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Johanna Chatellard-Schapira (Traducteur)
EAN : 9782221268179
672 pages
Robert Laffont (04/01/2024)
4/5   41 notes
Résumé :
Publié en 2009 en Suède où il rencontra un grand succès après avoir créé l'événement à Francfort, lauréat du prix August-Strindberg (l’équivalent suédois du Goncourt), en cours de traduction dans 25 pays, Les Dépossédés, le roman exceptionnel de Steve Sem-Sandberg, paraît aujourd’hui en France.

De 1940 à 1944, le ghetto de Lódz est placé sous la direction de Mordechai Chaim Rumkowski, président du Conseil juif. Contrôlé strictement par l’administratio... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (14) Voir plus Ajouter une critique
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Ce qui frappe avec ce témoignage romancé c'est l'incroyable travail de documentation fait par Sem-Sandberg. Une plongée effarante dans le ghetto de Lodz ou son responsable juif Mordechaï Chaïm Rumkowski va croire qu'en collaborant avec les dignitaires nazis, il protégera ces habitants. L'auteur suédois raconte la survie au jour le jour avec une moult de détails aussi terribles que malheureusement vrai. Rumkowski qui s'imagine être l'homme providentiel est un pathétique pantin manipulé par les bourreaux. La noirceur de l'âme et l'héroïsme humain s'entrecroisent avec son lot terrifiant d'inacceptable et d ‘actes de bravoure. le quotidien de ces habitants est remarquablement décrit par l'écriture juste de Sem-Sandberg, sans souci de sensationnel (l'horreur suffit à lui-même). Une lecture éprouvante qui m'interroge (de quel côté de la ligne, je me positionnerai), facile de répondre à notre époque, mais en 1940 ? Salaud ou héros ? Un témoignage supplémentaire essentiel pour ne jamais oublier. JAMAIS.
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Lire "Les dépossédés" de Steve Sem-Sandberg c'est basculer dans une autre dimension où l'horreur et la faim ont pris le pouvoir, où l'individu a perdu le sens de son humanité, où il n'est plus rien, c'est lire et vivre en direct l'histoire du ghetto de Lodz.

"Publié en 2009 en Suède où il rencontra un grand succès après avoir créé l'évènement à Francfort, lauréat du prix August-Strindberg (l'équivalent suédois du Goncourt), "Les Dépossédés" de Steve Sem-Sandberg est un roman exceptionnel" (Laffont)

Steve Sem-Sandberg s'est inspiré des archives officielles comme celles interdites et cachées du ghetto de Lodz (je sais qu'elles n'ont pas été détruites). La forme romanesque du livre permet au lecteur d'aller jusqu'au bout du tragique. Personnellement, je n'ai pas lâché ma lecture sauf à certains moments où le récit se faisant trop intense émotionnellement, je devais évacuer ma révolte en allant fumer une cigarette. Mais je reprenais ma lecture un peu comme un défi lancé à moi-même, je devais affronter L Histoire! Steve Sem-Sandberg l'avait écrit dans ce but!

Le ghetto de Lodz ne devait être qu' un ghetto de transition au départ mais il a duré jusqu'en 1944 ce qui en fait sa singularité et un sujet d'interrogations pour les historiens.
Le ghetto était dirigé, sous contrôle allemand, par un président, Mordechai Chaïm Rumkowski, ou le "Roi Haïm", personnage qui soulève beaucoup de débats aujourd'hui tant sa collaboration avec les autorités allemandes ne fait plus aucun doute.
Rumkowski était persuadé que si les juifs se rendaient indispensables à l'effort de guerre allemand, ils seraient épargnés.
C'était un homme assoiffé de pouvoir, caractériel, pédophile, pervers, doué d'un grand sens de l'organisation, sachant très bien exploité son entourage, et bénéficiant d'une certaine aura au sein du ghetto, j'imagine du fait de l'affaiblissement du raisonnement des juifs du ghetto affamés et épuisés comme de leur déshumanisation, ils avaient besoin d'un référent, de croire encore un peu en quelqu'un. Il avait le pouvoir absolu et tout membre qui refusait de se soumettre à ses ordres devait être dénoncé. Même parmi les surveillants et contremaîtres juifs, nombreux se sont montrés durs dans leurs relations avec les ouvriers.

Rumkowski ira jusqu'à l'opération du "Wielka Szpera" ( action menée par les allemands) du 5 au 9 septembre 1942 où il demandera aux parents (sauf aux personnes bien placées!!!!!!!) d'abandonner aux allemands les enfants de moins de dix ans, les personnes malades, les orphelins, les personnes âgées de plus de 60 ans, au prétexte de les déplacer afin d'organiser le ghetto en camp de travail. Un représentant de la Gestapo aidé des policiers juifs du ghetto rentrera dans chaque habitation et choisira les personnes jugées inaptes au travail!

Or, Chelmno existait et il est probable que Rumkowski ait été au courant du sort réservé à tous ces déportés.


Ce livre m'a assaillie de questions. Mais c'est un livre à lire absolument pour ne pas oublier, ce roman démontre bien comment fonctionne une micro société d'êtres humains liés les uns aux autres par le même destin : on y retrouve tous les travers de l'être humain., ceux qui veulent une reconnaissance coûte que coûte, ceux qui baissent la tête de peur des représailles. Je pensais qu'en période de détresse, de grande souffrance, il existerait un minimum de solidarité! Non, chacun jouait sa partition, sa survie, même si les informations sur les déportations ne parvenaient pas dans le ghetto, il y a eu des exactions dans le ghetto, il aurait pu y avoir une résistance comme à Varsovie, d'autant que le ghetto rassemblait un grand nombre de juifs de longue tradition de lutte ouvrière: je n'ai rien ressenti de tel, et les allemands ont bien su tirer profit de cette soumission.

Ah oui, et les rabbins continuaient de prier!!!!!

Je vous conseille pour les amis (es) intéressé (es) un article du Professeur Israel GUTMAN, historien, sur le site de Yad Vashem "La singularité du ghetto de Lodz" extrêmement détaillé et donnant beaucoup de précisions sur cette absence de résistance.

Bon, à présent, je vais lire un livre plus lumineux !

A signaler : beaucoup de mots allemands (j'avais mon dictionnaire près de moi) et pour les mots en yiddish, il y a un lexique en fin de livre.



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Témoignage sous forme de roman sur le ghetto de Lodz , surtout sur le responsable juif du ghetto Mordechaï Chaïm Rumkowski .
Est-il naïf , espérait-il se sauver lui même et sa famille , sans doute était-il dans l'impossibilité de croire à la réalité de ' La solution finale ' puis après quand il s'est rendu compte de l'horrible réalité , il a sans doute été dépassé par les évènements , pris dans un engrenage implacable .
A sa décharge , il faut dire qu'il ne s'en n'est pas sorti , lui et sa famille ont été partie des derniers juifs à être déportés et ils furent gazés dès leur arrivée , de toute façon , il aurait dû rendre des comptes pour ses actions .
A-t-il réellement cru qu'on pouvait discuter avec les allemands , a-t-il pensé que survivre quelque temps était préférable à mourir tout de suite , à un moment , on a l'impression qu'il croit que les allemands vont gagner la guerre et qu'ils devront bien trouver un accord pour vivre ensemble .
Ce livre pose pleins de questions pertinentes , il permet de réfléchir à ce que fait l'homme dans des situations extrêmes .
Chacun peut se faire sa propre opinion sur ce trouble personnage .
Livre très bien documenté , très complet , on partage le quotidien des habitants du Ghetto , on voit que certains se débrouillent mieux que d'autres , rusent , se compromettent , rares sont ceux qui parviennent à rester dignes .
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Dans ce terrible roman, l'auteur nous convie à une plongée en apnée dans le ghetto polonais de Lodz, de son établissement en 1940 à sa liquidation en août 1944. Se basant sur une importante documentation (entre autres, La Chronique du ghetto qui fut miraculeusement épargnée, et de très nombreuses autres sources), il reconstitue le gouvernement du ghetto, la vie quotidienne dans celui-ci et les grands événements qui marquèrent sa brève et tragique histoire. Ce fut un ghetto remarquablement productif, comptant des centaines de milliers de personnes et des milliers d'ateliers et d'usines à ses débuts. Se détache la figure ambigüe et détestable de son Président, Mordechai Chaim Runkowski, qui crut pouvoir pactiser avec le diable et collabora avec l'administration nazie en s'efforçant de convaincre ses gouvernés que leur contribution à l'effort de guerre les sauverait, jusqu'au point où il leur demanda de livrer vieillards et enfants. Inutile de vous préciser que ce récit n'offre que peu de répit au lecteur alors que l'on s'enfonce un peu plus chaque jour dans la faim, l'horreur et le désespoir, car parmi les personnages courageux et résilients que l'auteur a construits à partir des archives susmentionnées, pratiquement aucun ne survécut pour raconter le ghetto de vive voix.
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Ce livre est l'histoire extrêmement bien documentée et romancée de la vie dans le plus grand ghetto juif de Pologne, Lodz, d'avril 1940 à janvier 1945. C'est le ghetto qui a vécu le plus longtemps avant la déportation et le gazage de presque la totalité de ses habitants : sur 230.000 hommes, femmes et enfants, seuls 870 survécurent.

On va retrouver dans ce roman, sous leur véritable nom, les représentants de la triple administration de Lodz, semblable à celle de tout ghetto :
une administration civile : l'Amtsleiter Han Biebow
une administration militaro-policière : le SS Oberstumbannführer Otto Bradfisch
une administration juive : le Judenrat ou Conseil juif, présidé par Mordechai Rumkowski, le personnage central du roman.

Jusqu'à aujourd'hui, la personne de Rumkowski a suscité beaucoup de critiques. Primo Levi lui-même, dans son livre « Les naufragés et les rescapés » considère qu'il a « adopté le style oratoire de Mussolini et d'Hitler » et qu'il s'est comporté comme un autocrate. Et, en effet, l'auteur nous montre un Rumkowski qui choisit de collaborer avec les nazis pour, dit-il, assurer la survie du ghetto dont il a fait une cité ouvrière produisant très efficacement pour assurer la victoire allemande. Il vit avec toute sa famille dans une grande aisance, donne de grandes fêtes et des banquets auxquels il convie les autorités nazies quand tous autour de lui souffrent de la faim, du froid et manquent de tout (le titre original du livre est « Les pauvres de Lodz »). Nous suivons l'histoire de la famille Rumkowski mais aussi celle, très attachante, de quelques familles qui, elles, en sont réduites à tenter de survivre. Jamais le président Rumkowski ne met en doute la confiance qu'il a dans les autorités allemandes qui dirigent le ghetto et il croit même naïvement que Lodz survivra dans une Allemagne victorieuse, comme une enclave juive indépendante et économiquement très productrice ! Quand les nazis lui demandent d'établir une liste d'enfants et de vieillards à déporter, il s'exécute. Il n'hésite pas non plus à réprimer durement ses compatriotes récalcitrants. Pourtant, en 1945, Rumkowski et toute sa famille seront déportés à Birkenau où ils seront gazés le jour même de leur arrivée. Au moment de monter dans le train, il cherche le wagon confortable qui est certainement réservé à des personnes de leur importance avant de se retrouver dans un wagon à bestiaux surpeuplé…

C'est un très long roman dans lequel l'histoire des personnages choisis par l'auteur s'interrompt souvent pour donner place à des citations, des extraits de documents de la Chronique du ghetto ou à des informations historiques. Pourtant, on ne s'ennuie jamais et on poursuit la lecture, un peu halluciné, complètement immergé dans la vie quotidienne de Lodz dont on pense capter un peu de l'horreur qu'elle fut pendant quatre longues années. Quand on a fermé le livre, on reste quelque temps habité par ce qu'il nous dit et on n'arrive pas tout de suite à se plonger dans un autre roman… et on pense que, décidément, les victimes n'ont pas que des héros dans leurs rangs, et c'est très dérangeant.
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critiques presse (3)
Bibliobs
14 septembre 2011
Le président du ghetto de Lodz avait cru pouvoir s'entendre avec les nazis. Le Suédois Steve Sem-Sandberg raconte ce désastre dans un grand roman.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
LesEchos
06 septembre 2011
« Les Dépossédés » est plus qu'un témoignage sur la barbarie. Le livre du lauréat du prix August Strindberg est aussi une réflexion profonde sur la douloureuse ambiguïté de la nature humaine.
Lire la critique sur le site : LesEchos
Lexpress
05 septembre 2011
Les dépossédés sont le grand livre bouleversant de l'inéluctabilité de la tragédie.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Pendant la pause de midi, la jeune femme se trouvait dans la queue devant la cantine populaire rue Jakuba, munie de sa gamelle. Elle était tête nue et le soleil lui brûlait le sommet du crâne à travers les cheveux, comme si une large plaie ouverte se fût trouvée à cet endroit.
Dans la file d'attente, maintes personnes avaient eu des parents ou des amis dans les différents établissements hospitaliers du ghetto, et quasiment toutes racontaient les mêmes histoires : les enfants jetés par les fenêtres du service d'obstétrique, les personnes âgées et infirmes éventrées à la baïonnettes ou succombant sous les tirs des soldats. Seule une infime partie de ceux qui s'étaient rendus dans les hôpitaux avaient réussi à sauver leurs proches.
Selon certaines rumeurs, le Président avait obtenu des autorités, au terme de longues négociations, qu'elles épargnent une poignée de personnages particulièrement haut placés parmi les malades à conditions de déporter d'autres individus à leur place. Une nouvelle commission aurait été établie. Celle-ci était chargée d'examiner les listes des hôpitaux pour identifier tous les anciens patients y compris ceux qui avaient cherché à se faire admettre par le passé - mais dont la demande avait été rejetée, faute de contact. N'importe qui faisait l'affaire du moment qu'on pouvait le troquer contre l'un des rares irremplaçables du ghetto dont les dirigeants ne pouvaient absolument pas se passer.

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Le froid était tel, durant ces mois d'hiver, que Martin devait rompre la glace dans le puits avant de pouvoir tirer l'eau. A quatre pattes, Véra s'efforçait de nettoyer le sol, tout au moins sommairement, mais ses mains enflaient et s'engourdissaient au contact de l'eau glacée. On avait pendu un fil pour étendre le linge entre le tuyau de la cuisinière et la porte du cabinet de Maman mais les vêtements ne séchaient guère et on avait beau alimenter le feu, le froid s'engouffrait quand même et vous pénétrait jusqu'aux os.
Les douleurs dans ses articulations devenaient alors insupportables. Pourtant, bien plus que le froid et l'humidité, c'était la faim qui transformait la vie en un lent supplice. Couverts d'œdèmes, le ventre, les poignets et les chevilles se boursouflaient et les articulations étaient pesantes, sans force. C'était toujours la même soupe claire à l'odeur d'ammoniaque et, au bout de plusieurs jours à ce régime, la lassitude laissait place au vertige et le vertige à une sorte d'obsession. Chaque heure, chaque minute qui passait enfonçait un peu plus cette idée fixe dans le cerveau de Véra : manger.
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Le mensonge commence toujours par le déni.
Il est arrivé quelque chose- pour autant, on se refuse à l'admettre.
Ainsi commence le mensonge.
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Quand les déportés et les morts sont plus nombreux que les vivants, ils se mettent à parler à leur place. Les vivants ne sont plus en nombre suffisant pour avoir la force de porter la réalité ; c'est aussi simple que cela.
A présent, Adam comprend : c'est de là que viennent les voix.
Quand il fait froid et sombre et que l'humidité brouille toutes frontières, la balance penche de l'autre côté ; alors que le ciel là-haut n'est plus à lui, mais à eux. Ce sont eux qui marchent sous la voûte : en route pour Marysin depuis la prison de la rue Czarnieckiego, par rangs de trois ou cinq, escortés par les gardes ; ou bien debout derrière la clôture de la Maison verte, leurs petites mains oubliées pendues au grillage.
En d'autres temps, un silence absolu régnait dans les colonnes de marche. A présent, il entend les hommes chanter. Tous les dos chantent. C'est un chant sorti de la terre, sourd et puissant comme un grondement qui croît et grossit à l'intérieur de son corps. Car ce chant résonne aussi en lui. Le monde entier tremble et retentit de cette complainte. Il se bouche les oreilles de toutes ses forces pour la repousser ; en vain. Car quand les morts chantent, rien ni personne ne peut empêcher leurs voix de s'élever ; rien ni personne ne peut les faire taire.
Lorsqu'il se réveille enfin, il ne reste que l'écho de son propre cri. Mais cet écho se répercute au loin, bien au-delà de lui-même, comme s'il avait malgré lui dessiné les contours de tous ces morts et absents, dans un rayon de plusieurs milliers de kilomètres.
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Est-ce donc à cela que ressemble le mensonge ?
Lorsqu'on se ment avant tout à soi-même.
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