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EAN : 9782070757633
176 pages
Gallimard (03/02/2000)
4.25/5   6 notes
Résumé :
«En poche, je garde sous le poing un mémento qui est moins qu'un viatique et à peine un pense-bête. Il dit :

La poésie ne peut être coupée ni du sacré ni du réel.
Elle n'est pas un réservoir de mots d'ordre.
Elle a du souffle et pas de frontières.
Sa langue lui appartient, mais elle appartient à la rumeur des langues.
Opaque à tout populisme, elle n'a pas à craindre d'être populaire.
Si elle est vécue, elle change la... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
C'est au travers de son très beau recueil L'amour extrême et autres poèmes pour Chantal Mauduit que j'ai découvert André Velter, ouvrage dédié à la jeune alpiniste disparue en mai 1998 lors d'une ascension près de l'Everest et qui fut le grand amour de l'écrivain.

Essayiste, éditeur, co-fondateur du Printemps des poètes, directeur de publication chez Poésie Gallimard, lauréat entre autres du Prix Mallarmé en 1990 pour son livre L'Arbre-Seul et du Goncourt de la Poésie en 1996 pour l'ensemble de son oeuvre, André Velter est aussi un voyageur au long cours, un arpenteur de grands espaces et de hauts paysages (Afghanistan, Inde, Nepal, Tibet,...) qu'il évoque dans beaucoup de ses ouvrages.

André Velter fait partie de ces auteurs que j'apprécie, qui ne veulent pas que la poésie soit limitée au seul acte de l'écriture, qui pensent qu'elle est bien plus une manière d'être au monde, dans un rapport qui sous-tend une distance face aux normes, aux codes que la société nous impose. Cette vision de la poésie comme lieu de résistance et de prise de conscience imprègne toute l'écriture d'André Velter.

Cette pensée de l'auteur apparait tout entière dans " Un mot plus haut que l'autre ", un des textes qui inaugurent le recueil :
" [...] Comment ne pas perdre le contact d'avec cette chance qui nous perd, et fait de nous des survivants féroces ? D'abord en refusant d'être son propre copiste. En changeant d'allant et d'allure. En n'opérant aucun repli tactique sur des pages allouées, garanties, balisées.

Au-delà des preuves ou des traces, le poète n'a pas à fournir à la demande, même pas à la sienne, mais à se donner corps et âme dans les mots, corps et âme hors des mots. Son énergie tient du coup de foudre. Sa conscience éclaire un fol abime. Il est présent farouche, insouciance neuve, gaîté tragique. Ou alors il n'est pas.

Sa ligne d'horizon n'est pas ligne de fuite. Juste une brèche au ras des toits. Une clairière où danser. Et je crie que je voudrais tourner là-haut comme un derviche qui troue la terre jusqu'au coeur. Et je m'acharne à mettre en lumière un poème pareil à un pays sans fin.
J'avoue que je ne suis qu'autant que je m'évade. "

Plus loin dans le recueil, au travers de poèmes-hommage (magnifiques sont ceux dédiés à Ernest Pignon-Emest, Paul Rebeyrole ou encore à Gérard Chaliand). André Velter réaffirme sa pensée, défend une création qui ne soit pas le fruit de convenances et de compromis nés de l'esprit d'une époque (" chaque individu n'est pas uniquement l'otage de sa société, il est lui-même un univers "). Pour lui, l'écriture, autant que la lecture poétique, est l'acte d'une quête existentielle. Toute présence au monde s'inspire d'un lointain et la distance se révèle dans notre origine.

La poésie a tout à voir avec nous-mêmes, pour peu que nous acceptions d'emprunter le chemin de l'exil, de l'imprévu et de l'étonnement. Cette pensée d'André Velter fertilise ses poèmes. Poésie fraternelle, généreuse, parfois inquiète mais toujours en mouvement, pressante et nécessaire, essentielle.

" [... ] La création se joue d'abord au ras du sol. Avec l'humus et la boue. le sable et la cendre.
C'est une pâte qui lève à l'ombre. Un prodige composé de ce qu'il décompose. Une alchimie qui n'accepte que de l'or pourrissant.
[... ] le réel est un espace sans trêve. [... ] "

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Recueil de poésie engagée par le poète André Velter, co-fondateur du printemps des poètes.

En fin de recueil, il explique avoir laissé ce livre "dans son jus", dans la version qu'il a fait lire à sa compagne Marie-José Lamothe en février 1998, juste avant sa mort ; et aussi dans cette même version lue par l'alpiniste Chantal Mauduit, avant qu'elle ne meure en montagne. C'est pourquoi il n'a pas écrit de textes à la suite du Calligraphe du vide, qu'elle avait appris par coeur pour le lire au sommet de la montagne du Dhaulagiri.

Beaucoup d'émotions donc pour ce recueil.
André Velter a diverses réflexions sur la poésie et les créations, persuadé que les poètes doivent changer, se donner entièrement à elle. Elle ne doit pas être une contrainte dictée par la société et la bienpensance,

Puis il écrit de la poésie sur la guerre. les rêves.

Pour certains poèmes, malheureusement je n'avais pas les références de lieux ni d'évènements, ni des personnes, ce qui m'a empêchée de m'imprégner des poèmes en question.
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J'ai beaucoup aimé les textes des premières pages, ceux en prose. Un peu plus de mal avec les poèmes aux vers très courts mais je ne suis pas une lectrice de poésie, ou très peu.
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Citations et extraits (18) Voir plus Ajouter une citation
Planisphères
À Jean-Christophe Victor


Extrait 3

Je fais tourner le globe et garde la tête chaude,
quel raid nous allons mener Gengis !
quelles merveilles nous allons conter Messire Polo !
quelle chimère nous allons forcer plus à l’Est Csoma !
partout nos courses à l’estime sont exactes
nous avons nos chamans, la science du vide au ras du sol
et ces zones sans fin où ranimer nos âmes mortes.

La route va où elle veut
et je ne déroute que moi par instinct ou caprice,
comme on prend le premier train qui part
le premier bus qui klaxonne au matin
le premier bateau qui frémit au bout de l’embarcadère,
comme on s’offre un nouveau destin sur le papier
et la chance d’être plus que soi, ailleurs.
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La poésie se joue du temps. Elle parle et sait de très loin. Dans l'univers d'avant-naître. Dans l'instant d'outre-venue. Dans le réel plus vaste. Elle est lueur de mise en abîme. Feu souverain hors des flammes. Trace qui préfigure. Elle est nuit très pure. Aube fraîche. Grand midi. Rythme et visée de toute vie qui se risque.

La poésie est sursaut d'adolescence à jamais. Désir sans frein. Vitesse. Vertige. Frénésie de départ. Comme un galop dans le sang. Comme un soleil à la bouche. Et l'infini qui se donne en partage...
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Planisphères
À Jean-Christophe Victor


Extrait 1

Je ne cherche pas d’images dans les songes
mais dans l’inconnu du monde,
aux rives de la terre et en tous lieux inhabités,
aussi bien sous le ciel millimétré des almagestes,
que près des récifs de vieux portulans
même si mes regards et mes pas sont d’abord accordés
aux grandes dépressions de sable, d’herbe ou de neige.

Chaque tracé porte mes caravanes
qui vont interminablement d’égarements en bivouacs
pour oublier le but et mettre à distance,
sans épices, sans houppelande ni porcelaine, ni encens ;
un jour elles sont en Judée chargées de manuscrits
ou bien près du Rio Grande aux portes d’Albuquerque
avec des caisses de bière et des caisses de fusils.

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Planisphères
À Jean-Christophe Victor


Extrait 2

Il n’est pas de parcours étroit
dans un atlas qui met le centre aux pôles,
aux sources du Gange, au cœur de l’Amazone ;
lignes, courbes, chiffres, latitudes, longitudes
n’ont plus souci du labyrinthe à sens unique
avec sortie par le guichet d’immigration,
la vie est dans les marges et tout est no man’s land.

Une carte dépliée, c’est Byzance
à deux battements de cils de Novgorod,
c’est les îles de la Sonde sous le vent des Marquises,
un cavalier qui passe à gué de Cadix à Tanger,
c’est Katmandou, Lhassa, Srinagar, Dehra Dun,
Yarkand, Kaza, Keylong, Bénarès, Darjeeling
sous l’empire espéré d’un Kanishka troisième du nom.

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La loi des Etats semble le contrecoup panique de la grand-peur qui hante les sédentaires.
Et les pays cadenassés pullulent. Et ils s'accrochent à leurs limites. Et ils contrôlent. Et ils répriment. Et ils tuent.
La loi des Etats est la pire imposture.

Les pays oubliés crèvent dans une poussière d'exil, dans des bivouacs de boue,
dans le non-lieu d'une vieille blessure.
Ils échangent remords pour vengeance, légende pour programme, servitude pour servitude,
avec dans le sablier la même dose de poison que d'espoir.
Car les frontières existent au-dehors, au-dedans.
[...]
Car les frontières existent et renaissent
à la solde des milices, des clergés et des clans.
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Videos de André Velter (17) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de André Velter
Avec Marc Alexandre Oho Bambe, Nassuf Djailani, Olivier Adam, Bruno Doucey, Laura Lutard, Katerina Apostolopoulou, Sofía Karámpali Farhat & Murielle Szac Accompagnés de Caroline Benz au piano
Prononcez le mot Frontières et vous aurez aussitôt deux types de représentations à l'esprit. La première renvoie à l'image des postes de douane, des bornes, des murs, des barbelés, des lignes de séparation entre États que l'on traverse parfois au risque de sa vie. L'autre nous entraîne dans la géographie symbolique de l'existence humaine : frontières entre les vivants et les morts, entre réel et imaginaire, entre soi et l'autre, sans oublier ces seuils que l'on franchit jusqu'à son dernier souffle. La poésie n'est pas étrangère à tout cela. Qu'elle naisse des conflits frontaliers, en Ukraine ou ailleurs, ou explore les confins de l'âme humaine, elle sait tenir ensemble ce qui divise. Géopolitique et géopoétique se mêlent dans cette anthologie où cent douze poètes, hommes et femmes en équilibre sur la ligne de partage des nombres, franchissent les frontières leurs papiers à la main.
112 poètes parmi lesquels :
Chawki Abdelamir, Olivier Adam, Maram al-Masri, Katerina Apostolopoulou, Margaret Atwood, Nawel Ben Kraïem, Tanella Boni, Katia Bouchoueva, Giorgio Caproni, Marianne Catzaras, Roja Chamankar, Mah Chong-gi, Laetitia Cuvelier, Louis-Philippe Dalembert, Najwan Darwish, Flora Aurima Devatine, Estelle Dumortier, Mireille Fargier-Caruso, Sabine Huynh, Imasango, Charles Juliet, Sofía Karámpali Farhat, Aurélia Lassaque, Bernard Lavilliers, Perrine le Querrec, Laura Lutard, Yvon le Men, Jidi Majia, Anna Malihon, Hala Mohammad, James Noël, Marc Alexandre Oho Bambe, Marie Pavlenko, Paola Pigani, Florentine Rey, Yannis Ritsos, Sapho, Jean-Pierre Siméon, Pierre Soletti, Fabienne Swiatly, Murielle Szac, Laura Tirandaz, André Velter, Anne Waldman, Eom Won-tae, Lubov Yakymtchouk, Ella Yevtouchenko…
« Suis-je vraiment immortelle, le soleil s'en soucie-t-il, lorsque tu partiras me rendras-tu les mots ? Ne te dérobe pas, ne me fais pas croire que tu ne partiras pas : dans l'histoire tu pars, et l'histoire est sans pitié. »
Circé – Poèmes d'argile , par Margaret Atwood
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