Café des libraires - Survivre : le c?ur des femmes
Dimanche 23 septembre 2018 de 14h00 à 15h00
Brit Bennett - Jean Hegland - Gabriel Tallent - Valérie Caffier
Jusque dans leur chair, les femmes ont, de tout temps, été brimées, violentées, brisées. C'est peut-être cette lutte pour la survie, comme inscrite dans leurs gênes, qui les rend aujourd?hui si fortes et si combatives. Trois portraits de femmes aux prises avec la rudesse du monde.
Colette raconte
[...] J'ai beau me poser en vieux garçon, c'est un plaisir encore très féminin que je goûte à être la seule femme des déjeuners Goncourt, entourée d'un aréopage d'hommes. Cinq, six, huit, neuf hommes.
D'authentiques hommes- et l'âge ne fait rien à l'affaire-avec des défauts, des séductions d'hommes. (...)
Humainement ils se disputent, et Dieu merci ils sont gourmands...
Aucun d'eux n'a quitté l'amour d'écrire ni l'amour des écrivains. Qui donc, sinon cet amour, nous soutient, annuellement, sur le chemin pavé d'oeuvres que nous lisons ? Car nous lisons. Nous lisons cent, cent vingt volumes. (...)
Je vous répète que nous lisons. Etrange assemblée, qui sur dix membres compte dix lecteurs scrupuleux!
Consciencieux, capables d'erreurs, capables de récompenser un écrivain encore vert, de faire crédit à une promesse, et de le regretter l'année suivante ...
Croit-on que nous sommes sur un lit de roses, quand sonnent les dernières heures des compétitions ?
(...) Pour me contenter, il faudrait que les Dix fussent une vingtaine- au moins. (p. 95)
Colette [ Déjeuner, vote..." Le Fanal bleu, Fayard, 1987 ]
Les clans sont ainsi définis: ils n'ont pas fini d'en découdre par le verbe et par la force, avec des hauts faits et parfois des coups bas. Ces fougueux messieurs ont le heaume près du bonnet : tout est prétexte à discorde.
Michel Tournier
Les Mots et les mets
(...)
Boire, manger, parler. C'est tout le programme d'une société littéraire où la convivialité fait loi et dont le siège social officiel est un restaurant. Un mot me vient à l'esprit qui rassemble ces trois actes fondamentaux. J'ose à peine l'écrire cependant, car il contient une dose d'insolence à peine tolérable. Osons pourtant, et gardons-nous de nous prendre au sérieux. Ce mot, c'est -baragouin-. Rappelons qu'il vient du breton, et se compose de -Bara-, pain et -Gwin-, vin. (p. 68)
A une demi-heure de marche sur la voie royale 57 qu'empruntaient les rouliers et les voyageurs entre Paris et Mulhouse,la Verrerie occupait la moitié des hommes du Village.Avec les inondations et les loups,le verre fournissait la principale matiére des conversations dans les familles ou sur les bancs du jeu de quilles en attendant son tour de jouer.
Jacques Callot, confortablement traité au pensionnat artistique des Offices - logé, blanchi, nourri, fourni -, assure l'illustration des faits d'armes des Médicis avec la sérénité de l'observateur neutre que ne chatouille pas, malgré l'admiration pour ce lieu privilégié, la fibre patriotique.
Souvenirs d'un ours [III ] --Lucien Descaves (1932)
(...)Si ce -Voyage au bout de la nuit- n'est pas un chef-d'oeuvre , convenez qu'il mérite qu'on s'y intéresse ! Il révèle un fameux tempérament. Notre devoir vis-à-vis de Goncourt est, je vous le rappelle, d'encourager les tentatives nouvelles et hardies de la pensée et de la forme. Sous ce rapport, nous ne trouverons pas mieux. De plus, admettez que je suis reconnaissant à Céline d'avoir réveillé note jeunesse lointaine, le temps où je découvrais - L'Assommoir- ...(p. 53)
La vie des vieilles cartes de géographie est un roman.
- C'est bien cela : "Fais la vaisselle!" Nous n'en sortons pas. C'est ce que je veux te dire justement. Il faudrait que tu passes un jour chez Baignol et Farjon. Les hommes ne veulent pas de nous dans leurs syndicats. Ils se méfient des femmes.Pourtant, même après des années de boîte et bien qu'aussi expérimentées et qualifiées qu'eux, nous sommes payées trois fois moins.
Préface d'Hervé Bazin
(...) Habituée des dîners Magny et des déjeuners en ville, Edmond de Goncourt n'imaginait pas d'assemblée littéraire avec discussions et débats ailleurs qu'autour d'une table confortable au menu de qualité. La littérature du XIXe siècle ne lâcha la plume que pour la fourchette. Emile Zola prenait volontiers place au fourneau et adorait la bouillabaisse. A Croisset, Flaubert servait à ses invités un turbot assorti d'une sauce mémorable pour Maupassant et pour Goncourt. (p. 11)
Michel Tournier
Les Mots et les mets
Nous mangeons, nous buvons et nous parlons, trois activités qui s'accordent fort bien depuis le fameux Banquet de Platon de grande mémoire. (p. 66)