Citations de Claire Keegan (308)
Il est très rare que deux personnes veuillent la même chose à un moment précis de l’existence. Quelquefois c’est l’aspect le plus dur de la condition humaine.
Ah, les femmes ont presque toujours raison quand même, dit-il. Sais-tu pour quoi les femmes ont un don?
- Quoi?
- Les éventualités. Une vraie femme regarde loin dans l'avenir et devine ce qui arrive avant qu'un homme flaire quoi que ce soit.
Était-ce possible de continuer durant toutes les années, les décennies, durant une vie entière, sans avoir une seule fois le courage de s’opposer aux usages établis et pourtant se qualifier de chrétien, et se regarder en face dans le miroir ?
Tant de choses avaient une façon de paraître plus belles quand elles étaient un peu à distance.
"_Ah, les femmes ont presque toujours raison quand même, dit-il. Sais-tu pourquoi les femmes ont un don ?
_Quoi ?
_Les éventualités. Une vraie femme regarde bien dans l'avenir et devine ce qui arrive avant qu'un homme flaire quoi que ce soit."
Les mots me manquent terriblement mais c'est un nouvel endroit, et des mots nouveaux sont nécessaires.
Je me demande pourquoi mon père ment sur le foin. Il a tendance à mentir sur des choses qui seraient bien si elles étaient vraies. Quelque part, plus loin, quelqu'un a mis une tronçonneuse en marche et elle vrombit là-bas un moment comme une grosse guêpe agressive. J'aimerais être dehors, en train de travailler.
Je n'ai pas l'habitude de rester tranquille et je ne sais pas quoi faire de mes mains. Une partie de moi voudrait que mon père me laisse là pendant qu'une autre partie voudrait qu'il me ramène, vers ce que je connais.
Je suis dans une situation où je ne peux ni être ce que je suis toujours ni devenir ce que je pourrais être. p.17
Je suis dans une situation où je ne peux ni être ce que je suis toujours ni devenir ce que je pourrais être.
Il avait peu d'autres souvenirs de cette soirée, sinon qu'il s'était félicité de ne pas devoir l'aider à la moindre vaisselle ensuite.
- Tu sais ce qui est au cœur de la misogynie ? Dans le fond ?
- Parce que je suis misogyne à présent ?
-ça consiste simplement à ne pas donner, avait-elle dit. Que ce soit croire que vous ne devriez pas nous accorder le droit de vote ou ne pas nous donner un coup de main pour la vaisselle- c'est tout crocheté au même wagon.
Le pire était encore à venir, il le savait. Déjà il devinait l'océan de problèmes l'attendant derrière la prochaine porte, mais le pire qui aurait pu se produire était aussi déjà derrière lui : la chose non faite, qui aurait pu l'être - avec quoi il aurait dû vivre jusqu'à la fin de ses jours.
[...] il en vint à se demander à quoi bon être en vie si l'on ne s'entraidait pas. Était-ce possible de continuer durant toutes les années, les décennies, durant une vie entière, sans avoir une seule fois le courage de s'opposer aux usages établis et pourtant se qualifier de chrétien, et se regarder en face dans le miroir ?
"Tu n'es pas toujours obligée de dire quelque chose, reprend-il. Pense que la parole n'est une nécessité en aucune circonstance. Nombre de gens ont beaucoup perdu pour la seule raison qu'ils ont manqué une belle occasion de se taire".
Dans son rêve, il y a avait un grenier au plancher tapissé d'herbe. L'herbe devenait plus haute qu'une maison, les tiges penchaient vers l'ouest malgré l'absence de vent. Couchée sur le dos, Margaret ne portait qu'un pantalon d'homme et lorsqu'elle descendait sa main, au lieu d'un pénis, elle trouvait un gros lézard qui faisait partie de son anatomie et dont la queue musclée se balançait. Une femme qui lui ressemblait arrivait d'un autre siècle, drapée dans un tissu noué. Apercevant le lézard, elle ne reculait pas, mais l'accueillait en elle et , à son réveil, Margaret s'est palpée pour vérifier qu'elle ne se transformait pas en homme.
Pense que la parole n’est une nécessité en aucune circonstance. Nombre de gens ont beaucoup perdu pour la seule raison qu’ils ont manqué une belle occasion de se taire.
Les yeux de Kinsella ne sont pas complètement tranquilles dans son visage. On dirait qu’un gros problème lui envahit peu à peu l’esprit. Il pousse le pied d’une chaise avec sa chaussure et regarde de mon côté. « Tu devrais te laver les mains et la figure avant d’aller en ville, dit-il. Ton père ne s’est-il même pas soucié de t’apprendre au moins ça ? »
Nous ne parlons ni l'une ni l'autre, comme les gens se taisent parfois quand ils sont heureux. Dès que cette pensée me vient, je m'aperçois que le contraire est vrai aussi.
Elle m'emmène dans la maison. Il y a un moment très sombre dans le couloir ; alors que j'hésite, elle hésite avec moi. Puis nous passons dans la chaleur de la cuisine où il faut que je m'assoie, que je me mette à l'aise. Sous l'odeur de pâtisserie, un désinfectant, un produit javellisé pointe. Elle retire du four une tarte à la rhubarbe qu'elle pose sur le plan de travail pour la laisser tiédir : du sirop bouillonnant prêt à déborder, de fines feuilles de pâte sculptées dans la croûte. Un courant frais souffle par la porte mais ici tout est chaud, tranquille et propre. De grandes marguerites sont immobiles comme le grand verre d'eau dans lequel elles se dressent. Il n'y a de trace d'enfant nulle part. (p.14)
Le vent est fort et rauque dans les arbres, il s'agite parmi les branches sèches, dont les feuilles se soulèvent et se balancent. C'est très agréable de sentir la route découverte dévaler au-dessous de nous, sachant qu'on va, au bout, trouver la mer. La route continue et le ciel, le paysage entier semble s'éclaircir. Kinsella dit quelques petites choses insignifiantes puis s'enveloppe dans le silence qui est habituel chez lui, et le temps passe sans donner l'impression de passer, et nous voilà dans un espace dégagé, sableux, où les gens doivent garer leur voiture. Il y a des traces de pneus et des nids-de-poule partout, une poubelle qui ne semble pas avoir été vidée depuis longtemps.
"On est presque arrivés, Pétale."
Noël révélait toujours et le meilleur et le pire chez les gens.