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Critiques de Sapphô (27)
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Les poétesses oubliées

Quand on m'a proposé un livre de poche gratuit en librairie et que j'ai vu parmi d'autres celui-ci, nulle hésitation ! J'ai déjà découvert quelques recueils consacrés aux femmes poètes , mais j'ai constaté que certains noms m'étaient inconnus, d'où mon attraction.



Le recueil s'organise par thèmes : l'intime, le temps, l'enfance, la nature, l'engagement. J'ai retrouvé avec grand plaisir Marceline Desbordes-Valmore ou Cécile Sauvage, l'émouvante Sabine Sicaud, cependant j'ai découvert aussi , entre autres,Isabelle Kaiser, Augusta Holmès, et Jeanne Loiseau dont je lis avec surprise dans la biographie finale qu'elle est la premiere femme à avoir reçu en 1900 la légion d'honneur!



Les poèmes , notamment religieux ( peu nombreux, heureusement ), ne m'ont pas tous plu , j'ai néanmoins aimé beaucoup d'entre eux. Voici un extrait du magnifique " Songe d'été" de Jeanne Loiseau:



" Sous les arbres verts, sous les arbres noirs,

Dans l'éclat du jour ou l'ombre des soirs,

J'aime errer sans trêve.

Parmi les rameaux emplis de chansons

Le vent passe et meurt en vagues frissons:

Je poursuis mon rêve "....



Le texte de Sabine Sicaud adressé aux médecins qui viennent la voir clôt de façon poignante ce recueil intéressant, varié:



" Faites-moi donc mourir comme on est foudroyé

D'un seul coup de couteau , d'un coup de poing

Ou d'un de ces poisons de fakir , vert et or,

Qui vous endorment pour toujours, comme on s'endort

Quand on a tant souffert, tant souffert jour et nuit,

Que rien ne compte plus que l'oubli, rien que lui..."





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L'Egal des dieux

100 FOIS SUR LE MÉTIER REMETTEZ VOTRE OUVRAGE !



Bien que la citation originale de Nicolas Boileau présuma un peu moins des forces de l'artisan - il n'engage que vingt essais -, c'est à peu de choses près ainsi que l'on pourrait résumer, non sans quelque humour un rien moqueur (mais attendri), cet étonnant ouvrage proposé par les excellentes éditions Allia, celle-là même qui proposent par ailleurs la redécouverte de textes passionnants sur la paresse, sur la Kabbale, la philosophie antique, moderne ou chinoise, des œuvres méconnues de Walter Benjamin, de Simone Weil, de Jean-François Billeter ou de Marcel Schwob et bien d'autres ouvrages tous aussi surprenant qu' enthousiasmant.



Cet ouvrage d'un peu plus d'une centaine de pages, contenant cent propositions exactement, reprend ainsi l'un des textes les plus fameux - si ce n'est le plus célèbre - de la poétesse grecque antique, Sappho, généralement intitulé l'Ode à l'aimée. Celui-ci ne nous est connu que par des fragments (l'un d'eux n'ayant d'ailleurs été partiellement complété qu'en 1965 !), tiré de deux ouvrages postérieurs à leur écriture, ainsi que par une première traduction d'ailleurs plutôt libre du poète romain Catulle.



En voici l'une des traduction contemporaines les plus récentes, peut-être l'une des plus inhabituelles, mais envoûtantes et vivifiantes à la fois :



À UNE AIMÉE



Il me paraît

un rival

des dieux



l'homme qui peut

rester assis

près de toi



bercé de la

douceur sans nom

de ta voix



Tu parles

il écoute



les notes de

ton rire et moi

dans ma poitrine



coeur stupide



je t'aperçois

en un instant

il n'y a plus



un seul son



un seul

dans ma bouche



Et tout à coup

langue rompue



le feu court



fin sous ma peau

mes pauvres yeux



ne voient plus



L'oreille

me bourdonne



Et la sueur

m'inonde et

le frisson me



prend captive



plus verte que

gazon c'est à

peine si je



vis encore



de tout

privée



mais il faut

tout oser

puisque...



(proposition de traduction par Jérôme Vérain dans "À une aimée absente")



Ce poème a beaucoup marqué les poètes en ce qu'il est sans doute l'un des tous premiers, d'une femme, évoquant avec un lyrisme parfait les émois intimes, profonds, contrastés, pour ne pas dire parfaitement opposés en apparence et, de fait, totalement subjectivés, son amour pour une tierce personne - que l'on suppose être une autre femme même si rien dans le texte original ne permet de le dire de manière définitive, mais qui semble relever d'une certaine logique, eu égard à ce que l'on sait de sa créatrice, aristocrate originaire de Lesbos dans les îles éoliennes - dont la jalousie éprouvée à l'égard de celui qui, probablement son mari, peut s'approcher de l'objet aimé, convoité, tel l'égal d'un dieu approchant la déesse, plonge dans un état proche de la mort.



Ainsi, on retrouvera ici les traductions plus ou moins libres ou même seulement évocatrices de Nicolas Boileau, de Jean Racine, d'André Chénier, De Lamartine, d'Alexandre Dumas, de Jean Richepin, de Renée Vivien, de Robert Brasillach, de Marguerite Yourcenar ou encore d'André Markowicz pour ne citer que quelques-uns des plus célèbres d'entre eux. Toutes ces adaptations ne sont pas, c'est l'évidence, aussi brillantes, aussi profondes les unes que les autres. Certaines sont absolument fades à force de courir après un texte rédigé dans une langue éteinte depuis fort longtemps. D'autres nous touchent malgré les maladresses telle celle d'une anonyme dont on sait seulement qu'elle était "fille de qualité de Guyenne, âgée seulement de dix-huit ans". Parfois, deux traductions paraissent être la copie presque parfaite l'une de l'autre, malgré des transcripteurs différents. Mais il est une relecture qui, plus que toutes les autres rassemblées ici, semble toucher au plus près des intentions de la grande poétesse grecque, c'est cette relecture incroyable et d'une profonde sensualité, qu'en donne sa lointaine descendante lyonnaise (par la grâce et la musicalité), la poétesse Louise Labé quand bien même n'aurait-on aucune preuve qu'elle ait eu connaissance directe de l'original (on ne sait d'ailleurs même pas avec certitude si celle que l'on a surnommé "la belle cordière" a jamais existé !), qui nous touche encore aujourd'hui tant elle sait dire beaucoup d'un être qui aime :



Je vis, je meurs : je me brule et me noye.

J'ay chaut estreme en endurant froidure :

La vie m'est et trop molle et trop dure.

J'ay grans ennuis entremeslez de joye:



Tout à un coup je ris et je larmoye,

Et en plaisir maint grief tourment j'endure :

Mon bien s'en va, et à jamais il dure :

Tout en un coup je seiche et je verdoye.



Ainsi Amour inconstamment me meine :

Et quand je pense avoir plus de douleur,

Sans y penser je me treuve hors de peine.



Puis quand je croye ma joye estre certeine,

Et estre au haut de mon désiré heur,

Il me remet en mon premier malheur.



Louise Labé, Sonnet VIII



Quant à ce que l'on peut penser d'un tel étrange ouvrage - sorte de kaléidoscope de traductions/propositions/adaptations/réinventions d'un même et unique texte (imparfaitement) sauvegardé à travers les âges mais capable aujourd'hui encore de parler à notre plus profonde intimité : jalousie, envie, désir, souffrance, amour, mort... -, voici ce qu'en dit, pour conclure, le traducteur et postfacier Philippe Brunet : «Quelle leçon tirer de cette tentative obstinément réitérée d'identification avec celle que les Anciens appelèrent, non sans prophétie, la dixième Muse ? La traduction d'un texte dans une langue donnée témoigne de sa réécriture permanente. Dans le cas présent, elle fait plus que d'offrir une métaphore de la création (Jorge Luis Borges, préface au Cimetière Marin) ou d'ouvrir une histoire de la langue (George Steiner, Lire en frontalier) ou encore de la traduction (le John Donne d'Antoine Berman). de cette accumulation de caricatures, fantômes, clones à des degrés divers, rencontres, liens, de cette mimésis pieusement rejouée de l'une à l'autre, il ressort que l'original se réinvente à chaque génération, que le sérieux des traducteurs et la fantaisie des imitateurs se confondent dans un même acte rituel d'écriture et une même poursuite érotique : l'extrême vérité de Sappho, loin de préexister à ses avatars, se transforme sans cesse pour s'imposer dans la coexistence contradictoire de ses prétendants.»

... Ou comment, parce qu'elle ne cesse d'être réinterprétée, la pensée et l'oeuvre saphique n'en finit jamais de vivre et de revivre toujours et un peu plus, malgré le défi posthume, si souvent oublieux, des générations.
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Quelqu'un plus tard se souviendra de nous

Très intéressante initiative d'avoir créé cette anthologie autour de femmes poètes du monde entier. Elles sont quinze, présentées dans un ordre chronologique, une seule représentant l'époque contemporaine.



Bien sûr, qui dit anthologie, dit choix subjectif. J'aurais voulu y voir certaines comme Christine de Pisan ou Anna de Noailles, mais j'en ai découvert d'autres, à mon grand plaisir, notamment Gaspara Stampa et une femme poète grecque actuelle, Kiki Dimoula.



Chacune nous est dévoilée, d'abord par une biographie et des citations qu'ont fait sur elles d'autres écrivains. Puis des poèmes significatifs de leur personnalité, de leur talent s'offrent à nous.



Dans la même veine, j'ai préféré " Quand les femmes parlent d'amour" de Françoise Chandernagor : livre plus beau, femmes poètes plus nombreuses, et informations sur elles plus riches, mais celui-ci a aussi son charme et son intérêt.



Et surtout, comme tous les livres qui sortent de l'oubli ces magnifiques femmes poètes, il affirme et rappelle l'espoir formulé par Sapphô, depuis la lointaine antiquité :" Quelqu'un plus tard se souviendra de nous"....
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Poèmes : Edition bilingue français-grec ancien

Après de très nombreuses traductions et études, 2700 ans après son écriture, la poésie de Sappho exerce toujours une fascination particulière. De la poétesse née entre 630 et 612 av. J.C. à Mytilène sur l'île de Lesbos, il ne nous est parvenu que 264 fragments, des textes courts, souvent lacunaires.



À la première lecture, les textes de Sappho semblent un peu figés, sans résonance particulière. C'est parce que nous sommes et restons les héritiers du poète romantique nous livrant ses émotions, ses désirs et son désespoir, que la poésie saphique nous paraît désincarnée.



Pour parvenir à mieux entrer dans les textes de Sappho, il faut revenir à son contexte, au rôle primordial que le poète jouait alors dans la cité (les poèmes étaient utilisés dans les cultes et la célébration des dieux ou dans des rites comme le mariage ou les banquets). La poésie ne se déclamait jamais seule, elle était au même moment chantée et dansée, accompagnée de musique. On prêtait également attention à la lumière du lieu, on utilisait des parfums. Autant de moyens utilisés pour captiver l'auditoire présent.



Peu de choses transparaissent de la personnalité de Sappho dans ses vers. Ses textes fragmentaires sont le lieu de ce qui manque, de ce qui a été écrit mais qui a été perdu. Sappho est une poésie du regard, de la description, une poésie des sens. Les sons, les parfums, les textures servent toute son écriture. Elle décrit avec envie, elle convoite avec désir l'objet de ses poèmes. C'est cette densité de sensations, cette puissance d'expression du désir qui rend la poésie de Sappho si vivante aujourd'hui encore. Mettre le poème au monde, c'est comme rendre le monde au poème.



… à Sardes...

Souvent ici, je pense à elle,

Comment... nous vivions,...

Toi semblable à une déesse, facile à reconnaître

et, par-dessus tout, elle se réjouissait de

ton chant.

Mais maintenant, parmi les femmes lydiennes,

elle brille, comme, quand le soleil vient de

plonger, la lune aux doigts de rose,

l'emportant sur toutes les étoiles. Et elle

dirige sa lumière sur la mer salée, comme aussi

sur les champs riches en fleurs ;

et la belle rosée s'est répandue, et la rose est

fleurie, et le tendre cerfeuil, et le mélilot

épanoui.



(traduction de Jackie Pigeaud)
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Odes et fragments : Edition bilingue

La poésie de Sapphô − la dixième des muses, selon Platon −, bien que réduite le plus souvent en fragments éparses, a traversé les siècles et nous touche encore grâce à son lyrisme pur et ardent. En prêtresse d’Aphrodite elle y célèbre l’amour, ses rites et ses fêtes, mais aussi son désarroi ; la beauté de ses amantes dans une nature qui semble pleine de fraicheur et d’innocence. Une poésie aux vers suaves qu’accompagnent des chants et des danses, sous les feux du soleil ou de la lune, au milieu des pommes ou des fleurs.
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Fragments

Abondamment plagiée (Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue...n'a pas inspiré que Racine!), étonnamment moderne, follement féminine, brûlante et passionnée -homme ou femme, tout la portait à l'incandescence- Sapho a dû être sauvée de l'oubli parce qu'elle a su dire, très fort et très bien, le langage du corps avec les mots de la poésie.



La langue est difficile, rare -dorien littéraire du 6ème siècle av JC- et la lecture frustrante : les passages ayant échappé à la disparition sont souvent tronqués, lacunaires, laissant parfois le vers boîter, un pied en l'air.



Mais qu'importe: même dans les quelques vers qui restent éclate un tel talent, une telle authenticité du sentiment qu'on en reste confondu.



Et c'est une femme qui nous parle ainsi du fond des âges, qui nous dit ses émois dans un monde qui va rester obstinément fermé à la parole du plaisir féminin pendant des siècles!!
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Quelqu'un plus tard se souviendra de nous



Quelqu’un plus tard se souviendra de nous. Ouvrage collectif.



Une petite anthologie de poésie, nous présentant des poétesses, depuis l’antiquité avec SAPPHO jusqu’à Kiki DIMOULA, née à Athènes en 1931, décédée en 2020. Une belle sélection de poèmes relatifs à l’amour, à la vie, à la mort. Elles sont présentées chronologiquement. Le choix a dû être difficile à opérer. Une petite biographie introduit ces femmes. Certaines nous sont familières telle Marceline DESBORDES-VALMORE, Elisabeth BROWNING, Emily Jane BRONTE, Emily DICKINSON, Marie NOEL, Louise de VILMORIN . Nous avons le plaisir de découvrir des poétesses peu citées dans de tels ouvrages, tel SAPPHO, Sylvia PLATH, Kiki DIMOULA, une contemporaine.



J’aime la poésie et je lis très régulièrement des poèmes, de toutes les époques et j’apprécie les anthologies qui permettent de faire de belles rencontres. Pour apprécier ce genre littéraire, il faut lire ces textes à voix haute afin d’en apprécier toute la poésie, la sensibilité. De plus les poèmes ne sont que rarement très longs, on peut lire soit la totalité d’une strophe, d’un sonnet, d'un rondeau, d’une fable, d’une lai ou des ballades, des haïkus, de la prose. Je vous recommande de placer ce petit livret peu onéreux ( 10 euros) sur votre table de chevet et de lire une poésie chaque soir afin de faire connaissance avec ces merveilleuses poétesses. Les poèmes sont toujours d’actualité et révèle les différentes personnalités de ces femmes. Bonne journée. Il y a toujours un début de lecture mais jamais de date de fin. Bonne journée.

( 30/10/2023).
Lien : https://lucette.dutour@orang..
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Quelqu'un plus tard se souviendra de nous

"Quelqu'un plus tard se souviendra de nous" est une anthologie de la poésie féminine qui va, chronologiquement, de l'Antiquité à l'époque contemporaine. Nous y lisons les textes de Sapphô, Pernette du Guillet, Gaspara Stampa, Louise Labé, Marceline Desbordes-Valmore, Elizabeth Browning, Emily Jane Brontë, Emily Dickinson, Catherine Pozzi, Marie Noël, Anna Akhmatova, Marina Tsvétaïeva, Louise de Vilmorin, Sylvia Plath et Kiki Dimoula.



Elles sont françaises, grecques, italiennes, anglaises, russes ou américaines et parlent d'amour, de mort, de deuil, de solitude et de nature.



Il s'agit d'extraits vraiment intéressant, permettant de découvrir des poétesses méconnues ou oubliés, et de relire les plus connues.



" Je l'ai vu dans tes yeux cet invincible amour,

Dont le premier regard trouble, saisit, enflamme,

Qui commande à nos sens, qui s'attache à notre âme

Et qui l'asservit sans retour,

Cette félicité suprême,

Cet entier oubli de soi-même,

Ce besoin d'aimer pour aimer,

Et que le mot amour semble à peine exprimer,

Ton coeur seul le renferme, et le mien le devine ;

Je sens à tes transports, à ma fidélité,

Qu'il veut dire à la fois, bonheur, éternité,

Et que sa puissance est divine."

(Marceline Desbordes-Valmore)



J'ai été ravie de relire Marceline Desbordes-Valmore et Emily Dickinson. J'ai lu pour la premières fois les textes de Sapphô, de Catherine Pozzi et de Marina Tsvétaïeva. Et j'ai surtout été touchée par les textes de Gaspara Stampa.



Une œuvre à connaître !

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Poèmes : Edition bilingue français-grec ancien

Sappho est la référence de la poésie féminine antique. Ces fragments racontent l'expérience de l'amour, la séparation, la filiation, la mort. Sa mélancolie transcende les récits, de courtes phrases au présent narratif. Dans ses vers, l'homme a souvent le mauvais rôle. Pour Sappho, l'homme est un prédateur. C'est plutôt fort comme image. Le lesbianisme est sans doute moins toléré que l'érotisation masculine en Grèce antique.

"Mais viens ici, si jamais autrefois déjà percevant ma voix de loin

Tu l'entendais, et tu quittas la demeure dorée de ton père

Et tu vins."

Les Dieux olympiens vivent ici et interviennent dans la vie des mortels et dans leurs amours. La nature est divinisé.

La première de couverte est classique et délicate.
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L'Egal des dieux

Nous en savons très peu sur la vie de la poétesse Sappho, sinon qu'elle vécu aux VII et Viéme siècles avant notre ère, principalement sur l'île de Lesbos, située dans la mer Egée du Nord Est, à proximité de l'actuelle Turquie.



Selon les spécialistes, notre poétesse aurait écrit plus de dix milles vers, mais seuls six cents d'entre eux, nous sont parvenus, des copies ou des citations d'auteurs d'époques postérieures ; mais cet état des lieux est encore plus désespérant car une seule ode entière, l'Hymne à Aphrodite (ode n°1 selon la nomenclature établie) a traversé intacte les ages.



Ce bilan n'est malheureusement que trop familier, s'agissant d'auteurs antiques, y compris parmi les plus emblématiques. On pense naturellement au trio d'auteurs tragiques Eschyle, Sophocle et Euripide dont la majorité des oeuvres est à jamais perdue, sauf coup(s) de théâtre archéologique(s).



L'oeuvre poétique de Sappho n'est sans doute pas la première à chanter l'Amour, par exemple un texte comme le « Cantique des cantiques » avait déjà magnifié avec lyrisme la communion des corps. Mais en l'état des documents disponibles, il apparaît que Sappho soit la première poétesse identifiée à avoir construit son univers à la gloire d'Eros.



L'hymne à Aphrodite, évoqué plus haut, constitue à cet égard un manifeste, une profession de foi, serait-on tenté de souligner.



C'est bien la perception que la communauté poétique en a fait à travers les siècles, comme en témoigne ce recueil, « L'égal des dieux-cent et une versions d'un poème de Sappho », une compilation établie par Philippe Brunet en 2019. Plus précisément il s'agit de la déclinaison de cette ode :



« Il me paraît, celui là-bas, égal aux dieux, qui face à toi est assis, et tout près écoute ta voix suave et ton rire charmeur qui a frappé mon coeur d'effroi, dans ma poitrine ;

tant il est vrai que si peu que je te regarde, alors il ne m'est plus possible de te parler, pas même une parole ;

mais voici que ma langue se brise, et que subtil aussitôt sous ma peau court le feu ;

dans mes yeux il n'y a plus un seul regard, mes oreilles bourdonnent ;

la sueur coule sur moi ;

le tremblement me saisit toute ;

je suis plus verte que la prairie ;

et je semble presque morte ;

mais il faut tout endurer puisque... »(Sappho Poèmes trad Jackie Pigeaud p. 115 reprise par Philippe Brunet p. 133).



L'Amour qui ébranle intimement un être est le terrain de prédilection de la poésie mais ces vers peuvent être considérés comme fondateurs ; difficile d'exprimer avec plus authenticité, de force, d'intensité, voire de violence, le transport amoureux.



On lit ce recueil, comme on pourrait agiter un moulin à prières sous d'autres latitudes.



D'une version à une autre, il y a bien sur beaucoup de similitude(s) et on ne sait pas les versions qui sont le produit de traductions directes et celles qu ne sont que des reprises avec des petites variantes personnelles.



Curieusement, nombre de versions ont été écrites en français des XVI et XVIIème siécles, un artifice pour une finition patinée (?).



Peut-être pour rester dans le style de Louise Labé qui fut, semble t-il la première, à (re)traduire le texte.

C'est heureux et symbolique que ce fut l'oeuvre d'une femme telle que Louis Labé. J'aime beaucoup cette version :



« Je vis , je meurs ; je me brule et me noye.

J'ay chaut extreme en endurant froidure.

La vie m'est trop molle et trop dure.

J'ay grans ennuis entremeslez de joye.



Tout à un coup je ris et je larmoye,

Et en plaisir maint grief tourment j'endure

Mon bien s'en va, et à jamais il dure :

Tout en un coup je seiche et je verdoye.



Ainsi Amour inconstamment me meine :

Et quand je pense avoir plus de douleur,

Sans y penser je me trouve hors de peine.



Puis quand je croy ma joye estre certaine,

Et estre au haut de mon désiré heur,

Il me remet en mon premier malheur. »



(Louis Labé p. 26)



Et celle de Renée Vivien, enrichie avec bonheur a également ma préférence :



« Il me paraît, celui là-bas, égal aux dieux, qui est assis dans ta présence, et qui entend de près ton doux langage et ton rire désirable qui font battre mon coeur au fond de ma poitrine.

Car lorsque je t'aperçois, ne fut-ce qu'un instant je n'ai plus de paroles, ma langue est brisée, et soudain un feu subtil court sous ma peau mes yeux ne voient plus, mes oreilles bourdonnent,la sueur m'inonde et un tremblement m'agite toute ;

je suis plus pale que l'herbe et dans ma folie je semble presque une morte ;

mais il faut oser tout... »



« L'homme fortuné qu'enivre ta présence

Me semble égal des Dieux, car il entend

Ruisseler ton rire et rêver ton silence.

Et moi, sanglotant,



Je frissonne toute, et ma langue est brisée :

Subtile, une flamme a traversé ma chair,

Et ma sueur coule ainsi que la rosée

Âpre de la mer ; »



« Un bourdonnement remplit de bruits d'orage

Mes oreilles, car je sombre sous l'effort,

Plus pâle que l'herbe, et je vois ton visage

A travers la mort. »



(Renée Vivien p. 97)



J'ajouterai une version, absente du recueil de Philippe Brunet, celle mise en musique dans ce chef d'oeuvre musical d' Angélique ionatos-Nena Venetsanou « Sappho de Mytlilene ».



Plus verte que l'herbe



« Car dès que je te vois un instant, plus aucun son ne me vient,

mais ma langue se brise, un feu léger

aussitôt court dans ma chair

avec mes yeux je ne vois rien, mes oreilles résonnent,



sur moi une sueur se répand,

un tremblement m'envahit

je suis plus verte que l'herbe,

tout près de mourir il me semble…

Mais il faut tout oser car m^me abandonnée.. »



Le cd audio comprend un livret avec les textes et les contributions d'Odysseus Elytis, prix nobel de littérature 1979.



Les oeuvres ne sont pas comparables, mais s'agissant des toutes premières oeuvres littéraires de la culture occidentale, on ne peut que regretter l'asymétrie entre les textes homériques, sublimes dans leur esthétisme mais qui célèbrent la violence, la gloire du sang versé, la vendetta, et ceux de Sappho célébrant le culte d'Eros, la douceur de vivre.

Homère est dans les programmes officiels, même s'il y aurait beaucoup à dire sur son enseignement, Sappho reste confinée à un public de spécialistes et de militant(e)s de la cause lesbienne.
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Odes et fragments : Edition bilingue

Sappho m'aimait,

elle me l'a dit,

et écrit aussi,

'Sitôt que je te vois, la voix manque à mes lèvres, ma langue est enchaînée, une sueur froide m'inonde, tout mon corps frissonne, il semble que je suis près d'expirer.'

et moi je l'aimais

et j'aimais aussi cet homme,

mais ne le dites pas

aux gardiens désignés des pensées autorisées,

aux gardiens agréés des textes,

moi - je ne dirai pas mon nom ici -

moi, qui avait été élève de Sappho,

moi, tellement amoureuse,

j'ai écrit l'amour, le plaisir, la peau,

j'ai écrit avec mon amour,

mon amour qui a écrit aussi ses mots mêlés aux miens,

j'ai dit ce chant d'amour des corps,

je l'ai dit avec mes mots,

avec ses mots,

nous l'avons dit ensemble,

'sa bouche n'est que douceur, et tout son être est désirable'

et nos mots étaient si plein d'amour,

et de beautés,

que des hommes ont voulu les sauver,

alors ils leur ont inventé d'autres sens,

ils en ont fait des chants d'amour au pays

et aux dieux,

et ces hommes qui se réunirent - peut-être - à Jabné,

ont donné aux mots

des désirs pour l'éternité.



Les quelques vers de Sappho, je les lis quand je lis le Cantique des cantiques et son targoum; je m'enivre de leurs mots et aussi du vent de l'est de la Méditerranée, et là, je pense, contre tout enseignement, que le Cantique a été écrit par un homme et une femme, ensemble...je ne le sais pas, personne ne sait le contraire.
Lien : http://holophernes.over-blog..
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Quelqu'un plus tard se souviendra de nous

Sappho m'aimait,



elle me l'a dit,



et écrit aussi,



'Sitôt que je te vois, la voix manque à mes lèvres, ma langue est enchaînée, une sueur froide m'inonde, tout mon corps frissonne, il semble que je suis près d'expirer.'



et moi je l'aimais



et j'aimais aussi cet homme,



mais ne le dites pas



aux gardiens désignés des pensées autorisées,



aux gardiens agréés des textes,



moi - je ne dirai pas mon nom ici -



moi, qui avait été élève de Sappho,



moi, tellement amoureuse,



j'ai écrit l'amour, le plaisir, la peau,



j'ai écrit avec mon amour,



mon amour qui a écrit aussi ses mots mêlés aux miens,



j'ai dit ce chant d'amour des corps,



je l'ai dit avec mes mots,



avec ses mots,



nous l'avons dit ensemble,



'sa bouche n'est que douceur, et tout son être est désirable'



et nos mots étaient si plein d'amour,



et de beautés,



que des hommes ont voulu les sauver,



alors ils leur ont inventé d'autres sens,



ils en ont fait des chants d'amour au pays



et aux dieux,



et ces hommes qui se réunirent - peut-être - à Jabné,



ont donné aux mots



des désirs pour l'éternité.







Les quelques vers de Sappho, je les lis quand je lis le Cantique des cantiques et son targoum; je m'enivre de leurs mots et aussi du vent de l'est de la Méditerranée, et là, je pense, contre tout enseignement, que le Cantique a été écrit par un homme et une femme, ensemble...je ne le sais pas, personne ne sait le contraire.







© Mermed
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Le désir

Le désir – Sappho



Ce petit livre réuni les « œuvres complètes » de Sappho, j’y ai retrouvé les textes ou fragments de textes que j’avais lu dans Poèmes et Fragments mais j’ai pris autant de plaisir à les lire ou les relire.



A la fin a été ajouté un texte d’Ovide (Xvè Héroïde) où celui ci imagine une lettre écrite par Sappho à Phaon pour lequel Sappho se serait suicidée.
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Poèmes et fragments

Poèmes et fragments – Sappho



Joli petit livre où les poèmes sont illustrés de dessins qui semblent fait au crayon

Certain poèmes sont entiers d’autres ne sont que des fragments, mais j’ai beaucoup aimé lire cette poésie antique totalement nouvelle pour moi.
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Le désir

Si ce recueil présente " le texte intégral ", il s'agit en réalité des quelques vers qui nous sont parvenus de Sappho. Mélodieux fragments intimes. La poétesse grecque du VIème siècle avant J.C, la première poétesse - " Mais il fallait oser... " , celle que Platon nomma la Dixième Muse, évoque et invoque l'amour au son des accords de sa lyre; les tourments et les plaisirs de l'amour. Sa voix s'élève parfois pour un homme, parfois pour une femme, peu importe, cette différence n'existe pas pour l'émotion et les sentiments.



Le joli texte en hommage à Sappho que signe Colette Fellous en postface présente les informations biographiques croisées, souvent incertaines, sur la poétesse, antique mortelle légendaire qui inspira tant d'artistes.
Lien : http://www.lireetmerveilles...
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Le désir

La vie de Sappho s'est déroulée entre le VIIe siècle et VIe siècle av. J.-C., sur l'île de Lesbos. On ne sait presque rien d'elle. Pourtant elle a la réputation d'être une grande poétesse de la Grèce antique et, surtout, on la connait pour ses passions de… lesbienne. Celles-ci apparaissent assez clairement dans ses poésies. Les hommes ne cachaient absolument pas leurs inclinations homosexuelles; c'était probablement plus rare chez les femmes.

A vrai dire, peu de textes de l'oeuvre de Sappho nous sont parvenus. Ce petit recueil nous livre seulement quelques extraits que j'ai trouvé trop brefs et finalement très décevants. Je n'en retiendrai probablement rien.

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Odes et fragments : Edition bilingue

Le problème des odes de Sapphô, c'est qu'il n'en reste pas grand chose. On est obligé de deviner. Deviner le soleil ardent, la mer vineuse, les vignes et les collines, et les figues. Deviner cette amour de femme pour une femme, mais aussi la dimension mystique de l'amour éternel pour la Nature.
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Odes et fragments : Edition bilingue



Lesbos, au VII° siècle avant JC....Sappho, poétesse et prêtresse d'Aphrodite va créer une oeuvre dense et incandescente. Tôt mariée, elle prendra en horreur l'Homme et préfèrera les femmes et leurs douceurs.

S'ensuivent de nombreuses relations orageuses ou apaisées.



Sappho, c'est la voix de l'amour au féminin mais aussi celle de la Passion; amour-tempête ou amour- sérénité, les divers états de celui qui est touché par ce sentiment se retrouveront à travers ses vers. Et c'est bien cela qui fait de la parole saphique un verbe universel.





Une anthologie qui regroupe l'ensemble du corpus de la poétesse avec ses lacunes. Là encore, les manques sont nombreux comme dans nombre d'oeuvres antiques. Parfois un vers ou un mot subsiste et pourtant c'est aussi à travers ces béances que les poèmes trouvent un écho particulier. Elles permettent à l'imagination de jouer à plein et au lecteur de construire sa propre compréhension de l'ensemble.



Pour qui apprécie la poésie amoureuse, ce plongeon dans les limbes de la lyrique occidentale est une évidence.





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Quelqu'un plus tard se souviendra de nous

Recueil de poèmes, collectif.



Sapphô, la dixième Muse selon Platon, chantait l'amour des femmes pour les femmes, implorant les déesses de protéger les élues de son coeur. Sa lyre n'était pas moins enchantée que celle d'Orphée.



Pernette du Guillet, muse de Maurice Scève, a laissé à la postérité des textes fins, drôles et passionnés. Gaspara Stampa voudrait "qu'Amour [la] mît à bonne école." tandis que la Belle Cordière, Louise Labé, est lucide : "Ainsi Amour inconstamment me mène."



Marceline Desbordes-Valmore énonce chante la destinée :"J'étais à toi peut-être avant de t'avoir vu" et Elizabeth Browning revendique une légitimité d'aimer: "Je t'aime librement, comme on tend au Droit."



On découvre Emily Brontë poétesse. Ses vers ont la puissance que l'on savourait déjà dans Les Hauts de Hurle-Vent. "Il n'y a point de place pour la Mort / Ni d'atome qu'elle ait pouvoir d'anéantir, / Puisque tu es l'Etre et le Souffle / Et que ce que tu es - est à jamais indestructible." Emily Dickinson n'est pas moins sombre et souligne que "l'Ame est condamnée, / Escortée d'un seul chien / Son identité."



Catherine Pozzi, amie-amante de Paul Valéry, nage en eaux troubles : "Je ne sais pas de qui je suis la proie. Je ne sais pas de qui je suis l'amour." Marie Noël soumet sa création au doute : "les chansons que je fais, qu'est-ce qui les a faites ? "



Anna Akhmatova, en pleine tourmente soviétique, laisse à la postérite le soin d'achever ses écrits : "Cette page que je n'ai pas finie, / La main brune de la Muse, / Divinement calme et légère, / Y inscrira le dernier mot." Marina Tsvétaiéva, autre poétesse russe dévoile de sombres penchants : "Trahir est mon affaire et Marina - mon nom, / Je suis fragile écume marine."



Louise de Vimorin chante la mort à venir : "Mon cadavre est doux comme un gant / Doux comme un gant de peau glacée." Sylvia Plath fait l'expérience du détachement : "Je flotte à nouveau à travers l'air, mon âme pour vêtement, / Aussi pure qu'un pain de glace. C'est un don."



Finalement, Kiki Dimoula use des mots de la modernité pour chanter l'amour : "Pas de nouvelles de toi. / Ta photo, stationnaire. / Comme il pleut sans pleuvoir."



On découvre ou redécouvre ici quinze femmes qui ont marqué la poésie. Vingt-sept siècles nous séparent de la plus lointaine, la plus récente nous parle encore. De Sapphô à Kiki Dimoula, de Lesbos à Athènes, la boucle ne se referme pas mais continue d'entraîner dans son tourbillon des femmes dont la plume n'a pas fini de nous marquer. L'éditeur le précise, ce n'est pas "une anthologie de la poésie féminine, dénomination que beaucoup de femmes-poètes récusent, mais une succession de textes [...]" (p. 7), des textes qui ont marqué les âges, les hommes et les mémoires.



Chaque poétesse est présentée au travers des écrits, en vers ou en prose, que d'autres artistes, figures politiques ou historiques, ont écrit à son sujet. Les hommes ne sont pas les moins loquaces pour louer le talent et les oeuvres des femmes-poètes. Ainsi Christian Bobin compare Emily Dickinson et Arthur Rimbaud : "Sous le soleil clouté d'Arabie et dans la chambre interdite d'Amherst, les deux ascétiques amants de la beauté travaillent à se faire oublier."



De quoi parlent-elles ces femmes à la plume agile ? D'amour, de jalousie, de désir, d'absence, d'attente, d'inspiration et de douleur. Comme les hommes en fait. Mais une autre question se pose. Si on fait iquement de la femme la muse du poète, qui donc inspire et nourrit la création des femmes ? À cette interogation, je me garderai bien de répondre et ne peut que vous conseiller de chercher la réponse dans les textes de ces poétesses.
Lien : http://lililectrice.canalblo..
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Odes et fragments : Edition bilingue

Je sais, je sais, c'est très ancien, je sais, ce sont les fondements de la littérature européenne, un témoignage de l'esprit humain antique, je sais, en plus c'est une femme (!), je sais, c'est important... Mais j'ai beau savoir tout cela, j'ai beau avoir fait du grec pendant cinq ans, j'ai beau avoir lu tous les apparats critiques et le contexte, désolée, je ne comprends rien, je n'y arrive pas. Quand on se penche seulement sur le texte en faisant fi de la contextualisation, y a pas, c'est tout de même très obscur, et il y a souvent trop de texte perdu !



Extrait :



j'emmènerais



athrêmates (cadeaux de mariage)



le cap de la Chèvre



innocent



amamaxys (vigne à échalas)



tranchée d'irrigation



(J'avoue, je suis un peu de mauvaise foi, je n'ai pas pris le plus compréhensible^^)
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