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Critiques de Christophe Siébert (109)
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La place du mort : Une série Z existentielle

J'ai découvert ce roman grâce à Fabrice Colin (Bal de Givre à New-York, Blue Jay Way, ...), un auteur que j'apprécie énormément. Quand il met en avant un auteur ou un roman sur son blog, je fais confiance en son jugement et acquière le livre. Je n'ai jamais été déçu par ses conseils. Une fois de plus, je viens de me régaler avec "La Place du Mort, série Z existentielle" de Christophe Siébert.

Ames sensibles, s'abstenir! Ici, on ne fait pas dans la dentelle. Une fille paumée rencontre un gars paumé. Ils veulent refaire le monde, pour eux, nous sommes tous des morts vivants. La meilleure façon de refaire le monde, c'est de le détruire, de se détruire mais pas sans gloire, sans plaisir. La mort est le grâle, l'orgasme ultime, originel! Cette histoire est un grand coup d'accélérateur, ne freine jamais, monte et monte encore en puissance, jusqu'à la fin, un bouquet final digne des meilleurs feux de Bengale. Tant par le rythme de l'histoire que par l'écriture.

C'est le monde à l'envers. On fini par aimer les personnages, décalés, amoraux, sans scrupule, hédonistes, qui trouvent leur plaisir dans tout ce que notre société nous a appris à haïr. La répulsion devient séduction. Tout est bon pour arriver à leurs fins. Sexe, drogues, tortures, vols, meurtres, vandalismes. Le bonheur est là, dans le déni de la structure codifiée de notre société.

Peut-on comparer? Je pourrais croire que l'auteur a plongé dans un chaudron "J'Irais Cracher Sur Vos Tombe" de Vian, "Baise Moi" de Despentes, "37,2" de Djian et une pellicule de "A Bout De Souffle" de Godard, a tout fusionné en y ajoutant les piments les plus forts, créant une histoire à vous "cramer" de la première à la dernière ligne, du premier au dernier mot! Ici, on vit dans la tête de l'héroïne, dans son corps, dans sa vie.

C'est ma première rencontre avec cet auteur. Sa plume m'a séduit, son style, le rythme, l'histoire. On est dans le roman noir de chez noir. Cela semble impossible de plonger plus profond dans les abîmes. Ce livre vous aspire, vous entraîne dans sa folle équipée. Vraiment, plus qu'un bon moment de lecture. J'en suis devenu impatient de lire les autres titres de Christophe Siébert.

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Nos plus beaux effets gore

Je n'abonderai pas dans cette critique.



J'aime la littérature horrifique, profondément, en témoigneront mes critiques précédentes.

Je ne pense pas être insensible au gore, profitant d'ailleurs pleinement de ma lecture de "Morte Saison" en ce moment.



Mais alors là, c'est vraiment indigeste.

Le problème n'est pas le mauvais goût ou l'irrespect de la convention sociale, comme le laisse sous-entendre la préface, en profitant pour tailler ceux qui ne jurent que par King.



Le problème avec les œuvres violentes, c'est la gratuité. Et ça n'est pas simple de faire l'équilibriste entre débauche gratuite de violence et une violence esthétique ou engagée. J'ai déjà abordé ce point avec le nullisime "Martyrs" dans une de mes critiques (à pondérer avec l'excellent "Midsommar", à titre d'exemple).

Pour venir encore pondérer le propos, on pourra souligner que "Dirty Sexy Valley", dans le "porno-gore", était une réussite.



Mais dans ce recueil, en toute sincérité, il n'y a pas grand-chose à sauver.

C'est dégueulasse, évidemment de très mauvais goût, souvent insoutenable, et pour un bénéfice d'intrigue , de réflexion ou de divertissement inexistant.

C'est juste... Immonde et gratuit.



C'est exactement la littérature horrifique que j'exècre. J'avais beaucoup d'attente pour cette jeune maison d'édition, mais malheureusement, je ne peux que vous conseiller de passer votre chemin.

Et si les goûts et les couleurs ne se discutent effectivement pas, et que oui, on peut évidemment se divertir face à l'horreur via bien des médias, il y a bien une ligne avant l'abjection, qui sépare l'horreur gratuite de l'œuvre qui apporte un peu plus au lecteur, même en résilience.

Autant vous dire que pour le coup, on n'a pas vraiment respecté le terrain.
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Volna

Avec "Volna", Christophe Siébert ouvre un nouveau cycle - le troisième - dans l'univers de Mertvecgorod. Une Mertvecgorod un peu plus futuriste que dans les précédents volumes et surtout beaucoup plus décadente. La Cité-Etat vit désormais sous le joug d'une caste d’oligarques archi-corrompus qui a instauré un régime totalitaire et brutal. L'auteur se permet d’ailleurs quelques clins d'oeil en direction de l'oeuvre de Michael Moorcock et son sinistre empire de Granbretanne. Et il est vrai que l'ambiance extrêmement sombre et l'atmosphère de folie latente dans laquelle baigne le roman rappellent un peu les dérives mortifères des affidés du baron Méliadus.

Or donc, et même si c'est difficile à croire, les conditions de vie des citoyens de Mertvecgorod ont encore empiré. Le black-out est passé par là. Plus de satellites, plus d'internet. L'eau est rationnée et l'essence réservée aux activités prioritaires. La population est contrainte à une économie de la démerde et à un collectivisme forcé, sans autre idéologie que la loi du plus fort.

D'une manière générale, toutes les relations sociales sont construites sur des rapports de force, sur le pouvoir que vous confère la fonction, l’argent, les armes… Les instincts les plus primaires s’expriment sans contrainte avec toutes les dérives que l’on peut imaginer en matière de sexe et de violence. Guère d’entraide, peu d’empathie, rien que la peur. Celle que l’on ressent ou celle que l’on inspire.

Le récit est extrêmement vif. Les chapitres sont courts, le rythme haletant. Les personnages vont et viennent en un chassé-croisé survolté mais à la chorégraphie parfaitement réglée. Courses poursuites, passages à tabac, fusillades se succèdent à toute allure jusqu’à l’explosion finale, le tout dans une ambiance grise et humide, cafardeuse à souhait.

L’auteur nous accorde malgré tout quelques respirations bienvenues - mais pas forcément plus gaies - qui permettent de faire connaissance avec les différents protagonistes du roman. Il nous propose notamment deux beaux portraits de femmes, volontaires et fortes, mais engluées dans la fange d’une société qui ne leur offre d'espoir que dans le rêve d'un exil à l’étranger ou dans l'oubli fugace des paradis artificiels.

Court et intense, « Volna» est un nouveau pavé lancé dans la mare putride de la RIM ainsi qu’une nouvelle pierre à l’ambitieux édifice que Christophe Siébert est en train de construire, roman après roman.


Lien : http://sfemoi.canalblog.com/..
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Valentina



Tu as choisi cet ouvrage pour le voyage. L'ovni. L'inattendu. L'inconfort.

Tu l'as choisi pour son auteur, sans rien savoir, si ce n'est qu'il écrit de la poésie.

Voilà, cela suffira.

Du poète, tu attends toujours tout. Tu attends la "musique", que les mots s'ajustent comme des amoureux, que la lumière ne soit pas assez médiocre pour briller, mais qu'elle brûle, mon Dieu qui n'existez pas, qu'elle brûle !



An 2000.

Mertvecgorod.

L'enfant d'un flirt entre l'ex-URSS et le Los Angeles de Blade Runner.

Quelque chose entre la résignation et la vie qui s'agite encore. Faiblement.



Le monde est laid, pollué, étroit, le monde est petit, tout petit, il tient tout entier dans la pupille lucide de Klara et de ses quatre amis. Contraints d'aller à la chkola (l'école), quitte à n'y rien foutre, tant pis, mais d'y aller quand même.

Entre deux lignes.

De coke.

De basse.



Jusqu'à ce qu'on retrouve leur voisine assassinée.

Valentina.

Valentina la trav', avec ses amants comme des usagers. De passage.

Le corps évacué, elle est là pourtant.

En petites coupures.

En poudre.

En fumée.



L'une est morte.

Eux sont cinq. Cinq ados à s'aimer, à se souder. A vouloir plus que survivre !

C'est elle, Valentina, du fond de sa chambre froide, qui sera le catalyseur de cette énergie vive.



Les mots se sont ajustés comme des amants maudits.

La vie a brûlé.

Cette violence décalée dans un monde à la frontière du cyberpunk a quelque chose de familier. De touchant.

Ce pourrait être ici et maintenant.

Vous. Moi.

Perdus.

Éperdus.



Roman atypique.

Poétique.

Immersif.
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Chroniques de Mertvecgorod, tome 1 : Images..

C'est poussée par la curiosité que j'ai acheté ce livre. il s'avère en effet que l'auteur est un ancien camarade de classe. Notre prof de français nous lisait ses rédactions à titre d'exemple et concluait par "Siébert, vous êtes génial !". Je me suis renseignée sur lui et j'ai vu qu'il avait beaucoup de succès, certes dans un cercle restreint, qu'il avait obtenu des prix et qu'il faisait également de la poésie (et du porno). Je me suis dit, "tiens, ça doit ressembler à Houellebecq". Ben en fait non. Ça ressemble à Starmania: en effet, au début, des zonards underground font sauter un échangeur autoroutier dans une république autonome fictive d'ex URSS. Premier problème, le style: après Abel Quentin, ça ne passe pas. Pas de chance, si j'avais lu James Ellory avant, ça aurait pu passer pour une oeuvre littéraire. Deuxième problème: le sujet. C'est sur la société interlope et criminelle de la Russie post soviétique. En réalité, ça m'intéresse (J'avais adoré Limonov et Purge) mais là, c'est traité comme un film de série Z, qui se veut futuriste mais qui est kitch et bourré de clichés. Et puis, le viol d'enfants, je ne vois pas l'intérêt. La violence ne me fait pas peur mais il faut qu'elle serve à quelque chose, qu'elle fasse avancer l'histoire ou serve de catharsis. Là, c'est gratuit. Désolée Christophe; je suis ravie que tu aies un lectorat qui t'apprécie mais moi je n'adhère pas.
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Métaphysique de la viande - Nuit noire & para..

Pire que l'enfer,

Deux apocalypses,

L'anéantissement total,

Et dans son sillon,

Mes limites en charpie,

Ébranlé,

Sa dépravation,

Ma consternation,

Et là où tout respect fuit,

La haine, ma reine,

Fut faite tsar.



Coeurs sensibles: à proscrire !
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Chroniques de Mertvecgorod, tome 1 : Images..

Il y a fort à parier que vous n'avez jamais rien lu de tel !

Images de la fin du monde est un ensemble de flashes en lumière crue sur une société décomposée. C'est parfois vil, souvent glauque, ça pue et ça fourmille. Et c'est désespérément humain. Chaque personnage croisé - parfois recroisé, et l'on s'en félicite tant ils éveillent la curiosité - se grave en mémoire.

Christophe Siébert nous invite dans un futur proche (très proche !) et son monde n'est pas si éloigné du nôtre : il pousse simplement les curseurs vers le niveau supérieur.
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Nos plus beaux effets gore

Il s’agit d’un recueil de nouvelles parfois très gores. Je ne suis pas franchement sensible et plutôt adepte du genre « horreur » et « trash » mais ce qui m’a gêné c’est que parfois les nouvelles étaient trop courtes pour être vraiment construites mais quand même très crues … âmes sensibles s’abstenir
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Vive le feu

Avec VIVE LE FEU, Christophe Siebert offre un ovni à la collection Karnage.

Le gore laisse la place à une histoire d'amour en mode no future, sorte de Roméo et Juliette à la sauce bibine et Europe de l'Est.

Déroutant pour les lecteurs avides de sang et de tripes mais sans nulle doute le tome le plus touchant de la collection.
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Volna

Bienvenue.

Vous venez de poser les pieds en ce 11 Mars de l’An III dans les ténèbres de Mertvecgorod, capitale infernale sortie tout droit du rêve modeste et fou de Christophe Siébert. "Volna" sera notre guide et nous accompagnera à travers les rues sales et violentes de cette métropole corrompue aux frontières impénétrables.



Sous le regard des aurores atomiques, l'odeur des corps non lavés, conséquence d’une eau devenue aussi chère que rare, imprègne l'air des quartiers barricadés où les puissants, transformés en parodie effrayante, se préparent des traces et se nourrissent des faibles sans pitié, vague scélérate s’abattant au ralenti sur l’humanité entière.



Dans ce monde de violence et de brutalité, nous suivons entre autres l'histoire de Catherina et Roman, homme invisible hanté par des lianes noires, deux survivants luttant pour naviguer dans ces rues désertes où le soleil se lève chaque jour dans le seul espoir de percer l’épaisse couche de pollution. Leur vie est à jamais bouleversée lorsqu'ils tombent, entre deux épaves de voitures, sur un singe capucin, porteur de secrets inavouables dans une ville où les tabous n'existent pourtant pas. La course pour récupérer ce primate devient dès lors le point central de l'intrigue, avec de multiples factions violentes se lançant à la recherche d’un putain de singe en vadrouille quelque part dans la ville.



"Volna", pochoir de deuil synonyme d’espoir dans un monde sans horizon, plonge les lecteurs dans le monde sombre d’une cité avide de chairs où l'action est rapide, brutale, et le récit se déroule avec une efficacité remarquable. L’auteur confronte les aspects les plus sombres de l'âme humaine, filaments de sang pourri tombant du ciel comme des glaires, explorant un monde où la frontière entre l'humain et la bête est floue, et où l’avenir est une denrée que l’on ne peut se permettre.



Dans la crasse écarlate, il donne une voix à ses personnages : les marginaux, les négligés, les inadaptés.

Dans ces ténèbres qui accueillent les profondeurs de la condition humaine, il offre une lueur d’espoir au milieu de l’abysse.

Dans le ciel, l’enfer, la dégradation et l’œuvre continuent de se déchaîner.



Impact.
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Vive le feu

Je vais régulièrement sur la page Facebook de Christophe Siébert pour y découvrir son actualité, ses posts souvent fort drôles et ses coups de gueule. Il y a peu, il nous y parlait de son activité de directeur de collection aux éditions de La Musardine et notamment de la façon dont il avait convaincu l’un de « ses » auteurs de privilégier la profondeur de ses personnages à la recherche d’une intrigue sensationnelle. Et bien le moins que l’on puisse dire c’est que le bonhomme applique à la lettre les conseils qu’il donne à ses poulains.

L’intrigue de « Vive le feu » est en effet plutôt mince. Sur cent cinquante pages, il nous déroule, d’abord en accéléré, puis de façon de plus en plus lente et précise, la vie de Masha. Pas un long fleuve tranquille la vie de cette divorcée mal dans sa peau. Plutôt une succession d’épreuves qui nous plongent dans le pathos le plus absolu : dépression, licenciement, deuil, alcoolisme, médocs, solitude. Solitude surtout. Solitude de ceux qui ne se reconnaissent pas dans notre société de l’image et de l’hyper-communication. Solitude de ceux qui refusent de hurler avec les loups ou de communier avec les foules. Solitude de ceux qui répugnent à bouffer la soupe insipide qu’on leur sert jour après jour.

Avec un hyper réalisme parfois dérangeant, l’auteur nous décrit le quotidien de son héroïne et ses maigres tentatives pour garder la tête hors de l’eau. Ce faisant, il nous fait ressentir de manière presque physique la vacuité de son existence et, d’une certaine manière, celle de toutes les existences. Et c’est ainsi que, l’air de rien, c’est la vie de la classe moyenne de la République Indépendante de Mertvecgorod qui prend corps avec ses trajets en voiture sur l’avtostrada, les dimanches dans les gigantesques centres commerciaux conçus pour dépouiller les braves citoyens de leurs maigres économies, les émissions de télé-réalité à la con, les réseaux sociaux délétères… Une vie qui ressemblerait assez à celle de l’occidental moyen s’il n’y avait en sus quelques joyeusetés locales : la zona et ses immenses décharges à ciel ouvert, ses usines de retraitement des déchets, ses bidonvilles…

Lourd et oppressant, le récit prend un rythme plus soutenu avec l’apparition de Pavel, un ado en rupture avec lequel Masha projette une action d’éclat, histoire de finir en beauté. La relation entre ces deux paumés sera l’occasion de quelques passages assez touchants avec, ici et là, quelques notes d’un humour noir et désespéré. Comme de juste, tout cela finira mal et l’ultime pied de nez à une société exécrée aura des allures de pétard mouillé. Ils n’auront pourtant pas totalement échoués puisque nous aurons été, l’espace de quelques heures, les témoins de leurs différences, de leur souffrance et de leur révolte.
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Chroniques de Mertvecgorod, tome 2 : Femini..

Ciudad Juarez sur Don : premier retour à Mertvecgorod, la monstrueuse mégapole post-soviétique, mystérieuse et infectieuse.



Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2023/07/28/note-de-lecture-feminicid-christophe-siebert/



Christophe Siébert nous avait fait découvrir Mertvecgorod, l’immense ville fictive, aux confins de l’Ukraine et de la Russie, qu’il a inventée pour habiter et hanter les ruines post-soviétiques au sein même de nos imaginaires, avec son « Images de la fin du monde » de 2020 (auquel je vous renvoie donc pour une situation générale de la mégapole infectieuse).



Un an plus tard, toujours chez Au Diable Vauvert, voici « Feminicid », qui nous permet, à travers le filtre du « manuscrit exfiltré » de Timur Domachev (« traduit par Ernest Thomas » 🙂), de retrouver des lieux désormais familiers, entre le sordide avéré des barres d’immeubles paupérisés et les somptueuses villas bunkérisées des hauts de la ville, ainsi que bon nombre de figures à présent connues, politiciens, oligarques, intermédiaires douteux, et, naturellement, en bonne place, le Svatoj Nikolaï lui-même, être hors normes fait de violence, de sainteté, de sexe et de mysticisme. Et nous voici donc armés pour traquer, par bribes, aux côtés du journaliste d’investigatio Timur (vraisemblablement suicidaire pour exercer ce métier en ce lieu) et de son alliée hackeuse Lily (un peu plus prudente ou paranoïaque que lui), le mystère de ces meurtres de femmes qui dévastent la cité depuis plusieurs années et qui n’ont rien à envier à ceux de Ciudad Juarez, à une échelle encore plus massive, semblant peut-être encore moins explicables.



Ce deuxième volume consacré, par de nouveaux angles d’approche, à la cité délétère mobilise à nouveau le plus cruel et le plus désespéré de l’imaginaire post-soviétique, celui que nous connaissons certes ici par bien d’autres biais, en général plus authentiques que l’étrange succédané récemment concocté par Giuliano Da Empoli et son « Mage du Kremlin », car Vladimir Sorokine et Viktor Pelevine sont grands, Thierry Marignac est habile, et Antoine Volodine (notamment à l’époque de « Un navire de nulle part » et de « Rituel du mépris ») comme la team Yirminadingrad (Léo Henry, Jacques Mucchielli et Stéphane Perger) ont su insuffler un souffle poétique fort rare dans les décombres de la fin rêvée de l’égalitarisme.



Mais une fois de plus, sur ce terreau à nul autre pareil, Christophe Siébert fait fructifier des ingrédients bien à lui, dont le mélange secret est à nouveau bien curieusement délectable. Son maniement insidieux de la langue, sans se limiter, loin de là, à l’usage malicieux des mots directement issus – éventuellement joliment déformés – du russe, passe par l’imbrication de registres techniques, journalistiques, politiques et sensuels que l’on connaît le plus souvent sous leurs formes bien disjointes. Et même dans le cadre littéraire d’une investigation, sa capacité à utiliser des mots ambigus, mots qui laissent entendre leurs non-dits, leurs suppositions et leurs collusions, avérées ou simplement vraisemblables, fait merveille. Dans le bourbier sans nom de Mertvecgorod, une écriture est née et se développe dans des directions encore insoupçonnées.


Lien : https://charybde2.wordpress...
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Chroniques de Mertvecgorod, tome 2 : Femini..

Ce livre est un vrai coup de poing! Alors certes, il faut réussir à entrer dans cet univers très sombre, voire pourri jusqu'à la moelle mais ma foi, quel uppercut!

Timur Maximovitch Domachev est retrouvé mort, une balle dans la tête, en pleine enquête sur des féminicides horribles qui durent depuis des décennies. Il voulait comprendre et nous a laissé son journal de bord, transmis à ses éditeurs d'une façon mystérieuse suite à sa mort justement.

C'est le 2ème ouvrage sur la République Indépendante de Mertvecgorod (RIM), je n'ai pas lu le premier (et ne pense pas le faire car au final, pas mon univers) mais on peut très facilement suivre cette enquête sur des meurtres atroces et gratuits, impliquant toute l'oligarchie du pays et un réseau pire que tout, sans humanité, sans pitié, sans regrets ni remords!

C'est violent, gore, plus que sanglant et amoral. J'ai lu jusqu'au bout parce que je voulais malgré tout savoir finalement mais ce fut une lecture difficile car beaucoup de passages sont très très durs...

Cependant, il faut quand même lui rendre hommage car au travers de toute cette violence, on retrouve les travers de notre société et des faits qui ont vraiment existé en filigrane...

Donc, pour les adeptes, allez-y sans problème, vous serez comblés je pense et pour les autres, soyez avertis...
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Métaphysique de la viande - Nuit noire & para..

Ce livre regroupe deux courts romans parus précédemment : Nuit Noire et Paranoïa, deux textes noirs, et même très très noirs, dans des registres pourtant forts différents.

Quand Nuit Noire est un parfait livre d'horreur relatant l'entièreté de l'existence d'un tueur en série, en détaillant sans aucune retenue toute l'étendue de ses monstrueux fantasmes et de ses passages à l'acte, Paranoïa est quand à lui à la frontière entre le polar, le fantastique voir le mythologique, avec cependant une (très) bonne dose d'horreur également, et nous conte une histoire désordonnée et précipitée, assez impossible à résumer, entre meurtres et complotisme sur fond de fin du monde.



Commencer par Nuit Noire est une furieuse expérience. C'est un court roman cru, violent à l'extrême. On peut même sans exagérer employer des mots comme épouvantable, exécrable ou repoussant tant il évacue l'idée même d'un quelconque tabou. Cela constitue donc le parfait écrin pour que l'écriture très sensitive (et même organique) de Siébert s'épanouisse dans les détails les plus sordides, donnant corps (touchers, odeurs...) à cette litanie de scènes abjectes.

Cependant, le summum arrivant assez rapidement dans l'histoire, on se sent très vite anesthésié quant au niveau de dégueulasserie auquel on est confronté.

C'est plutôt au milieu de l'ouvrage que l'on finit par être rattrapé, voire frappé, par l'étrange rythme qui se dégage de l'ensemble. Au-delà des pensées déviantes du tueur, ses mots et ses actions, répétés jusqu'à l’écœurement, finissent par tisser une sorte de poésie sordide, dans laquelle ma raison et mon envie de compréhension se sont effacées face à une étrange, une inqualifiable esthétique.



En comparaison, Paranoïa est beaucoup plus délirant, et si les scènes infernales y sont également légion, l'aspect bien plus hallucinatoire de l'histoire désamorce une partie des sentiments qu'elles inspirent, et c'est surtout l'ambiance très malsaine et poisseuse qui finit par prédominer.



Si le premier m'a plus emballé que le second, j'ai retrouvé dans les deux la volonté de cet auteur de plonger bien au fond des plus sombres aspects de ses personnages, de livrer au lecteur leur folie autant que leur médiocrité, sans compromis ou compassion. J'y ai retrouvé également sa formidable écriture aussi précise qu'invocatrice, qui, à mon avis, s'épanouira plus encore dans Images de la fin du monde...

Une lecture éprouvante donc, qui met les sens et la raison à rude épreuve, qui fait vriller (un peu) et qui répugne (beaucoup) mais pour le fond de son propos bien plus que pour son horreur frontale.
Lien : https://unspicilege.org/inde..
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Volna

Soyons clairs c’est trash. De l’univers de Mertvecgorod, je n’avais jusqu’à présent lu que Valentina, que j’avais adoré, et je m’étais ravi du fait que c’était « pas si trash », justement (je l'avais chroniqué ici même). Bon, ben là, c’est sûr qu’à côté de Volna, le précédent c’était Blanche Neige va boire du thé chez Barbie. Parce que cette fois, c’est vraiment trash. Certains passage m’ont fait plisser les yeux, sentir des lames de rasoirs sous mes ongles et autres trucs pas sympas qui font que parfois, on lâche un bouquin*. Mais là, non. Siébert a cela de très fort, que même dans la dégueulasserie, il nous donne envie de ne pas lâcher ses personnages, de voir au bout s’ils vont enfin réussir à le surmonter ce monde de merde dans lequel ils surnagent avec peine.



S’ils y arrivent ? Je vous le dirais pas.



Je vous dirais simplement que voilà un bouquin qui sort de l’ordinaire, résolument punk, du côté des moins que rien, des tox, des prolo qui en chient, et qu’en littérature, c’est pas si souvent, en fait, qu’on est à ce point de ce côté de ceux qui sont dans la merde. Ça vaut le coup de plisser parfois les yeux.

la suite de la critique par ici :
Lien : https://pieddebichemarquepag..
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Chroniques de Mertvecgorod, tome 2 : Femini..

D'abord, et c'est rare que j'en parle : c'est un plaisir de contempler le beau bleu de la couverture, presque de l'art brut. Mais il faut bien ouvrir le livre.



Je pense qu’il est compliqué de se jeter dans le roman sans avoir lu le premier tome tant il y a des termes auquel l’auteur nous a habitué et de clins d’œil.



Christophe Siebert propose ici une uchronie plutôt qu’une dystopie, puisque certains éléments déclencheurs de tous ces drames ont débuté hier, et il y a même dix ans, il créé donc - et c'est ce qui m'avait particulièrement séduit dans le premier tome - tout un univers très solide.

Il exploite le mélange des croyances, anciennes ou nouvelles, existantes, propres à des civilisations enfouies ou slaves, mais aussi des élucubrations fantastiques et meurtrières. J’aime beaucoup que ce monde ait des légendes propres, un passé, une histoire solide, on y croirait, ainsi qu'au détail de ses vestiges et de l'histoire de son archéologie.

Autre mélange qui marche beaucoup sur moi quand c'est bien fait : le mélange entre science-fiction et magie. Loin de robots tueurs, d'extraterrestres et de baguette magique, Christophe Siebert exploite nos technologies comme les drones, l'informatique, le numérique, le hacking... Sans oublier une certaine nostalgie pour le vieux cinéma, qui par exemple se prête si bien aux snuff movies qu'on retrouve dans ce tome-là également. La magie est plutôt de l'énergie, Siebert s'est renseigné et utilise intelligemment les concepts de magnétisme, de rêves éveillés, de sorties de corps... Bref, encore une fois, le foisonnement, la science du détail de l'univers de Mertvecgorod fonctionne sur moi.



Peu habituel de l'auteur, le livre s'ouvre sur un appel à l'humanité, il enjoint à se soucier de son prochain. Ce mystère prend forme entre les pages, mais il tarde de voir s'il déborde su la suite des chroniques.

Aussi, le ton est différent du premier tome qui regroupait le point de vue de nombreux personnages, ici nous avons à faire au manuscrit d'un journaliste. Mort dans d'étranges circonstances, critiquant ouvertement le système, s'étant pris d'affection, faisant preuve d'humanité, touché par le sort de ces filles qu'on retrouvait terriblement assassinées. Le roman a son titre : Feminicid.



Ainsi, on est jeté dans un récit en poupées russes, on est plongé dans l'enquête comme si ce n'était pas un roman. L'immersion est folle, vraiment super réussie, prenante, un numéro d'équilibriste littéraire et stylistique qui met le lecteur à la place de l'enquêteur, le livre se compose de (liste non-exhaustive) : comptes rendus, entretiens réalistes et très vivants, billets d'humeurs écrits à l’arrache, extraits d’articles, chronologies, roman dans le roman... Autant de format qui embarquent le lecteur sur la piste de ces mystérieux féminicids.

L'immersion persiste même dans les interstices du livre, jusqu’en "note du traducteur."



Ainsi, le premier tome nous avait laissé avec plein d’interrogations où des destins tragiques s’allongent sur les pages glacées, retraçant la vie des basfonds. Le second s'attaque à la création du monde, le big bang terrible, entre thriller et fantastique.
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Chroniques de Mertvecgorod, tome 1 : Images..

Images de la fin du Monde pourrait porter le très joli et doux nom de « roman chorale » c’est à dire plusieurs points de vues se succèdent pour parler de la même histoire.

Ici, c’est l’histoire de Mertvecgorod qu’on découvre. Une ville poubelle imaginaire de l’ancienne URSS qui est une ville et à la fois le pays dont elle est capitale et unique ville, avec plus de 2 000 habitants au mètre carré, cette dernière se déploie dans le ciel. Au-dessus des trottoirs principalement composés de détritus.



Qu’est ce qu’on découvre dans cette uchronie ? En effet, nous sommes plus sur de l’uchronie que de la dystopie car les points de vues, comme des journaux intimes ou des lettres de suicides, se mélangent, nous baladant de 2025 à 2018 en passant par 2022 ou bien par notre propre année. Ainsi, nous parlons de trafique d’organes, de snuff-movies (un vrai Serbian Film ce bouquin !), de secte, de pauvreté, de pollution, de surveillance à outrance, de prostitution. Bref, on est bien contents de ne pas vivre à Mertvecgorod.



Le livre tourne autour d’un attentat qui a lieu dans les premières pages. Après ce premier témoignage journalistique, tourne justement, toutes les autres histoires comme autant de genèses au désastre. Pour retracer, ou semer des pistes, qui permettraient de comprendre ce monde étrange et qui ressemble pourtant au nôtre et qui a amené à cet attentat. C’est donc un livre trash, gore, avec des gens qui survivent plus qu’ils ne vivent, une décharge vivante de l’Europe, où tous les maux semblent macérer. Ainsi, les drames qui se multiplient sans cesse, amènent fatalement à la terrible situation qui ouvre le roman, mais, puisqu’il s’agit ici d’un tome 1, les mystères ne sont pas tous révélés, au contraire, on est plutôt sur un plantage de décor, pour notre plus grande frustration.



Particulièrement intéressant, l’auteur se nourri de diverses spiritualités, religions, croyances de l’Est et de l’Orient pour créer le mysticisme de son roman. Ce dernier mêle, exactement comme j’aime, la spiritualité presque chamanique, ancestrale, avec la science-fiction, la robotisation, la réalité virtuelle.

Il réussi à mélanger tout ça à l’ambiance sale et glauque pour créer un univers bien à lui. C’est à dire qu’on découvre une réelle genèse avec une patte particulière qui donne envie de découvrir le fin mots de toutes ces ficelles politiques et sociales. On s’intrigue sur ce pays, cette ville-pays, renfermée sur elle-même et décrite avec beaucoup de brio en passant d’un témoignage à un autre.



Trash, science-fictif, totalement halluciné, ce premier tome donne fiévreusement envie de découvrir la suite !
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Chroniques de Mertvecgorod, tome 1 : Images..

Images de la fin du monde : Chroniques de Mertvecgorod présente un recueil de nouvelles se déroulant dans un futur dystopique, dans une ville fictive, située entre l'Europe et la Russie et véritable personnage principal de l'histoire.

Mertvecgorod palpite en effet au cœur de ces pages. Incarnation de la déchéance d'une civilisation, c'est une mégalopole grotesque, glauque et puante, il y règne un désenchantement tangible, un désespoir prégnant, qui entraînent les protagonistes de ces récits vers des pulsions destructrices : la violence, la perversion, la corruption, la déchéance...

Aucun des personnages présentés (dont certains réapparaissent d'une nouvelle à l'autre) n'est aussi vivant que Mertvecgorod. Morts en sursis, sacrifiés plus ou moins volontairement, leur sang, leur sperme, leurs cris, leur désespoir ou leur infini cynisme nourrissent une ville cannibale et gloutonne, qui elle seule s'épanouit au fil du récit.



L'écriture de Siébert est d'une finesse absolue. Crue, directe, organique. Elle donne vie à l'inanimé, personnalise la souffrance, abreuve les sens. Ses mots permettent de sentir la puanteur, voir la grisaille, ressentir la terreur, palper la chair. On ressort de cette lecture totalement habité par l'esprit de Mertvecgorod qui semble avoir étendu ses tentacules jusqu'au fond de notre psyché.



Tour de force absolument magistral, Images de la fin du monde est une de mes révélations de cette fin d'année. Si loin des clichés et des codes, si loin des tours et des recettes, voilà un livre original, qui ne ressemble à rien de ce que vous avez pu lire, qui s'éloigne des romans dytopiques léchés, ceux qui finissent par se confondre dans leur banalité.


Lien : https://unspicilege.org/inde..
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Valentina

Le fond : cinq jeunes losers vivent dans une mégapole fictive post-URSS de menus larcins aussitôt réinvestis en drogues et fiestas. Un jour, Valentina, leur voisine, un travesti vendant ses charmes et louant ses sex toys, est retrouvée assassinée.

La forme : une écriture vivante avec des dialogues qui sonnent juste.

Pour conclure : une intrigue universelle transposée dans un univers trash et personnel, et accompagné d’une bande-son qui l’est tout autant

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Volna





Mertvecgorod, ou l’anatomie atrophiée d’un corps malade, aux muscles irrigués d’un acide sociétal, ou grouille les vies humaines, noircies de totalitarisme, dans une dystopie monstrueuse, ou existe bon gré mal gré les anti-héros de cette histoire…



Volna fais partie d’un récit tentaculaire, initié depuis quelque temps par son auteur des plus singulier. Un terrain de jeu explosif. Volna est une nouvelle histoire dérivée de son axe, plus nerveuse, fonçant avec une franchise exaltante vers sa résolution exorcisante !



Au pays des contes suintant la pollution, un singe capucin câblé sous sa fourrure, disparait, porteur d’une source numérique, une sorte de compteur des infamies ayant tourné sans relâche… C'est kidnappeurs, dans l’improvisation totale de leur acte, ne devinerons jamais dans quel engrenage, ils auront coincé leurs humanités crasse…



Mertvecgorod ou le croque-mitaine, avalant — broyant ses âmes, avec sa dose de kosmo, pour mieux supporter l’absence d’apesanteur dans ce microcosme maudit ou vive les damnés, ou l’auteur se plait aussi à défendre ses héroïnes sans nom ou presque, fortes, rebelles et si tristes.



Vous l’aurez deviné, sous vos yeux pourra se dérouler bien plus que ce que vous ne pourriez l’imaginer, car ce livre, n’en sera qu’une petite porte d’entrée, dont les tenants et les aboutissants vous serons expliqués dans une judicieuse préface. L’auteur, avec sa plume sans concession et son talent d’écriture sans conteste, nous dévoilera avec le temps une grandiloquente cosmologie des ténèbres …



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