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Critiques de Amélie Cordonnier (393)
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Trancher

« Trancher » est un roman qui s’attaque à un sujet trop souvent négligé : la violence conjugale.



Dès les premières lignes, on entre dans le quotidien d’une mère de famille dont la vie de couple ordinaire bascule le jour où le mari tombe le masque et se révèle brutal. Alors, il n’est pas question de sang ou de bleus mais d’insultes. Le mari lâche des mots sans prévenir, d’une grande violence, qui surgissent et qui viennent frapper la conjointe en pleine face. Même si le choc n’est pas physique, l’impact est féroce sur l’instant et les effets dramatiques sur la famille entière.



La narratrice s’adresse à son personnage principal à la deuxième personne. En utilisant ce mode d’expression, on a plutôt l’impression qu’elle se parle à elle-même, comme pour se protéger de ce qui lui arrive, comme pour rester en retrait de la réalité. Elle décrit alors tout le processus émotionnel qui découle de ses échanges insoutenables.



Outre la dénonciation de l’agressivité, le livre s’intéresse plus particulièrement aux conséquences collatérales de cette situation. En effet, la victime se retrouve face à un choix cornélien. Elle est consciente que sa relation est toxique, elle veut s’en échapper. Seulement elle est toujours amoureuse de cet homme et elle s’accroche au souvenir de ce qu’il était avant les drames. Elle pense aussi à ses enfants et à l’équilibre de la famille. La décision n’est donc pas facile à prendre et elle va devoir « trancher » entre partir et pardonner.



Je ne crois pas que ce roman soit autobiographique, mais la réalité dégagée pourrait y faire penser. Les scènes et les sentiments paraissent tellement authentiques qu’on pourrait croire à une histoire vraie. Pour son premier roman, un peu court, Amélie Cordonnier nous ouvre les yeux sur la violence du quotidien et perce à jour la complexité du couple. Puissant et nécessaire !
Lien : http://leslivresdek79.com/20..
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En garde

J'ai lu les trois premiers romans d'Amélie Cordonnier.

Et j'avais bien aimé son style d'écriture fougueux, son audace à traiter de sujets très sensibles.



Mais là, je n'ai pas du tout adhéré à « En garde ».

*



Pourquoi Amélie Cordonnier a-t-elle fait croire à ses lectrices et lecteurs que son livre était une réelle tranche de sa propre vie ? Que « c'était plus qu'une autofiction mais une vivisection », comme écrit dans son prologue.

Car franchement si l'histoire de la première partie tient la route jusqu'à la page 85, les autres parties, soit les 150 pages suivantes, sont plongées dans un délire complet.



Je me suis retrouvé dans une autre dimension, dans un roman fantasque, une histoire abracadabrantesque, où pas une seule seconde j'ai cru au cauchemar, digne d'un polar noir, que l'auteure et sa famille a vécu en cette année 2020.

Au début, cela m'a amusé, par aussi le style enlevé et par les talents de narratrice d'Amélie. Mais plus j'avançais dans le récit, plus je m'agaçais de lire tant d'invraisemblances. J'avais l'impression que l'auteure voulait me faire avaler des couleuvres.

A moins que je n'ai pas été réceptif à son humour.

*



Et je m'en explique :



En premier, je connais des gens très proches qui travaillent comme assistantes sociales, un métier où il manque aussi du personnel.

Ce n'est pas une profession facile surtout lorsqu'il faut rendre visite aux familles pour s'assurer que des enfants sont en bonne santé.

Alors pensez-vous sincèrement, qu'elles s'amuseraient et auraient surtout le temps de venir tous les jours harceler, terroriser les familles visitées ? Comme l'affirme l'auteure dans son livre.

Pensez-vous sincèrement que ces assistantes sociales ou assistants s'imposeraient à venir passer des nuits dans l'appartement de ces mêmes familles, sans avoir besoin de décliner leur identité, ni à se justifier par un document écrit.



On nage en pleine hystérie !!!

Car il y a une éthique, il y a des procédures à respecter.

*



Le deuxième chose que je voudrais partager, c'est que j'ai eu moi aussi la même et identique dénonciation qu'Amélie Cordonnier.

Il y a trente et un an de cela, mon fils avait cinq ans. Et je pense que la protection des enfants était moins rigoureuse à cette époque, les lois ont changé depuis.

Cependant un soir sans prévenir, deux assistantes sociales ont sonné à la porte de notre appartement pour nous rendre visite.



Elles nous ont expliqué le pourquoi de leur présence. Qu'un voisin dont elles tairaient le nom nous avait dénoncé pour maltraitance de notre fils.

Je précise qu'à cette époque, jamais aucun voisin ou voisine de l'immeuble où nous habitions ne s'était plaint de bruit, ni de cris.

Nous sommes tombés des nues, la mère de mon fils et moi-même.

Les deux dames nous ont dit que lorsqu'il y a une plainte de déposée, le service social est obligé de déclencher une procédure pour vérifier la véracité des faits. le soir même, elles se sont entretenues poliment avec nous et aussi seules avec notre fils, après que nous ayons donné notre accord.



A cette époque et même pour moi encore aujourd'hui, nous vivons sainement et je n'ai jamais craint que les services sociaux nous enlèvent notre fils. Nous avions la conscience tranquille.

Toujours est-t-il que l'une des assistantes sociales nous a fait signer des papiers. Elle devenait alors pour deux mois, la tutrice de notre fils. Et qu'elle lui rendrait visite une fois par semaine.



C'est là où j'ai eu le plus mal en moi de savoir que je perdais momentanément l'autorité sur mon fils. Je l'ai vécu comme un déshonneur. Et j'étais aussi très en colère contre la personne qui avait cru bon d'avertir les services sociaux.

Avec notre accord aussi, je me souviens que la nouvelle tutrice de mon fils, l'a amené voir un pédopsychiatre.



Je me souviens que nous avions tellement eu honte, très peu de monde ont su notre histoire.



Au bout de deux mois, d'allées et venues et d'entretiens avec la tutrice, les deux assistantes sociales sont revenues un soir. Elles nous ont déclaré que leur mission était terminée, qu'elles feraient un rapport très positif sur notre famille et notre comportement. Qu'elles n'avaient vu aucune maltraitance et qu'elles n'avaient rien à signaler de suspect qui aurait pu mettre notre fils en danger.



Nous ne les avons plus revues…

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Pas ce soir

Duras et Libé, l'amant et les petites annonces, le bac de Sadec en Indochine et la ligne 13 du métro parisien, des parallèles ou se rencontrer, des décalages horaires où fusionner pour une vie de couple heureuse avant que les corps ne s’endorment en parallèle, une fois les enfants partis, allongés dans de froides chambres séparées par le couloir du temps révolu.



C’est allé vite, si vite, trop vite.



Pour elle le désir s'est fait la malle, lui rumine sa mâle frustration et ça fait mal.



Isa s'est repliée dans la chambre de Roxane, leur fille qui a quitté le bercail, mais le balcon où lui susurrer ses maux est au troisième étage et, à Paris, ce n’est pas pratique.



Alors il craque, le crack, et crac, le voilà en vrac alors il se braque. Clic, Clac, Kodak, une photo de Sophie Calle à décoder à l'aube d'un week-end reconquête à Etretat et le trac qui le traque le détraque ! Il veut le troquer ce trac, contre un truc qui calmerait la trique qu'il trimballe depuis qu'Isa a mis les bouts de l'autre côté du couloir.



Faute de coït, il cogite.

Refait le parcours à l’envers et n'y trouve rien à redire. Rien à comprendre, il n'a rien vu venir…où partir.



Alors pourquoi ? Y a-t-il un autre, plus fringant qui fait frissonner frénétiquement les fesses de sa femme ?



Alors comment ? Comment peut-elle laisser tapis sous le tapis les moments taris dont ils ont joui ?



Et depuis quand ?



Ça taraude le taureau qui gesticule en lui. Ça obsède les pensées obscènes qu’il observe en lui.



Tout lui nuit, jours et nuits !



Alternance permanente entre manque et frustration, l’amertume charrie l’envie à l'envi, envie devenue besoin inassouvi.



Il en rêve, il en crève, pas de trêve, du sexe la grève ! Pas même le minimum syndical, rien, Nada, peau de zob, elle se dérobe, garde ses robes et lui reste là, las, pauvre comme job !



Finalement, comme pour un cheval à six pattes, il faut s'y faire, alors il prend les choses en mains, on y va Ginette, la paire flexion au masculin !



Il tentera de vivre sans le feu de leur amour ou il trouvait les calories nécessaires à son existence, ce feu où il aurait aimé se brûler mais dont ne reste que de la cendre (Quoi, de notre amour feu ne reste…)



Une belle écriture syncopée qui rythme son récit au gré des états d’âme de son protagoniste, qui palpite et bat le beat, le cas danse sous nos yeux connectés à cet homme en souffrance.

Quelques références (des citations même) artistiques, cinématographiques ou musicales pour agrémenter ce récit sans concession ou la misère affective ou sexuelle entraîne le narrateur vers des sous-sols sans lumière. Comment sera sa réception à l’arrivée de ce toboggan vertigineux, de cette planche savonnée au savon noir !



Étonnant, quand même  de constater que les mots souvent crus de ce roman soient ceux d'une femme tant, vécu de l’intérieur, semble être ce récit organique que je n’oserais conseiller à mon épouse, le trouvant trop destiné à un lectorat masculin. On peut en débattre.



Dommage tout de même, pour ce couple que l'explication finale n'ait pas eu lieu plus tôt, elle lui aurait épargné bien des souffrances...mais il n'y aurait pas eu de roman !

 

 

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Trancher

Difficile de faire plus d'actualité que ce premier roman qui dissèque avec finesse et précision la mécanique de la confusion des sentiments dans une situation de violence conjugale. Confusion d'autant plus grande que la violence est verbale (terrible, terrifiante mais... sans trace), que son auteur a toutes les apparences du prince charmant et que cela se passe au sein d'une famille "idéale" qui pourrait figurer au casting des publicités Ricoré. A travers ce texte court à la narration très tendue, Amélie Cordonnier parvient à donner corps à un dilemme toujours difficile à percevoir de l'extérieur. Sans juger, sans s'apitoyer, en décortiquant pas à pas la mécanique de décision.



Trancher. La narratrice ne l'a pas fait il y a sept ans, lors de la première "crise" d'Aurélien, la première fois où son mari, le père de son fils Vadim alors un nourrisson a déversé sur elle un flot d'insultes d'une violence extrême. Dépression, mea culpa, thérapie et basta. Or, après sept ans de calme et la naissance d'un deuxième enfant, la rechute la cloue sur place. Ça éclate n'importe quand, des bordées d'injures plus immondes les unes que les autres. Sauf que cette fois, les enfants sont les spectateurs ahuris de ces démonstrations et que la jeune femme ne peut plus réagir par rapport à elle-seule. Rester ou partir ? Se taire ou parler ? Agir ou faire le mort ? Dire, dénoncer c'est admettre aux yeux de tous, constater son échec, sa faiblesse. Et ne rien faire c'est bientôt ne plus pouvoir regarder ses enfants dans les yeux...



En choisissant d'écrire ce texte à la deuxième personne du singulier, Amélie Cordonnier nous plonge directement dans la tête de son héroïne qui se parle à elle même (en fait elle s'écrit) pour tenter de comprendre, d'analyser ses réactions, et de trouver la force de trancher. C'est certainement là que tient la réussite de ce roman. Peu à peu se dessine le contexte, le manque d'affection maternelle dont la narratrice a souffert, l'amour fou qui l'a unie et l'unit encore à Aurélien, l'envie de ce cocon familial qui lui a tant manqué. Alors... croire en la guérison ? Mettre l'amour au-dessus de tout ? Il y a un combat féroce dans la tête de la jeune femme avec d'un côté la douleur affichée d'Aurélien à se voir rechuter et de l'autre, le regard atterré et plein de questions des enfants : comment valider cette représentation des rapports homme/femme auprès d'eux ? Mais, quand l'amour a procuré tant de bonheur, comment croire que la violence peut triompher ?



L'ensemble est très bien mené et très convaincant car il évite les situations trop marquées ce qui permet d'explorer toute la palette des hésitations et des sentiments. Les victimes devraient se sentir comprises tandis que les autres percevront peut-être un peu mieux la difficulté de trancher. Et bravo pour la fin, dans la droite ligne du parti-pris du roman !
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Trancher

Quel choc !

C'est encore une histoire qui m'a remué les tripes.

Amélie Cordonnier m'a fasciné une fois de plus, avec ce premier roman fougueux et très percutant.

Je n'ai même pas eu à trancher, car dès les premières lignes, je me suis plongé presque « à corps perdu » dans cette histoire si folle, si triste, si envoutante, pour la lâcher à la dernière page du récit.

*



Le roman est très bien écrit, avec des phrases courtes, des phrases haletantes, comme pour accompagner les suffocations et les instants d'offenses de cette femme que son mari-bourreau torture.

Mais un bourreau qui « travaille » pernicieusement en profondeur. Un bourreau qui ne touche ni le corps ni la peau de sa victime, et qui ne laisse aucune trace physique visible.

Un bourreau qui a choisi des paroles et des mots, tranchants comme un scalpel, parfois râpeux comme de grosses tenailles pour opérer et arracher en lambeaux le coeur de sa femme.



Je me suis placé tout de suite, tout contre cette femme, cette épouse, cette mère, cette inconnue dont je ne connaissais même pas seulement son prénom. Une femme désemparée, qui avait cru, par des promesses, avec l'enfant qu'elle avait donné par amour à son époux, qu'une vie nouvelle pouvait recommencer. Que son couple pouvait prendre un nouveau départ. Que le bonheur d'hier pouvait revenir avec un visage radieux.

*



J'étais tout contre cette femme si émouvante, comme pour faire un illusoire rempart entre elle et les mots qu'elle recevait. Des mots lancés comme des poignards effilés. Des mots crachés comme des flèches empoisonnées. Des mots soufflés avec violence comme des éclats de verre.

Des mots qui lacéraient à toute volée d'autres mots, comme douceur, tendresse, légèreté ou gaieté.

Une femme qui se parlait à elle-même, ou à son double et témoin. Une femme qui se dédoublait comme pour peut-être fuir les scènes dont elle était le coeur du drame, comme pour mieux prendre de la distance face aux insultes qui lui fracassaient son être, qui lui brûlaient l'âme.

*



Dans cette histoire si dramatique, on ignore de quoi souffre Aurélien, le mari.

Est-ce un pervers ? Est-ce un homme atteint par quelconque syndrome ?

L'homme semble cependant être un beau psychopathe, malgré les soins qui lui sont prodigués. Un furieux qui ne cesse par crises de plus en plus rapprochées, sous n'importe quels prétextes, d'insulter, de railler, d'humilier par des grossièretés, par des mots orduriers, son épouse.

Et la perversion de ce mari arrive à son comble lorsque celui-ci se « lâche » sur sa femme, en la rabaissant et en l'avalisant devant leurs deux enfants.

Des enfants, inquiets, anxieux presque effrayés, qui très vite prendront fait et cause pour leur maman.

*



Mais le réconfort de ses deux enfants sera-t-il suffisant pour cette mère si désespérée ?

La maman, la femme avait cru une première fois que l'amour serait le plus fort, que son mari aurait l'énergie et la vitalité de combattre définitivement ses vieux démons.



Cette fois-ci, elle va se donner un temps à la réflexion. Un temps qui va lui paraitre interminable.

Doit-elle continuer encore et encore d'espérer et de croire ?

Et comment retrouver un second souffle avec toute cette souffrance qui l'étouffe ?

Ou doit-elle abandonner son mari avant qu'il la détruise entièrement et qu'elle n'ait plus aucune force pour se reconstruire ?

*



Un grand merci à ma chère Agathe Ruga pour m'avoir dernièrement conseillé ce livre.

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Un loup quelque part

Un récit dérangeant et pourtant profondément humain sur le désamour d’une mère envers son enfant. L’estampille « Livre Coup de Poing » n’est pas exagérée: le sujet de ce livre ainsi que le style surprenant de l’auteure sont remarquables.



La protagoniste, dont on ne connait pas le prénom, est une professeure d’une trentaine d’années, mariée, qui profite d’un congés parental pour s’occuper de son bébé de cinq mois et de sa fillette de huit ans. En faisant la toilette d’Alban, elle découvre d’intrigantes taches brunes sur le corps de son bébé. Une visite chez le pédiatre lui apprend que son fils, sans aucun doute possible, est métis… Un choc pour la jeune femme dont l’incompréhension est totale. Il lui faudra enquêter avant de comprendre la raison de cette « différence », mais cela entraine avant tout un rejet, un dégoût profond pour son enfant, avec le besoin de le « recommencer » car forcément il y a un loup quelque part… Mais voilà, on ne peut pas retourner, comme un achat défectueux, un bébé à la maternité sous prétexte qu’il ne convient pas… Il faut au lecteur ou lectrice (mère de famille ou pas) se mettre à la place de cette femme que rien ne prépare à découvrir le changement progressif de couleur de peau de son enfant : le bébé tout blanc se métamorphose sous ses yeux en petit métis, comme Grégor Samsa, le personnage de Franz Kafka devenu un beau jour cloporte… Non qu’elle soit raciste, cette jeune femme s’en défend d’emblée, mais tout de même que va t-elle dire aux autres ? Et puis cela touche à son histoire personnelle, à ses racines. Ce roman évoque un sujet jusqu’à récemment encore tabou, et pour lequel les langues commencent seulement à se délier, par des témoignages courageux : ces femmes qui n’éprouvent pas l’amour tant attendu envers leur nouveau-né, vivant un « déni d’amour » culpabilisant et mal perçu par la société. Ces situations existent et engendrent de la souffrance tant du côté des parents que des enfants et la seule attitude valable pour les personnes qui gravitent autour de ces familles en souffrance est de ne surtout pas juger mais d’apporter écoute et soutien. Cela dérange peut-être mais voilà, c’est un fait, les relations parents-enfants peuvent parfois se révéler très complexes.



Le style d’Amélie Cordonnier (et là j’arbore un grand sourire), m’a d’abord déroutée. Totalement. Au point qu’après avoir lu quelques courts chapitres je me suis demandée comment j’allais venir à bout du roman (j’ai honte!). Direct, saccadé, incisif, de prime abord je n’aime pas. Et puis, c’est un peu comme écouter pour la première fois Alors on danse, le tout premier tube de Stromae, au début ça tape sur les nerfs et puis se dégage quelque chose de profondément séduisant. Entre références littéraires et musicales actuelles, on se laisse surprendre par des associations d’idées venues d’on ne sait où, mais tellement évidentes, des rimes inattendues, une poésie moderne, sombre et intimiste qui prend aux tripes. Alors là, oui bien sûr que oui. Une belle surprise que ce roman!



Je remercie Babelio de m’avoir sélectionnée pour découvrir ce titre lors d’une opération Masse Critique.
Lien : https://loeilnoir.wordpress...
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En garde

Une auteure que je ne connaissais pas. Ce roman m'a fait penser au film " Rien à perdre" avec Virginie Efira. C'est autobiographique. Un jour, Amélie Cordelier a reçu une lettre des services sociaux, elle a été signalée pour maltraitance sur ses enfants. Elle et son mari Alexandre vivent dans le 15 ème arrondissement de Paris avec leurs deux enfants Lou 7 ans et Gabriel 14 ans. Les faits dénoncés se seraient passés lors du confinement. La famille est alors convoquée par les services sociaux. Cet événement va provoquer une complète remise en cause de l'auteure. Si la première partie du roman est autobiographique, la seconde est fictive. Un témoignage qui fait froid dans le dos. Une écriture simple, réaliste. Des personnages auxquels on peut s'identifier. Ce récit fait froid dans le dos car très crédible. J'ai bien aimé.
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En garde

Suite à un appel au 119, le service téléphonique de l’enfance en danger, l’autrice et narratrice se retrouve convoquée par la protection de l’enfance à un rendez-vous en famille, afin de vérifier que les enfants vont bien. Croyant d’abord à un canular, son sang se glace à la réception de la seconde lettre. Elle a bien été «dénoncée» par l’un de ses voisins de palier.



Et c’est ainsi que le cauchemar commence pour la mère, le père et les deux enfants, Lou, 7 ans et Gabriel, ado de 14 ans. Ils pensent être tranquilles une fois passé le fameux rendez-vous mais la machine s’emballe et les parents sont suivis par un assistant social à domicile, qui se fait appeler le Cousin.



Et ce cousin va vraiment devenir un membre de la famille, contrôlant tout jusqu’à l’alimentation des enfants et la prise de pilule de la mère, s’installant dans l’appartement et dormant dans le salon sur son matelas gonflable… Il s’incruste physiquement et psychologiquement dans la moindre parcelle disponible de mètres carrés et de cerveau. Toute la famille devient obsédée par ce couz’ qui s’infiltre et colonise tout.



Là, on se questionne. Dans quelle mesure est-ce possible ? C’est troublant, car l’écrivaine explique en préambule que cette histoire est réelle et tirée de son expérience personnelle. Jusqu’à la fin, le doute est permis, même si l’invraisemblance de la situation finit par nous faire basculer dans la fiction, une fiction flippante à la Big Brother.



Et ce sera mon gros bémol pour ce roman, finalement. Si Amélie Cordonnier arrive à nous faire ressentir toute l’angoisse et l’oppression d’une telle situation qui, à terme, risque de lui faire perdre ses enfants, je trouve peu honnête de faire comme si tout cela s’était vraiment passé. Suite à la lecture de ce livre, si l’on ne perçoit pas le passage de la réalité au délire, je doute que l’on ose appeler le 119, tant la procédure décrite est inhumaine.



A lire donc comme un roman, dès le début, et ce livre anxiogène ne vous quittera plus jusqu’à la fin, car il faut bien l’avouer, il est haletant.
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Un loup quelque part

Un roman puissant qui laisse sans voix. Une histoire qui semble sans issue pour les personnages. Mais un roman qui prend des chemins de traverses, les plus escarpés. Un roman casse-gueule où il n'y a pas de gueules d'ange.

Un roman moderne, sulfureux parfois dans ses propos. Rien n'est vraiment blanc. Rien n'est vraiment noir. Entre ces deux couleurs un petit garçon Alban. Et une tonne de questions qui alourdissent le coeur. L'avenir est sombre. On broie du noir. le teint est blafard.

*



Amélie Cordonnier et son originalité.

Amélie et son « Trancher ». Haché petit. Haché menu.

Amélie et son « Pas ce soir ». Pas envie. Peux plus supporter ta tête de gland ! Retour à l'hôtel « des culs tournés. »



Au loup ! Un loup !

Un défaut de fabrication ? Un ouvrage mal exécuté ? Une erreur génétique ? Une punition divine ?

Le bébé est laid et il est en mue.



Amélie qui ose. Là où d'autres boguent doucement, balbutient et enrobent les mots de peur de faire fuir leurs lectrices et leurs lecteurs.

Amélie comme une guerrière dégoupille une grenade. le récit est explosif. La différence est toujours un sujet tabou, un sujet épineux. Une arête qui se met à travers la gorge. Une croute de pain qui se coince dans l'oesophage. On toussote. On fait de grands « Rhââ ! ». Pour finir par recracher, écarlate.



La différence sur la couleur prend cette fois-ci toutes les couleurs du désespoir.

*



La belle plume d'Amélie zigzague, crisse sur le papier. Elle s'emballe, fait des embardées irrégulières. Elle aligne quelques mots. Elle distribue en rafale des phrases courtes.

L'encre noire crachote sur les feuilles blanches. Apparaissent des taches aux figures fantasmagoriques.

Je suffoque. J'invoque les esprits que l'auteure n'ait pas perdu les siens.

Mais non elle a toute sa tête. Alouette !



C'est parce que l'auteure est narratrice.

D'une mère sans prénom, qui semble sans identité propre. Une naissance celle d'Alban, une tâche, pas un grain de beauté. Une petite tâche intrigante. Qui n'a pas sa place là où elle se trouve. Un grain de peau importun jugé « contre nature ».

Et qui va bientôt entacher le bonheur immaculé de cette maman.

*

La mère qui perd pied. Cette prof de français en perd son latin. Elle sombre et ses journées s'assombrissent.

La mère est ravagée, abattue, brisée devant ce phénomène. Une erreur de distribution dans les gènes. Une injustice. Une trahison de Dame nature.

Mais qui lui aurait menti ?





C'est Alban qui pleure. Il veut boire. C'est Alban qui sent mauvais. Il a fait caca et en a mis plein ses couches. Maman est dégoutée. C'est le rejet, la négation. Maman n'ose plus toucher son petit garçon.

Pire, maman ne peut plus le voir en peinture. Trop de coups de pinceaux bariolés.

Un petit corps avec des zones couleurs cuivre, pain grillé, croissant doré, café au lait. Mais sans « olé ! ». Pas de jeu de mots joyeux pour une situation trop grave.

*



La situation est désespérée et désespérante. Peur des jugements. Peur de la colère et l'incompréhension du mari.

Cacher l'enfant, dissimuler Alban, l'emmitoufler, le cagouler, le maquiller. Peut-être le faire disparaitre...

Une pensée horrible. Une pensée hideuse. Et le rouge de la honte qui monte au visage de la mère.

*



Elle appelle son papa.

Lui demande d'arrêter de faire ses grimaces hypocrites. Lui demande de remonter dans son arbre et de grimper aux branches généalogiques bien sûr.

T'es sûr ! Pas de cracheurs de feu ?

Pas de réducteurs de tête ?

Pas de marabouts africains parmi nos ancêtres ?



Aller papa t'es sûr ? Crache ta Valda !

Ou as-tu trompé maman ?

As-tu fauté ? Avec Lucienne la mauricienne ou avec Thérèse la congolaise.



Je suis TA fille, j'exige la vérité ! Rien que la vérité ! Toute la vérité ! Tu le jures !



Le pauvre père est accablé. Tant d'années de culpabilité. Tant d'années à dissimuler ses secrets de famille. Tant d'années à aimer sa fille et à lui mentir. Finir avec la tromperie. Finir avec ce mensonge permanent.

Alors il parle. le père parle, dit tout ce qu'il a tu trop longtemps, par lâcheté peut-être. Lâche le morceau, d'une seule traite, avec toute l'acidité qui suinte dans ses mots.

Soulagement ! Délivrance !



Le père crache alors La vérité. Celle qu'il a cachée. Comme une multitude de bastos qui mitraille le coeur de sa fille.

*



La femme, la mère, la fille vacille. La dernière torpille arrive et explose tout son être.

Elle est anéantie. Elle ferme les yeux.

Pour elle la longue nuit commence.

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Un loup quelque part

On se sait comment elle s'appelle peut-être pour la rendre plus anonyme ou parce que c'est un phénomène qui peut survenir à toute femme (et pourquoi pas à un homme). Elle est mariée et mère de deux enfants : Esther 8 ans et Alban, le plus jeune, âgé de quelques mois et lors d'une visite chez le pédiatre le doute s'installe, s'insinue et se confirme. Et ce qu'elle croyait inébranlable, son couple parfait,  son amour maternel, sa famille, vacillent et sombrent dans un cycle infernal.



J'avais déjà entendu parler de cette auteure pour son premier roman Trancher (que je n'ai pas encore lu)  qui abordait déjà des thèmes durs, violents axés sur le couple et la famille et elle le fait à nouveau ici avec une écriture très particulière et c'est ce qui m'a le plus marqué dans ce roman. Une prose rythmée et sonore tellement les phrases, les mots se répondent les uns aux autres, comme une longue tirade qui résonne comme un poème sombre, noir, des phrases sèches comme les pensées qui se succèdent et qui tournent en rond, s'accumulent et qui reflètent l'angoisse d'une mère qui perd pied. Ce rythme, ces mots qui riment m'ont parfois gênée, ils étaient parfois trop présents et au bout d'un moment presque attendus, recherchés mais qui donnent à l'écriture et au rendu une identité particulière et surtout un son.



C'est un roman très marqué par les couleurs, de la maternité heureuse ébranlée à la propre enfance de l'héroïne, ayant perdu à double titre l'image maternelle, de la filiation, la sienne mais aussi celle vis-à-vis d'Alban, aux non-dits, aux questionnements qui resteront sans réponse. J'ai trouvé habile la façon dont l'auteure a choisi la manière dont son héroïne focalise sa propre blessure sur son enfant.



Amélie Cordonnier évite tous les stéréotypes qui peuvent mener une femme à cette sorte de "folie", rien ne la prédestinait à y sombrer peu à peu, à s'isoler mais le trouble est là, qu'elle ne peut s'empêcher de s'identifier à Gregor Samsa, le personnage central de La métamorphose de Kafka, elle hallucine, elle est obsédée par cet enfant qu'elle a sous les yeux, dont elle observe la mutation en un être qu'elle ne reconnaît pas comme fruit de ses entrailles.



Comme pour Chanson douce de Leïla Slimani, on ne comprend pas l'aveuglement de l'entourage qui ne voit pas la détresse, la lente descente aux enfers de cette femme mais également celle de l'enfant car parfois le trait est tellement forcé, va à l'extrême que cela semble incroyable et pourtant combien d'exemples dans l'actualité de cas semblables. Mais passons, c'est un roman et il faut accepter le deal car à l'évidence ce qu'il en ressort c'est le cheminement des pensées, le processus de lamination, son mécanisme et toutes les ruses mises en place pour tenir.



Alors ai-je aimé ? Oui malgré le sujet difficile, oui parce qu'il y a un travail d'écriture singulier et original, oui parce qu'elle évite de sombrer dans le glauque même s'il est présent et effleuré et oui parce qu'elle évite un final qu'il aurait été facile d'imaginer..... Cela se lit d'un trait, on retient presque sa respiration, à chaque page tournée on espère que le pire n'est pas arrivé, on secoue Vincent, Elsa pour qu'ils ouvrent les yeux mais nous-mêmes est-on à même de voir un proche qui sombre ?
Lien : https://mumudanslebocage.wor..
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En garde

« Big brother is watching you »… un petit côté « 1984 » auquel l’auteur fait d’ailleurs référence à plusieurs reprises… et un petit côté « La délation sous l’occupation » qui fait froid dans le dos…

Invitée par ma libraire à une séance d’interview/dédicace avec Amélie Cordonnier, j’ai donc fait la connaissance de ladite auteure venue nous parler de son dernier roman : « En garde ».

J’ai découvert une jeune femme pétillante, très à l’aise dans son expression et plutôt volubile.

Elle raconte avec une certaine hargne et un peu de gêne cette terrible expérience vécue par sa famille (son époux et ses 2 enfants) juste à la sortie du 1° confinement de 2020 qu’elle a tenté d’exorciser à travers ce roman… dont elle précise qu’il est né d’un fait réel mais qu’il s’agit ensuite d’une fiction sortie de son imagination…

En bref, une dénonciation (anonyme bien entendu) lance les services de la protection de l’enfance sur les traces de sa famille pour « maltraitance envers ses enfants » !

Elle reçoit cette lettre comme un uppercut avant de penser qu’il s’agit d’une erreur… malheureusement, les événements s’enchainent : convocation, audition de la famille puis des enfants « seuls »… et la suite… que je vous laisse découvrir si vous lisez ce roman.

Convaincue par l’auteure lors de cette rencontre, j’ai lu son livre… dont je ressors mitigée…

Autant la première partie qui retrace les affres de cette famille en proie aux services sociaux « tout puissants » alertés par un personnage « masqué » m’a émue et je m’en suis sentie solidaire, autant la seconde partie (dont je suppose qu’elle est beaucoup plus imaginaire) m’a laissée de marbre voire agacée !

Difficile de me mettre à la place d’Amélie dans de telles circonstances mais je pense que j’aurais refusé de courber l’échine et de me laisser « chosifier » à ce point… Je suis une battante et une révoltée de nature, donc cette situation n’aurait probablement pas perduré chez moi… et encore moins avec mon époux !

Lecture en demie teinte donc avec une fiction « peu crédible » à mon sens…

Dommage car les faits réels sont suffisamment graves pour être relayés, sans pour autant remettre en question l’importance des enquêtes menées après les alertes reçues par le 119. Ce que l’auteure a bien précisé à la fin de son roman !

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Pas ce soir

J’ai découvert la plume d’Amélie Cordonnier avec Trancher, son premier roman paru en 2018.

Tout récemment j’ai lu En garde, que j'ai beaucoup aimé.



Pas ce soir est un récit est à la troisième personne. Son personnage central est un homme. Amélie Cordonnier a réussi à se glisser dans sa tête… et dans son corps. La cinquantaine bien tassée, marié et père de deux grandes filles qui ont quitté le nid. Son problème : sa femme ne veut plus faire l’amour avec lui… chose que ce monsieur ne s’explique pas.



Ce qui me plaît chez Amélie Cordonnier, c’est qu’elle n’hésite pas à forcer le trait, « pousser le bouchon », quitte à sacrifier à la crédibilité des situations.

Ce qui me plaît aussi, c’est son écriture, incisive et drôle, pétrie de figures de style, de jeux de mots, de proverbes populaires et de paroles de chansons :

« Détrôné dans son king size, le roi n’est à la hauteur de rien, ce soir. »



L’auteure explore « la triste petite misère de la conjugalité », avec son cortège de questionnements concernant le désir (masculin…féminin… différents ?), la baisse de libido liée aux modifications hormonales ou à un état dépressif, l’abstinence, le consentement :

« Est-ce qu’insister c’est forcer ? (…) certaines fois elle ne bougeait pas, ne disait rien. Alors il s’obstinait. Gentiment. Un peu comme une mère force son enfant à manger. Et l’appétit lui venait souvent en baisant. »



Comment finit une telle histoire ? Mal, en général… Pour savoir si au sein de ce couple noir c’est noir, il n’y a plus d’espoir, ou bien si le mari frustré aura encore l’occasion de dire à son épouse qu’il va l’aimer à faire dresser ses seins et tous les Saints, à faire voler leurs âmes aux septièmes cieux … lisez ce roman !
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Trancher

"Pourquoi tu restes ?" Cette question sur le bandeau de la couverture résume assez bien le propos de ce livre. En effet, pourquoi rester avec une personne qui vous agonit d'insultes, qui vous détruit à petit feu par ses mots accablants ?



Amélie Cordonnier répond en nous livrant avec une justesse incroyable les pensées qui traversent cette femme victime de maltraitance psychologique, les rouages qui régissent son existence aux côtés d'un homme volcanique, incapable de refréner ses colères.



Un tableau réaliste et tragique, qui fait également la part belle à l'importance de relation mère-enfants dans ce genre de situation.
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Un loup quelque part

Je ne sais comment commencer la chronique de ce roman, qui a soulevé en moi des émotions contradictoires. Ecrit de toute évidence pour faire réagir, j'y ai senti quelque chose d'artificiel qui m'a empêchée d'adhérer complètement à cette lecture : il y a comme un parti pris de froideur et de distance parfois, qui me semble loin de ce que ressent une mère dans une telle situation, même si la culpabilité et les tourments sont bien présents à d'autres moments. Autre détail qui m'a gênée : la mise à l'écart du père qui pourtant accueille avec bienveillance cette annonce "coup de tonnerre" d'avoir un enfant noir, et malgré ça ne reçoit aucune confidence de la mère en détresse, alors que l'on perçoit bien qu'elle n'arrive pas à gérer seule cette situation. On n'arrive d'ailleurs pas à savoir si son drame réside dans la couleur de son enfant ou dans l'annonce de son adoption à elle, et bien que les deux évènements soient liés, leur mise en relation n'est pas vraiment exploitée. Enfin, côte forme, l'emploi systématique d'allitérations et de métaphores filées à l'extrême alourdit quelquefois le texte. Ce qui ne m'empêche pas d'avoir lu ce roman sans m'ennuyer, et d'y avoir trouvé, quelquefois, un certain plaisir.
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Un loup quelque part

La vie de était un long fleuve tranquille pour le personnage principal, jusqu’à ce que des révélations viennent bouleverser cette quiétude. Son petit univers équilibré s’effondre alors. Toutes ses convictions sont mises à rude épreuve. Bien qu’elle ait un entourage bienveillant avec un mari prévenant, une fille adorable, un père aimant, une amie attentive, elle perd complètement pied.



Le lecteur assiste au dialogue intérieur de cette femme paniquée. Plongé dans son quotidien, on ressent l’ensemble de ses émotions, de plus en plus angoissantes. Ce qui semble n’être qu’au départ qu’un caillou dans la chaussure, devient très vite une obsession maladive. Son comportement s’aggrave dangereusement. En tant que témoin, on est plus en plus mal à l’aise. Sous nos yeux, elle perd sa bienveillance et dégage une instabilité inquiétante.



Ce texte apporte une nouvelle vision de la maternité. En complément des derniers livres de Carole Fives et Sylvie Le Bihan, il met en lumière la difficulté pour une mère d’appréhender une situation maternelle qui lui échappe. Cela appuie aussi l’idée que l’instinct maternel n’est pas forcément inné et qu’il peut être ébranlé par les incidents de la vie. Les mamans apparaissent souvent comme inébranlables et finalement, cette histoire sans fard leur redonne une certaine humanité, en nous dévoilant leurs failles.



Ne vous fiez pas à ses airs innocents (je l’ai rencontré, elle est aussi très sympathique), Amélie Cordonnier est assez diabolique. Dans le choix de ses thèmes et dans sa manière de les traiter de l’intérieur, elle vous immergera dans une expérience réaliste et oppressante. Elle sait affronter les drames de front et mettre le lecteur dans les conditions du réel, sans filtre. Avec ce deuxième roman, elle confirme son talent d’écrivaine de l’intime. Je vous recommande donc vivement cette lecture et je serai bien sûr à l’affût de son prochain livre.
Lien : http://leslivresdek79.com/20..
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Un loup quelque part

Il est né, le deuxième enfant de ce couple uni et aimant. Ils sont déjà parents d’une petite Esther adorable et sans histoire, voilà qu’arrive un fils aimé et choyé. Enfin jusqu’au jour de cette visite chez le pédiatre, lorsque sa mère découvre une tache bizarre sur le petit corps d’Alban. Et jour après jour, les marques se font plus nombreuses, la couleur de sa peau change. Car Alban s’avère être un bébé surprise, un bébé métis. Mais pourquoi, et comment ?

Les découvertes et les révélations sont violentes et déstabilisantes pour cette maman complétement perdue dans le silence de ses origines, dans ce secret enfin dévoilé qui bouleverse sa vie. Qui est-elle et d’où vient-elle ? Une fillette adoptée par des parents aimants. Par ce père devenu veuf qui se mure dans le silence et n’ose révéler ce lourd secret à sa fille au décès de son épouse.

Le silence est fracassant, la révélation déstabilisante, elle est face à cet enfant qu’elle ne reconnait pas, qu’elle hésite à aimer, à prendre dans ses bras, à accepter. La voilà plongée dans un immense désarroi, celui de réaliser qu’elle a été abandonnée à la naissance, puis le silence de son père, enfin la couleur de l’enfant, comment peut-elle vivre avec ça ? Mais elle a en même temps une réaction totalement démesurée, celle de "cacher cet enfant que je ne saurais voir"par tous les moyens, même les plus invraisemblables. Un peu trop peut-être, on a un peu de mal à y croire à ces accessoires, mais dans la réalité, on sait bien hélas que la maltraitance n’a pas de limite… surtout dans une famille un peu trop aveugle confrontée à cette mère désespérée.

Un roman qui a le mérite de poser de bonnes questions sur la maternité, l'instinct maternel, la filiation et la connaissance de soi.

Chronique complète à lire sur le blog Domi C Lire https://domiclire.wordpress.com/2020/08/01/un-loup-quelque-part-amelie-cordonnier/
Lien : https://domiclire.wordpress...
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Trancher

Amélie Cordonnier a choisi, pour son roman, le thème encore tabou et donc peu exploité de la violence verbale au sein du couple. Elle cible ici une femme qui, à la quarantaine, se remet en question ; quelle satisfaction lui procure encore son couple ? Son époux, Aurélien, a tous les contours du mari attentionné et du père aimant. Et pourtant… En-dehors des regards extérieurs, c’est un véritable tyran verbal : il insulte sa femme, la met plus bas que terre et l’assomme de mots orduriers y compris à l’occasion des scènes les plus intimes. Et elle ? Elle baisse la tête, prend tout de front, souffre de dépression, s’éloigne une première fois, le temps de lui donner une chance de se soigner ou de se remettre en question, puis revient, toujours, comme si une élastique ne pouvait l’empêcher de quitter Aurélien.

La violence verbale ne se voit pas : pas d’hématomes, ni de traces sanglantes. Mais elle fait souffrir tout autant. Et le regard d’Amélie Cordonnier sur son personnage féminin est tout sauf complaisant. En utilisant le pronom personnel « tu » pour narrer le récit de son personnage féminin, elle prend un ton proche de l’accusation. Le lecteur devient alors spectateur d’une diatribe qui semble inciter cette femme à enfin réagir, à enfin trancher ce fil invisible qui la relie à ce type finalement intrinsèquement pervers.

Alors, à dix jours de son quarantième anniversaire, cette femme s’impose un préavis de réflexion : va-t-elle réussir à s’émanciper de cette relation toxique afin de pouvoir enfin retrouver l’estime de soi ?

Un roman prenant, poignant et bien écrit. Il se lit d’une traite, en apnée.



Lu dans le cadre des 68 premières fois.
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Trancher

« C’est toujours la même chanson : tu ne t’y attends pas, c’est une irruption soudaine de colère et de haine qui te surprend et écrase tout. Piétine l’insouciance, gâche la joie, les fracasse. Alors tu ne veux plus connaître pourquoi du comment. C’est lassant. La même histoire qui se répète et se raconte. Inéluctablement. »





Ces quelques phrases pourraient résumer à elles seules la détresse et la violence dans laquelle sont plongés cette jeune quadragénaire et ses deux enfants Vadim, 14 ans et Romane 8 ans.

Accablée par la sauvagerie des insultes profanées à son encontre par son époux Aurélien, elle se replonge 7 ans en arrière, après avoir réussi à sauver sa famille déjà frappée par les comportements belliqueux et insanes de celui qu’elle a aimé par dessus tout. Elle, qui croyait derrière elle à tout jamais, cette violence gratuite, se retrouve projetée dans le feu de cette vindicte d’autant plus incompréhensible qu’elle a dorénavant lieu en présence de ses enfants.



Jouant avec les mots, mêlant l’humour à l’horreur des mots subis, Amélie Cordonnier décrit avec force et réalisme cette détresse infligée par l’être aimé auquel elle reste cependant attachée. Dilemme donc : fuir ou rester ? Affronter ou partir ?



« Tu te demandes si sa détresse te ravage autant que sa violence. »



Mais voilà, elle n’est plus la seule concernée par ce problème qui rejaillit également directement sur ses enfants. Commence alors ces interrogations inéluctables sur le devenir de la famille qu’elle a fondée avec lui. Sur son devenir en tant que femme. Peut elle encore supporter ses agressions verbales qui surgissent sans prévenir ? Veux t’elle exposer ses enfants à cette haine sous-jacente dont les effets secondaires ne peuvent s’avérer que nuisibles pour eux ? « Trancher » : tel est alors le but qu’elle se donne.

Continuer à vivre cet amour toxique où s’en éloigner ?



« Trancher » est un récit qui pointe du doigt la violence psychologique, celle utilisée par le biais de mots acides et coupants, blessants et dégradants, ceux qui peuvent faire basculer de manière insidieuse toute une vie vers la destruction de l’être.



Amélie Cordonnier ne donne pas de prénom à cette jeune femme : peut-être veut-elle par ce biais ne pas donner une identité spécifique à son personnage afin que celles qui pourraient se sentir directement concernées par cette violence conjugale puisse prendre la force de trancher à leur tour ?



Récit d’une intensité certaine, dont le seul bémol serait peut-être le langage vulgaire utilisé dans certaines scènes par celle-là même qui combat une autre forme de vulgarité porteuse de violence.

La fin donne toute son ampleur à cette histoire témoin de l’ambivalence et de l’ambiguïté des sentiments, avec lesquels les pervers narcissiques jouent habillement
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Trancher

Un homme "galant, brillant, précoce", intéressant et différent des autres.

Comment se douter qu'il héberge un double, un monstre capable, malgré lui, de détruire la femme qu'il aime ?

Sa jeune épouse qui va devenir "la femme d'un mec violent qui réussit à la casser sans la taper".

Dans ce récit à la deuxième personne, la narratrice s'adresse à elle-même. Pour créer une certaine distance ?

On est témoin de sa stupeur, de sa douleur, de son anéantissement et de ses hésitations au fil des heures.

Tout son ressenti est bien analysé, paraît vraisemblable et sonne juste.

Partir ? rester ? le détester ?, l'aimer encore malgré tout ?

Rien n'est simple et c'est bien rendu.

L'écriture est parfaite, à mon avis, et rend palpables paroles et sentiments.

En quelques mots bien posés, les personnages prennent corps.

Et Barbara, Rimbaud et Baudelaire ajoutent les notes triste de leur poésie.
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En garde

Je ne vais pas y aller par quatre chemins : je n'ai pas du tout aimé le dernier roman d'Amélie Cordonnier alors que j'avais apprécié "Trancher" et "Un loup quelque part".

Trois ans après les faits, l'auteure écrit sur un traumatisme qui l'a directement touchée, elle, son mari et ses deux enfants, Gabriel 14 ans et Lou, 7 ans. Une dénonciation anonyme de maltraitance sur enfant déclenche la machine administrative de l'Aide à l'Enfance qui se met inexorablement en marche, une machine à broyer qui considère les parents à priori comme coupables de quelque chose. S'immisce alors dans leur vie un assistant social qui vient à l'improviste, a les clefs de chez eux, prépare les repas, fait les devoirs avec Gabriel, jette la malbouffe......

Les phases psychologiques successives traversées par l'auteure sont très bien décrites : incrédulité, déni puis peur, angoisse, panique, stress. Mais on s'enfonce rapidement dans une sorte de dystopie, un cauchemar éveillé où Big Brother régit la vie de la famille, lui ôte toute liberté, jusqu'à l'effondrement psychologique de la mère. C'est too much, trop abracadabrantesque comme aurait dit un de nos anciens présidents, j'ai décroché même si j'ai tenu à lire le roman jusqu'au bout.

J'ai également trouvé la critique de l'Aide Sociale à l'Enfance trop exagérée et comme tout ce qui est exagéré, a provoqué en moi un rejet. L'action de ce service de l'état est indispensable et ne peut être réduit à une simple machine à broyer même si je reconnais que l'expérience d'Amélie Cordonnier a du être particulièrement traumatisante.

Bref, une déception.
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