plus, occupés qu’ils sont par une seule et unique chose : rester vivant. Tout mon corps est comme une main moite de sueur crispée jusqu’à la crampe. Tir au lance-roquettes, puis succession de rafales entrecoupées de Allah akbar. Nous enfonçons leur ligne avec une facilité inespérée. Faisons irruption dans leurs tranchées désertées. Les veines me sortent de la tête. Les balles explosives font un crépitement de pop-corn. Redžo Begić est à ma droite, à genoux. De la paille dépasse de dessous une couverture militaire. Nous fouillons les sacs des soldats. Le propriétaire de celui que j’ai entre les mains s’appelle Duško Banjac. Son nom est écrit au crayon à papier sur une feuille arrachée d’un carnet de comptabilité. On fourre dans nos poches les boîtes de munitions en carton. Maintenant, du sang épais coule de la bouche de Redžo. Il gargouille ; son visage prend la couleur de la craie. Je pense d’abord qu’il a pris une balle en pleine bouche. On le tire de la tranchée pour le traîner une dizaine de mètres plus bas, dans l’abri. Quelques secondes plus tard, il est mort. On n’a même pas eu le temps de panser sa blessure. La balle lui est entrée dans la poitrine par le haut. Son cœur a éclaté. On le recouvre d’une toile de tente. (« Pour l’éternité »)
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On nous amène en première ligne. Partout, boue et brouillard. Je vois à peine le type devant moi. C’est tout juste si on ne se tient pas les uns aux autres par la ceinture pour ne pas se perdre. Autour de nous, des maisons incendiées. La colonne s’étire le long de palissades branlantes. On patauge dans la bouillasse, qui se colle aux bottes en mottes gluantes. Les lignes les plus belles sont celles qu’on prend pour la première fois. Tout a l’attrait du neuf, de l’inhabituel : tout est super-bandant. Surtout quand on prend la ligne de nuit et que le lendemain, à la lumière du jour, on va réaliser qu’on se trouve à la pointe d’un clou. D’un toit tombent des poutres carbonisées qui grésillent dans la boue. Le terrain est très pentu, on crapahute en dérapant dans l’herbe rendue visqueuse par le brouillard. Au premier qui se casse la gueule, la colonne doit s’arrêter et le gars, invariablement, maudit son propre pays et injurie son président. Quand je pense que cette nuit, on va devoir dormir à la belle étoile, j’en ai mal au cul. L’orienteur de la police militaire guide la colonne au sommet d’un piton, autant dire un clou. Emir et moi prenons possession d’une tranchée peu profonde où nous trouvons, crottés de boue, un matelas, un édredon et une poignée de mégots, fumés jusqu’au filtre et fichés nerveusement dans la terre. (« Sous pression »)
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Le Chauve note les effectifs dans son calepin. Formation de guerre : neuf hommes plus le gratte-papier. Absences justifiées : un, à la caserne (le gratte-papier). Blessés : deux combattants. Morts : un. Au repos pour raisons médicales : un, en neuropsychiatrie (la recrue). Sur place : cinq combattants. On boit des coups de gnôle et on fume sans rien dire. Dehors, le brouillard conquiert le territoire. Les statistiques règnent. Elles manient les déficits et les excédents avec un aplomb imperturbable. Mesurent le moral, pèsent les hommes comme du bétail. Écart type plus ou moins ∞. (« Pour l’éternité »)
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Quand elle tourne au ralenti, la machine de guerre gonfle de sang les muscles des officiers supérieurs et débride l’imagination des civils. La peur s’estompe et la guerre s’incruste dans le corps comme un appendice boursouflé. (« Kaléidoscope de souvenirs »)
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