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Citations de Anatole Le Braz (118)


Il ne faut jamais laisser la maison seule pendant l'enterrement, sinon le mort dont on croit accompagner la dépouille au cimetière reste la garder.
[...]
- Il y avait donc un enterrement aujourd'hui ? leur demanda-t-il.
- Oui, répondit l'aîné des Lharidon d'une voix triste.
- Quelqu'un de vos proches, peut-être?... C'est donc ça, que j'ai trouvé votre mère tisonnant la cendre d'un air si préoccupé. Elle n'a même pas eu le cœur de compter l'argent que je lui apportais pour le prix du veau.
Les deux Lharidon le regardaient, hébétés.
- Notre mère, dites-vous?... Vous avez parlé à notre mère?
- Certes. Qu'est-ce qu'il y a là de si extraordinaire, que vous me dévisagez avec cette mine ?
- Mais, c'est elle que nous venons d'enterrer!
Ce fut au tour du boucher d'écarquiller les yeux.
- Je l'ai pourtant vue comme je vous vois, affirma-t-il.
La servante des Lharidon, qui était avec eux, leur dit alors :
- Je vous avais avertis... Il ne fallait pas laisser la maison seule... Maintenant la morte ne la quittera qu'au coucher du soleil.
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Nocturne
À madame Adolphe Graff


Le ciel s’éteint, tout va dormir
Je songe à des choses passées ;
C’est à la fois peine et plaisir.
La veilleuse du souvenir
S’allume au fond de mes pensées.

J’entends des pas, j’entends des voix,
Des pas furtifs, des voix lointaines
C’est peine et plaisir à la fois.
On dirait le frisson des bois
Sur le cœur tremblant des fontaines.

Des formes traversent la nuit,
Formes noires et formes blanches...
Où vont-ils et qui les conduit,
Ces passants qui passent sans bruit,
Comme la lune entre les branches ?

Le vent d’une ombre m’a frôlé...
Fantôme d’enfant ou de femme ?
Sur la veilleuse il a soufflé
Quelque chose d’inconsolé
S’est mis à pleurer dans mon âme.

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Les menuisiers qui fabriquent les cercueils savent d'avance si quelqu'un de la région doit mourir dans le journée ou dans la nuit. Ils en sont prévenus par le bruit des planches,qui s'entrechoquent d'elles-mêmes dans le grenier.
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21 avril.
Rien à signaler, mon ingénieur, du moins pour ce qui est du service. Le baromètre est sur « variable » ; il souffle grande brise de noroît. Ce matin, après l’extinction du feu, j’ai monté mon matelas dans la lanterne, ainsi que des provisions de bouche pour plusieurs jours. Car, d’ici quelque temps, je ne me soucie pas de redescendre. Comme je passais sur le palier du deuxième étage, devant la porte de leur chambre, – de leur tombe, – je l’ai entendue, elle, qui disait à l’autre :
— Je savais bien qu’il avait trop de religion pour vouloir cela !
Puis, mon pas s’éloignant, elle a poussé une clameur folle, un cri d’angoisse désespérée :
— Au nom de Dieu et de saint Yves ! Goulven ! Goulven Dénès !
J’ai continué de gravir les marches, j’ai mangé un biscuit trempé d’eau et je me suis étendu sur le matelas, les bras en croix sous ma tête. J’ai dormi du sommeil de mes nuits anciennes, du temps que l’image de la femme ne me hantait point, – d’un sommeil sans pensée et sans rêves. Le soleil se couchait derrière l’Ar-Mèn, dans les lointains de la mer, quand j’ai rouvert les yeux. Je suis reposé : j’ai les idées d’une lucidité qui tient du prodige, comme si l’éblouissante flamme du phare projetait son éclat jusqu’au fond de mon esprit.
Saint Yves ! Elle a osé invoquer saint Yves ! Ce fut la veille de son pardon...
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Ceci se passait au temps où les riches n'étaient pas trop fiers et savaient user de leur richesse pour donner quelquefois un peu de bonheur au pauvre monde.
En vérité, ceci est passé depuis bien longtemps.

date de première parution du livre: 1893.
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Dieu, que c'est triste ! du vent, de la pluie et du froid.
Ce 1er mai me fait l'effet d'un jour de noces, devenu jour de convoi.
Hier au soir, c'était la lune, les étoiles, un azur, une limpidité, une clarté à vous mettre aux anges.
Aujourd'hui, je n'ai vu autres choses que les ondées courant dans l'air, les unes sur les autres, par grandes colonnes, qu'un vent fou chasse à outrance, devant lui ...
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Le prêtre qui célèbre l'enterrement est, dit-on, averti, au moment où le cercueil touche le fond de la fosse, si l'âme du mort est sauvée ou perdue.
Aussi, lorsqu'il ferme tout de suite son livre, en quittant la tombe, et se dépêche d'expédier le chant, c'est qu'il n'y a plus rien à faire : le mort est damné.
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Plogoff. Il est près de onze heures et demie. Le Sanctus tinte, la grand'messe va finir. Assis sur la margelle de l'échalier qui donne accès dans le cimetière, j'achève de noter la physionomie du bourg.
Une dizaine de maisons tout au plus, pêle-mêle et comme en tas, basses, trapues, solidement enracinées dans le sol, tournant uniformément le dos à la mer.
Une branche d'ajonc desséché sert d'enseigne à une auberge.
C'est ici un des derniers villages de France, du côté de l'Atlantique ; au delà, il n'y a plus rien que deux ou trois kilomètres de terres pauvres plongeant à pic dans l'immensité ...
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C’est ce que nous allons savoir ! s’écria Jozon Briand. Il enjamba le cercueil, ouvrit la porte. Mais, à peine entré, il trébucha, en poussant un long soupir. Quand on le releva, tout son sang lui était sorti par le nez. Il eut encore le loisir, cependant, de raconter son aventure et de faire connaître ses dernières volontés, mais non de fumer sa dernière « pipée. » On prétend qu’il la réclame chaque fois que la cheminée fume, à Kermarquer.
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L’un portant l’autre, ils traversèrent la mer brumeuse. L’homme surnaturel marcha sur les eaux trois jours et trois nuits. Le jour, une colonne d’écume blanche cheminait devant lui, pour lui montrer la route. La nuit, c’était une claire étoile.
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Il en est d’autres, parmi les âmes, qui accomplissent leur pénitence sous la forme d’une vache ou celle d’un taureau, suivant le sexe qu’elles avaient de leur vivant. Les âmes de riches sont parquées dans des champs stériles où ne poussent que des cailloux et quelques herbes maigres. Les âmes de pauvres trouvent à brouter abondamment dans des pâtures opulentes où il ne manque ni trèfle, ni luzerne.
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Ne parlez de ceci à personne de l’équipage. Ce que vous m’annoncez n’est pas nouveau pour moi. C’est probablement l’âme de quelqu’un de nos anciens camarades, péris en mer, qui fait sa pénitence autour de la Jeune-Mathilde. Ne vous occupez pas d’elle ; gardez-vous de la troubler. Surtout ne vous penchez plus au-dessus du bordage. Le mort vous attirerait.
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J’étais, du reste, à présent que j’y songe, l’homme le plus enclin à être dupe. Je suis né de cette race austère des laboureurs du Léon, dont la religion est le souci suprême. Mon enfance fut sérieuse et un peu triste. Là-bas, point de chansons, ni de danses, ni de ces jeux qui égayent la vie. Je ne me rappelle de ce passé que des bruits de prières et des sonneries de cloches tintant des offices. Une famille s’y considérerait comme maudite, si elle ne comptait parmi ses membres un prêtre. Je fus élevé en vue du sacerdoce ; à douze ans, j’entrais au petit séminaire de Saint-Pol.
Nul écolier ne se montra plus docile ni plus appliqué. Mais la lenteur de mes progrès dans les études latines me nuisit dans l’esprit de mes maîtres, et, sur la fin de ma seconde, ils conseillèrent à mes parents de me garder auprès d’eux. Ce fut une grande déception pour ma mère qui voyait déjà, dans ses rêves, l’église dont je serais le desservant, et le presbytère, fleuri de clématite, où se reposeraient ses vieux jours. Je ne pus supporter le spectacle de ses larmes. Les travaux de la moisson terminés, je m’engageai dans la Flotte.
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Allons ! endormons-nous pour la première fois en terre irlandaise. Me voici dans l'île de mirage et de chimère, dans la Thulé des Gaules, la patrie archiceltique où le celtisme, de quelque façon qu'on l'entende, dans les choses comme dans les gens, est en quelque sorte élevé à sa suprême puissance, à son dernier coefficient. Ô patrie d'Ossian, de Fingal et de Patrice, pays des saints étranges et des héros extravagants, je te salue ! Accueille-moi comme un de tes fils : il n'y a que trop en moi, je le sais, de ces grands songes vagues dont tu enivras la race des Celtes. Ma logique sans doute critiquera beaucoup en toi, mais mon coeur ne saurait se défendre de te plaindre et de t'aimer. Bonsoir, vieille Hibernie, dont sur le seuil des chaumières bretonnes, les fileuses de l'Ouest français m'ont entretenu si souvent !
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Mais une fois de plus, je m'en veux d'avoir quitté Rennes. Il ferait si bon chez nous, à cette heure-ci, dans mon bureau, sous la lampe, la porte ouverte sur la chambre à coucher. Oh ! la maison ! la maison !
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L’anneau la hantait à un point tel que toutes ses pensées lui étaient vouées. C’était devenu chez elle une véritable obsession.
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Si nous étions moins préoccupés de ce que nous faisons ou de ce qui se fait autour de nous en ce monde, nous serions au courant de presque tout ce qui se passe dans l'autre.

(Les intersignes page 103)
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La veillée mortuaire s'appelle ann noz-veil.
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Il y a un moyen assuré de ne jamais retrouver une personne morte sur son chemin ; c'est d'embrasser son cadavre avant la mise en cercueil.
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De là vient que tant de Bretons ont la faculté de voir ce qui reste invisible aux yeux de la plupart des hommes.

Entendre des chutes d'objets - écuelles, assiettes ou verres - qui se cassent en tombant, signe de mort pour un parent ou pour un ami en voyage.

Les menuisiers qui fabriquent les cercueils savent d'avance si quelqu'un de la région doit mourir dans la journée ou dans la nuit. Ils en sont prévenus par le bruit des planches, qui s'entrechoquent d'elles-mêmes dans le grenier.

Dans le pays de Paimpol, les femmes de marins qui sont depuis longtemps sans nouvelles de leurs maris, se rendent en pélerinage à Saint-Loup-le-Petit ( Sa-Loup-ar-Bihan), dans la commune de Lanloup, entre Plouézec et Plouha. Elles allument aux pieds du saint un cierge dont elles sont munies. Si le mari se porte bien, le cierge brûle joyeusement. Si le mari est mort, le cierge luit d'une flamme triste, intermittente, et tout à coup s'éteint.
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