Citations de Anne Tyler (274)
Et c'est depuis ce temps que les pastilles de marrube eurent pour Justine le goût obscur, familier et vertueux de l'amour et du chagrin qui lui avait étreint la gorge en ce premier jour d'incursion dans le monde extérieur.
Elle mangeait elle-même extrêmement peu, elle chipotait.Cela impliquait une sorte de critique à l'égard de ceux qui avaient le malheur d'avoir faim ou qui s'intéressaient à ce qu'il y avait dans leur assiette.
Il devrait y avoir un langage à part, pensait-elle, pour les mots qui sont plus vrais que les autres, pour les mots chargés de la parfaite, de l'absolue vérité.
Le sentiment de déchirement semblait s'être accentué, déployant au plus profond d'elle ses contours déchiquetés.
La distance, voilà le secret : la séduction de la femme distante et mystérieuse dont l'aura n'a pas été entamée par les incessantes petites abrasions du contact quotidien.
Elle avait quatre-vingt sept ans -une petite poupée en feuille de maïs couleur de paille qui bruissait sèchement.
Pauline ne doutait jamais qu'elle pourrait donner un tour plus convenable à l'existence des gens
Michael remarqua que son visage se composait d'une série d'ovales - un ovale contenant deux yeux marron à l'ovale allongé, une bouche ovale où il manquait à la lèvre supérieures ce creux qu'on rencontre chez la plupart des gens, et l'ovale de son crâne aux cheveux recourbés autour de la nuque. Jamais encore il n'avait songé à quel point il est apaisant de contempler un ovale.
Marcher à coté d'un petit enfant était aussi délicat que de recueillir de l'eau dans le creux de sa paume.
Il s'en alla, s'aidant de sa canne au bout en caoutchouc qu'on entendait piauler comme sous le poids d'un tourment.
Tout ce que j'avais eu envie de lui raconter pendant ses mois d'absence (...) me semblait à présent dérisoire. Pitoyable. Il suffit de prendre de la distance par rapport à un événement pour qu'il s’affaisse et,d'une certaine façon se fonde dans le paysage.
Il n’y a évidemment aucune honte à se retrouver dans une maison de retraite quand il n’y a pas d’autres solutions et que tous les membres de la famille sont morts.
Elle dit qu’il lui reste encore tant à faire, que Dieu devrait lui laisser le don. Elle dit que c’est injuste. Il y a des gens malades partout dans le monde, qu’elle dit, des gens qui souffrent, des estropiés, et elle, elle a perdu son pouvoir à présent et ne peut même plus guérir les migraines de son propre fils. Elle n’arrête pas d’en parler ou plutôt de le crier pour que tout le monde l’entende : “Ce n’est pas parce qu’un peu de temps s’est écoulé, que ce don doit disparaître ainsi ! Ce n’est pas une raison !
La paix ne sera pas possible tant que les voisins se disputeront pour une tondeuse à gazon.
Dans la vie normale, on n’est jamais attentif ou concentré sur l’action. Du moins pas très souvent.
Il me semble que les gens résistent de plus en plus au changement, comme s’ils se cramponnaient à leur situation présente. Ce qui rend l’avenir facile à prévoir ; mais pourquoi s’en faire ? La voyance n’est intéressante que si l’on prédit un événement précis. Cela ne sert à rien de dire : “Ne craignez rien, votre vie continuera comme par le passé…”
« Aurais-je pu éviter mon destin si celui-ci était de faire souffrir ?
– L’homme ne peut échapper à son destin ».
Si votre destin est d’avoir des enfants, est-il possible de choisir de ne pas en avoir ? Si votre destin est de faire souffrir, par exemple, existe-t-il un moyen qui nous rende attentif pour que nous évitions de faire du chagrin autour de nous ? Peut-on échapper à son destin ?
Des savants ont fait des recherches sur ce qui faisait pousser des trilles aux oiseaux le matin. Et jusqu’à présent, ils n’ont trouvé qu’une seule raison : ils chantent parce qu’ils sont heureux.
C’est toujours bon d’avoir un peu de compagnie ! Tous ces jeunes autour d’elle lui rendront sa gaieté.