L'île du couchant

Enthousiasmée j'ai commencé le roman de Gilbert Sinoué , l'auteur d"'Avicennes" et du "Livre de Saphir" pour me plonger dans la vie d'un souverain marocain du XVII -ème siècle.
Cette biographie du sultan Moulay Ismaël qui pacifie le Maroc m'a enchanté mais au début seulement.
Ce descendant de la dynastie Alaouites hérite d'un pays où les rivalités tribales s'enflamment . Les Européens ont colonisés des ports importants et les conflits maritimes ne cessent avec les Barbaresques.
Ismaël va donc soulever une armée de "abid" esclaves noirs endoctrinés depuis l'enfance et réduire les tribus sous son autorité.
Mille batailles vont mettre à l'épreuve le souverain mais jamais il ne baissera les bras devant même combattre sa propre famille.
Il tentera de négocier avec Louis XIV un accord de paix qui échouera malgré les bonnes volontés de ses ambassadeurs.
Ce destin de souverain est narré avec une petite romance d'un médecin marseillais qui se préoccupera d'un dispensaire des Trinitaires, religieux qui rachetaient les captifs européens.
Cependant mon enthousiasme s'est peu à peu émoussé avec l'arrivée des chroniques berbères, histoire de ce peuple qui a perdu sa souveraineté dans le Maghreb au profit des Arabes. Cette construction narrative enchâssée dans la vie de Moulay Ismaël m'a semblée brouillonne; elle coupait le récit et le rythme alors que le passage des ambassadeurs à la cour du roi soleil était éblouissante.
Même si je suis ressortie déçue, la lecture de ce roman m'a confirmé que le destin d'un peuple dépend surtout d'hommes de grandes convictions. Moulay Ismaël était certes cruel mais aussi un tolérant religieux et un grand bâtisseur, un "roi soleil des mille et une nuits".
Pour en savoir davantage j'ai regardé l'excellente émission "Secrets d'histoire" sur ce sultan fondateur d'un beau pays: le Maroc.

C'est à la fois une biographie romancée – celle de Moulay-Ismaïl, le « Roi Soleil » marocain qui vient d'accéder au trône en 1672 après la mort de son frère aîné – en un collage de plusieurs époques, une sorte de patchwork historique avec des flashbacks qui remontent au VIIème siècle, qui nous aide à mieux comprendre cette nation à la fois si proche et si différente … Encore que !

C'est aussi la narration d'une très longue négociation diplomatique entre le seigneur du Maghreb – c'est le sens de l'île du couchant - et Louis XIV, sur fond de piraterie et de captures d'esclaves par les corsaires, avec des captifs de part et d'autre et que chaque camp cherche à récupérer.

Côté français, on fait lanterner les ambassadeurs, on les gave de luxe et de spectacles à la cour de Louis XIV, on leur promet des libérations qui ne viennent jamais, on les contraint à accepter des clauses léonines …
La négociation avec Louis le Grand n'aboutira pas du vivant de Moulay Ismaïl. Elle sera renouée avec Louis XV. En matière diplomatique, il faut de la patience.

L'ouvrage (qui constitue le premier tome d'une trilogie) rend hommage aux femmes éminentes du Maroc : la Berbère Zaynab Nefzaouia, épouse de Youssef ben Tachfine, le fondateur de Marrakech, Sayyeda al-Horra, la Kahina Dihia, Lalla Khenata … C'est en fait une parabole, celle de l'enrichissement réciproque des trois religions monothéistes et de civilisations qu'apparemment tout oppose.

Au-delà du tableau habituel des luttes incessantes entre tribus et héritiers présomptifs des sultans, collaborateurs fidèles et traitres récidivistes, c'est aussi la chronique d'un émigré marseillais, le "tabib" Casimir Giordano qui a fait du Maroc son pays sans renier ses racines françaises. Un exemple d'intégration réussie vu de l'autre côté de la Méditerranée …
Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..

Dans l'île du Couchant, Gilbert Sinoué fait revivre quelques personnages au temps du sultan Moulay Ismaïl, qui régna sur le Maroc de 1672 à 1727.
On apprend beaucoup sur la construction de cet état, et sur ses relations avec les puissances européennes. de ce point vue, la lecture de ce roman historique est tout à fait enrichissante.
Le problème, c'est que Sinoué mêle plusieurs histoires en même temps, sans que le lien entre elles ne paraisse évident, sinon qu'elles nous parlent toutes de l'histoire du Maroc, au 8-9ème siècle, puis au 16ème. Ces apartés affadissent l'intensité romanesque, d'autant que l'intrigue qui est censée accompagner le roman historique demeure assez faible, sinon de plus en plus faible, sans jamais choisir vraiment entre la narration à la première personne (avec le journal du médecin Casimir Giordano) et celle à la troisième personne d'un auteur omniscient.
Je reste donc un peu sur ma faim, avec un livre moins pertinent qu'une véritable étude historique, et peu accrocheur sur le plan romanesque.
Mon jugement est certainement sévère et personnel, pour un livre qui n'est pas désagréable et se lit facilement, mais ma déception est d'autant plus vive que Gilbert Sinoué avait réuni toute la matière nécessaire pour un livre passionnant.

En avril 1672 lors d'une fantasia Moulay Rachid, celui qui instaura la dynastie des Alaouite et qui est toujours au pouvoir au Maroc, meurt accidentellement ; son demi-frère Moulay Ismail va monter sur le trône et devenir le nouveau sultan et commandeur des croyants. Va s'ouvrir une période où la puissance marocaine tendra vers l'apogée ; à sa mort en mars 1727, le royaume est unifié et étendu malgré les innombrables rivalités de cour et de harem.

Cette « Île du couchant », titre qui fait référence au nom que donne le monde arabe au royaume « Jazîrat al-Maghrib », est le premier tome d'une trilogie qui s'étendra jusqu'en 1912 et déjà la suite de cette épopée porte un nom « le bec de canard »… plus sibyllin on ne peut point, à moins que la narration se porte sur le Neukamerun…

A tout bon roman historique, un personnage de fiction haut en couleurs est incontournable. Là, c'est le médecin du sultan qui est le conteur, Casimir Giordano, un français ayant embarqué un jour dans le port de Marseille pour ne jamais revenir sus ses terres et épouser Fatima, une vaillante femme mère d'un petit garçon, rencontrée dans le dispensaire installé pour accueillir les malheureux patients victimes d'une terrible épidémie de peste. A l'époque plusieurs régions avaient été confinées… l'histoire, perpétuel renouvellement.

Entre immersions dans les couloirs de palais, incursions sur les champs de batailles et chroniques berbères, c'est une merveilleuse photographie sur une partie de l'histoire du Maroc avec également ses relations avec l'Europe, le Royaume-Uni, la France et l'Espagne, ce dernier pays ayant chassé – dans le meilleur des cas – en 1492 ceux qui refusaient de se convertir au catholicisme, aussi bien les conquérants musulmans que les natifs juifs. Relations qui furent les prémices d'une colonisation. Mais en attendant les passages sur la rencontre entre la finesse de la diplomatie marocaine et le décorum du Maître de Versailles sont d'une gourmandise verbale exquise.

Autre point marquant, l'écrivain a offert de belles fenêtres sur le rôle des femmes, tant sur les origines du royaume que sur le rôle politique des épouses ou des filles et permet ainsi de souligner leur importance dans les temps anciens, une réalité trop souvent occultée.
Lien : https://squirelito.blogspot...

"Sachez déjà que mon pays est un vieux pays et qu'il possède un passé. Un passé aussi dense que le vôtre."

Ainsi parlait Mohammed Temmin émissaire de Moulay Ismaïl et premier ambassadeur marocain reçu à la cour du roi de France.

Et c'est l'histoire de ce grand pays qu'est le Maroc qu'a entrepris de nous conter Gilbert Senoué.

J'ai suivi avec plaisir les pas de Casimir Giordano, médecin d'origine française qui se retrouve au service de Moulay Ismaïl et de son harem.

J'ai beaucoup apprécié de découvrir des chroniques berbères, ces "hommes libres" et qui nous font remonter jusqu'en 683.

J'ai adoré les passages qui nous relatent les négociations d'un Traité de paix entre la France et le Maroc qui bien que savoureux, finissent par laisser une certaine amertume.

Mais surtout j'ai vraiment apprécié que Gilbert Sinoué donne une place certaine aux femmes qui ont joué un rôle important et trop souvent tu.

Alors il y a bien sûr Lalla Zaydana, Lalla Khenata, mais surtout j'ai découvert l'histoire de Sayyeda al-Horra.

Une lecture passionnante qui souligne combien l'unité du Maroc n'a pas été simple à obtenir, mais n'est ce pas justement ce qui fait la richesse de ce pays : la multiplicité des tribus originales, la diversité des cultures qui s'y côtoient et la cohabitation des différentes religions dans le respect.

"Un pays est comme un homme : il a besoin de temps pour devenir ce qu'il sera. le mien n'échappe pas à cette règle."