Citations de Alain Cadéo (289)
Mais c’est bon de partager cette fringale avec ces compagnons de fortune. Oui, c’est bon l’humain, c’est chaud, ça bouffe, ça boit, ça sue, c’est sur les nerfs, jamais très loin du coeur qui cogne, ça se réserve des tonnerres de rires et ça a même quelques fois des gestes maladroits comme de la tendresse.
𝒞𝒶𝒹ℯ𝒶𝓊...
Tout est cadeau, disait ma mère, mais seulement, rajoutait-elle, pour ceux qui n’attendent rien.
Ce qui rend l'humain terne et dur comme un bout de bois sec, c'est le renoncement à la lumière et à ce goût de n'être qu'une éponge, afin de devenir prudent, calculateur et raisonnable.
On est toujours le même, il n’y a que le paysage que l’on traverse qui change.
Chaque vie est une légende, un grand récit allégorique truffé de secrets, de rencontres, de mystères, de signes, de mythes, de symboles, qu’on réduit, qu’on étrangle jusqu’à en faire trop souvent un mauvais scénario suant de platitudes.
La vie n'est -elle faite que de quiproquos? La grande tribu des quiproquos : un Iroquois rencontre un esquimau lequel rencontre un sibérien. L'un parle de son désert de montagnes, l'autre de son désert de glace et le troisième évoque son désert de sel et les trois ne comprennent qu'une chose : chacun est seul dans son désert.
Je ne ferai pas ici l'inventaire de tous les freins que l'on s'inflige. Il y en a trop. Tout ce que je peux vous dire, c'est que la moindre bulle de confiance a le pouvoir de contenir des océans et de se dilater sans craindre l'explosion.
Au fond un grand poète, comme les saints, sait qu’il n’y a de réponse que dans une infinie simplicité.
J’habite un phare blanc, dans la mire très précise d’un regard de femme qui ne me lâche pas...
(Isola)
Tout ce qui vit, doute. Tout ce qui doute a, au moins un instant, des frémissements d'intelligence. Car rien n'est clair sur cette putain de terre. Et c'est dans les failles du doute que parfois poussent les plus étranges fleurs.
Je ne suis qu’une pauvre âme en train de naître, emberlificotée dans un cocon phosphorescent d’images, un buisson d’étincelles salement embrouillées et n’ai que ma tenace et dernière volonté : m’agripper, comme un vieux scarabée, afin de dire au mieux ce que j’étais, ce pour quoi j’étais fait... ce que je suis devenu. Un ectoplasme, un courant d’air, un nuage de phrases lancées au grand hasard.
Théo pense de plus en plus que la terre n'est faite que pour fournir aux hommes une sorte de lourde innocence. Elle ne se mate pas à coup d'orgueilleuses sentances. Elle rechigne à se plier devant nos exigences conquérantes. Elle est même capable de se cabrer et de détruire en quelques instants des pans entiers de civilisations.
La joie, c'est la richesse d'une multitude de perceptions se recoupant sur les méridiens du cœur. C'est un costume d'Arlequin fait de bouts de tissus éclatant. Pour l'éprouver, il faut être tout neuf, fragile, agile et consentant. Ce qui rend l'humain terne et dur comme un bout de bois sec, c'est le renoncement à la lumière et à ce goût de n'être qu'une éponge, afin de devenir prudent, calculateur et raisonnable.
𝒫ℴ𝓊𝓇 𝓊𝓃ℯ ℊℴ𝓊𝓉𝓉ℯ 𝒹’ℯ́𝓉ℯ𝓇𝓃𝒾𝓉ℯ́
Il me faudrait cent ans pour traduire au plus près le cœur du cœur de l’émotion.
Il me faudrait mille ans pour mélanger les temps, en extraire le suc, vivre comme un nabab dans une goutte d’éternité.
Il m’en faudrait dix mille pour concevoir la Perfection.
C’est un fœtus lové dans une larme d’Amour pur.
Et je n’ai que ma vie, courte, fragile et imparfaite. pour n’en saisir que l’ombre d’un reflet.
J’ai pris toute ma vie à la légère les incessants délires de la plupart des adultes. Leur ton sentencieux, cette manière qu’ils ont de se prendre au sérieux, ou de tourner autour du pot camouflant leurs faiblesses, leur façon de pleurnicher sur leur sort, tout m’a laissé indifférent. Je les trouvais ennuyeux, menteurs, rasoirs, barbants, inodores, inaudibles.
Mais un gosse qui te raconte une histoire en laquelle il croit, tu ne peux pas ne pas l’entendre. Il est tout dedans et tu n’as qu’une envie, c’est de le suivre. Tu as même envie d’en rajouter. Parce que rien n’est meilleur pour l’esprit que de plonger tout entier dans un torrent d’imaginaire, ouvertement confiant, chassant le doute à grands coups de pied au cul. Et c’est à qui t’entraînera plus loin encore, plus haut, jusqu’à ces rires qui sont nos friandises préférées, comme une ivresse, la perfection atteinte une absolue complicité.
Il y a de la lumière dans le regard de certains hommes. Plus que de la lumière, il y a de la chaleur. Ceux-là seuls sont bons et généreux, qui vous transmettent, sans calcul ni méfiance, la récolte fruitées de leurs vies. Ils vous en font cadeau, sans en avoir même conscience. Et c’est à prendre, aussi sec, sans chichis, sans réserve, au goulot, comme une rasade d’alcool pur.
Combien de mutations, combien de mues durant une vie ?
L’ignorance est indispensable au rêve.
Et nos parents pensaient que les enfants sont des moineaux qui, grandissant, se font les ailes, s'éloignent un tantinet, aiment à se poser dans d'autres arbres qu'ils pensent être les premiers à découvrir et retrouvent avec soulagement le coeur de leur famille. Puis, obéissant à de mystérieuses pulsions migratrices ils se dispersent à nouveau, s'éparpillent, laissant leurs vieux géniteurs becs cloués de rhumatismes, tristes à pleurer de se sentir désormais inutiles et à la fois heureux d'avoir mis au monde ces portées si riches de merveilleux et incompréhensibles fugitifs.
Si le hasard est un bordel, le destin, lui, est un sacré beau dessin.