Sur un paquebot de luxe, deux hommes à la personnalité énigmatique vont disputer une partie d'échec des plus endiablées devant un groupe de passagers dilettante.
Gzentovic, célèbre champion mondial d'échecs, est un jeune homme taciturne, condescendant, apathique, aux facultés intellectuelles limitées mais remarquable tacticien qui n'a jamais perdu une seule partie. Ce jeune prodige n'a pas pour valeurs en ce monde que les échecs et l'argent, par conséquent il n'accepte de jouer qu'en échange d'honoraires.
Malgré tout le champion propose d'échanger une partie avec un inconnu M.B..., celui-ci prétend ne pas avoir joué aux échecs depuis plus de 20 ans, pourtant il va se révéler un génie de l'échiquier.
Avant la partie, l'inconnu se confie à un passager, le narrateur, il lui explique comment il a acquis des connaissances échiquéennes.
Exilé autrichien, M.B...a subi la torture mentale des nazis dans le but de lui extirper des informations. Enfermé dans une chambre d'hôtel, privé de tout, il vivra pendant de longs mois hors du temps, hors du monde dans un océan noir de silence.
Un jour, profitant de l'attente d'un interrogatoire de la Gestapo, le prisonnier vole un manuel d'échecs, une collection de 150 parties jouées par les grands maîtres.
M.B... voit dans cette acquisition, une solution à tuer le temps et ainsi détruire « l'empire du néant qui occupe son âme ». Il fabrique un échiquier avec des moyens très rudimentaires et passe ses journées à s'entraîner aux échecs. Obsédé, intoxiqué par le jeu, n'ayant pour adversaire que lui-même, il se glisse dangereusement dans un dédoublement de l'esprit.
Sauvé par un médecin qui réussira à obtenir sa libération, ce dernier lui conseillera de ne plus jamais jouer aux échecs.
M.B... accepte donc de jouer une partie avec le champion et se promet d'en jouer qu'une seule mais...
« Un homme qui est atteint d'une manie peut retomber malade même s'il est complètement guéri ».
L'oeuvre de
Stefan Zweig met en scène deux personnages mystérieux, deux machines à jouer, portés par la passion du jeu. L'auteur dépeint cette partie comme une bataille, les deux partenaires s'affrontent comme deux ennemis qui cherchent à s'anéantir réciproquement.
A travers M.B..., Zweig nous emmène dans les profondeurs de l'âme humaine, aux frontières de la folie. Nous assistons à la lutte d'un homme face à sa solitude qui, pris par le jeu, se dédouble, et devient son propre adversaire.
Se vaincre soi-même devient son ultime défi !
Un récit fascinant, terrifiant et douloureux, la dernière oeuvre de
Stefan Zweig.