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Critiques de Caroline de Mulder (132)
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Manger Bambi

"Le titre laissait déjà présager le malaise. Derrière le projet carnivore se profilait l'inversion des valeurs, l'atteinte à la dignité animale, la profanation d'une figure exemplaire du panthéon enfantin, bref l'acte criminel et même blasphématoire.

Bien vite on voit que Bambi est une jeune fille, et si elle n'est pas aussi fraîche et innocente que le petit animal Disney, elle est tout aussi frêle et sympathique (certes, en mode sale gosse), et elle a beau être armée d'un redoutable Sig Sauer dont elle sait se servir, on anticipe que ça va quand même mal se passer parce qu'une gamine de 15 ans et qui joue les bombes sexuelles pour attirer et détrousser des vieux cochons, c'est pas le signe d'un bon départ dans le travail salarié, même si on n'a rien contre le statut d'auto-entrepreneur et le métier d'acteur.(...)

Ce qui est fort dans ce roman, c'est tout d'abord l'écriture, une belle immersion dans la langue des banlieues, un rythme enlevé, des descriptions sensibles, ensuite c'est le personnage de Bambi, sa colère, ses angoisses, sa mère, ses beaux-pères, les hommes qu'elle croise, sa radicalité. Enfin, c'est l'histoire, ce récit poignant d'une enfant perdue, ses copines à la vie à la mort, coéquipières de ses virées dangereuses, au plus près des fantasmes sexuels des bonshommes, sans que jamais il ne soit question de sexe, mais juste de violence, d'arnaques, de coups tordus et de prises de risques inconsidérées. (...)

Bref, un très bon roman noir, une belle découverte !"

François Muratet dans Double Marge (Extrait)
Lien : https://doublemarge.com/mang..
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La pouponnière d'Himmler



Parmi les idées saugrenues et aberrantes de l’Allemagne nazie, figure sûrement leur création d’une association visant la naissance d’enfants aryens purs, dignes de la race des seigneurs. Cette association, qui porte le nom de "Lebensborn" ou Source de vie, fut créée dès le 12 décembre 1935. Elle ressortait sous le haut patronage de l’horrible Reichsführer-SS, Heinrich Himmler, né le 7 octobre 1900 à Munich, grand manitou de la redoutable Gestapo, qui s’est suicidé à Luneburg, en Basse-Saxe, le 23 mai 1945.



La plus célèbre enfant de Lebensborn est incontestablement Anni-Frid Lyngstad, chanteuse du groupe ABBA, née le 15 novembre 1945 près de Narvik en Norvège, comme une des 12.000 enfants de mère norvégienne et père allemand. Ce n’est qu’en 1977 que Frida a rencontré son père naturel, le sergent Alfred Haase, Allemand et marié.



Sur le "programme" Lebensborn existe une multitude de livres, documentaires, films, séries télévisées et même un jeu vidéo "Mon enfant Lebensborn".

Il y a entre autres les ouvrages de Will Berthold (1958), de Georg Lilienthal (2003) et le plus connu "Lebensborn, la fabrique des enfants parfaits" de Boris Thiolay de 2014.



Les inspirateurs théoriques de ce phénomène curieux ont été essentiellement le Français Arthur Comte de Gobineau (1816-1882) avec son "Essai des inégalités des races humaines" de 1853 ; le Britannique Houston Stewart Chamberlain (1855-1927) avec "La Genèse du XIXe siècle" ; et l’Allemand Alfred Rosenberg, le philosophe du Parti Nazi, né en 1893, condamné à mort lors du Procès de Nuremberg et pendu le 16 octobre 1946.



Je m’excuse si j’ai été un peu long à présenter l’arrière-plan du merveilleux roman de ma compatriote, Caroline De Mulder. Pour nos jeunes lectrices et lecteurs, j’ai pensé que mon petit résumé, mettrait cependant davantage les qualités de ce roman en relief.



Au Heim Hochland, le premier centre de l’association Lebensborn à Steinhöring, en Haute-Bavière à une cinquantaine de kilomètres à l’est de Munich, sous la direction de l’Oberführer (colonel) dr. Georg Ebner (1892-1974), l’ancien toubib de la famille Himmler, l’auteure nous présente ses protagonistes principaux, début décembre 1944, à l’occasion de la visite de l’affreux Himmler pour une cérémonie de "Namengebung" qui, au lieu de baptême chez nous, consistait à donner un nom et un parrain à un nouveau-né de façon à l’admettre dans la communauté nazie.



Ainsi, nous faisons donc la connaissance de l’adolescente Renée, originaire de Caen en France, qui attend un bébé de celui qu’elle croit être son grand amour, le soldat allemand Artur Feuerbach, à qui elle "pense tout le temps,... même sans y penser".

Un amour de jeunesse prohibé, qui lui a valu d’être chassée de chez elle et tondue.

Elle écrit aussi des lettres d’amour à son Artur, qui est quelque part sur le front et ne répond jamais à ses billets doux.

Dans le doute, mais plein d’espoir, notre Renée fait des sacrés efforts pour apprendre, en attendant, la langue de Goethe.



Autre personnage attachant : "Schwester" ou sœur Helga, un monument vivant d’humanité, qui dans cet enfer essaie d’aider ses pauvres jeunes mères avec leurs bébés et les futures mamans dans leur grossesse, tout en se chargeant des tâches administratives du docteur Ebner, son chef.



J’arrête là mon synopsis, pour avouer mon honte que l’auteure de ce remarquable récit m’était complètement inconnue, c’est d’autant plus grave que Caroline De Mulder est née dans la ville de Gand, où j’ai fait mes études secondaires, quoique quelques années avant sa naissance en 1976.



Je regrette qu’à cause d’un arrêt de cœur, mon cardiologue m’a interdit les grandes distances, car j’aurais vraiment aimé me rendre à Paris, le 26 avril prochain, pour la rencontre avec Caroline De Mulder, organisée par Babelio et l’éditeur Gallimard, l’entendre présenter son œuvre et surtout lui offrir mes sincères félicitations.

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Manger Bambi

Bambi, jolie môme mais qu'as-tu fait ? Regarde-toi, de quoi t'as l'air là ? T'es qu'une gamine Bambi, t'as pas seize ans et t'as déjà l'Rimmel qui fout l'camp, qui coule des rigoles sombres sous tes beaux yeux tristes. T'as trop pleuré jolie môme ? Non, tu pleures jamais toi, sur le vide de ta vie, sur celle que tu rêves d'avoir, une vie de princesse comme dans les contes des Mille et Une Nuits mais la vie c'est pas un conte merveilleux Shéhérazade, ton palais c'est rien que quatre murs gris tout décrépis d'un quartier ouvrier, sans chaleur ni tendresse car la vie c'est une putain d'embrouille qui te fait pas de cadeaux si t'es pas née là où il faut. Alors tu refais l'histoire à ta façon, princesse glauque et sordide, sans te douter un instant que tes petits jeux sont dangereux.



Hé toi ! Oui toi, le jeune homme dans la fleur de l'âge, l'hédoniste qui cherche une petite à gâter, luxe, calme et volupté. Gaffe si tu croises la route à Bambi, elle est bien capable de te faire la peau après t'avoir vidé les poches, même pas sûr qu'elle te laisse ton slibard, tout juste un peu d'amour propre. Tu ne le sais pas mais Bambi c'est Hilda pour l'état civil, son délire c'est de racoler et dépouiller des vieux-beaux friqués et bien mis comme toi sur les sites de Sugar Dating. Et toi tu n'y vois que du feu, juste l'envie de croire que tu peux encore pécho une petite poupée, un petit bonbon à peine sorti de l'enfance en alignant quelques billets.



Alors Bambi rêve de Thaïlande, de paradis, d'îles lointaines, de cartes postales... Elle redevient une petite fille, Bambi a le seum, Bambi a le spleen des femmes qui sont fatiguées d'avoir trop vécu. Entre deux ou trois deals de shit du côté du "Santa Barbara" avec son gang de filles et un passage à tabac d'un pigeon qui n'a pas su résister à sa petite moue de baby doll, elle essaye juste d'oublier qu'elle n'a pas la vie qu'elle mérite, que sa mère picole et qu'elle a la main un peu trop leste quand son actuel (qui lui aussi aime un peu trop les petites) se fait la malle. "La vie est une pute faut la bouyave" alors Bambi sort le gun à papa et joue à la guerre. Elle gueule, elle beugle, elle crache son fiel, sa rage, elle griffe pour faire mal et pour se faire mal car elle est comme ça Bambi, elle préfère avoir mal, plutôt crever que de se laisser aller à pleurer.



Un récit sombre, une écriture crue et féroce. Caroline De Mulder reprend avec brio les codes et le langage spécifiques de la rue en y incluant des passages d'une grande intensité, elle laisse parler le corps, la souffrance psychique. Elle dresse le portrait au vitriol d'une jeunesse à peine sortie de l'enfance et déjà désenchantée : Bambi adolescente paumée et borderline, véritable petite bombe à retardement, façonnée à l'envi par une société de plus en plus consumériste, rejette, vomit littéralement sa vie étriquée et n'a aucune conscience de la gravité et de la barbarie de ses actes, elle reproduit les violences qu'elle subit car c'est la seule manière pour elle de se révolter contre une société dans laquelle elle se sent complètement exclue et sans aucuns repères qu'ils soient familiaux ou sociaux.



Vous l'aurez compris Bambi n'aura fait qu'un bouchée de moi. Je me suis pris un aller-retour en pleine face, un uppercut, et à l'issue de ma lecture je n'ai eu qu'une envie c'est de prendre la gamine dans mes bras et de la réconforter. Je n'en dis pas plus et je vous laisse découvrir cet excellent roman de la demoiselle De Mulder.



"T'es qu'une fleur de printemps

Qui s'fout d'l'heure et du temps

T'es qu'une rose éclatée

Que l'on pose à côté

Jolie môme..."







* Merci aux petits amis : Sam, Majero, Christophe-bj, Wyoming qui m'ont amenée jusqu'à Bambi.



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Bye Bye Elvis

Elvis, John... John, Elvis... se jouent de nous avec une infinie tristesse tout au long de ce roman. Fusionnent leurs âmes chagrines, battent à l'unisson leurs coeurs fatigués de trop d'excès, pareils à l'étoile, qui après avoir brillé si fort à son firmament, se désagrège en poussière. Poussière de corps, poussière de peaux, de cheveux, d'ongles, de rognures, de raclures, le poids d'une vie trop lourde à supporter.

Il m'aura fallu attendre la page 100 pour parvenir à entrer dans ce double récit qui dès les premières pages a provoqué en moi une sensation de malaise tant l'autrice fait mouche en disséquant dans les moindres détails l'état de décrépitude du corps, de l'esprit, le déclin contre lequel on ne saurait lutter, ni vous, ni moi, ni John White, ni Elvis, pauvre Elvis...



C'est bien connu les mythes ne meurent jamais. Nombreux sont les adorateurs d'Elvis qui encore aujourd'hui, plus de quatre décennies après sa mort, sont intimement persuadés qu'il est toujours vivant, quelque part, loin, sur une île déserte ou plus près, à Paris. Il aurait refait sa vie sous une nouvelle identité, il aurait 87 ans. Les rumeurs les plus folles ont circulé après sa mort tragique le 16 août 1977, laissant des milliers de fans éplorés dans le manque de leur idole. Aussi Caroline De Mulder n'a pas hésité à se servir de la rumeur et c'est ce qui fait tout le charme de son roman car après tout qu'est-ce que la rumeur si ce n'est un fantasme, une histoire née de l'imaginaire collectif auxquels chacun est libre de croire ou pas le temps d'un récit de 350 pages.



Avec "Bye Bye Elvis" Caroline De Mulder sauve Elvis de sa fin tragique, elle le ressuscite, elle le libère de ses démons, de Graceland en nous racontant à 17 ans d'intervalle une autre histoire, celle de John White. John White, dont le nom fait curieusement écho au blanc immaculé des tenues de scène d'Elvis. Nous saurons peu de choses sur cet américain excentrique et désargenté, si ce n'est qu'il est vieillissant et en mauvaise santé et qu'il s'est expatrié à Paris pour des raisons qui resteront obscures même pour Yvonne, la douce et fragile Yvonne qui vient de perdre son mari et s'apprête à passer vingt années au service de ce curieux personnage.



En alternant judicieusement les deux récits (Elvis/John White) l'autrice laisse petit à petit apparaître le mimétisme qui existe entre les deux hommes, laissant le doute s'insinuer en nous. Et si Elvis n'était pas mort ce 16 août 1977 dans sa prison dorée de Graceland, toujours entouré d'une foule de personnes mais tellement seul, seul à en crever, fatigué de trop de "pilule mon amour", Dexedrine, Demerol, Dexamyl, discipline, dévouement, dévastateur ?



"Bye Bye Elvis" c'est la vie qui nous trompe, c'est la vie qui s'en va tout doucement sur la pointe des pieds, c'est l'histoire douloureuse mais aussi fabuleuse d'un gamin blanc qui chantait comme un noir et qui malgré lui a décroché la lune pour devenir la star planétaire que nous connaissons tous, une star obsédée par son apparence physique qui s'est brûlée les ailes à force de trop de lumière. "Bye Bye Elvis" c'est l'histoire d'Yvonne qui aura donné vingt ans de sa vie à John White, le pansant, le berçant, lui tenant la main comme à un enfant, l'enfant qu'elle n'aura jamais eu.



L'écriture de Caroline De Mulder est un savant désordre, une cacophonie de mots, crue, lyrique, elle nous gifle, elle nous caresse, nous envoûte tel un sortilège maléfique.

Il faut reconnaître que l'autrice nous dresse un portrait affligeant et sans concession d'Elvis dans l'intimité : toxicomane non repenti aux lubies toutes plus pathétiques les unes que les autres, enfermé dans un système sur lequel il n'avait aucun contrôle si ce n'est obéir aux ordres du Colonel Parker qui en aura fait une bête de scène, une bête de cirque, usée jusqu'à la corde, machine à faire du cash, que la célébrité et la gloire auront rendu complètement mégalo et cassé en mille morceaux.



Un beau roman, douloureux jusqu'à la dernière page qui ne conviendra pas je l'imagine aux fans de l'artiste qui préfèreront garder en tête l'image de la star éternellement jeune et romantique entonnant "Heartbreak Hotel" plutôt que celle du triste sire à Vegas, engoncé dans ses costumes blancs, le visage boursouflé, peinant à se rappeler les paroles de ses chansons.

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Manger Bambi

Bambi est une jeune fille de presque seize ans qui vit avec sa mère alcoolique dans une grande précarité. Avec son amie Leïla, elle écume les sites lui permettant de se mettre en contact avec des hommes beaucoup plus âgés et « généreux ». Mais c’est elle qui leur fait passer un sale quart d’heure. ● Comme le titre le suggère, c’est un roman très noir mais aussi très addictif, très bien construit et très bien écrit dans une excellente stylisation de ce langage jeune des cités qui est celui de Bambi. ● Le rythme ne se relâche jamais, ce qui n’empêche pas l’histoire d’être poignante, car Bambi est avant tout une victime ; et elle n’abandonne jamais sa mère qui pourtant lui rend la vie infernale. ● Le portrait de ces adolescentes en déshérence est remarquable. ● Je conseille fortement ce roman ! Et je remercie daniel_dz de me l’avoir fait découvrir. Je ne connaissais pas l’autrice, je vais lire d’autres livres d’elle.
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Manger Bambi

Bambi, un roman âpre et sombre. Bambi, une adolescente de quinze ans bientôt seize ans. Voilà. Tout est dit. Bambi, c’est pas comme un conte de fée, de toute façon l’histoire de Bambi n’a rien d’un conte pour enfants, Bambi c’est un conte pour adultes bourré de rage et de tristesse. Bambi, le gun dans son jeans slim, ce sont des SMS auxquels un vieux con comme moi ne comprend pas grand-chose. Mais il comprend qu’à l’intérieur de sa mignonne petite tête, cela bouillonne, sauvagement. Elle est prête à exploser, et le moindre de ses rencarts « sugar dating » peut virer au bain de sang.



Dans cette poésie de l'asphalte qu'il faut appréhender au départ, je découvre un autre monde que les clichés d'un conte pour enfant auxquels Bambi ferait référence. Une violence féminine que l'on ne soupçonnerait même pas en regardant la douceur du visage de l'auteure Caroline de Mulder. Une enquête sur la jeunesse dans la rue que l'on pourrait autant placé dans la banlieue de Paris que de Namur.



Le sugar dating, ce sont ces rencontres entre de jeunes filles avec des vieux messieurs, des pauvres types, des vieux cons, des pervers avec des femmes qui veulent plus baiser. Alors, le gun en main, Bambi se venge, se sert, noie son chagrin, crie son désespoir, hurle sa rage. Intense, brutale, trash. Elle braque, elle vole, elle humilie. Une vie sans repos mais tout en colère. En colère contre sa mère, contre les mecs de sa reum, contre l’école, contre la société. Cela fait beaucoup à quinze ans presque seize, et cela fait surtout un roman tristement noir, là où il n’y a plus d’espoir comme lorsque l’ampoule du lampadaire du coin de la rue a explosé et que la nuit n’expose même plus la mélancolie de sa lune ou la brillance de ses étoiles. Le noir complet, absolu, le genre de noir où tu te noies profondément et où seul le rouge sang apporte une terrible nuance de couleur. Sauf que même le sang, au bout d’un certain temps, vire au noir.
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Manger Bambi

Voilà un roman très noir, dénonçant les violences féminines, très souvent tues, au travers des sites Internet des sugar-babies. En utilisant ce nom gentillet, ce n’est finalement pas moins qu’une forme de prostitution, souvent pour de très jeunes filles en mal d’argent mais aussi de reconnaissance.



« Manger Bambi » n’est pas un conte de fée, bien loin de là. C’est un livre à la fois vif et percutant, exprimant le désoeuvrement d’une jeunesse où la paupérisation et la violence contraignent à des voies détournées pour celles qui veulent tout, tout de suite.



Il n’est pas évident de rentrer dans l’histoire dès les premières pages vu l’emploi de ce nouveau parler « jeune » des cités (pourtant, je n’ai que 35 ans; ) avec le verlan et le langage SMS que l’auteure, Caroline de Mulder pousse très loin. Mais une fois cette difficulté passée (qui risque pourtant de déplaire à plus d’un lecteur), c’est un roman très actuel qui sonne juste et que j’ai dévoré.



Il s’agissait de ma première découverte de cette auteure belge de 45 ans qui compte déjà 5 livres à son actif. Elle est lauréate du Prix Victor-Rossel 2010 pour Ego Tango et du Prix Auguste-Michot 2018 pour Calcaire.
Lien : https://www.musemaniasbooks...
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Manger Bambi

Roman noir de l'adolescence paumée qui présente assez d'originalité pour accrocher le lecteur. Déjà le titre, Bambi est en fait Hilda, voire Dada, jeunette de presque seize ans (son anniversaire intervient en cours de lecture), et cette Bambi n'a pas froid aux yeux, son objectif est de faire de la "thune" en accrochant des hommes en quête de chaleur sexuelle avec des minettes peu farouches. Ils seront bien déçus, humiliés et plumés.



Ensuite le langage, essentiellement du verlan et des dialogues des cités qui ne sont pas toujours "izi" (faciles) à suivre même si on comprend l'ensemble malgré quelques doutes sur certains mots.



Et enfin, la socio-psychologie développée tout au long d'une sorte de road-movie miniature de Bambi et de ses partenaires pas toujours très fiables envers elle. Elle, elle sait ce qu'elle veut, de la "thune" avant tout pour mener une autre vie et fuir "Nounours" le dernier amant alcoolique de sa mère qui se joint à elle pour la maltraiter physiquement. Mais, Bambi n'est pas Pimprenelle et Nounours finira par tâter de son "gun".





Quelques belles réflexions sur la "life" qui "bousille" Bambi. C'est vrai qu'elle est pas mal fracassée la pauvre et devient attachante au fur et à mesure de la lecture qui permet de comprendre finalement une certaine moralité qu'elle porte en elle.



J'ai bien aimé les rares descriptions de l'environnement, particulièrement celle du jardin sauvage de sa maison, la dégustation avortée du homard et, finalement, l'intégralité de ce court roman chargé d'adrénaline dans lequel on ne s'ennuie pas sur les pas saignants de Bambi.



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Manger Bambi

Elles sont deux, deux adolescentes, dans une chambre d’hôtel de luxe, attifées comme des… Heu… Bref ! Elles ont commandé en roomservice du homard. Mais là, elles se débattent avec la carcasse de la bête sans arriver à se sustenter. Elles devraient demander conseil à l’homme présent dans la chambre. Lui sait certainement. Mais il va avoir du mal à leur répondre. Il est bâillonné sur le lit…





Critique :



Mesdames et Messieurs, si vous attendez des « héroïnes » de cette histoire qu’elles s’expriment dans un langage châtié, approuvé par l’Académie française, ne vous attardez pas ! Vous risquez un malaise ! Caroline De Mulder fait parler « ses filles » de façon très crédible… Pour des filles de banlieue ! Pas de banlieue chicos ! Non ! D’une de ces banlieues où la misère est présente à tous les nivraux et l’éducation au dernier sous-sol plutôt qu’à l’ultime étage de l’instruction d’où l’on a une vue sublime sur le Larousse, le Robert et le Littré. Ses personnages sont-ils crédibles ? Oh, que oui ! Pas seulement parce que des gangs de filles extrêmement violents ont vu le jour, mais aussi parce que, malgré les horreurs qu’elles peuvent commettre, elles n’en restent pas moins des êtres humains que la vie n’a pas épargnées et qui décident de prendre ce qu’elles n’ont pas, tout en manifestant parfois des sentiments tels que l’amitié, la fidélité, l’amour filial, etc.

C’est là aussi que certaines lectrices et lecteurs risquent de faire les grands yeux à l’auteure : ces filles ne sont pas des victimes ! Ne cherchez pas les prédateurs parmi les hommes ! Ces gamines à peine pubères sont des prédatrices. Attention : Caroline De Mulder ne dit pas que c’est bien ! « Super les filles, il faudrait dire « frères » si l’on parle le même langage qu’elles, super les filles ! Vous êtes au moins aussi douées que les mecs pour commettre des horreurs. »

Elle constate simplement que des femmes, des jeunes filles, ici, peuvent aussi commettre des atrocités et se montrer parfaitement malveillantes. (Ouille ! Je sens que certaines féministes qui considèrent toujours les femmes comme des victimes ne lui pardonneront pas, alors que d’autres féministes ne lui en tiendront pas rigueur puisque ces adolescentes deviennent les égales des hommes, fut-ce au travers de crimes). Soyons clairs : personne, et certainement pas Caroline De Mulder, n’encourage les comportements décrits dans ce livre. C’est un roman ! Une fiction, quoi ! … Mais grâce à l’immense talent de Caroline De Mulder, on y croit… Ou pas si on est convaincu.e que jamais une fille ne pourrait commettre de tels forfaits. Et pourtant, Hilda, Bambi pour son « crew », et la blonde (à perruque), Leïla, n’hésitent pas.

Bambi et Leïla attirent des hommes, mariés de préférence, dans des pièges qu’elles dressent via des sites de rencontres où des hommes plutôt âgés cherchent des contacts avec des jeunes filles pour des échanges tarifés. Elles les piègent pour les dépouiller comptant sue le fait qu’ils n’oseront pas porter plainte puisque Bambi n’a même pas seize ans. Les hommes ont plus à perdre qu’elles… Beaucoup plus ! « Plutôt crever que de se faire gauler la main dans le string. »

Et Bambi est tellement douée qu’elle n’a aucun mal à faire chanter le directeur de son établissement scolaire grâce à ses talents de comédienne, et à l’habile préparation de sa mise en scène, qui font d’un innocent un sacré vicelard !

N’allez surtout pas croire que ces furies, dont au moins une a des airs angéliques, ne s’en prennent qu’aux mâles ! Une fille de leur âge est aussi une belle victime potentielle, tout simplement parce qu’elle a de jolies pompes aux pieds et qu’elle est jolie, alors si en plus elle refuse de refiler ses godasses, elle ne devra pas venir se plaindre s’il lui arrive une ou deux bricoles.

C’est un ouvrage à déconseiller aux âmes sensibles tant la plupart des passages sont durs. Mais la violence n’est pas étalée juste pour obtenir un effet gore. Elle est là parce que l’histoire le veut pour être crédible.



Ce n’est pas un polar, ni un thriller, ni un roman policier… C’est un roman noir de chez noir !

Mais sortez de l’obscurité et lisez-le. Il est remarquable !

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Bye Bye Elvis

Un livre inconnu où presque et qui cependant ne manque pas d’intérêt.

Caroline de Mulder met en parallèle la vie du King et celle d’un américain anonyme, vivant à Paris, 17 ans après la mort de la star.

Quel rapport entre ces deux hommes ? Y-en-a-t-il un d’ailleurs ?



En tissant habilement ces deux histoires, l’auteure raconte Elvis, l’ascension puis le déclin jusqu’ à la chute finale. L’histoire commence par la fin, sur son lit de mort Elvis est au milieu des siens, famille, amis parasites, gardes du corps.

S’en suivent les étapes de sa vie, la montée au firmament des stars adulées, avec des milliers de fans en transe à sa moindre apparition, jusqu’à la descente aux enfers de la drogue et des médicaments.



A ce point de ma critique, je me dois de préciser mon adoration pour ce chanteur que j’ai aimé, que j’aime et que j’aimerai toujours.

Le quitter au bout de quelques pages pour découvrir la vie d’un vieil homme anonyme dont le cerveau bat la breloque m’a quelque peu désarçonnée.



C’était sans compter sur le talent de conteuse de l’auteure qui m’a aussitôt embarquée dans cette vie aussi monotone que mystérieuse.



A mesure que les histoires avancent dans des lieux et des époques différents, les liens apparaissent, des similitudes dans les situations, des réflexions, des attitudes.

Caroline De Mulder montre deux tragédies, l’une sous les feux de la scène, l’autre dans l’anonymat banal du déclin solitaire. Deux univers différents et la même douleur, les mêmes souffrances, la même solitude, les mêmes plaies des mêmes failles.



Le parallèle entre ces deux existences est traité avec pudeur et tendresse.

Il ne s’agit à aucun moment d’une biographie d’Elvis Presley, même si l’auteur a fait de nombreuses recherches pour relater des pans d’une vie hors norme.



Bye bye Elvis est un roman que j’ai adoré.



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Bye Bye Elvis



Et si le roman le plus Rock’n Roll de la rentrée était Belge ? Et si Elvis n’était pas mort à Graceland le 16 Aout 1977 ? Caroline De Mulder s’empare cette légende urbaine pour nous livrer une « biographie » du King pleine de larmes, de sueur et de divers fluides corporels. La vie du King n’a pas été un jardin de roses. Fils de pauvres devenu riche à millions il passera sa carrière à se protéger en s’entourant mal : un colonel manager escroc notoire, une bande de Garçons parasites qui le suivent partout, filles et mères hystériques prêtes à tout, famille cannibale et vers la « fin » de sa vie une énorme couche de graisse véritable air bag contre le mal-être.



Et si Elvis n’était pas mort et enterré à Graceland, Memphis, Tennessee ? Peut-être finirait-il sa vie à Paris dans un immeuble cossu du XVIe arrondissement, au bon soin d’Yvonne. Cette veuve dévouée, tour à tour gouvernante infirmière maman,panse et cajole un vieux monsieur dont elle ne sait rien. Et surtout Yvonne est discrète et bienveillante.



Amour, gloire et beauté, quête impossible.Vrai-faussebiographie intelligente et sans concession, Caroline De Mulder nous parle du rêve et du cauchemar Américain, nous parle de vieillesse, de solitude, d’amour non partagé avec tendresse et sensibilité. Un bon roman.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Manger Bambi

Vous pourriez imaginer mille choses à travers le titre, pourtant aucune ne sera celle à laquelle vous penserez. Vous pourriez imaginer une intrigue sur la cause animale, pourtant, même s’il est question d’animalité, ce n’est pas celle à laquelle vous penserez. Vous pourriez imaginer que l’auteure souhaite parler de ces animaux en voie d’extinction, pourtant même s’il est question de bestialité, ce n’est pas celle à laquelle vous penserez…



Manger Bambi, quel drôle de titre que cette référence à l’enfance avec le dessin animé éponyme, pourtant ici point de contes à la clé, sauf un conte des temps modernes où l’horreur côtoie l’enfance, l’adolescence. Un parallèle avec la perte de l’innocence et de ces illusions enfantines.



Bambi à l’aube de ses quinze ans a déjà tout du monstre… Bambi mord avant de l’être, elle s’est construit dans un rôle lui permettant de prendre sa revanche. Ce qu’elle veut c’est du pognon pour s’en sortir. A la tête d’un trio d’ado toutes aussi perdues qu’elle, elle se sert d’un site de sugardating, sur lequel ces messieurs, bien plus âgés, cherchent de la chair fraîche… Elle monte des traquenards, dignes des plus grands bandits, elle emprunte les codes des mecs pour se faire sa place.



On pense à tort que la violence est réservée aux garçons, or, lorsqu’elle est utilisée par les filles, elle est aussi virulente, si ce n’est plus. Comme si elles devaient prouver qu’elles sont capables d’être violentes. Ce qui est horrible dans ce livre ce n’est pas tant la violence, mais c’est le détachement avec lequel Bambi en use. Même ses copines ont du mal à la comprendre, ne comprennent pas dans quoi elle les entraîne. Sauf que Bambi, ne lutte pas seulement contre la société qui l’enferme dans sa misère, alors que d’autres ont tout, mais lutte surtout contre elle-même est ses démons.



Ce qu’elle n’a pas, elle le prend de force et prendre par la force lui donne un sentiment de puissance qui l’exalte. Pourtant, elle va se brûler les ailes et toute cette violence qui l’exalte et la broie de l’intérieur, va la consumer.



Ce n’est pas une simple histoire, c’est une histoire qui prend aux tripes, ce n’est pas une simple intrigue, c’est un roman sociétal qui pointe les dysfonctionnements de notre société moderne. C’est un roman sur la lutte des classes, sur la pauvreté et ce qu’elle peut engendrer. C’est l’histoire de la violence sous toutes ses formes et dans ce qu’elle a de plus abject. C’est l’histoire de toutes les Bambi dont la violence est le reflet d’un mal-être d’une grande profondeur. C’est l’enfance bafouée, l’absence de parents, c’est la violence comme héritage familial.
Lien : https://julitlesmots.com/202..
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Manger Bambi

Trois gamines qui jouent aux putes pour braquer et plumer de vieux vicelards. La chef c'est Bambi, la plus jeune qui tire sa force de sa rancoeur envers 'Nounours', l'ex de sa mère.



C'est assez 'trash' et pourtant on craque devant ces gamines paumées, Bambi si attachée à son alcoolique de mère, Julie, l'éducatrice à la dérive et dépressive harcelée par les filles.



Pas toujours crédible, mais c'est fort!

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Manger Bambi

Bambi, jeune fille révoltée de pas encore seize ans , est déterminée à sortir de la misère dans laquelle elle est plongée depuis sa naissance .



Avec ses amies, elle a trouvé un filon : les sites de sugardating qui mettent en contact des jeunes filles pauvres avec des hommes d'âges murs et friqués bien décider à les entretenir .



"La ravissante, c’est Hilda, Bambi pour son créa. Bambi à cause de ses yeux doux et de sa charpente légère, tout en pattes. Elle est en slim et top serré sur un torse sec, et gueule d’enfant grimée



Mais Bambi n'est pas la proie facile que ces messieurs vont imaginer . Et de victime de prédateurs libidineux , notre Bambi et son innocence bafouée vont vite inverser la tendance et faire subir à son tour cette violence qu'elle subit au quotidien .



Bambi a décidé de tout dézinguer, de bomber le torse et de rendre les coups au centuple, meme ceux qu'elle a pas subi.



Mais toutes ces frasques et ces dérives ne vont pas elles finir par mal tourner pour notre Bambi dont la vie est décidemment loin d'être un conte de fées?Cette virée trash et turbulente, Caroline De Mulder, dont on avait plus trop de nouvelles depuis un excellent roman sur Elvis il y a 6 ans, la raconte grâce à un style très contemporain , mélant argot des banlieuses et langue plus travaillée, un style punk, trash, dont la filiation avec une Virginie Despentes semble assez évidente.



Evidemment malgré son titre, Manger Bambi n'a évidemment rien d'un paisible conte de féés.



Bambi , jeune héroïne, écorchée vive, pleine de rage, de colère et de violence fait partie de ces personnages de littérature noire tourmentée et violente qui fait l'effet d'une mandale dans la gueule.



Brillant et violent !




Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Calcaire

L'intrigue concoctée par Caroline de Mulder nous emmène en Belgique, dans une campagne sans charme aux relents nauséabonds de purin, de choux pourris et de bien d'ordres choses encore.

Un homme y cherche , morte ou vive, la femme qu'il aime et qui a disparu brusquement, avalée ou envolée... Dans sa quête il rencontre une faune inquiétante; des individus louches, déglingués, fantasques, malades ou poètes qui évoluent dans une atmosphère de gadoue putride. C'est une plongée suffocante, qui peut mettre au bord de la nausée, dans les profondeurs d'un monde souterrain rempli d'ordures en tout genre.

Porté par un verbe nerveux, aux accents rocailleux et à la gouaille inventive, ce roman sonde la merditude des choses pour atteindre le coeur pur de la matière.

Un coup de coeur pour ce roman très, très noir et surtout vraiment bien écrit !
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Manger Bambi

Oubliez le gentil petit faon de votre enfance !



Ici, Bambi, c’est une jeune fille de quinze ans qui a bouffé de la vache enragée toute sa vie et qui en veut à la terre entière, sauf à sa mère, bizarrement, alors qu’elle est alcoolo, brutale, en décrochage total dans l’éducation de sa fille, du ménage, bref, elles vivent dans un taudis.



Bambi, pour se faire des thunes, décide de jouer avec les sugar daddy, ces hommes dans la force de l’âge qui veulent se faire des petites jeunes. Bambi ne fait pas ça pour payer ses études, comme bien des filles, mais pour palper le max de pognon et, au passage, leur écraser les roustons.



Bambi, c’est du maquillage genre camion volé, tu vois ? Faut masquer les coups qu’elle s’est prise dans la face, par sa daronne. Son daron ? Il a joué les filles de l’air, il a juste laissé son Sig Sauer et Bambi, elle aime jouer avec l’arme. Pour elle, c’est l’équivalent d’un doudou chez un marmot.



Avec son gun, elle se sent plus forte. C’est plus izi (easy) pour forcer les daddy à filer leur oseille.



Bambi, c’est cru, trash ! Autant dans le récit que dans le langage. Wesh, les mecs et les bitch, va falloir réviser son argot et son langage d’jeun’s ! TKT, Google vous aidera si vous captez pas.



Bambi, c’est du roman noir à fond d’blinde ! T’y aventures pas si tu cherches des petits cœurs roses, tu trouveras que dalle !



L’autrice te raconte la misère ordinaire, simple, courante, celle que l’on a croisé un jour dans notre vie et qu’on a vite détourné les yeux, se moquant de la gonzesse ou du mec qui sentait pas bon, sans penser que sa mère elle avait p’têt abdiqué le ménage.



Avec ce langage cru, celui des jeunes de nos jours, ça renforce le côté filles en perte de vitesse, filles qui se donnent un genre, filles qui se pensent les plus fortes, et qui le sont, sauf quand le vernis craque et qu’on se rend compte qu’elles ne sont que des filles paumées, apeurées. Mais plutôt crever la gueule ouverte que de l’avouer !



Avec un personnage comme Bambi et ses copines, tu sais pas trop si tu dois leur coller des claques dans leur gueule de petites merdeuses, les flinguer direct ou laisser pisser le mérinos.



Elles sont trop loin dans la misère sociale que pour espérer les en sortir. L’autorité, elles en veulent pas. Bambi encore moins. Elle aime que sa mère et ses deux copines. Parfois avec des clashs…



Bambi, c’est un roman noir vachement noir, mon frère. Le rayon de soleil ? Cherche pas et carre-le-toi bien profond où tout le monde pense. Y’a pas d’édulcorant, pas de sucre, ou alors, c’est de la poudre qu’on sniffe.



Bambi, c’est le récit d’une société qui part en couilles, qui abandonne ses jeunes, qui ne sait pas comment les aider, qui le fait, mais mal.



C’est l’histoire de gamines qui ne savent pas trop si elles veulent être sauvées ou pas. Et si oui, même elles ne savent pas comment, hormis palper le grisbi et se tirer en Thaïlande pour glander grave sa mère. Ce qui ne les aiderait pas, mais ça, elles en savent que pouic.



Bambi, c’est un roman noir qui te met mal à l’aise. C’est un roman trash qui parle de violences, de coups tordus, d’arnaques, de pétage de plombs de ce qui fut, un jour, une gentille petite fille toute mignonne et qui, à cause de cette chienne de vie, a mal tournée et est devenue enragée envers le monde entier.


Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Ego tango

Une jeune romancière belge, qui a obtenu le prix Rossel mais peu remarquée de l'autre côté de la frontière.

Si je ne l'avais pas découverte dans "Le Soir", je la croirais sans doute française mais ce n'est pas le plus important. Pour moi, c'est un peu la quintessence de ce qu'Alexis Jenni appelle le style blanc (alors que lui affectionne le gras) et le style conditionne tout le reste. Les phrases sont souvent elliptiques : les mots et le sens, le signifié et le signifiant. On peut étendre ce principe aux personnages, qui sont dépouillés au maximum de leur substance : le tango et l'amour et les deux se confondent plus ou moins.

Comment exprimer le reste ? Moins il y a de gras, moins le corps est en mesure de supporter les chocs, moins les protections naturelles amortissent les blessures. Caroline De Mulder se retrouve donc du côté des marges, de ceux qui n'ont rien pour les protéger, s'écorchent au moindre contact.

On peut y voir une relecture de Shakespeare : "Frailty, thy name is woman". La réinterprétation de cet aphorisme est sans doute moins phallocrate que l'original : ces personnages féminins que l'auteur affectionne sont un peu comme des roseaux. Ils sont ballotés par le vent, meurtris par la pluie. Désenchantés ou inconscients, ils vivent tout de même mais sans avoir l'impression de vivre.

C'est l'inverse pour le lecteur, qui lit sans avoir l'impression de lire : il vit.

Je pense un peu au titre d'un album de Bashung : "Play blessures". C'est une chose de le dire, c'en est une autre que quelqu'un l'écrive pour vous.
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La pouponnière d'Himmler

L'eugénisme et ses dérives.



Himmler lance, dès 1935, l'idée d'une race pure et germanisable qui sera développée dans des maternités (il y en aura aussi en France et en Belgique).



Le Heinhockland (Bavière) dans lequel nous pénétrons par la plume de Caroline de Mulder dévoile tous les mécanismes de cette idéologie.

Chaque personnage évoqué est représentatif des conséquences de cette guerre destructrice jusqu'à l'impensable, le difficilement supportable, l'inimaginable que l'on n'arrête pas de découvrir.



Helga, l'infirmière en proie aux questionnements rapidement engloutis par son embrigadement.

Doutes, malaise, abandon à l'Ordre.

Renée, la française tondue, rejetée, en attente de la naissance du fruit d'un amour allemand qui n'a que faire d'elle.

Marek, passé par Dachau et réduit à une condition animale, travaillant à la constructions des bâtiments devant accueillir des enfants : le degré zéro de la vie.



Des futures mères, des "infirmières", un docteur dirigeant, des bébés, des très petits, des convictions, des regards différents selon l'origine de la mère (étrangères, filles mères, etc...), des règlements organisant la vie quotidienne et les soins aux enfants.



Des non-dits, des pensées détournées vers le pire, des pensées uniques non habitées personnellement et le danger qui en découle.

Un but : la pureté de la race et sa construction forcée, la création d'un nouvel être, "l'élevage" de futurs seigneurs de guerre.

Des enfants "triés", examinés sous tous les aspects possibles (les mères aussi), des grilles tueuses : le tri amenant l'exclusion et/ou la mort précédée parfois par d'atroces souffrances dues aux expérimentations médicales.



Et puis l'arrivée des Américains, la délivrance et l'anéantissement. La douleur qui n'en finit pas.



L'auteure nous offre cependant une fin plus humaine avec Marek qui laisse s'entrevoir l'espérance d'une humanité plus digne de ce nom mais, que de chemins encore à accomplir avec le poids de ce qui fut vécu.



Caroline de Mulder, par une écriture "scalpel", précise, sans fioritures, qui fait exister êtres et lieux, remue en nous émotions, larmes, révolte, nausées, apitoiement, tendresse douloureuse.

Un roman qui raconte une réalité sans nom où l'humain est englouti sous une idéologie abjecte.



Dire est nécessaire, ne pas oublier, rester vigilants, voilà les leçons à tirer de ce livre coup de poing et magistralement bien écrit.





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Manger Bambi

Loin du conte que le titre pourrais faire croire, "Manger Bambi" bouscule par sa violence assumée, sa haine des autres, son langage cru. Caroline De Mulder dresse le portrait d'une jeune psychopathe, en rébellion contre la terre entière (les hommes surtout) qui redevient Hilda petite fille torturée (dans les deux sens du terme) auprès d'une mère alcoolique et non aimante. Bambi/Hilda morfle mais se venge. Les hommes (friqués bien sûr) qui croisent sa route font face à une jeune fille qui dégoupille grave, sans le moindre remord, incontrôlable. Bambi c'est une bombe à retardement qu'une enfance sacrifiée à rendu tout aussi perverse et violente. De Mulder, décoche des uppercuts qui laissent peu de répit au lecteur. Lecteur qui peine à trouver un peu d'empathie à cette gosse déjà sérieusement cabossée, à un âge souvent ingrat. On peut j'imagine, rester de marbre devant cette ambiance poisseuse, conflictuelle, à la cruauté assumée, Caroline de Mulder n'essaie pas de brosser dans le sens du poil. Deux cent pages en apnée. Mais force est de reconnaître, son travail remarquable sur les dialogues et cette ambiance anxiogène que De Mulder maintient tout du long. Seul bémol à mon sens, une fin qui survient de façon abrupte et qui m'a déçu par rapport à l'ensemble. Merci aux Editions Gallimard et à Babelio de m'avoir permis de découvrir Caroline de Mulder, une auteure (autrice) que je relirai avec plaisir.
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Nous les bêtes traquées

Voilà un roman pour l’hiver, un roman à lire au calme, calé dans un bon fauteuil, bien au chaud. C’est un roman qui se mérite, un texte qui se dévoile petit-à-petit. C’est à la fois le portrait d’une femme qui adule un homme jusqu’à en perdre son âme et l’histoire d’un couple traqué dont le mystère se dévoile par toute petites touches. Caroline De Mulder s’y distingue une fois de plus par sa maîtrise technique et son originalité !



Caroline De Mulder est une auteure belge douée, que je qualifierais de surprenante. En effet, je n’ai pour l’instant lu que trois de ses romans, mais ces trois textes étaient différents, tant par leurs formes que par leurs styles. Sur base de ces lectures, je dirais que lorsque l’on entame un roman de Caroline De Mulder, on ne sait pas à quoi s’attendre. On sait qu’elle adaptera sa langue au thème du roman, c’est déjà une caractéristique remarquable, mais pour le reste, c’est la surprise.



Dans « Nous les bêtes traquées », deux facettes s’entremêlent, ajustées comme des pièces de marqueterie. D’une part, l’auteure nous brosse le portrait d’un couple. Max est l’avocat vedette d’une association qui défend des opprimés. Sûr de lui. Imposant. Marie est un ancien mannequin, follement amoureuse de Max. Aveuglée. Dominée. Il la malmène, mais elle s’écrase, magnétisée. Décrire ce genre de relation n’a rien d’original, certes, mais le texte de Caroline De Mulder n’est pas « un texte de plus » sur ce sujet. Il se démarque par sa finesse d’analyse et par un style percutant, qui fait ressortir la faiblesse naïve de Marie et sa transformation sous l’emprise de Max.



D’autre part, en parallèle de ce portrait, l’auteure nous livre une intrigue mystérieuse. Je vous conseille d’ailleurs de ne pas lire le résumé qu’en donne Babelio, et qui ne figurait pas sur la quatrième de couverture de l’exemplaire que j’ai lu. On sent dès le début que couple est traqué. Par qui ? Pourquoi ? Où sont-ils, exactement ? Quelle est cette organisation pour laquelle Max travaille ? Qui est cette sorte de garde du corps qui les accompagne ? Mystère… Le mystère se dévoile petit-à-petit, très lentement. On tourne avidement les pages parce que l’on est dans le brouillard et que l’on a envie d’en sortir. Les informations s’accumulent, il ne faut pas les perdre. Moi, j’en ai perdu et j’ai terminé ma lecture dans une certaine confusion. Mais l’intelligence de l’auteure s’était imposée tout naturellement: je ne suis pas sorti de ma lecture fâché contre elle, mais plutôt fâché contre moi-même de n’avoir pas été plus attentif. Je devrais relire ce livre, j’en ai bien l’envie. Mais cette première lecture me laisse néanmoins une impression qui m’a marqué, l’impression d’un voyage dans un pays différent, l’impression d’une ambiance étrange et prenante.



Découvrez Caroline De Mulder, elle est unique !
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