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Critiques de Andreï Guelassimov (89)
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Les dieux de la steppe

1945, Razgouliaevka, un village au fin fond de la Sibérie, non loin de la frontière chinoise, isolé dans la steppe et encerclé de loups. Non loin du village, un camp de prisonniers où séjournent Fritz,Hongrois et Japonais.Les Japonais étant les premiers arrivés, on continue d'appeler cette communauté qui trime dans une mine de charbon, "Japs".

Dans ce village, qui doit son nom à la gnôle , produit de contrebande qu'en fait le village avec les chinois de l'autre rive, habite Petka, un enfant "sans père", un garnement qui n'a pas froid aux yeux. Il a dû grandir vite pour survivre. Confiné à une famille, qui a peu d'amour à lui donner, pieds nus, le ventre vide, il trouve la chaleur dans un louveteau ramassé dans la steppe, qu'il cache dans la grange de ses grand-parents, avec leurs chèvres (!). Ce sacré gamin fume et discute avec le lieutenant chef du camp, cherche Hitler disparu de Berlin, avec son pote Valerka, près de la rivière , (des fois on ne sait jamais, il aurait pu atterrir par là)......et chaque soir se pointe à la gare pour voir passer avec béatitude les convois militaires, qui parfois s'arrêtent. Il rêve d'une mort à la guerre.



Dans le camp de prisonnier, un prisonnier, médecin japonais , Miyanaga Hirotaro soigne tout le camps,prisonnier, soldats...sans exception,avec des herbes qu'il cueille dans la steppe. Il survie grâce à sa passion pour ces herbes et l'écriture. Il écrit et dessine dans un cahier, l'histoire de ses ancêtres à travers rites et coutumes de l'époque, pour ses fils restés à Nagasaki, que nous aussi aurons le loisir de lire.



Petka et Hirotaro, deux univers, deux personnages qui n'ont strictement rien en commun, ni l'âge, ni la culture, à part la proximité et la vie misérable et dure qu'ils mènent.Et pourtant.......une rencontre "magique".

Non, ce n'est pas un conte..........



La prose de Guelassimov , dont le mérite est sûrement dû en partie à l'excellente traduction est magnifique. La nature sauvage, la survie dans la steppe dans la misère, l'univers foisonnant tragique des deux protagonistes et le burlesque qui fait parti intégrante de la vie quotidienne du village et du camp, nous donne un récit épique, dense, pleine de poésie et surtout beaucoup d'humour.

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Purextase

Aïe Tolian !

Une mère, la Nikolaïevna craint comme la peste par son entourage y compris famille proche ,

Un père tchétchène qu'il aime, vite remplacé par son père biologique ,capitaine des RVSN( Les forces des fusées stratégiques de la Fédération de Russie ) que personne n'aurait voulu avoir comme père, qui refait surface pour la première fois sept ans après sa conception,

Un frère , tout son opposé mais avec lequel il est comme cul et chemise pour le meilleur et le pire,

Des potes aux surnoms irrésistibles pour lesquels il est toujours prêt à se sacrifier,

Et une vie qui ne manque pas de pep dans un contexte de violence, drogue , alcool, ….et de MUSIQUE , et c'est cette dernière qui le sauvera.

De Rostov-sur-le-Don à Dortmund, de 1990 à 2010 l'étonnant parcours d'un célèbre rappeur , dont le passé fait resurface à la suite d'une rencontre inattendue, celle d'une certaine Maïka avec qui il gazouillait dans le temps…..et au coeur duquel se niche une histoire d'amour pas comme les autres,

« Je sais, il y en a qui aiment aimer selon leurs moyens,

Mais là c'est un amour à faire exploser un putain de coeur.

Tu es à côté de moi... c'est la plus purextase !

Tu es à côté de moi… c'est la plus purextase !

La plus Purextase !



C'est le deuxième livre de Guelassimov que je lis, et à vrai dire très surprise, de par le style , le ton , et le sujet très différent du premier lu , « Les dieux de la steppe », une plongée historique dans la Sibérie de l'après-guerre, décrite avec beaucoup de poésie . Même s'il y a l'humour ravageur en commun , ici on s'approche un peu plus du style violent de Zakhar Prilepine , un autre auteur russe que j'apprécie aussi beaucoup bien que l'oeuvre de ce dernier soit plutôt asphyxiante tant elle est chargée de haine, de mépris et de dérision comme l'asséne aussi Guelassimov. Une prose énergique, faites de phrases courtes, où malgré la violence, la tendresse pour ses personnages et l'humour qu'il emploie comme une arme pour résister à l'horrreur, en font un livre jubilatoire. L'auteur alterne magnifiquement l'inhumain et l'humain ne laissant pas de place au désespoir dans un pays pourtant ravagée par la misère, la détresse , l'absence de perspectives à plus ou moins long terme.

Beaucoup aimé !



“…. je me suis dit que la vie en soi ne méritait pas qu'on se casse le cul pour elle. Elle n'acquiert une véritable valeur que lorsque tu commences à piger les choses. Quand tu piges ce qui te rend heureux, ce dont tu te moques, ce qui compte pour toi et pourquoi exactement — comme autant d'items sur une liste —, tu as parfois envie de te pendre. Seules ces choses, si tu les as pigées, font que ta vie mérite d'être vécue.”

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La Soif

Un petit livre pour une soif immense et un feu inextinguible…



Kostia boit, c'est peu de le dire…Il bois à la Boris Vian, pour oublier ses emmerdements, dès qu'il a des loisirs, pour être soul, pour ne plus voir sa gueule, sans y prendre plaisir, surtout pour pas se dire qu'il faudrait en finir.



Kostia boit, pour oublier les horreurs de son service militaire en Tchétchénie dont il est revenu le visage monstrueusement brûlé, il boit pour ne plus voir l'attaque de son tank à la grenade par les boeiviki, attaque après laquelle on l'a considéré comme mort d'où l'importance de la brulure, il boit pour oublier les yeux en soucoupes volantes des enfants désormais horrifiés par sa trogne.



« J'ouvre la bouche. Sur le visage de Pacha une expression d'horreur. Il éteint le feu sur moi à mains nues. Je veux fermer les yeux, mais je n'ai plus de paupières. Elles ont brûlé ».



Kostia boit pour oublier son père qui l'a laissé pour une autre femme, plus jeune et plus belle que sa mère, il boit pour oublier le nouveau compagnon de sa mère, Edouard Mikhaïlovitch, qui le dénigre, il boit pour oublier ce peintre raté Alexandre Stépanovitch, directeur d'un établissement scolaire, qui l'avait pris sous son aile, impressionné par ses talents de dessinateur, père de substitution qui lui avait enseigné deux choses : boire de la vodka sans simagrées et ouvrir ses yeux au monde pour mieux le peindre. Même lui va le laisser.



« Ce qui me plaisait chez lui, c'est qu'il ne buvait pas sa vodka comme les autres. Mon père restait toujours un long moment debout, son verre de vodka dans une main, un verre d'eau dans l'autre. Il se préparait, se mettait en condition. Puis il avançait ses lèvres en cul-de-poule, fermait les yeux à demi, et l'ingurgitait lentement. Edouard Mikhaïlovitch, lui, avait toujours des sortes de spasmes, comme si on lui avait mis une grenouille dans le cou. le directeur lui ne buvait jamais sa vodka dans les petits verres habituels. Il se la versait dans un bon gros verre et l'avalait comme si c'était effectivement de l'eau. Comme s'il avait soif, tout simplement. En homme qui a la gorge sèche ».



Mais le bidasse, sorti d'un coma éthylique par deux de ses camarades, camarades présents avec lui ce jour-là dans le tank, va se mettre avec eux à la recherche du quatrième rescapé de l'équipe qui semble avoir disparu…périple à travers la campagne russe et les villes russes, auprès de personnes multiples et variées que Kostia va inlassablement dessiner. Il ne cesse de dessiner, donc de voir, de comprendre, et remet de la vie là où il n'y en plus, là où il y en a guère…dessiner un bras pour remplacer celui qu'un miliaire a perdu, dessiner un homme mort au combat à un âge plus avancé avec des enfants imaginaires…dessiner pour redonner du sens à sa vie. le dessin comme rédemption pour retrouver la soif de vivre.



« A l'un je dessinais une jambe, à un autre une femme. A un troisième ses amis qui avaient été tués. A un quatrième, je faisais un enfant en bonne santé. A tous ces hommes je donnais de la vigueur, à leurs femmes de la beauté, à leurs enfants de la drôlerie ? Je dessinais ce qu'ils n'avaient pas ».



Loin d'être un éloge à l'alcool et à l'alcoolisation tout azimut comme le laisse penser les premières pages, ce petit livre dense est d'une belle humanité. Un roman initiatique qui réussit le tour de force de nous faire sourire avec émotion à la toute fin. Servies par une plume nerveuse, percutante, qui sait entremêler les souvenirs et le moment présent, ces 120 pages nous plongent dans une eau qui a la couleur, l'odeur et le gout de la vodka mais qui se révèle être une eau salvatrice à la fontaine de l'amitié et de l'art, à savoir le dessin tout en jeu d'ombres et de lumières. Un tour de force qui me donne l'envie de découvrir d'autres livres d'Andréï Guelassimov.



« Es-ce que tu as déjà vu comment tombe un rai de lumière dans une pièce sombre, par une porte entrouverte ? Au départ, il est tout étroit, et puis il s'élargit. C'est exactement la même chose pour l'être humain. D'abord il est seul, puis il se retrouve avec deux enfants, et ensuite avec quatre petits-enfants. Tu comprends ? L'homme s'élargit, comme un rayon de lumière. A l'infini. Tu as compris ? ».



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La Soif

Comment parler de ce roman ? C’est un OVNI que j’ai lu sans m’arrêter une seconde, tellement j’étais assoiffée… comme sous perfusion de vodka ou d’autre chose…



Constantin, alias Kostia, est un rescapé. Il a été laissé pour mort lors de l’accident où le tank dans lequel il se trouvait a été attaqué en Tchétchénie. Donc, c’est lui qui a été sorti en dernier, quand on s’est aperçu qu’il vivait encore. Il a été gravement brûlé, son visage est déformé et on s’en sert pour faire peur aux enfants !



Il survit grâce à la vodka, et surtout grâce à Alexandre Stépanovitch, un professeur qui a été impressionné par ses dessins, et l’encourage à persévérer. Le professeur boit comme un trou, il boit sa vodka dans des grands verres qu’il vide cul sec. Mais il transmet des conseils à Kostia, comment voir le monde, notamment. Il ne le ménage pas:



» Constantin? C’est un très beau nom. Tu dois être quelqu’un de persévérant.C’est bien. Tu es persévérant Constantin? Ou bien tu n’as de persévérant que le nom? »



C’est un peu un père de substitution, un mentor. Tellement peu d’hommes ont pu lui servir de modèle : son père est parti, il a refait sa vie ; le nouveau compagnon de sa mère le dénigre…



Il a gardé des liens avec ses camarades militaires et lorsque l’un d’eux, Serioja, disparaît, les trois autres vont se lancer dans un périple à travers les villes russes alentour. Kostia boit, roule en voiture avec eux mais dessine : un bras pour remplacer celui qu’un militaire a perdu, une famille imaginaire pour un qui est mort au combat. Il va peu à peu trouver un sens à sa vie.



L’accident en Tchétchénie aurait pu le détruire, l’anéantir, mais il a su conserver une amitié forte avec ses copains, transcender la souffrance physique et morale, dans cette Russie où la vie n’est pas simple, l’exprimer dans ses dessins, toujours en noir et blanc.



Je redoutais cette lecture, car j’avais peur de voir des hommes consommer de la vodka au litre, comme seuls les Russes savent le faire, un éloge de l’alcool. Ce livre a donc pris la poussière quelques temps avant que je ne l’ouvre car les histoires d’alcoolisme, d’alcoolisation me rebutent en général. Ce petit roman, 129 pages à peine, est d’une telle densité qu’il est un uppercut pour le lecteur, un voyage initiatique, une leçon de vie, très loin des « feel-good » à la mode aujourd’hui.



L’écriture est incisive, les phrases sont parfois lapidaires, et le style d’Andreï Guelassimov tellement percutant que j’ai envie de continuer à découvrir son œuvre. J’ai un autre de ses romans, récupéré dans une corbeille, sorte de livre voyageur, en attente lui-aussi : « Fox Mulder a une tête de cochon », recueil de nouvelles. « L’année du mensonge » devrait être bien aussi…



Un auteur à découvrir absolument.
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Les dieux de la steppe

Au début, je n'étais pas très convaincue, j'ai cru que je ne pourrais pas m'attacher à ce gamin, que je n'allais pas accrocher à cet univers rude d'où toute trace de tendresse semblait bannie, pas retrouver ce qui m'avait tant plu dans La Soif.

Je me trompais. Guelassimov nous offre un drôle de mélange doux-amer, finalement bien savoureux, de dureté du monde qu'il décrit, d'humour, d'humanité souvent assez étonnante, parfois cruelle, parfois tendre et poétique. On part du très sombre et puis on se dit comme Petka qu'on a cinq doigts à chaque main, cinq à droite pour compter les bonnes choses, cinq à gauche pour les injustices, «Si à une main il en avait eu huit par exemple et à l'autre trois, on aurait encore pu discuter», mais là, c'est clair, ça s'équilibre.

Et je l'ai beaucoup aimé ce môme, batard, va-nu-pieds, rêvant d'avoir pour père le camarade Staline, rêvant sa vie héroïque, gravant sans cesse avec son clou des gros mots sur Hitler et découvrant le coeur battant qu'à chaque mot gravé par lui les troupes russes prenaient des grandes villes.

«Enfin, bien sûr, les nôtres s'étaient battus avec acharnement et d'ailleurs, ils étaient les meilleurs soldats du monde, mais Petka, à sa façon, n'y était pas pour rien.»

Et puis j'ai été complètement sous le charme d'Hirataro, un personnage que j'ai trouvé extraordinaire. Le prisonnier japonais a avec le monde, la vie et ses injustices une relation très particulière. Il est très décalé, avec une belle dimension étrange et poétique, du fait d'abord qu'il s'est considéré pendant longtemps comme mort. Il s'était mis à rédiger son journal pour envoyer depuis le royaume des morts un message aux vivants. Mais l'écriture a sur lui un effet secondaire non négligeable puisqu'elle réveille son intérêt pour la vie et le pousse à prêter une attention nouvelle à ce qui l'entoure.

Bref, j'ai adoré la façon dont Guelassimov nous embarque en compagnie de ces deux-là dans ce lieu bien étrange pour nous, Razgouliaevka, un trou paumé dans les steppes de Transbaïkalie, tout près de la Chine. Un roman étonnant, qui nous rend si proches des personnages si différents et qui transfigure avec tant de générosité et d'originalité un univers âpre et déprimant au départ que j'en ressors émerveillée.
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La Soif

Comment font ces russes pour rester lucides après des litres de vodka ? Comment font ces russes pour rester amis après une trahison ? Comment font ces russes pour ne pas sombrer dans la folie civile au sortir de celle de la guerre ?

La réponse à la troisième question est dans l'amitié et la vodka, au moins dans ce court roman, absolument formidable, et tant pis si les non-russes ne peuvent pas tout comprendre. Outre la construction complexe où les histoires s'entremêlent et finissent par s'éclairer mutuellement, j'ai aimé ces morceaux d'enfance recréés, cette possible rédemption par l'amour de l'enfance et le dessin, malgré les trahisons et les mesquineries.

Tous les destins ne sont pas tragiques dans ce récit, certains sont seulement désespérants, et banals comme les douleurs de la vie ordinaire. Mais le narrateur Kostia (Constantin), blessé irrécupérable de la vie et de la guerre, m'a donné une sacrée leçon d'espoir. Il finit par comprendre la leçon reçue dans son enfance : oui il sait voir le monde, ses dessins le prouvent. Et pareillement Andreï Guelassimov nous donne sur le papier une vision du monde, complexe, perturbante, mais prenante et utile.

J'admire le geste de la collection Babel, offrant ce petit livre jaune pour deux autres volumes achetés, quelle belle idée pour faire connaître Guelassimov, qui se rend indispensable en 120 pages. Merci.
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La rose des vents

Un roman historique qui m'a fait découvrir «le Grand Jeu», «le Tournoi des ombres», une espèce de guerre froide au XIXème siècle, où s'affrontent les impérialismes de la Russie et de l'Angleterre en Asie. D'un point de vue russe qui plus est, qui va bien davantage remettre en cause l'attitude de la Perfide Albion que ce que j'ai pu lire sur le sujet en français. Pour être tout à fait franche, malgré son intérêt, vu mon ignorance sur l'histoire de ces luttes d'influence, j'ai parfois été larguée par les réflexions géopolitiques, de Semenov en particulier, que j'aurais aimé plus brèves.

Remarquez, le protagoniste, Nevelskoï, est assez largué aussi au début et j'ai plutôt aimé cet effet d'étrangeté, d'avancée dans le brouillard, quand le mystérieux Semenov le promène à sa suite sans lui donner d'explications.

Mais par la suite, le roman est moins étonnant que La Soif ou Les dieux de la steppe que j'avais adorés, et s'inscrit dans la tradition du récit de voyage. Il n'en aborde pas moins des sujets intéressants, avec par exemple cet ancien bagnard, Gouriev, qui veut fonder avec Nevelskoï un royaume qui n'aurait rien à voir avec celui du tsar - «Ils ne savent que boire le sang des paysans là-bas.» Mais de la même façon que, selon lui, l'ancien serf était considéré comme un animal par le propriétaire de la terre où il travaillait, il maltraite les habitants de l'estuaire du fleuve Amour, les Guiliaks, qui sont à ses yeux des sauvages.

Et puis, pour ceux qui seraient sujets aux accès de rage, on y apprend un truc bien utile. Si vous êtes tenté d'étrangler quelqu'un, prenez prudemment cet individu par un bouton de sa redingote et tournez-le cinq fois dans un sens et cinq fois dans l'autre. Pendant que vous comptez, pour ne pas effectuer un sixième tour qui serait fatal au bouton, votre colère reflue, et vous vous épargnez bien des soucis.

Malgré cette information d'une si grande utilité qu'elle devrait, me semble-t-il, être enseignée à l'école, le roman a quelque chose de frustrant. Il met en place un personnage intéressant et très prometteur, Katia, décalée comme on aime dans le milieu où elle évolue, consciente de son étrangeté mais pourvue d'une force intérieure séduisante. Et pof, on la perd de vue, pour ne la retrouver que dans l'épilogue. Bref, on nous sucre salement des scènes bien appétissantes qu'on nous avait placées dans notre horizon d'attente, et ça, malgré toute l'admiration que j'ai pour Andreï Guelassimov, c'est dur à pardonner. Allumeur va!

C'est malgré cela un bon roman, mais qui aurait été bien meilleur si les relations entre ces personnages avaient été développées de façon plus satisfaisante. Il y a un petit goût amer d'escamoté dans ce déséquilibre de la construction du récit.
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La Soif

Un court roman comme je les aime !

Les blessures physiques, morales et esthétiques de la guerre, la guerre elle-même, l'amitié forte qui réunit ces rescapés, la vodka bien entendu qui étanche difficilement la soif - il en faut des quantités et enfin le salut par le dessin.

Le protagoniste principal est attachant, fortement défiguré par une grenade lors de la guerre de Tchétchénie, il permet à sa voisine de l'utiliser pour se faire obéir de son enfant. Son don du dessin a été découvert par son directeur d'école qui lui apprendra à "voir" ce qui l'entoure

C'est le dessin qui lui donnera un but alors que tout aurait pu être ravagé par son handicap.

C'est le dessin qui lui permettra de vivre.

J'ai beaucoup aimé !
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Les dieux de la steppe

Un roman plein de vitalité à l'image de Petka qui en occupe le centre. Ce gamin vif et futé, petit polisson qui observe, cherche, questionne, nous entraîne à sa suite dans ses rêves et ses cabrioles pieds nus à travers le village de Razgouliaevka situé en Sibérie orientale près de la frontière chinoise ; village qui "doit indirectement son nom à la gnôle puisque sa racine est issue du verbe "gouliat" dont un des sens est "faire la bringue". La vie de ses habitants retracée à travers Petka y oscille entre bouffonnerie et tragédie.

S'il est solitaire et se sent très proche du louveteau qu'il a recueilli, sa curiosité l'entraîne vers bien des aventures où il prend des coups et en donne. Parmi les enfants, Il a un ami de son âge Valerka, un ennemi Lionka l'Atout qui mène les autres gamins du village. Quant aux adultes il adore les berner que ce soit la grand-mère Daria et ses chèvres, le grand-père Artiom qui va se fournir en alcool de contrebande en Chine avec sa carriole tirée par sa jument la "Petite Étoile" ou les gardes du camp de prisonniers japonais. Il s'y fera un autre ami en la personne d'un médecin japonais Hirotaro qu'il ira chercher pour sauver son ami Valerka.

La guerre occupe également une grande place dans l'imaginaire de l'enfant, qui voudrait devenir un héros, et dans la vie du village déserté par les hommes. Une guerre où ses oncles et son père inconnu sont partis et qui n'est pas tout à fait finie dans ces terres des confins même si l'on est en 1945....

" A Razgouliaevka, les femmes se battaient toujours avec les hommes. (...) Mais lorsque la guerre débuta et que les hommes furent envoyés au front, le silence s'instaura dans les cours. Personne ne bondissait plus hors de chez lui en sous-vêtements, ne hurlait plus comme un enragé au milieu de la nuit, ne se cachait plus dans les granges. Les haches, les fourches, les pelles et les râteaux étaient fastidieusement utilisés à bon escient. Personne ne les brandissait au-dessus de sa tête, ne les jetait chez les voisins par-dessus la palissade. La vie s'était arrêtée.

Cela, il est vrai, jusqu'à ce que les grands-pères et les grands-mères se souviennent qu'eux aussi étaient "maris et femmes" et que les lois, en amour, étaient les mêmes pour tous.

Et alors, les vieux se mirent peu à peu à se bagarrer." p 38-39



Un beau livre où se croisent le loup et l'alouette, animaux qui sont en accord avec Petka qui vit de manière instinctive en suivant ses intuitions mais sait aussi composer avec la réalité. La légèreté de l'oiseau l'habite quand il rêve de voler et de voir le monde d'en haut et pour ce faire grimpe sur le toit de la grange de ses grands-parents. Ces deux animaux totems vont faire se rejoindre intimement Hirotaro le médecin japonais et l'attachant petit va-nu-pieds russe dans une belle leçon de vie et de poésie ...

"Hirotaro s'assit à la table et, à la lumière de la lampe que grand-père Artiom tenait au-dessus de sa tête, il écrivit directement sur un dessin un autre haïku.

Une alouette dans les hauteurs...

Et hier encore, en folâtrait

Une autre au même endroit" p 330

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Les dieux de la steppe

Ce récit se déroule en 1945. Si la seconde guerre mondiale s'achève en occident, elle ne touche pas encore à sa fin dans ce petit village de l'extrême orient soviétique où bon nombre de prisonniers triment encore dans des mines et bon nombre de soldats sont encore au combat.



Les soldats. Il y a ceux qui partent dans des trains bondés chargés d'engins militaires qui n'en finissent pas de faire rêver le jeune Petka. Et ceux qui reviennent, médaillés, estropiés - les deux parfois - tenant debout grâce à la gnôle qui coule des gorges aux veines. Petka, le bâtard ou fils de pute du village, qui fait l'objet des pires violences de la part des gamins, mais aussi des adultes, espérait rejoindre les premiers ; mais ce sont les seconds qui vont débarquer dans sa vie...



"si Petka avait eu à décider, il n'aurait pas pris Mitka Mikhaïlov comme père. Mais sa maman, même si on lui avait donné le choix entre cinq mille autres, il l'aurait choisie".



Beaucoup de violence, directe ou sous-jacente, dans les dieux de la steppe. Petka, sa mère, le jeune Valerka, son ami à la santé fébrile et bien d'autres la subissent, mais presque de manière "naturelle" comme si c'était la norme. La faim, le froid, la cruauté font partie intégrante de leur vie. Et la guerre n'y est pas forcément pour grand chose.



"Il n'y avait pas beaucoup de cafards, parce qu'ils vivent là où il reste au moins quelque chose à avaler, et Valerka et sa maman ne laissaient rien dans la maison. C'est tout juste s'il y avait assez à manger pour eux. Ils ramassaient les miettes dans le creux de leur main et devant les cafards affligés, ils se les fourraient soigneusement dans la bouche. Comme pour le charbon à la mine. Un, deux et hop dans le wagonnets".



On suit parallèlement à l'histoire de Petka, la vie d'un des prisonniers japonais qui travaille à la mine : Hirotaro. On devine que ces deux-là vont finir par se rencontrer, mais quand ? La raison, on la devine, mais Andreï Guelassimov prend son temps pour installer ses personnages, leur vie et nous ouvre peu à peu à la découverte de ce que certains appellent l'âme russe, entre poésie, douleur, abnégation et résistance...



"tu ne peux pas connaître ton destin.

Peut-être replieras-tu tes ailes au milieu des steppes..."



Peut-être...
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La Soif

La Soif, ce pourrait n’être que la soif de vodka pour noyer dans l’alcool les souvenirs de son service militaire en Tchétchénie qui empoisonne Constantin, Kostia, mais c’est aussi la lente, douloureuse mais belle remontée vers la vie, la soif de vivre qui va lui être progressivement redonnée grâce à son envie de dessiner. 


Ce goût du dessin qui vient de l'enfance, développé à l’école, grâce au directeur qui s’est rendu compte de son don et le favorise, va renaître au contact des enfants de son père qu’ils retrouvent à Moscou lorsqu’il se lance avec ses amis Pacha et Guena à la recherche de Sérioja celui qui les a tirés de leur blindé en flammes. 


Par étape, après s’être amusé avec ses demi-frère et soeurs, émerveillés qu’ils donnent naissance sur le papier à tous leurs désirs, il va continuer à extraire de lui-même et faire surgir sur le papier les souvenirs obsédants et cauchemardesques de Tchétchénie. Le Directeur de l’école, lui avait d’ailleurs fait don d’un livre « les Caprichos de Goya » composé de gravures satiriques sur la société espagnole et aussi de gravures fantastiques où s’agitent des êtres étranges. Les visages, les corps y apparaissent déformés. Dans « La Soif » il y a aussi la vision du visage de la Russie actuelle mais tout est de l’ordre du constat, Kostia ne prononce aucun réquisitoire, ne se plaint pas, il montre, raconte par bribes, se souvient et le lecteur le suit sans l’interrompre car ce livre on le lit d’une traite et la fin soulage et redonne espoir.

Le récit de Kostia débutait sur l’appel au secours de sa voisine Olga lui demandant de venir faire peur à son petit garçon Nikita : « Excuse-moi de toujours t’embêter, me dit-elle alors. C’est que… il n’a peur que de toi… Moi, il ne m’obéit plus du tout. » et il se termine par le retour vers ce même petit garçon qui lui dit malicieusement après qu’il l’ait mis au lit :

— Moi je sais.

— Qu’est-ce que tu sais ?

— Je sais bien.

— Mais qu’est-ce que tu sais ?

— Que tu n’es pas méchant. C’est juste ta figure qui est comme ça.

Kostia, grâce à ces enfants placés sur sa route rejoint sa propre enfance et va retrouver son visage en retrouvant la capacité de le dessiner après que Nikita se soit endormi.

un livre parfois éprouvant mais au final émouvant et beau

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Rachel

Sviatotoslav Semionovitch Kaufman , professeur de littérature à l’université , cinquante- trois ans ,mi- juif, mi- orthodoxe , difficile quand on est né en Union Soviétique .... se remémore :



D’abord doctorant spécialiste de Scott Fitzgerald.

En même temps il doit travailler comme infirmier dans un hôpital psychiatrique , sa vie est rythmée par trois mariages —— trois époques——trois femmes ,——deux infarctus ——Loubia,



——-sa Rachel , puis Véra avec laquelle il aura un fils Volodia , et Natalia ——une jeune étudiante ...trois versions de lui même .

Il vit pleinement les années 60 où les jeunes Soviétiques découvrent le jazz, le rock et Hemingway .

C’est à ce moment - là qu’il rencontre sa deuxième épouse Véra.



Les souvenirs défilent , une narration touffue, ambitieuse, pétrie de références philosophiques , littéraires, bibliques, cinématographiques .

L’on côtoie au gré d’un fil narratif dense , semblable à des poupées Russes, Hemingway, Platon , Homère, Les sorcières Skaspeariennes, William Faulkner et bien d’autres écrivains et poètes russes notamment Pouchkine...

Heureusement les trois femmes nous donnent un semblant de repères narratifs.



Des réflexions à propos de la vieillesse , une ironie féroce concernant «  la grandissime culture américaine » , des théories psychiatriques, les nouvelles technologies , l’art , la peinture tressent cette narration en « miroir » trop touffue , un peu à côté de la plaque ...dont on sort fatigué à force de chercher le fil ...

C’est la première fois que je suis un peu déçue par la jeune littérature russe ....

Mais ce n’est que mon avis, tout relatif....









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La Soif

Je n'ai pas choisi de lire ce roman en fonction de l'actualité, je l'avais depuis un certain temps déjà et le hasard, s'il y en a un, me l'a fait sortir de ma pile. Le contexte actuel donne à cette lecture un ton particulier.

Kostia est un jeune soldat revenu de Tchétchénie défiguré suite à l'explosion du char dans lequel il se trouvait. Pour faire face à cette tragédie, il boit de façon complètement démesurée. La vodka à outrance devient son quotidien.

Avec deux de ses camarades Guena et Pacha qui étaient avec lui en Tchétchénie, il va aller à la recherche de Serioja qui a disparu. Ce dernier fut celui qui l'a sauvé en le sortant du char.

On va voir comment Kostia reprend goût à la vie à travers le dessin. On est un peu le témoin d'une renaissance. " A l'un, je dessinai une jambe, à un autre une femme. A un troisième ses amis qui avaient été tués. A un quatrième, je faisais un enfant en bonne santé. A tous ces hommes je donnais de la vigueur, à leurs femmes de la beauté, à leurs enfants de la drôlerie. Je dessinais ce qu'ils n'avaient pas. "

Le thème est original et fort mais je n'avais pas l'état d'esprit pour être assez réceptive à ce cheminement. Je n'ai pas réussi à entrer en phase avec le style et ma lecture ne fut donc pas très agréable. Je le regrette et suis convaincue que ce livre mérite bien mieux que mes pauvres étoiles.
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Le froid



Le froid est un roman construit en trois actes et un entracte comme une pièce. C’est que Filippov notre héros est metteur en scène de théâtre et de cinéma, il doit prendre l’avion pour sa ville natale, quelque part en Yakoutie, dans le grand nord sibérien où règnent le noir, un froid avoisinant les moins 40 et un épais brouillard occultant et givrant. Filippov doit rencontrer son assistant et récupérer des dessins pour son scénario, c’est l’affaire d’un aller-retour. Cependant La situation dégénère quand la ville tombe en panne de chauffage, la panique s’empare alors des habitants.



Guelassimov nous guide dans un récit alcoolisé, embrumé, par la vodka vers des situations loufoques, rocambolesques, nous pénétrons dans un « monde borderline » où la frontière entre réel et irréel est floue, on est en quelque sorte en « delirium tremens » ! Nous découvrons la pratique du « zapoï » notre héros boit, boit… jusqu’à tomber raide, les esprits se brouillent alors, et le récit nous plonge dans la perplexité.

Nous apprenons que la femme de Filippov l’a quitté et qu’elle est décédée, peu de temps après, dans de troubles circonstances. Filippov est un homme pessimiste et angoissé, se saoule-t-il de chagrin ? A-t-il quelques remords ? Un passé trouble ? Guelassimov nous fait pénétrer dans la conscience de Filipov par le truchement du « diable du vide » son compagnon, guide et conseiller.

Ce récit catastrophe dévoile les travers et comportements de l’âme humaine devant l’adversité. Nous sommes dans la pure tradition russe. Il y a beaucoup de Boulgakov comment ne pas le reconnaître ?

Guelassimov se met à distance des événements et prend un ton ironique, son humour est fin et incisif pour notre plus grand plaisir.

J’ai adoré cette œuvre vive et enlevée et même poétique qui assène de sacrées vérités sur la nature de l’homme et les conditions de vie en Russie.

J’avais beaucoup aimé « la soif », je rajoute « le froid » comme « coup de cœur ».

A lire absolument et auteur à suivre.

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Les dieux de la steppe

En 1945, la guerre touche à sa fin. Dans les steppes de Sibérie, un petit village désolé survit, dont les habitants sont assez rustres. C'est là que vit Petka, entre une mère très effacée et des grand-parents qui le rudoient. Ce petit garçon sans père est rejeté par les autres et essuie en permanence brimades et insultes. Ses principaux tortionnaires sont une bande de gamins brutaux qui le poursuivent pour le rosser. Loin de s'apitoyer sur son sort, Petka encaisse les coups et réinvente sa vie. Son imaginaire, nourri par la guerre, est peuplé de chars d'assaut et de combats héroïques. A son seul ami, un enfant maladif, Petka montre le louveteau qu'il vient d'adopter et qu'il fait passer pour un chiot.



Près du village, des militaires soviétiques dirigent un camp de prisonniers japonais qu'ils font travailler dans une mine.

Parmi les prisonniers de guerre se trouve Hirotaro, un médecin japonais, qui a eu l'opportunité d'être libéré mais a préféré, par sens du devoir, rester dans le camp. C'est un vieil homme cultivé, exempt de haine, qui soigne aussi bien les russes que ses compatriotes. Issu d'une lignée de samouraï, il écrit en cachette l'histoire de sa famille sur un cahier, à l'intention de ses fils. Il espère que ce cahier leur parviendra un jour.



Petka est un enfant exalté qui projette de devenir un grand héros soviétique en mourant pour sauver sa patrie.

Hirotaro est un homme âgé qui s'évertue à transmettre son héritage car il est convaincu qu'il ne survivra pas à la guerre.



Les tribulations de ces deux «morts en puissance» oscillent entre le tragique et le cocasse.



La confrontation de leurs univers respectifs, pourtant si différents, liera Petka et Hirotaro l'un à l'autre, dans un dernier chapitre poétique et fabuleux.
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La rose des vents

Diantre, quelle odyssée !



Ce livre est à mi-chemin entre le roman historique et le roman d’aventures, avec quelques faux airs de roman d’espionnage.



Il se déroule à la louche entre 1845 et 1849 et relate le(s) périple(s) du lieutenant de la Marine impériale russe Guennadi Ivanovitch Nevelskoï (1813-1876).



Au début du roman, nous le découvrons à son retour du Portugal accompagné de Konstantin, le deuxième fils du tsar Nicolas 1er, dont il est aussi le précepteur. Son ambition est alors d’accéder à la charge de commandant de la frégate Pallada. Evidemment, tout ne va pas se passer comme il l’avait envisagé…



Les spéculations sur l’existence d’un détroit à l’embouchure du fleuve Amour, aux abords de l’île Sakhaline, aux confins de la Russie et de la Chine, attisées par le mystérieux Semenov, semblent devenir d’une actualité brulante. (A cette époque Sakhaline, sous protectorat de l’empire Qing, était alors considérée comme une péninsule et l’existence d’un détroit, qui plus est navigable, n’était que présomptions). L’officier Nevelskoï se laissera-t-il convaincre de prendre part à cette expédition hasardeuse sous haute tension stratégique au risque de briser sa carrière ?



En vérifiant les hypothèses suggérées sur l’étymologie du nom du fleuve « Amour » (Амур), j’ai été amusée de constater ce mot puisse être issu d’un dialecte local bouriate signifiant boueux ou boue. Car c’est effectivement en eaux troubles que nous fait louvoyer Nevelskoï, entre coups du sort, coups de dés, coups de vent, entre ennemis intérieurs et ennemis extérieurs, au gré de la cabale, des intérêts financiers et de l’honneur.



La première partie (qui représente tout de même plus d’un tiers du roman sur les quatre que comportent le roman) est un peu longue. Les tergiversations de Nevelskoï sont un peu lassantes. En revanche, elle a le mérite de poser le contexte géopolitique international de l’époque et c’est tout à fait passionnant. Quoique peut être pas suffisamment développé. L’escale à Londres est particulièrement savoureuse car elle pointe notamment les différences culturelles entre la Russie et les Britanniques. D’autres thèmes sont également évoqués tels que le servage, la condition des femmes (du moins celle des jeunes filles), les us et coutumes de la navigation. Mon principal regret concerne la fin, trop abrupte selon moi. En fait, je n’ai pas saisi l’intérêt d’avoir développé autant certains personnages secondaires, alors que d’autres que je m’attendais à revoir à un moment donné, pschitt… évaporés !



En tout cas, c’est une lecture attrayante, teintée d’un humour discret et un poil ironique. Dans ce Far East slave, qui prend parfois des allures de Far West, le danger ne se trouve pas nécessairement où on l’attend.



Grand merci aux éditions des Syrtes et à l’opération masse critique Babelio de m’avoir permis de découvrir cet auteur qui me lançait des coups d’œil espiègles depuis quelques temps.

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Fox Mulder a une tête de cochon : Et autres n..

Andreï Guelassimov nous propose dans ce recueil cinq nouvelles. La première, qui est le titre du livre, est de loin la plus longue et nous entraîne dans une classe de terminale, dans une rivalité entre une professeure, ancien régime qui fait régner une discipline de fer, allant jusqu’à cacher par exemple la carte des positions russes pendant la guerre, pour saper le travail d’une plu jeune. Outre ces rivalités, on a des histoires d’amour balbutiantes entre des étudiants, ou entre l’un d’eux et une des profs qui va s’attirer des ennuis.



Ceci permet à l’auteur de s’en donner à cœur joie entre nostalgiques de l’ordre soviétique et les autres, à l’esprit plus ouvert…



Dans la deuxième, « Accomplis ce miracle Seigneur », on se trouve face à un couple qui ne s’entend plus très bien, et à la suite d’une soirée chez des amis où ils se rendent à contre-cœur, le mari qui a bu emboutit une voiture et se trouve soumis à un chantage, avec bandes rivales, mafia…



« Combien d’années de sa vie, qui ne reviendront plus, peut-on passer sur des chaises que l’on n’a pas choisies…«



Avec « Jeanne » on aborde de manière touchante mais sans complaisance, le statut des enfants nés avec un déficit moteur, la grossesse non voulue à l’adolescence et le père qui se défile dès qu’il peut. Et que dire de l’attitude des médecins…



« Grand-mère par adoption » est ma préférée : le statut des femmes dans la société, la nécessité d’épouser un homme capable de les faire vivre, à travers l’exemple de la narratrice : elle était mariée à Valery qui travaillait dans les sous-marins et qui a un jour disparu lui laissant leurs deux filles sur les bras. Elle a trimé toute sa vie. Sa fille aînée a fait un bon mariage mais elle vit loin d’elle et elle ne connaît ses petits-enfants qu’en photos. La deuxième s’est mariée très jeune avec un gros fainéant qui oublié de dire qu’il avait déjà été marié et avait une fille de ce mariage… Et qui va s’en occuper alors qu’elle bosse à la demande le jour, ou la nuit, tout en s’occupant de la maison pendant que le couple se prélasse ???



Dans la dernière « L’âge tendre » l’auteur nous propose le journal d’un ado, qui ne sait pas très bien où il en est, dans ce monde d’adultes qui ne lui plaît guerre. Il a du mal à grandir et trouver sa place…



J’ai retrouvé avec plaisir, l’humour noir d’Andreï Guelassimov, son analyse sans concession de la société russe, de sa violence, sa mafia, sur le couple, mais aussi les moments de poésie qu’il offre au lecteur, aux moments les plus sombres. J’ai aimé ses portraits de femmes, obligées de se tuer au travail, ou de se heurter à l’administration face au handicap, la notion de l’amour maternel qui est là ou qui ne l’est pas…
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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La Soif

Ce court récit est d'une lecture d'un abord facile par le style d'écriture, fluide et plutôt lapidaire, mais compliquée par les choix narratifs de l'auteur. Tout au long du récit le lecteur découvre à la fois l'histoire passée de Kostia, son enfance, son accident lors d'une embuscade en Tchétchénie et une histoire du présent, la recherche d'un de ses camarades survivant de la même embuscade que lui. Ils étaient quatre survivants, l'un d'eux, Sérioja, semble avoir disparu sans laisser d'adresse et les deux autres poussent Kostia à se joindre à eux pour partir à sa recherche. La narration est remarquablement maîtrisée.

Cela n'a l'air de rien, mais pour Kostia, gravement brûlé et défiguré, devenu alcoolique, qui ne sortait plus guère de chez lui, qui n'avait de relation avec sa voisine que quand elle avait besoin de faire peur à ses enfants, le périple alcoolisé à la recherche de Sérioja devient un parcours initiatique vers un retour à une vie « normale », de redécouverte de son goût pour le dessin et par là, de l'observation du monde autour de lui avec un autre regard, pour finalement retrouver un sens à sa vie et la soif de vivre.

Un très beau roman plein d'humanité, très dur et en même temps plein d'émotions. Dense, intense, et très réussi.
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La Soif

Kostia n'a pas réussi à caser toutes les bouteilles de vodka dans le frigo. Cette saloperie d'appareil que sa mère lui a laissé avant de partir. Il est là tout seul avec sa gueule défigurée. La voisine vient le chercher pour faire peur à son petit garçon qui ne lui obéit pas et il en profite pour lui refiler son dernier miroir. Si seulement Sérioja ne s'était pas trompé et ne l'avait pas laissé cramer dans le véhicule blindé. Il pensait qu'il n'y avait plus rien à faire pour lui. Il avait d'abord dégagé ceux qui bougeaient encore. Pourquoi lui ? Kostia est en colère, s'enferme avec ses bouteilles, se souvient de son père au visage bronzé qui les a abandonnés, des femmes aux cheveux longs qui jouaient au volley-ball, de sa mère qui s'est mise avec un gros beauf, du directeur de l'école qui a compris qu'il était doué pour le dessin mais qui l'a abandonné lui aussi. On tambourine à la porte. Ses deux camarades l'impayable Guena la grande gueule et Pacha le taiseux ont besoin de lui pour retrouver Sérioja qui les a tirés de leur blindé en flammes...

Ce court roman est remarquable, pas du tout larmoyant. La nouvelle est rude et tendre, pleine de cruauté mais aussi d'humour. Tous les personnages sont intéressants et attachants. J'ai beaucoup aimé la construction elliptique, on passe sans transition du présent au passé, de la réalité aux réminiscences avec des motifs qui reviennent régulièrement : la jalousie, les enfants, les filles aux longs cheveux. Et puis c'est un livre optimiste. Sachez-le. A la fin Kostia aura trouvé la soif de vivre.

Je remercie l'ami Krzysvanco qui m'a donné envie de lire ce livre.
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Fox Mulder a une tête de cochon : Et autres n..

Dans ce livre de 190 pages, Acte Sud publie cinq nouvelles De Andreï Guelassimov dont c’est la première parution en 2001. Nous retrouvons :

- Fox Mulder a une tête de cochon

- Accomplis ce miracle, Seigneur

- Jeanne

- Grand-mère par adoption

- L’âge tendre

Guelassimov situe ces nouvelles dans la Russie contemporaine où la vie est rude et la violence quotidienne. Son pessimisme nous accable, son regard sur l’homme est noir : « Les gens n’attendent jamais qu’une chose : entuber quelqu’un d’autre dans les grandes largeurs. »

Guelassimov narre des sujets graves. Son écriture est fine et concise. Dans ses récits pointe un humour âpre et badin qui semble être une arme pour défier les problèmes :

- Un professeur a une liaison avec son élève dans le lycée c’est un chamboulement, une tornade, qui bouleversent l’école et ces amours clandestines.

- Un couple, en pleine désillusion, se détruit tandis que leur jeune fils cherche ses repaires.



Cette violence côtoie aussi la générosité et la tendresse.

-la vieille Octobrine Mikhaïlovna, qui tente d’apprivoiser un jeune rebelle et révolté.



-Enfin Jeanne est une autre belle personne elle veille avec amour et dévouement sur ses enfants handicapés.

Dans ses premiers récits il ne règne pas cette ambiance onirique, pleine de bizarreries que l’on trouvera par la suite dans la soif et surtout le froid.

Auteur à lire







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