Citations de Abdourahman A. Waberi (173)
Lorsque mes petits camarades se dépensaient sur le terrain de foot ou dans un gymnase, je restais à l'écart, sur un banc ou un coussin, à l'autre bout du collège, n'importe ou. Tout me convenait dès lors que personne n'entendait le son de ma voix, qu'aucune main n'essuyait les larmes qui creusaient mes joues. Je restais là, à contempler mon bout de terrain vague. Je connaissais chaque motte de terre, chaque nid-de-poule, chaque tas de pierre. Le paysage de mon enfance est d'abord un terrain vague.
Washington est, tu le sais, une ville d'eau qui aspire à prendre le large en se jetant dans l'océan Atlantique.
On ne se refait pas à son âge, on n'efface pas d'un coup de gomme les blessures du passé.
Tu es la, menue dans un grand lit.
Tu te tords de tout ton petit corps.
La douleur doit être insupportable.
Le cou raidi, le visage serré, tu changes à vue d'oeil.
Encore une nuit à tenir, me dis-je. Tu vas te relever. Tenir encore.
Demain, tu essaieras de nouveau. Te mettre debout.
Un pas. Puis un autre.
Garder l'équilibre, faire quelques pas.
J'aime à penser que le temps joue en ma faveur, que chaque génération apporte a l'édifice une attention nouvelle. Que dans l'ensemble mes parents ont fait ce qu'ils pouvaient et qu'il m'appartient de peaufiner l'œuvre commune. J'apprends depuis des années a me rendre plus patient et plus disponible pour mes enfants et mes étudiants. J'apprends à tirer un enseignement à partir du quotidien avec toi et tes frères. Tous les jours je prends la mesure de mon ignorance. Mais j'avance un peu au lieu de raccrocher les gants. Un jour à la fois.
Je vous livre mon récit de chair et de sang, le testament tourmenté de ma vie que d'autres ont disséqué avant moi; les versions se suivent et se ressemblent un peu. Moi Ahmet, le neveu révolté, le soldat hailloneux riche seulement d'espoir et de crasse, je vous parle du royaume pourri et de la famille disloquée.
Quand une dent est pourrie il faut savoir l’arracher à temps avant qu’elle ne contamine toute la bouche.
Ils savaient exactement où était leur place,car on ne peut pas se vouloir à la fois la paume et le dos de la main.
La Providence m'a doté d'un autre don : la capacité de lire les signes et les songes qui échappent aux hommes occupés par l'incessant et harassant combat pour la survie quotidienne. Ils quittent rarement la caverne de leur corps. Mais une fois le pain et le toit assurés, les humains jettent leurs dernières forces pour satisfaire des besoins d'une fastueuse inutilité : paraître plus riche, plus fort, plus intelligent et plus beau que leur voisin de palier.
On croit choisir sa vie, mais c'est le contraire qui arrive, c'est la vie qui vous choisit. C'est elle qui vous retient dans ses filets. Vous voilà inscrit dans un parcours, une histoire. Arrimé à ce socle par vos gènes et par votre salive, par votre expérience et par le legs de vos ancêtres. Cette force est immense, irrésistible...
Je m’appelle Aden Robleh. Les enfants de mon quartier, eux, m’appelaient le Gringalet ou l’Avorton. Ces quolibets m’ont longtemps servi de carte d’identité. Ce passé a été ma prison. Je veux désormais le remettre à distance. M’en libérer.
Je devais étancher ma soif de lecture, affoler mes neurones, garder mon esprit en éveil. Je lisais tout ce qui me tombait entre les mains car mon appétit restait toujours vif.
La nuit, sous la voûte céleste aux mille étoiles, rien n’est plus exaltant, plus dépaysant que cet univers qui semblait contenir tous les autres : terres, continents et océans.
Si je me suis remémoré mon passé, si je me suis remis à sillonner une derrière fois les ruelles de mon enfance, c’était pour partager avec toi mon hier et son lot d’interrogations et d’angoisses.
Oui j’aime danser.
Alors je danse.
Je danse même en marchant.
Sans préméditation.
C’est une seconde nature.
C’est ma signature.
Ils m' appelèrent Jack Lang. (...) Langaareh, dans ma langue maternelle, le somali, signifie le boiteux. Me voilà artiste et boiteux.
Africain un jour et Français le lendemain
Aujourd'hui encore, les mots sont des jouets merveilleux.
Respecter la ponctuation et les règles grammaticales.
Alterner les phrases courtes et les phrases longues pour créer du rythme.
Utiliser vos connaissances et, en cas de panne, faite appel à votre imagination.
Je ne devais plus jamais me définir par cette maladie ou par une autre.