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Critiques de Becky Chambers (494)
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Les voyageurs, tome 1 : L'espace d'un an

Rafraîchissant et très agréable.





La vie d'un petit équipage multiracial (quatre races, cinq si l'on compte l'IA) à bord d'un vaisseau-tunnelier (qui trace des routes entre les systèmes) dans un univers où la race humaine, si elle fait partie de l'union galactique est loin d'être en première ligne pour quoi que ce soit.





Dès les premières lignes, comme l'indique mon titre, on se sent bien, c'est frais, c'est léger. Très agréable à lire sans être simpliste. Si j'osais un parallèle avec l'une de mes dernières lectures (que je n'avais pas aimée) c'est « Les ferrailleurs du Cosmos », mais en bien cette fois.





Il n'y a pas de grands enjeux, pas d'envolée lyrique, pas de révélation cosmique mais une tranche de vie à bord d'un vaisseau où tous les personnages sont abordés, culturellement, socialement sexuellement et plus si affinité. Sans excès, sans vulgarité, sans réflexion profonde mais cette absence de tout ne signifie pas présence de rien. Beaucoup de sujets et de sentiments sont abordés dans un univers certes survolé mais cohérent.





On aime les personnages, leur histoire et leurs interactions. Ils forment une famille et on fait partie de la famille et on se sent bien dans cette famille.

Une blogueur et babelionaute a dit : « Le petit vaisseau dans la prairie ». Tout à fait d'accord. Mais au contraire de lui j'ai adoré « le petit vaisseau dans la prairie ».
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Apprendre, si par bonheur...

Captivant et… Beau.



La vie extraterrestre existe. Quatre astronautes naviguent de planète en planète pour l’étudier dans une atmosphère douce, intelligente… Belle.



Eh bien voilà, je rejoins l’innombrable cohorte de ceux qui ont adoré leur lecture. Tout comme pour son premier tome (l’espace d’un an), l’impression, la sensation qui se dégage de notre lecture c’est : On s’y sent bien. L’auteure aborde avec intelligence de nombreux thèmes, avec un réalisme scientifique tout à fait honorable, de façon non anxiogène, mais sans angélisme pour autant. Tout en étant un roman court (150 pages), on y croise du space opera, du post apocalyptique, de la hard science, mais à des années lumière des dystopies en vogue.



Une SF humaniste, intimiste. Superbe.
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Apprendre, si par bonheur...

Voilà un petit livre très agréable à lire et qui sort des canons habituels de la SF. On y retrouve les ingrédients classiquement utilisés en SF mais distillés ici à doses homéopathiques : il y a bien des éléments scientifiques mais ils sont avancés simplement et de façon pédagogique, il y a bien un vaisseau mais nous ne sommes pas vraiment dans du space-opera, la présence sur une planète étant centrale par rapport au voyage pour y arriver, les notion d'humains augmentés et de trans-humanisme sont également présentes mais avec subtilité, le côté post-apocalyptique est aussi une préoccupation du récit mais appréhendé avec un certain recul, à des années-lumière de la Terre…ce livre plairait sans aucun doute aux personnes non férues de SF pour un joli voyage sur quelques planètes très différentes les unes des autres. Eric (@casusbelli) grâce à qui j'ai découvert ce livre parle d'une lecture dépaysante, et oui, c'est tout à fait ça. Cette lecture est un voyage d'un exotisme exquis !



Ce récit se veut rapport et récit. Presque cri glacé et silencieux. C'est en effet le rapport d'une des membres d'équipage, Ariadne O'Neill, seule ingénieure de vol à bord du Merian. Nous sommes autour de 2100. Ariadne, qui parle au nom des quatre membres d'équipage, a bien conscience que son rapport mettra 14 ans pour arriver sur Terre, et qu'une réponse éventuelle mettra également 14 années pour leur parvenir. de cette réponse dépend leur sort après l'exploration des quatre planètes prévues dans leur mission. Ariadne fait le récit du quotidien de ces chercheurs sur ces quatre planètes différentes visant à découvrir de nouvelles formes de vies, de nouveaux écosystèmes.



Nous découvrons à quel point leur vie est partagée entre joies immenses presque enfantines issues de leurs découvertes, concentration rigoureuse et respect minutieux de multiples protocoles. Entre chaque planète, les astronautes sont plongés dans un coma qui leur permet de vieillir moins vite que la vraie durée du voyage. Mais à chaque réveil cependant, ils ont vieilli de quelques années et, en plus de découvrir les stigmates du vieillissement, ils découvrent comment leur corps a été subtilement modifié pour pouvoir s'adapter au mieux aux conditions de vie sur la nouvelle planète.



« Arrachez-nous à notre planète natale et nous cessons d'être adaptables. le corps humain supporte très mal les longs voyages spatiaux. Sans l'influence de la gravitation, les os et les muscles cessent vite de se fatiguer à conserver leur masse. le coeur se montre paresseux. Les globes oculaires se déforment, ce qui entraîne des migraines et des troubles de la vue. Tout cela paraît désagréable, mais bien pires sont les radiations qui balaient le vide. Aux premiers temps de la conquête spatiale, six mois en orbite basse – trois cents kilomètres d'altitude – suffisaient à augmenter nettement les risques de développer un cancer ».



Pour que le corps humain puisse s'adapter à la planète nouvelle, la technique de la somaformation est déployée. C'est une solution, sur la base d'un patch à enzyme, qui consiste à modifier quelques propriétés du corps humain afin qu'il puisse s'adapter, par exemple en le dotant d'une peau plus épaisse sur une planète soumis à un rayonnement massif d'ultraviolet, ou le dotant de paillettes dans la peau afin de réfléchir la lumière sur une planète peu exposée au soleil.



J'ai adoré découvrir Aecor, cette lune glacée, et les planètes terrestres Mirabilis et son océan de glace noire, Opéra et sa luxuriance complètement folle et Votum, cette planète rocheuse vide, épurée, propice à la méditation. J'ai aimé voir de quelle façon la somaformation permet de s'y adapter et découvrir des formes de vie sur chacune d'elles, depuis la simple présence cellulaire jusqu'aux formes de vie complètement atypiques. J'ai ressenti et admiré la beauté de l'espace. J'ai été touchée par les relations entre ces quatre membres d'équipage et la façon qu'a l'auteure de décrire leur psychologie.



Ce court texte pose de multiples questions, notamment celles relatives à l'exploration spatiale alors que la Terre va si mal à l'aune du réchauffement climatique. « Comment penser aux étoiles quand les océans débordent ? Comment s'intéresser aux écosystèmes aliens quand la chaleur rend les villes inhabitables ?»



Becky Chambers aborde également, avec sensibilité, la possibilité du bonheur ailleurs que sur Terre. La possibilité d'une renaissance, un espoir qui peut germer, ailleurs et différemment en une fleur nouvelle. Cela m'a fait écho, j'ai trouvé cette approche réjouissante.



« Et j'étais heureuse. Sereine comme jamais auparavant. J'étais entourée de gens que j'aimais, tranquille, libérée du bruit, du besoin d'impressionner, de la civilisation. Ici, nul ne se souciait des questions de statut et d'argent, de pouvoir ; ni intrigues amoureuses ni assassinats. Il n'y avait que l'eau et les merveilles qui y vivaient. Sur Aecor, les priorités étaient les bonnes. Je ne suis pas croyante, mais cette lune me donnait le sens du sacré. Une planète monastique qui récompensait le travail, la patience, en offrant des trésors : le calme, la beauté, le savoir ».



J'ai fini cette lecture presque frustrée de ne pas en savoir plus…Chaque planète aurait pu donner lieu à plus de découvertes, plus de descriptions, et me voilà à imaginer une suite, une réponse, une liberté prise envers le protocole…Apprendre, si par bonheur…voilà ce que je voudrais…bref, ce livre est incroyable car, malgré ses 140 pages, il aura réussi à totalement me transporter mais je l'imagine avec délice tout à fait dans sa version plus longue…J'en veux encore !!



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Histoires de moine et de robot, tome 1 : Un..

Apaisant et beau.



Dans un monde post Transition, les robots ayant acquis une conscience et été rendus à leur liberté, dans un monde sans pétrole et sans usine (mais pas sans civilisation ni confort), la rencontre improbable entre un moine et un robot.



Becky Chambers, une douce poésie pour nos yeux et nos sens de lecteurs. Une histoire courte qui ferait plaisir aux éleveurs new age du Larzac et aux écologistes puristes adeptes du recyclage total, mais pas végans (on mange de la viande, mais issue de la chasse, pas de l’élevage).

On retrouve cette sérénité qu’on avait découverte dans son premier roman, « l’espace d’un an » ou la petite maison dans la prairie de l’espace et dans son dernier, « apprendre si par bonheur » (J’ai moins aimé les autres).

On se sent bien, pendant et après la lecture, délassante, apaisante et pleine de douceur et de poésie.



On passera sur ce que j’estime être des incohérences du World Building de l’autrice, dans un monde sans pétrole où l’on roule à vélo mais on est capable d’envoyer des satellites dans l’espace. Une petite fusion nucléaire contrôlée ? Une écologie à la Jancovici ? (perso j’adore) ? Ce n’est pas indiqué, mais au final ce n’est pas le propos. La vie et l’état d’esprit de ce moine non genré (mais iel semble préférer les relations charnelles avec les hommes) et de ce robot, cette chose, tel qu’il se définit, consciente, curieuse et candide est un pur régal.

Un grosse centaine de pages à savourer d’une traite et s’endormir apaisé.
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Apprendre, si par bonheur...

Une lecture originale et agréable, je vais même ajouter dépaysante ce qui pour de la science fiction pourrait paraître surprenant.

Je connaissais la SF militaire et ses combats et conquêtes, la "hard SF" et ses délires technologiques à base de robotique et autres "humains augmentés", les "space opéras" politiques et farcis d'intrigues interstellaires mais je ne connaissais pas... la SF philosophique et scientifique qui nous emmène en voyage pour étudier et apprendre, celle qui regarde, observe et compare sans rien abimer, la SF qui fait réfléchir à la (vraie) place de l'humanité dans l'univers.

Ce voyage en compagnie de quatre scientifiques en mission d'exploration va se révéler intéressant car l'auteure s'est documentée pour nous offrir une histoire solide et parfaitement imaginable si l'on fait l'effort de se projeter dans un futur finalement pas si lointain.

Le quotidien des chercheurs va nous proposer le plaisir enfantin de la découverte de nouvelles formes de vie, de nouveaux climats et écosystèmes, il va aussi nous faire prendre conscience de la rigueur de la recherche avec l'omniprésence des protocoles indispensables à la sécurité sous tous ses aspects.

Enfin nous aurons aussi du grain à moudre en suivant les états d'âmes de ceux qui ont tout quitté pour assouvir leur passion loin de leur famille qu'ils ne reverront jamais, loin de la Terre qui change si vite et qui leur est déjà devenue étrangère en si peu de temps.

J'ai adoré ce moment de lecture ! Il me reste à remercier Florent pour cette belle découverte.
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Les voyageurs, tome 3 : Archives de l'exode

Décevant.



La grande flotte, plusieurs générations après être parti de la Terre a fait connaissance de l’union galactique, a profité de sa technologie et ne sert plus à rien qu’à être un vivier d’humanité, en orbite autour d’un soleil, qui se raccroche à son mode de vie passé.



Cela aurait pu être une dystopie de plus, un traitement plus classique des Arches pluri générationnelles (Aurora, Destination ténèbres ou dans un autre genre Silo). Mais c’est traité à la sauce Chambers. On vient donc chercher de la SF positive, bienveillante, douce et agréable.



Donc, oui, c’est positif, c’est doux, mais qu’est-ce que je me suis ennuyé. Des tranches de vie, qui se croisent, ou pas, qui permettent de découvrir le mode de fonctionnement très communautaire de la flotte, où tout le monde œuvre pour le bien commun, sans monnaie, sans privilèges. Douce utopie dont on sait où elles mènent systématiquement quand elles sont expérimentées sur Terre à grande échelle.



Mais du coup, ici, il ne se passe RIEN. Mais quand je dis rien, c’est au-dessous de la vérité. Oui la SF « contemplative » a son charme, et j’avais adoré le premier opus de l’auteure ( L’espace d’un an), beaucoup moins le second, mais avec ce troisième tome, les limites sont franchies.

Des gens ordinaires, et des vies ordinaires. C’est revendiqué, mais sont-elles intéressantes pour autant, ici, dans ce roman ? La réponse est clairement non.



Le pire, c’est que je vois passer des critiques dithyrambiques sur le tome 4 (Apprendre si par bonheur). Qu’est-ce que je fais moi du coup ?
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Les Voyageurs, tome 2 : Libration

Bienveillance et gentillesse.





L’histoire de l’adaptation de Lovelace, l’IA dans l’espace d’un an, à un ‘kit » humain réaliste et illégal sous la supervision, protection et amitié de Poivre la gentille mécano.

L’histoire de Poivre, humaine « améliorée », créee pour servir d’esclave sur une planète, qui parvient à s’échapper après avoir vécu plusieurs années dans une navette et son IA protectrice.





Bienveillance et gentillesse. Comme le titre l’indique, des mots qui ressortent régulièrement, si ce n’est en vrai, du moins en sentiments exprimés.

L’auteure soigne ses personnages dans un univers également sympathique et on en vient à les aimer. De toute façon, il n’y a pas de « méchants » à l’horizon, pas de bouleversements, pas d’action (au sens noble) il ne se passe pas grand-chose au final.





Je n’irais pas jusqu’à dire qu’on s’ennuie, parce que l’écriture fluide, la bienveillance qui transpire, nous berce gentiment dans un univers cocon mignounnet. Une belle histoire d’amour et d’amitié, une littérature enfant pour adulte (ou l’inverse). Cela reste néanmoins moins attractif que le premier tome et cette lecture n’est clairement pas indispensable, même pour ceux qui ont aimé ce dernier (que je ne peux m’empêcher de recommander à nouveau).
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Apprendre, si par bonheur...

Je sors de cette lecture assez impressionné car en toute franchise et à mon humble avis : c'est un sans-faute.

Le style est agréable, éloquent et pointu. Les mots sont pesés et aucun n'est surfait , ampoulé ou dilatoire.

Il y a aussi une grande modération dans ces pages , les péripéties sont modérées , les développements scientifiques sont modérés et le ton est modéré même si une grande partie du récit traite de personnalités bien campées avec un fort caractère et très différentes les unes des autres.

Ni vu ni connu l'auteur ouvre une nouvelle voie en matière d'augmentations corporelles qui ne passe pas par la case post-humains habituelle. Elle le fait avec une solide évocation de ce qu'elle dénomme la Sommaformation qui utilise l'ingénierie génétique pour aller assez loin dans les modifications corporelles.

Ces modifications sont pensées comme ponctuelles et réversibles .Elles ont une vocation utilitaire et elles peuvent être spectaculaires selon les nécessités mais elles ne fondent pas de nouvelles humanités .

Partir à la recherche la vie pluricellulaire ou non , et les moyens de le faire sont le sujet de ce livre très bien pensé .Les capacités du vaisseau sont bien posées sans être très invasives dans la trame narrative . Les personnages sont tous palpables même s'ils sont plus ou moins densément campés.

Le texte est rédigé à la première personne légèrement limitée et c'est du meilleur effets ici.

Les aventures exo biologiques de l'équipage sont bien vues et les protocoles de recherche et d'approches des problématiques sont bien pensés également, sans être noyés dans un nuage de hard science impénétrable et tout en étant aussi absolument tangibles. Et ces problématiques sont riches de contenus .

Je suis assez émerveillé par ce texte car c'est un grand moment de sciences mises en fiction selon des approches rusées qui rendent ces données aussi accessibles par le lecteur que opératoires dans le récit en général.

Ceci conformément à la simplicité et à la modestie calculées de ce texte très soigné que j'évoquais plus haut.

Un exemple de ruse, le narrateur est un membre de l'expédition compétant sur des fonctions techniques avec une pluri compétence minimale par ailleurs, qui permet au lecteur de bénéficier de sa compréhension de par ses compétences limitées et minimalement pointues en exobiologie par exemple.

Le caractère humain et humaniste de ce roman est infiniment agréable aussi.

Enfin pour conclure je souligne sans spoiler que ce roman assez court et dense est aussi un drame poignant sans virer pourtant au complètement tragique , Toujours cette modération structurelle et agréable de ce texte qui s'exerce jusqu'à la fin qui est riche étonnante et intéressante.

De belles descriptions avec de belles couleurs bien définies qui font des environnements étranges et autres , dans un texte évocateur ,clair et plein d'images concrètes qui laissent des traces pendant et après la lecture.

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Histoires de moine et de robot, tome 1 : Un..

Il m’avait suffi de lire une seule novella (la génialissime Apprendre, si par bonheur que je recommande à quiconque) pour que Becky Chambers devienne l’une de mes autrices préférées. Aussi ai-je abordé cette lecture avec autant d’enthousiasme que d’appréhension : est-ce qu’Un psaume pour les recyclés sauvages pouvait vraiment être aussi bon? Verdict : peut-être un léger cran en-dessous, mais toujours d’excellente qualité.



Sur Panga, l’humanité a échappé au pire. La civilisation a pris une direction plus respectueuse de la nature, nature que les robots sont allés rejoindre après avoir accédé à la conscience. Quelques siècles plus tard, leur existence n’est plus qu’un mythe. Aussi, Dex, moine de thé non-binaire, ne s’attendait définitivement pas à croiser sur sa route Omphale Tachetée Splendide, robot qui cherche à comprendre de quoi l’humanité a besoin. Une question à laquelle Dex aura bien du mal à répondre.



Ce qui se dégage en premier lieu de cette lecture, c’est sa douceur – une douceur bienvenue quand on a l’impression d’être saturé·e de dystopies ou de récits post-apocalyptiques plus noirs les uns que les autres. La dédicace, « Pour vous qui avez besoin de souffler », est d’ailleurs très à propos. Becky Chambers est souvent vue comme une des principales représentantes du mouvement hopepunk, qui cherche à garder vivant un imaginaire optimiste et refuse de s’en laisser dépouiller par un monde de plus en plus sombre. À cet égard, cette novella est caractéristique de ce qu’elle cherche à faire et cette lecture a quelque chose de très réconfortant (plus, à mon sens qu’Apprendre, si par bonheur qui a un côté plus ambigu).



Pour autant, la douceur et l’optimisme ne sont pas synonymes de contenu creux, moralisateur ou dégoulinant de bons sentiments. Becky Chambers passe au crible plusieurs sujets déjà vus, mais sans se contenter d’aligner les lieux communs ni tomber dans la culpabilisation. Qu’est-ce qui pousse les êtres vivants à rechercher le bonheur et la sécurité? Qu’est-ce qui les pousse à en vouloir toujours plus au point de mettre en péril cette recherche de bonheur et de sécurité? Faut-il se couper de la nature pour maintenir avec elle une relation apaisée? Si la vie n’a aucun sens, aucun but, ce qui reste peut-il suffire? J’ai aimé le regard apaisé que l’autrice porte sur les choses (notamment la technologie, qui n’est plus une course au profit continuel mais redevient un outil d’épanouissement pour l’être humain ; certains indices laissent toutefois penser qu’on rencontrera dans le deuxième tome des personnages qui la rejettent plus radicalement).



D’un point de vue littéraire, on peut aussi y voir, en creux, une remise en question de la narration occidentale, laquelle est si centrée sur la notion de conflit qu’on en vient instinctivement à penser qu’une histoire dénuée de conflit ou de tension n’a strictement aucun intérêt littéraire ou philosophique. Ainsi, la forme apaisée contribue elle aussi à la réflexion de fond.



En bref, c’est une belle réussite! J’ai hâte de lire le deuxième tome, maintenant que j’ai enfin réussi à mettre la main dessus. En vouloir toujours plus, on disait?
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Histoires de moine et de robot, tome 2 : Un..

Un deuxième tome totalement dans la lignée du premier, autant dans les thèmes et leur traitement que dans le ton employé, mais sans tomber dans la redondance (et avec une couverture encore plus magnifique que le précédent, ce qui n'est pas peu dire).



Rappel : le premier tome, Un psaume pour les recyclés sauvages, nous présentait un monde où l'humanité a échappé à la catastrophe et a reconstruit un monde meilleur - un monde plus beau et plus doux, où l'épanouissement personnel va de pair avec une société fonctionnelle. C'est dans ce contexte qu'a lieu la rencontre entre Dex, moine de thé en reconversion professionnelle, et Omphale, un robot sauvage curieux de découvrir ce qu'est devenue l'humanité. Il en résulte un court roman (environ 100 pages) de SF optimiste aux accents de conte philosophique, où Dex aide Omphale à se familiariser avec le fonctionnement des communautés humaines.



Autant le premier tome portait essentiellement sur le questionnement de soi et la rencontre avec l'autre, autant le deuxième élargit la perspective en s'interrogeant sur la place de l'individu dans une société donnée (qu'iel en soit originaire, comme Dex, ou qu'il soit un étranger curieux d'en découvrir les rouages, comme Omphale). Ainsi, aux interrogations du premier tome, qui sont ici approfondies, s'en ajoute une de plus : l'individu doit-il avoir une utilité sociale? L'occasion rêvée de voir comment, à travers les malentendus et les imperfections, on en vient à un dialogue apaisé et constructif, qui n'est pour autant ni creux ni moralisateur (ça fait du bien).



Une lecture belle et apaisante et pas mièvre pour deux sous - il faut dire aussi que j'ai lu les deux tomes à quelques mois d'intervalle, ce qui était sans doute parfait pour les apprécier à leur juste valeur. À lire quand vous aurez besoin de souffler !
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Apprendre, si par bonheur...

J'avais lu dans l'ensemble beaucoup d'avis très positif sur les romans de Becky Chambers notamment sur son roman “l'espace d'un an”, premier tome de la trilogie les voyageurs récompensé notamment par le prix Hugo de la meilleure série littéraire en 2019. de quoi finir par me rendre assez curieux pour le rajouter à ma PAL ainsi que le court roman que constitue Apprendre, si par bonheur.



Il aurait pu y rester encore longtemps mais quand je suis tombé dessus en médiathèque mis en avant sur une étagère avec l'encart nouveau, je n'ai pas hésité à emprunter ce dernier pour le lire au format papier. Ce fut une lecture assez surprenante, j'ai trouvé le tout vraiment très calme, posé, je dirais presque apaisant. On est à l'opposé ici des romans d'action à gogo ou on tourne les pages avec frénésie pour connaître la fin de l'intrigue.



Présenté sous forme de rapport, de journal de bord, Ariane O'Neill, ingénieur de vol du vaisseau Mérian nous raconte. Elle nous raconte son voyage dans l'espace d'une planète à l'autre y étudiant les différentes formes de vie avec ses trois compagnons de voyage, sa famille. Elle nous raconte cette vie dans l'espace si loin de la Terre, ses pensées, ses envies, son travail et les recherchent menées avec ses compagnons. le mélange fonctionne bien, dans ce roman tranche de vie Becky Chambers décrit de bien belle manière les relations et la psychologie de ces 4 astronautes auxquels on finit au fil des pages par s'attacher. Quatre personnages très différents mais soudés que l'on ne peut que trouver très humain.



Moi qui n'ai guère de connaissance scientifique, je me suis surpris à prendre plaisir à lire les quelques brèves explications scientifiques que l'auteure insère dans ce texte, cette dernière ayant trouvé le juste dosage pour que cela ne devienne jamais rébarbatif et ne me sorte de ma lecture. J'ai apprécié également les questionnements que ce court texte nous invite à faire, sur le transhumanisme, sur l'intérêt et tout l'argent dépensé dans la découverte spatiale quand il y a déjà tant à faire sur Terre.



J'ai finalement terminé ce roman le sourire aux lèvres regrettant même qu'il n'ait pas été un peu plus long tout en me disant qu'en l'espace d'un peu moins de 150 pages l'auteure avait réussi à aborder avec talent une belle palette de sujets.



Apprendre, si par bonheur fut donc une belle lecture et rencontre avec la plume de l'auteure que je lirai de nouveau dans les prochains mois avec l'espace d'un an que j'espère apprécier autant que ce court petit texte.

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Les voyageurs, tome 1 : L'espace d'un an

Dans ce Space-opéra aux accents de soap-opéra "familial", l'auteure embarque le lecteur dans le "Voyageur", vaisseau-tunnelier qui crée des trous de ver entre les planètes.

Livre qui avait été nominé pour le Arthur C. Clarke Award et dont le titre en anglais "The long way to a small angry planet" traduit bien plus explicitement dans quel type de périple le capitaine Ashby embringue son équipage hétéroclite, constitué d'humains, tous nés dans l'espace, et d'extra-terrestres allant d'une lézard coiffée de plumes, en passant par une "lovely" IA, jusqu'au alien à la double personnalité.



Pendant cette odyssée, chaque membre à bord est, a tour de rôle, mis sous la rampe d'éclairage, quand il/elle se trouve confronté à un problème, est en conflit avec soi-même ou avec d'autres, mais à aucun moment B. Chambers se permet l'apologie d'une race plutôt que d'une autre. Tous les Intells (êtres intelligents), biologiques ou non, sont décrits comme physiquement, sexuellement et culturellement très différents, qui s'acceptent... plus ou moins. Parce que les guerres, notamment pour les intérêts commerciaux, existent toujours.



Mais à bord du Voyageur, le lecteur, comme l'équipage, n'en a souvent que de lointains échos. le dessein de l'auteure se situe essentiellement dans la description de cette petite communauté soudée qu'on peut considérer comme une famille dans laquelle B. Chambers souhaite nous inclure. Et elle y réussit (dans un style agréablement accessible) fort bien, on s'attache à chaque personnage (même au plus grincheux d'entre eux), on suit avec sympathie et émoi les relations qui se tissent malgré les divergences, on désire pouvoir faire partie de cette unité et c'est finalement avec un pincement au coeur qu'on la laisse repartir dans l'espace...
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Histoires de moine et de robot, tome 1 : Un..

Un.e moine, malgré un bonheur apparent et une grande efficacité dans l’accomplissement des tâches qui lui sont confiées, n’est pas heureux. Il se lasse de ce quotidien sans problème et rêve d’autre chose. Iel se décide alors à tenter une nouvelle expérience : se promener, sur un vélo-maison, à travers le pays afin de proposer une écoute attentive à ceux qui en ont besoin. Cela elui permettra de voyager et de découvrir autre chose. Mais cela elui apportera-t-il enfin la quiétude ?



Un psaume pour les recyclés sauvages, premier court roman d’un diptyque (Une prière pour les cimes timides devrait bientôt suivre), reprend de nombreux éléments des contes philosophiques. Les situations sont assez simplifiées et l’on ne se perd pas dans les détails. La portée des évènements qui arrivent au personnage principal est plus qu’individuelle et peut se généraliser à un grand nombre de personnes. Ces péripéties permettent au lecteur de s’interroger sur le monde et son état, même si celui qui est décrit dans ce récit est tout autre que celui dans lequel nous vivons. Mais j’y reviendrai plus tard.



Frœur Dex est un moine qui s’ennuie et décide donc de voyager. Il commande alors la fabrication d’un vélo trainant une habitation individuelle sacrément bien conçue (j’aimerais bien en avoir le plan, pour voir comment tout cela fonctionne) qui permet de se promener en toute autonomie. Enfin, il faut acquérir de quoi se nourrir, mais l’essentiel est là, bien à sa place dans sa petite demeure. Donc, Frœur Dex devient moine de thé : il doit aller de village en village afin d’apporter la sérénité aux villageois. Comment ? Grâce à une bonne tasse de thé prise autour d’une table où les personnes en souffrance (ou seulement agacées) peuvent venir se plaindre et discuter avec le moine. Difficile au début, mais rapidement aisé pour Frœur Dex, qui finit par exceller dans cette discipline. Mais là encore, la lassitude finit par lae rattraper. Heureusement, la rencontre d’Omphale va bouleverser cette routine.



Frœur Dex évolue dans un monde qui pourrait être le nôtre après pas mal de bouleversements. Le plus grand changement cité dans ce roman est l’Éveil, le départ des robots. La série dont Un psaume pour les recyclés sauvages est le premier volume, s’intitule d’ailleurs Histoires de moine et de robot. Un jour, donc, les robots ont décidé de cesser leur travail et de ne plus approcher les humains, afin de les laisser mener leur vie sans les gêner, sans les entraver. Depuis, plus personne n’en a vu un. D’où la surprise immense de Frœur Dex quand il croise Omphale, un robot en parfait état. Surprise d’autant plus grande quand le même Omphale lui révèle la raison de se venue : voir où en sont les êtres humains. Et voilà le moine suivi à la trace par un être de métal tout émerveillé par ce qu’il découvre en fréquentant cette personne faite de chair et de sang.



Mais revenons au monde décrit. Tout semble y être en harmonie. Les machines sont réduites au strict minimum. Le recyclage est la norme. Le vélo, amélioré, permet de transporter un habitat individuel où tout est pensé pour avoir le minimum d’impact. Les individus semblent avoir des places définies qu’ils occupent avec un certain bonheur. Si certains éprouvent des difficultés avec leur travail, avec leurs voisins, ils peuvent se libérer de leurs tensions en parlant à un moine venu avec sa petite maison et, surtout, un bon thé. Car la cérémonie d’écoute passe aussi par la dégustation d’une boisson chaude à la recette spécialement conçue pour l’interlocuteur et sa situation. Ce qui demande un certain talent de la part du moine. Comme s’en aperçoit Frœur Dex lorsqu’iel change de vocation et circule à travers les campagnes pour se mettre à l’écoute de ses concitoyens. Comme je l’ai écrit plus haut, il trouvera vite les bonnes recettes pour apporter la détente aux autres. Mais pas la plénitude dans sa propre existence.



Frœur Dex ressemble parfois à un.e enfant gâté.e qu’on a envie de secouer. Tout va bien pour iel : iel réussit dans son premier métier, puis dans son deuxième choix. Et à chaque fois, iel éprouve de l’insatisfaction, un vide existentiel. Mais quand on y réfléchit, combien d’entre nous n’ont pas ressenti ce creux au fond de leur esprit. Quant tout paraît aller sur des rails mais que l’on sent confusément que quelque chose manque. On se secoue en se traitant de capricieux, mais il reste un manque au fond de soi. Et c’est cet état d’esprit qui est brillamment mis en scène dans ce roman. Frœur Dex s’interroge sans comprendre d’où vient son insatisfaction. Et cela lae mine. Comme cela nous mine. Surtout dans cette société de consommation remise en question de nos jours. Suite au Covid. Suite aux bouleversements climatiques. Suite à la disparition des grandes causes qui permettaient de se trouver un but, une raison de vivre malgré la banalité du quotidien. Et le récit de Becky Chambers, même s’il n’apporte pas de solution miracle, fait du bien car il aborde des questionnements cruciaux avec un ton rassurant, un rythme apaisant. Malgré les doutes et les inquiétudes, on se sent bien et on peut se poser des questions sans angoisse. Loin du malaise qui sourd des pages de Composite d’Olivier Paquet, autre roman qui s’interroge sur notre société.



Becky Chambers est réputée pour le côté rassurant de ses écrits. Malgré la difficulté de certains thèmes qu’elle peut aborder, elle le fait avec la douceur d’une nourrice guidant un jeune enfant. Elle rassure tandis qu’elle nous fait progresser dans notre réflexion, dans notre connaissance de nous-mêmes et de notre rapport au monde. Une belle histoire aux racines profondes. J’attends la suite, prévue pour mars 2023, en dégustant une petite tasse de thé.
Lien : https://lenocherdeslivres.wo..
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Apprendre, si par bonheur...

Ce premier contact avec la prose de Becky Chambers est une réussite.



Dans un monde SF où les récits me donnent l’impression d’être de plus en plus dystopiques, reflétant probablement la marche du monde réel, l’auteure porte une voix optimiste, positive. Elle nous donne à lire un récit qui exprime que l’humain, la vie et l’univers ne sont pas forcément merdiques et sans espoir.



C’est l’état d’esprit des quatre personnages qui m’a le plus frappé. Leur éducation semble avoir presque complètement éradiqué les pensées négatives et la colère. Aucune friction ne vient ternir leurs relations bien qu’ils vivent confinés ensemble pendant leurs années d’exploration spatiale. A peine l’agacement est-il parfois ressenti mais sans s’exprimer. Ce comportement est englobé dans une sorte d’exaltation de l’enfant qui découvre à quel point la variété et la complexité du monde sont merveilleuses. Leur joie de découvrir des formes de vie – tout à fait originales de surcroît ; l’évolution a bien bossé – explose en permanence. « Le monde est magnifique » semblent-ils toujours penser.

Les quatre explorateurs ont parfaitement intégré la notion de respect animal qui se développe de nos jours dans nos régions. C’est dans leurs tripes. Faire du mal à un animal provoque en eux un traumatisme violent et durable. Certaines scènes sont à ce titre tout à fait insupportables d’horreur, comme la pire des tortures.

Pourtant Becky Chambers met le caractère de ses personnages à l’épreuve, en particulier sur la planète Opéra où les attend une situation qui ferait craquer n’importe qui. C’est l’occasion de découvrir que, enfouies au fond de leur cerveau reptilien, les émotions « négatives » subsistent. Et ce face-à-face passe mal pour les personnages eux-mêmes.



Le style utilisé par l’auteure est agréablement commun. Ariadne, sa narratrice, parle presque comme nous. Elle est souvent amenée à décrire un élément scientifique et elle le fait à chaque fois avec un grand talent vulgarisateur qui m’a rappelé Carl Sagan (j’ai adoré les images qu’elle emploie pour expliquer la chiralité des molécules organiques). Une phrase qu’elle prononce est particulièrement évocateur : « Ainsi, pour le moment, je sacrifie l’exactitude scientifique pour que mon récit reste évocateur ». On est presque dans de l’anti Hard Science.



Becky Chambers pose aussi une question au lecteur. Est-il moral de dépenser des ressources pour découvrir les secrets de l’univers lorsque le monde autour de nous part à vau-l’eau ? Pour Ariadne la réponse est oui, c’est essentiel. C’est ce qui permet à l’humain de montrer à l’univers qu’il est capable de dépasser la simple lutte pour la vie. Mais elle laisse le lecteur se faire sa propre opinion.



Ce récit fait du bien. Tout en restant conscient de l’état du monde, il nous offre un regard sur le merveilleux de ce qui nous entoure. Il permet de reprendre son souffle.

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Histoires de moine et de robot, tome 2 : Un..

Ce tome 2 reprend peu de temps après la fin du précédent. Il est aussi bon que ce dernier, et pas le moins du monde répétitif.



Dex (læ moine-cycliste-thérapeute-barista non-binaire) et Omphale (le robot sauvage, premier à contacter les humains depuis des siècles) pédalent vers la grande ville.



En chemin, ils s'arrêtent dans les villages où les gens se bousculent pour rencontrer le robot qui n'a qu'une question pour eux : De quoi les humains ont-ils besoin?



Le champ des réponses varie entre "une nouvelle porte de grange" et "un sens à ma vie".



Bref, comme le précédent, il s'agit d'une lecture très douce et contemplative. Ce qui n'exclut pas un worldbuiding de qualité et un investissement émotionnel enverra les personnages. Bref, c'est une lecture reposante, dans être nécessairement "légère" en contenu. Ne vous y attaquez pas en vous attendant de l'action épique ou quoi que ce soit dans ce genre là.

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Les voyageurs, tome 1 : L'espace d'un an

Voici un très sympathique space opera, classique dans la forme, original dans le fond. L’héroïne de ce Roman, Rosemary, se fait enrôler sur un tunnelier comme greffière, c’est à dire responsable de l’aspect administratif. Un tunnelier est un vaisseau chargé d’effectuer des tunnels, sortes de passages (trous de vers) dans l’espace pour se déplacer plus rapidement d’un point à un autre de la galaxie.

L’action n’est pas au centre de l’intrigue. Quelques moments de tensions se contentent de ponctuer le récit, ce roman est surtout centré sur les relations entre les personnages, les différentes espèces, dans l’espace confiné du vaisseau.

L’aspect fantastique de la science fiction est très réussi, mais c’est surtout la conception des différentes races de la galaxie, superbement soignée, qui nous fait voyager. En s’attardant beaucoup sur les relations, les sentiments, on s’attache à chacun des passagers du vaisseau, les détails, recherchés, dans toutes les direction, physique, culturels... nous immergent parfaitement dans ce périple. La qualité de la prose, efficace, fluide et sensible, faisant appel à tous les sens, est riche et agréable, voire, par moments, poétique. Tout en usant des bases de la SF militaire et space opera, il en ressort une œuvre très sensuelle et féminine. Ce roman possède une certaine finesse et une certaine légèreté qui le rendent particulièrement original, rafraîchissant, plaisant.
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Histoires de moine et de robot, tome 2 : Un..

Retour en Hopepunk avec le second volet des Histoires de moine et de robot de l’américaine Becky Chambers après Un Psaume pour les Recyclés sauvages paru l’année dernière chez L’Atalante.

Dans Une Prière pour les cimes timides — quel titre magnifique — nous retrouvons nos deux héros, à savoir frœur Dex et le robot Omphale, qui sortent enfin de la forêt des ruines de la civilisation pour reprendre contact avec le monde des hommes.

Prenez une tasse de thé, quelques biscuits savoureux et un bon plaid car l’aventure continue…



Suite directe d’Un Psaume pour les Recyclés sauvages, cette seconde novella prolonge l’épopée apaisante et pleine d’intelligence imaginée par Becky Chambers sur le monde de Panga, décalque utopique d’une Terre du futur où l’homme vivrait enfin en paix avec la Nature et avec lui-même.

Ceux qui ont aimé la recette du précédent opus ne seront pas déroutés, au contraire, puisque le principe reste strictement le même.

Chez Becky Chambers, l’exploration est autant celle du monde que celle de soi, conservant avec bonheur une capacité d’émerveillement face au quotidien et à l’insignifiant qui fait merveille à la lecture.

Omphale et Dex poursuivent leur quête, celle de trouver du sens à l’existence même si celle-ci semble de plus en plus n’en avoir aucun.

Cette fois, le temps est surtout venu de partir à la rencontre de l’autre et de mettre face à face un robot et des humains qui n’ont plus rien vu de semblable depuis des éons. Cette rencontre va forcément changer la donne, pour Omphale comme pour Dex. C’est aussi l’occasion pour Becky Chambers d’imaginer une société différente, utopique, où l’argent n’existe plus et où un troc solidaire a remplacé l’ancien système. Un troc qui, en plus, tente de prendre en compte l’aspect psychologique de ses participants et qui, parfois, révèlerait leur mal-être. On trouvera aussi quelques mentions fugaces de la cellule familiale qui semble bien plus élargie et libre que par le passé, permettant des unions multiples et finalement très loin du couple hétéronormé. Cela sans jugement aucun, car chez Becky Chambers comme toujours, ce qui prévaut c’est le dialogue, l’écoute et la compréhension de l’autre, peu importe sa nature et ses idées.



Une Prière pour les cimes timides poursuit ainsi la dimension philosophique de son prédécesseur en s’interrogeant sur ce qui nous construit et nous transforme, sur l’importance du corps et ce qui change lorsque celui-ci change, sur ce qui constitue l’essentiel et le non-essentiel, sur ce qui diférencie l’objet de l’être humain.

Becky Chambers écrit une science-fiction réflective et belle, qui prend son temps et apaise les maux de ses personnages.

Car les maux, il en reste tout de même. Tout n’est pas complètement idyllique là-dedans. Dex souffre toujours d’une forme de spleen difficilement explicable, d’une blessure qui l’empêche de s’autoriser à être heureux et qui, au passage, l’empêche de redevenir le moine de thé remarquable qu’iel a été par le passé. Une souffrance existentielle qui fera écho à la question centrale posée par Omphale sur le besoin.

A-t-on toujours besoin de quelque chose ? Et que devenons-nous si nous n’avons plus de besoin ?

Mais ce qui réjouit dans cette aventure doucereuse, c’est sa capacité à ne jamais juger et à toujours respecter l’autre, à réveiller des questionnements sans jamais soulever la colère ou la haine. C’est une science-fiction d’espoir et de paix, toujours, et c’est certainement ce qui rend cette aventure drôle et unique en son genre, indispensable dans son inutilité sensible et émouvante.



Suite parfaite à une histoire du futur qui transpire la bonté et l’apaisement, Une Prière pour les cimes timides poursuit sa réflexion sur l’existence et sur la nature des êtres de Panga. Becky Chambers règne sur le beau et sur le bien, nous berçant jusqu’à la fin avec intelligence et subtilité sur demain.
Lien : https://justaword.fr/une-pri..
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Apprendre, si par bonheur...

Une science-fiction optimiste et positive c’est ce que Becky Chambers veut nous livrer dans son petit roman de 140 pages Apprendre si par bonheur… Et elle y arrive car ce Planet Opéra est agréable à lire et plein de tendresse et d’amour de la vie. Les habitués des milieux hostiles avec des méchants extraterrestres devront passer leur chemin sous peine de s’ennuyer à mourir.



C’est un roman calme où tout coule de source. Il n’y a pas de heurts entre les quatre membres d’équipage. Les deux femmes et les deux hommes se connaissent et une solide amitié particulière les unit ensemble. « Le café te manque ? J’ai posé la question à Jack quand il s’est éveillé à côté de moi. La veille au soir, nous avions installé sa couchette dans ma cabine, comme nous le faisions parfois. Ou ma couchette dans sa cabine. Ou ni l’un ni l’autre ». L’héroïne Ariadne O'Neill qui nous raconte cette histoire possède un charisme exceptionnel au point d’être le trait d’union pour l’ensemble de l’équipage. L’ambiance a bord du vaisseau est sereine et apaisée. Chacun se respecte pour ce qu’il est.



Les astronautes vont faire une exploration responsable et douce des quatre planètes définies dans leur mission. En effet, ils adaptent leur corps en fonction de la planète à visiter. C’est le point fort du roman, on assiste à une métamorphose anatomique de nos héros grâce à une technique dite de la somaformation : « Mais je ne m’étais jamais sentie forte, pas à ce point-là. Mon corps était puissant, mes membres épais. Mon cœur renforcé battait fort, comme un gros tambour. Mes os eux aussi avaient été modifiés. Ils étaient assez denses pour soutenir mes muscles neufs. Je n’étais pas devenue une héroïne de conte de fées ni une déesse guerrière. J’étais moi, mais renforcée ». Les explorations dans le dur sont finies, dans la science-fiction positive c’est le cosmonaute qui s’adapte à la planète et non l’inverse.



Les relations entre la mission d’exploration et notre bonne vieille planète Terre sont aussi traitées de façons différentes. « Comment penser aux étoiles quand les océans débordent ? Comment s'intéresser aux écosystèmes aliens quand la chaleur rend les villes inhabitables » La réponse est donnée sous la forme d’une conquête spatiale participative. En effet le budget de la NASA (GAO dans le livre) est assuré par l’ensemble de la population mondiale sous la forme de don financier individuel. Les états n’intervenant plus, La conquête pouvait s’appuyait sur l’ensemble de l’humanité. « Le but du Groupement astronautique ouvert était simple : le vol habité financé par les individus. L’exploration par amour de l’exploration. Apolitique, international, sans but lucratif. GAO acceptait les dons de tout le monde, sans rétrocommission, sans concessions, sans rien promettre qu’un effort passionné pour empêcher que les astronautes ne disparaissent pour de bon ».



Oui, j’ai bien aimé cette fraicheur inédite dans la science-fiction d’aujourd’hui. Elle se veut plus lumineuse que les récits sombres et dystopiques des écrits actuels. Certains critiqueront peut-être aussi la fin du roman mais elle m’a fait penser à Star trek et à son commentaire fétiche, un clin d’œil aux trekkies.



« Space, the final frontier. These are the voyages of the starship Enterprise. Its five year mission: to explore strange new worlds, to seek out new life and new civilisations, to boldly go where no man has gone before. »

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Les voyageurs, tome 1 : L'espace d'un an

Récompensée en 2017 par le Prix Julia Verlanger pour son cycle « Wayfarers » (qui comporte à ce jour deux romans : « L’espace d’un an » et « Libration »), Becky Chambers est une auteure qui, jusqu’à présent, m’était parfaitement inconnue, et ce en dépit de la solide réputation qu’elle commence à se tailler en France et à l’étranger dans le domaine du space-opera. C’est finalement sur les conseils d’une grande lectrice, et encouragée par ma récente très bonne découverte de « Pyramides » de Romain Benassaya, que j’ai finalement décidé de tenter l’expérience. Or, sans être véritablement négatif (loin de là), le bilan reste malgré tout plus mitigé que ce à quoi je m’attendais. Posons d’abord le décor. Le roman met en scène la vie menée par les membres de l’équipage du Voyageur, un vaisseau chargé de creuser des tunnels dans l’espace. A priori rien de bien particulier, sauf que les individus qui constituent cet équipage appartiennent à des espèces très différentes. Outre les humains, qui sont parmi les derniers a avoir été intégrés dans « l’union galactique » rassemblant toutes les races désireuses de vivre en bonne intelligence, on trouve également à bord une Aandriske (une espèce à plume et écaille), un Grum (une sorte d’amphibien doté de plusieurs bras/tentacules), ou encore une paire de Sianats (une espèce ayant accueilli dans son cerveau un neurovirus appelé chuchoteur et considéré comme formant la deuxième partie de cet étrange duo). Pour Rosemary, une humaine ayant grandi sur Mars dans un milieu très préservé et désormais greffière du vaisseau, la rencontre avec toutes ces espèces très différentes de la nôtre et pourtant aussi complexes et intelligentes a de quoi secouer. Surtout que le capitaine vient d’accepter de mener une mission inédite pour le compte de l’union galactique : les voilà tous partis dans l’espace pendant au moins un an, et ce dans le but de construire un tunnel censé relié l’Union à une autre race extraterrestre jusqu’à présent belliqueuse mais désormais avide de nouer contact.



L’éditeur nous prévient dès la quatrième de couverture, et pour une fois la description n’a rien d’exagéré : ne vous attendez pas à « un space-opera d’action et de batailles rangées ». La guerre dans l’espace n’intéresse pas du tout l’auteur, de même que les considérations d’ordre plus scientifiques sur le fonctionnement de tel vaisseau, tel phénomène ou telle planète. Non, ce qui compte pour Becky Chambers, ce sont les individus et les relations qu’ils tissent les uns avec les autres, en dépit de leurs différences. Le roman met ainsi l’accent sur des valeurs profondément humanistes et livre un véritable plaidoyer pour la paix entre les peuples. Le pari était un peu osé, et ne remportera certainement pas l’adhésion de tous les lecteurs, mais l’auteur ne s’en sort pas moins avec beaucoup d’élégance. Le principal attrait du roman réside par conséquent dans ses personnages, tous plus attachants les uns que les autres. Difficile de les qualifier d’« humains », compte tenu de leur appartenance à une autre espèce, mais c’est pourtant l’impression qui se dégage du récit : quand bien même les différences entre toutes les races intelligentes qui peuplent la galaxie peuvent paraître insurmontables, on finit malgré tout par observer chez eux des similitudes qui finissent par gommer toutes autres considérations et nous les font envisager comme nos semblables. Et pourtant certaines espèces paraissent très éloignées de la nôtre ! Physiquement, d’abord : on trouve des individus à plume, à écaille, à tentacules, plus grands, plus petits, augmentés par la technologie, d’une autre couleur… La différence est aussi bien souvent sociétale : les autres espèces ne se construisent pas autour des mêmes concepts que les humains, ils n’ont pas les mêmes codes, ni les mêmes notions d’amour, de pudeur, d’éducation… Le travail effectué par l’auteur à ce sujet est remarquable, et on se prend à plusieurs reprises à sourire ou à s’interroger devant la description faite à une autre espèce de certaines de nos habitudes qui paraissent soudainement parfaitement incongrues (la manière de considérer les enfants, celle de manifester son affection…).



Cet aspect humaniste du texte permet à l’auteur d’aborder quantité de thèmes qui questionnent évidemment beaucoup notre société : le clonage et ses dérives, les Intelligences artificielles et leur accès à la conscience, la modification du corps par la technologie… La plupart des autres thématiques abordées sont plus classiques et plus consensuelles : le ravage des ventes d’arme et de la guerre, les bienfaits de l’amitié et de la solidarité… C’est d’ailleurs l’une des choses que l’on peut reprocher au roman : sa tendance à nous présenter un monde « bisounours ». Oui on entend parler de massacres, oui tous les personnages ne sont pas sympathiques (quoique…), oui la plupart sont hantés par de vieilles blessures. Il n’empêche que tout finit toujours par s’arranger et que, globalement, tout le monde est plutôt gentil : on s’entre-aide, on se pardonne tout, on se soutient dans les moments difficiles, si bien qu’il n’y a finalement quasiment pas de tensions entre les personnages. Or, vous en conviendrez, c’est assez malheureux mais ce sont justement les conflits qui donnent bien souvent du sel à une histoire. On arrive là à ce qui, à mon sens, constitue le cœur du problème de ce roman : le pitch se résume à nous narrer le voyage du vaisseau et les relations entre les membres de l’équipage, sans que l’auteur cherche à construire une véritable intrigue. La toute nouvelle mission confiée au Voyageur aurait pourtant pu engendrer plusieurs péripéties qui seraient venues complexifier et enrichir le récit, seulement tout cela reste très marginal, et est finalement évacué de manière assez expéditive à la toute fin. Sans aller jusqu’à parler d’ennui, on ne peut ainsi se départir d’un sentiment de lassitude, renforcé au fil du récit par le nombre très limité de rebondissements venant rompre cette monotonie. C’est d’autant plus dommage que tous les personnages ne se valent pas, certains finissant par agacer par leur babillage, tandis que d’autres sont quasiment invisibles.



Ce roman de Becky Chambers n’a pas grand-chose à voir avec ce qu’on s’attend à trouver dès lors qu’on parle de « space-opera », et c’est justement ce qui fait une partie de son charme. L’auteur se donne du mal pour dépeindre des races extraterrestres totalement différentes de la nôtre, ce qui permet une remise en question et suppose une ouverture d’esprit qui sont toutes deux nécessaires et intéressantes. On peut toutefois regretter la quasi inexistence d’une véritable intrigue, ainsi que le caractère un peu trop « gentillet » de la plupart des personnages. A vous de vous faire votre propre avis !
Lien : https://lebibliocosme.fr/201..
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Histoires de moine et de robot, tome 1 : Un..

Mes bibliothécaires me parlent de ce livre depuis des mois, et j’ai pu enfin accéder à cette lecture bienfaisante.



Lu en quelques heures, ce petit roman de science-fiction est tout le contraire des dystopies et des romans post-apocalyptiques dont nous abreuve la littérature, à commencer par le « 1984 » qui m’avait rebutée.



Ici, rien de tout ça : nous sommes dans le futur, les robots se sont révoltés bien des années auparavant et les humains ont tout simplement accepté leur départ de la civilisation humaine. Depuis, les hommes se sont adaptés et vivent heureux dans la bienveillance et le désir de bien faire en harmonie avec la Nature et la société. Dex, moine de thé, ne déroge pas à cette habitude de vie, et rend les gens heureux. Mais lui-même ne l’est plus, et veut à tout prix partir dans les régions non « civilisées », à la recherche de lui-même. Il rencontrera un robot bien humain !



A vrai dire, j’ai apprécié cette ambiance cocoon, pleine de douceur. Mais deux choses m’ont en énervée, et je m’explique. D’abord, comme Dex est un non-binaire, le pronom le désignant est « iel » pour le pronom -sujet, ou « lea » si c’est un complément d’objet direct ou indirect. Et le roman est truffé de ces pronoms, évidemment ! Je déteste l’écriture inclusive parce qu’elle complique la lecture, alors que la langue française est déjà si compliquée ! Je plains franchement les dyslexiques et tous ceux et celles (remarquez que je n'ai pas écrit « toustes celleux », horreur !!!) qui ont des problèmes de lecture et d’écriture !

Deuxième raison d’être chiffonnée : le roman ne donne pas de réponse à la question existentielle que se pose Dex. J’aurais voulu que cela soit plus creusé, mais tant pis. Il faut dire que je suis en train de lire en même temps, à petites doses, « Le goût de vivre » d’André Comte-Sponville, qui donne moultes pistes de réflexion sur la nature humaine…



Je trouve que ce roman est une bonne approche de la réflexion philosophique, une approche, je répète, pas une réflexion approfondie. Il aborde la question de la nature et de la culture, du sens de la vie, de la nature humaine, de l’écologie.

Il y a une suite, et je la lirai peut-être.

Mais ne comptez pas que je me recycle en écriture inclusive !

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