Conclusion de cette trilogie. Le maître se déroule de nos jours. Le joueur Argent a défié la Maîtresse de Jeu elle-même. C’est désormais le Grand Jeu, à côté duquel les jeux précédents semblent dérisoire. Le globe terrestre est désormais réduit aux dimensions d’un échiquier, à travers lequel Argent doit tracer sa voie s’il veut vaincre son adversaire. Ici, les deux protagonistes jouent pour le contrôle de la Maison des Jeux, et ont pour pièces non des personnes mais des armées entières, des factions, des organisations, des nations même. Le résultat de cette partie déterminera l’orientation du monde ; plus rien ne sera désormais comme avant…
Le maître se déroule sur un tout autre plan : ce n’est plus un jeu mais LE jeu. Le défi ultime, sur un plateau d’échecs qui n’est autre que le monde entier, dans notre période contemporaine. Les personnages ne font plus dans la dentelle, sortent l’artillerie lourde et nous offrent du grand spectacle. Une sorte de synthèse des deux premiers volumes, alliant ruse, tactique, stratégie d’un côté, et flair, instinct et… autre chose de l’autre. C’est parfois digne d’un film américain où ça pète de partout, mais c’est fichtrement prenant, jusqu’au dernier quart très blablateux mais pas moins passionnant.
On a donc dans cette trilogie trois jeux différents, et l’on pourrait penser que ça s’arrête là. Pourtant, il y a bien plusieurs fils rouges qui relient ces trois textes et créent un ensemble harmonieux. Ce dernier volume nous apporte le plus d’informations sur la Maison, sa Maîtresse en titre, et tous les enjeux qui en découlent.
En cela, Le maître est à la fois une sorte de synthèse des deux premiers volumes, un prolongement et un aboutissement de la trilogie. Ce dernier tome apporte également, en plus du recul et de la hauteur de vue sur ce plateau de jeu géant, une ouverture qui dépasse même la raison d’être de la Maison.
Le Maître révèle la construction d'ensemble de la Maison, faite de fils rouges, d'échos, de personnages récurrents, de réminiscences et de souvenirs, de promesses et de pactes qui ponctuent la série jusqu’à ce dernier volume, sorte de point d’orgue de la trilogie.
Ce dernier volume m’a également fait réaliser la manière avec laquelle tout était calculé d’avance. Par les personnages, certes; Argent étant particulièrement brillant dans sa capacité à envisager et calculer sur le long terme. Mais par l’autrice surtout, notamment pour construire tout ceci sur trois volumes et nous sortir de son chapeau de magicienne un Oiseau qui relance le jeu quand on pense que c’est fini.
La trilogie nous interroge sur les notions de libre-arbitre, liberté d’action et de choix. Les ficelles sont-elles tirées, comme l’écrivain démiurge sur son œuvre, par des puissances annexes et qui nous dépassent, qui nous sont inconnues ? Le maître est particulièrement perturbant pour cela, et formidablement bien réalisé, car il transforme notre quotidien en un jeu… et on tend, parfois, à se demander si ceux qui nous dirigent, ne considèrent pas tout cela comme un jeu également. Le rapprochement des deux est assez glaçant tant la vision ludique du Maître paraît presque crédible…
Enfin, j’ai particulièrement aimé le questionnement posé dans le dernier volume : le cœur, ou la raison ? La vie n’est-elle qu’un jeu de calculs, de statistiques, de raisonnement logique, ou répond-elle à des instincts plus primaires ? De quoi est fait l’être humain, et vers quel côté l’humanité doit-elle pencher pour subsister ? Faut-il d’ailleurs qu’elle penche, ou est-elle plutôt un jeu d’équilibre entre ces deux forces contraires ?
On comprend alors toute la raison de la création de La maison des jeux, mais aussi cela offre, a posteriori, un autre regard sur Le serpent et Le voleur.
Alors certes, ce dernier volume c'est du grand spectacle, ça pète de tous les côtés et ça a un effet très cinéma américain, jusqu'à un blabla final soporifique (mais pas inintéressant). C'est ce qui coûte une demi-étoile à ma note finale... Malgré tout, quel final ! J'ai adoré cette série que je trouve remarquablement ficelée, construite, pensée, jusqu'au bout.
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