« J'espère avoir trahi toutes les promesses que je m'étais faites enfant. Devenir un homme, c'est revoir son plan de vol. Comprendre qu'on se trompe en permanence sur ce qu'on s'imagine que sera la vie. »
La nostalgie s’entretient. Elle est le moyen de continuer à ressentir. Quand les sentiments vieillissent alors nous aussi.
Je sais aussi que vous n'avez pas été heureux, seul un être brisé peut en réparer un autre. On ne comprend la douleur que si on l'a fréquentée.
Je me suis attardé sur sa joue, dans son cou un instant de trop pour lui dire au revoir.
On finit toujours par haïr les gens aux endroits par où on s'était mis à les aimer.
On trouve les livres quand on est prêt pour eux.
La sensualité qui émanait de moi jadis se délie, se délivre sous vos doigts. certaines choses se passent de mots. Ce que je ressens c'est une langue qui flotte, que nous pouvons comprendre, sans même nous regarder.
Je me suis coupé les cheveux à la garçonne , comme toutes les femmes qui divorcent , je ne peux même plus les attacher . Je ressemble à un vieil oiseau .
Ça fait vingt ans que j'appelle mon père papa parce que je ne me souviens plus de son prénom.
Forcément mon vrai père s'appelait Moshé, et celui-là fête les rameaux alors il doit plutôt s'appeler Jean quelque chose ou Pierre quelqu'un...
Je ne pense pas qu'il se doute que je ne connais pas son nom, ça lui ferait de la peine.
J'ai bien pensé à me marier, pour qu'on décline son état civil, et celui de ma mère, et le mien à haute voix, que je sache enfin... La vérité...
Mais me marier avec qui?
Quand on est un vieil homme on a du mal à embrasser un jeune con. Alors l'épouser, vous pensez bien...
Ma mère s'obstine.
Elle me dit " Sophie".
Je sais, on sait, j'ai sûrement de vieux amis dans la salle qui le savent, je m'appelle Joseph Rosenblath! Mais elle m'appelle Sophie...
" Sophie" elle me dit "Ne sois pas juif, juste ce soir, ne soit pas ce vieux juif. Tes grands-parents sont là. Ça va finir par mal tourner."
Je crois qu'elle fait çà pour me protéger.
Je crois qu'elle n'a plus toute sa tête.
" Les allemands sont partis" je lui dis "on n'est plus obligés de faire semblant."
Elle s'en va, en pleurant.
Avec mon père, ils se prennent dans les bras, et ils se disent "elle s'en sortira".
J'ai longtemps cru qu'ils parlaient de la France mais j'ai des soupçons. J'ai l'impression, j'ai la nette impression qu'ils parlent de moi, Joseph Rosenblath, comme d'une fille, de leur fille de vingt ans."
Les livres, ce sont les rêves que quelqu'un d'autre nous prête.
La vérité c'est qu'il y a toujours trois vérités. Celle de l'un, celle de l'autre et celle de Dieu.
Je ne me suis jamais fait piquer par un moustique. J'ignore cette sensation. Jamais le moindre bouton. A croire que mon sang est impur.
Je t’aime" en japonais, on ne le dit pas, il n’existe pas de traduction littérale. On dit à la place "Il y a de l’amour dans l’air"
L’amour est un instant qu’on tente de prolonger. En me privant du corps de Laure, j’ai mis mon sentiment sous cloche, pendant des années, comme un enfant garde un bonbon tandis que les autres dévorent les leurs. Et quand tout le monde en a fini, alors, il ouvre doucement le papier, et il prend le temps de le savourer sous les regards jaloux. Le bonbon n’est pas un meilleur bonbon mais la patience l’a rendu unique.
"Tu ressembles à ton père, c'est fou. C'est dommage qu'il soit mort, je ne peux pas dire du mal de lui."
La mère de Madeleine sourit quand elle dit des choses méchantes. Elle sourit beaucoup. Elle ne supporte pas que Madeleine lui ressemble, elle le refuse.
Pardon mon fils.
Mes silences, David , faisaient le bruit de l'amour.
Papa
Quand on est immigré où qu'on soit, on a abandonné une partie de ce que l'on est et on n'appartenant pas complètement à ce que l'on vit. Jamais chez soi, à chercher si un jour on pourra poser notre sac pour de bon. Je pense qe'en abandonnant son pays, on ne trouve plus jamais la paix.
Seul un être brisé peut en réparer un autre. On ne comprend la douleur que si on l'a fréquentée.
J'aimerais vous parler des souvenirs que je ne connais pas encore. J'ai cette impression singulière qu'on ne vit pas par ordre chronologique ; que le temps fait des boucles.
La musique était toujours ici comme une autre personne.