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Critiques de Daniel Arsand (109)
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Je suis en vie et tu ne m'entends pas

Comment ne pas être ému, bouleversé, chamboulé à la lecture de ce beau livre aux mots crachés, aux mots douleur, aux mots chair , aux mots gifles :

L'histoire sortie des tripes de cet homme revenu en 1945, déambulant dans sa ville natale ,Leipzig, après avoir passé quatre ans à Buchenwald, enfermé pour son homosexualité?

Klaus Hirschkuh , 23 ans, décharné, au corps martyrisé, frappe à la porte de ses parents et ne peut exprimer ce qu'il ressent.....

Revenu d'un cauchemar et d'un enfer qui l'ont meurtri, écartelé, encrassé, traité comme un sous homme, une larve, un porc et des lettres vomissures, des lettres crocs cousues sur son dos, sa poitrine, le haut de son pyjama " Matricule 5395 et triangle rose ".....

Voici le roman d'un survivant qui désirerait se fondre dans la banalité du quotidien.....mais ne pourra jamais aimer au grand jour, rejeté encore et toujours........

L'auteur nous livre un ouvrage extrêmement fort d'une crudité et d'une beauté expiatrices......

L'histoire de Klaus est hantée tout le long de sa vie "d'aprés" par cette barbarie qui lui revient d'une manière obsessionnelle , ces barbelés et ces corps martyrisés.

Il s'exilera en France et mènera une vie de combat pour cacher son homosexualité et nous livrer ses deux grands amours, Heinz et Julien .

Un témoignage , un texte nécessaire, bouleversant , crucial,rigoureux, explosif, glaçant et brûlant à la fois.

Une écriture sublime alliant poésie, violence, hurlements, cris sourds , amour , lumière et sécheresse......

Des phrases crues, une prière en hommage à la mémoire des déportés, rythmées en une description qui dit la rage et la tristesse, l'amour fou et la douleur intense, les blessures béantes, les injures et les humiliations.......

Un ouvrage au souffle puissant que l'on n'est pas près d'oublier........

Lu dans le cadre du prix Jeand'heurs, spécifique à mon département, sélection historique 2016.

Un livre que "tous "pourraient Lire ........
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Je suis en vie et tu ne m'entends pas

Il y des livres qui vous bluffent par leur style incroyable, d'autres vous estomaquent par la violence ou la beauté de leur sujet, certains vous emportent comme un poème et vous font chanter jusqu'à la dernière page. Et puis il y a ce livre, ce livre entre tous, celui qui vous fait tout à la fois, "Je suis en vie et tu ne m'entends pas" m'a complètement bouleversée.



Le sujet en est essentiellement le racisme sexuel, le plus répandu, le plus sournois, le plus toléré, le plus écœurant.

Daniel Arsand nous montre une facette souvent méconnue de la Seconde Guerre Mondiale - quand les homosexuels étaient déportés pour être "guéris" - par le ressenti d'un homme, Klaus Hirschkuh, un homme qui préfère les hommes.

Rescapé d'un camp de concentration - dont je ne vous donne pas le nom puisqu'il lui faudra du temps pour même envisager de le prononcer - Klaus retourne à la vie et aux vivants. Il est presque détruit, miné par les horreurs vues et subies. C'est un zombie qui traverse les ruines de Leipzig après la Libération et qui, par bribes, nous raconte l'enfer du camps pour les triangles roses, les homosexuels : les brimades, la castration, la haine des autres détenus, l'amour forcé pour survivre, les viols collectifs pour le punir de survivre.

Il nous montre aussi l'immense douleur de vivre, la culpabilité du survivant et la difficulté à se reconstruire après "là-bas", le décalage entre lui et sa famille, l'exil choisi avec l'ami René, puis doucement, tout doucement, un peu de bonheur retrouvé, enfin.

Mais la fin de la guerre n'est pas la fin de l'ostracisme, les homosexuels restent les victimes privilégiées des petites frappes et de leurs insultes pas très originales, Klaus en sera témoin.



Dans ce livre génial, c'est le déni de notre société sur l'homosexualité que Daniel Arsand dénonce. Après la guerre il y a eu le refus d'accepter qu'il y a bel et bien eu des homosexuels internés dans les camps de concentration, qu'ils ont subi un enfer qu'on ne compare à aucun autre car qui oserait réaliser un classement de l'Horreur ? Les homosexuels n'ont jamais pu obtenir de reconnaissance après guerre, jamais obtenu de dédommagements non plus, on a nié leur internement dans les camps, il n'en sera pas fait mention au procès de Nuremberg en 1946.

L'auteur nous rappelle aussi que lorsque l'épidémie de SIDA a fait des ravages, ce sont eux qui ont été pointés du doigt, eux les pédés, qui ramenaient au monde cette saloperie de maladie... non, les hétéros n'ont pas le SIDA, jamais, non jamais.



Aujourd'hui encore, même si Daniel Arsand n'en parle pas dans son livre, il reste encore ce fond de haine indécrottable, cette violence qu'on ne veut pas admettre, entre autres l'incroyable machin pour tous et ses professeurs de morale à la Brigide Foutin.



Vous l'aurez compris, j'enrage de cette intolérable injustice, de ce racisme sexuel dont on parle si peu. Et je suis amoureuse de ce livre parce qu'il nous dit des choses vraies et terribles et terriblement belles aussi. Le tout écrit dans un style admirable, pur, scandé, des bribes de pensées, des morceaux de vie, il dénonce sans haine, il montrer l'amour, le vrai, celui qui n'a pas de sexe. C'est un plaidoyer magnifique, un des plus beaux livres que j'aie lu depuis des années.

Ma fille, si sage pour ses dix-neuf ans, me dit qu'il existe autant de façons d'aimer que de couleurs dans un nuancier, elle a raison, nous devons dire Stop à toutes les formes de Racismes, STOP à la LGBTPHOBIE.



À lire absolument. Merci M. Daniel Arsand.



P.S. : N'oublions pas que l'homosexualité, féminine et masculine, est encore aujourd'hui un délit passable de mort dans beaucoup de pays : https://www.cosmopolitan.fr/tous-les-pays-ou-l-homosexualite-est-interdite-et-punie-par-la-loi,2022352.asp

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Je suis en vie et tu ne m'entends pas

"Je suis en vie et tu ne m'entends pas", toi, Heinz, qui a préféré la mort à l’arrestation, toi qui ne peux plus m’entendre et à qui pourtant, dans le deuil impossible de ton amour, je m’adresse pour te dire l’indicible de ce que, sans toi, j’ai vécu seul… “là-bas”.



Peu de romans se sont fait l’écho, dans la littérature, de la déportation en camp de concentration des homosexuels qui figurèrent pourtant parmi les victimes de l’épuration que les nazis opérèrent au sein de leur propre peuple, et cette catégorie particulière de déportés, dont il ne fut d’ailleurs fait aucune mention au procès de Nuremberg, reste encore largement taboue aujourd’hui.



Dans ce roman hors norme où à la voix de l’auteur se mêle le monologue intérieur de son personnage principal, Daniel Arsand raconte l’histoire absolument épouvantable d’un jeune Allemand, Klaus Hirschkuh, déporté parce qu’homosexuel au camp de Buchenwald où il subit, en plus du traitement “ordinaire” infligé par les nazis, les sévices, les insultes et le mépris de ses co-déportés, lui le “pédé”, la “tante”, le “sous-homme”, le “porc”.



Libéré en 1945 après quatre ans de déportation, Klaus Hirschkuh n’a que 23 ans mais il est déjà “sans âge”, squelette errant dans les ruines de ce qui fut sa ville, Leipzig, à la recherche de sa maison et de ses parents : “il boitait et se rapprochait d’eux, ses parents, M. et Mme Hirschkuh. Il avait ce droit là ; ne plus se heurter à un mur de cendres.”



Mais qu’a-t-il encore en commun avec eux, ces parents à qui il fait honte ? De “bonnes personnes” pourtant, mais “il avait causé son propre malheur, et le leur. (...) Il les avait en quelque sorte déclassés par ses mœurs, (...) il les avait rendus douteux à eux-mêmes, à une société tout entière. Comment pardonner ?”



Dans une société et une époque où l’homosexualité est non seulement un péché et une faute mais, au regard de la loi, un délit et un crime, que l’on ait été déporté ne fait toujours pas de soi une victime. Comment, dès lors, se reconstruire, en dépit de l’incompréhension, de l’agressivité et du jugement d’autrui, comment réussir à édifier une forme de bonheur, d’espérance et d’apaisement, malgré la souffrance, la solitude et les souvenirs de l’enfer traversé “là-bas” ? Est-ce seulement possible, même loin de sa terre natale, même en France, le pays des Droits de l’Homme, même des décennies plus tard ?



J’ai rarement été à ce point bouleversée par la lecture d’un roman. Bouleversée par l’histoire qui n’est pas qu’une fiction, qui vous questionne et qui vous prend aux tripes. Bouleversée par l’écriture, hachée, crue, splendide, qui dit la colère, la violence et les larmes au-delà des larmes, la douleur au-delà des mots.



Un livre magnifique, important et nécessaire, qu’il faut absolument avoir lu - que l’on soit sensible ou non à la cause LGBT - et, pour moi, un immense coup de cœur. ❤❤❤



[Challenge MULTI-DÉFIS 2019]

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Je suis en vie et tu ne m'entends pas

Surprenant, criant de modernité. Klaus, jeune allemand sort de 4 ans d'enfer en camp pour son homosexualité. Ce livre retrace sa vie d'après, les cauchemars, la peur, le dégoût, les sévices endurés avec toutes la cruauté que cela peut inspirer. La place de parents qui ne l'attendaient pas, qui ne comprennent pas, comment se reconstruire loin, c'est aussi l'aube d'une époque où se cacher devient une injure, une injustice. L'auteur ne mâche pas ses mots, il faut le savoir avant d'ouvrir ce livre. Mais quel parcours fait par cet homme qui ressemble à tant d'autres, qui cherche doublement le chemin du bonheur, si bonheur il peut y avoir après tant de souffrance. Une oeuvre brute, qui passe d'un sujet à un autre sans transition mais avec la violence du traumatisme...à lire
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Lily

Ce livre conte l’enquête minutieuse d’un fils Simon, sur la vie de sa mère, une bouleversante incursion dans l’intimité de Lily, enfant : sentimentale et déjà excentrique , à qui il voue une passion mal partagée ,à un tel point que , fils unique il inaugure un musée dédié à sa mémoire dont il sera à la fois le gardien exclusif et dont il assurera les visites.



Lily , née le 18 octobre 1909 décédée le 8 juillet 1986——- presqu’une traversée du siècle ——-témoin du sceau de l’inquiétude, des guerres , des deuils, des coups du destin , du dérèglement, de la haine , de l’amour fou ou vain., un cycle de désastres , condamnée à la fuite par crainte de s’enfermer dans un amour exclusif qui menace insidieusement de la soustraire à la vie.



L’auteur déroule une pelote d’histoires sombres : tous ces êtres , Madeleine, Constance , Lily, repères tumultueux marqués par le recommencement de schémas familiaux néfastes : Lily , venait de Roanne , d’une lignée de femmes marquantes , étouffantes :Amélie , Madeleine, Constance, manque d’amour, extravagances , aimant ou détestant tour à tour , avec une folle intensité , puis vous abandonnant, sombrant dans un comportement glaçant , extravagant , toujours des attachements tumultueux , cisaillants qui ruinent une vie et confinant au mutisme, à l’angoisse——-des enfers maternels respectifs——-



Simon n’échappera pas à ce destin , un rescapé englué dans une fatalité qui le dépassera, l’empêchera définitivement d’être heureux ....



Il cherchera sa voie , en tentant de réduire à néant ses démons.



Cet ouvrage conte à merveille à l’aide d’une minutieuse observation psychologique, ces moments de la mémoire chargés d’une forte charge émotionnelle——sens de la perte et besoin absolu d’amour—— tel un gardien d’histoires anciennes reconstituées ———semblable à un archiviste de musée——-de génération en génération ——au sein d’une famille engluée dans une fatalité insidieuse et réelle..



Récit tortueux , inquiet, à l’écriture soignée , travaillée au petit point , originale , envoûtante, très belle.

Longues phrases sinueuses ou courtes au talent singulier.
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Je suis en vie et tu ne m'entends pas

Une écriture écorchée pour un texte fort. Chaque mot évoque la douleur de cet homme homosexuel que son passé dans le camp de Buchenwald a définitivement abimé. La lecture du livre est éprouvante. Le style est haché , déroutant et pourtant si expressif. Même la réparation sera refusée à ces hommes exclus, qui ont tout subi. Un livre marquant que je ne suis pas prêt d’oublier et qui vaut tous les discours.
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Lily

CHEMINS TORTUEUX...



Si le principe d’un musée à la gloire de la mère (Lily Hagopian) par son fils (Simon) aurait pu être glorieux : il n’en est rien... Si ce n’est « tourner en rond » (comme moi d’ailleurs) dans le dédale de la vie de Lily, tout comme sur la recherche d’identité de Simon.

Suis-je passée à côté de cette quête ? ...

Je reste très mitigée sur ce roman malgré l’écriture claire de Daniel ARSAND.



Je remercie, tout de même, BABELIO et l’éditeur LIBRETTO de m’avoir fait découvrir cet auteur dans le cadre de MASSE CRITIQUE JANVIER 2014.

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Lily

Elle ne venait pas de Somalie, Lily, non, elle venait de Roanne, rescapée d’un monde de femmes marquantes, étouffantes, qui aiment et qui détestent tour à tour avec la même intensité, et qui vous abandonnent

Et c’est Simon, son fils, qui à sa mort ouvrira un authentique musée à la gloire de sa mère, « épouse et mère, voyageuse parfois, extravagante à ses heures ». Musée dont il assurera les visites et sera le gardien.

Lui aussi est un rescapé, qui passe sa vie à tenter de tuer ses démons.

Madeleine, Constance, Lily… une transmission implacable des schémas familiaux.

Et ce livre est le récit des meurtrissures de l’enfance qui se transmettent de génération en génération.

L’’écriture et belle, l’ambiance est lourde. J’ai tourné les pages avec délectation. agacée mais pleine d’empathie pour Lily et pour Simon, englués dans une fatalité qui les dépasse et les empêche à tout jamais d’être heureux, espérant toujours une reconnaissance d’amour maternel

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Je suis en vie et tu ne m'entends pas

Il rentre à Leipzig en 45 après quatre ans de camp à Buchenwald, quatre ans de cruauté envers lui, Klaus, homosexuel.



Impossible d'oublier les humiliations des kapos, les viols collectifs. Impossible d'oublier son amour, Heinz qui s'est défenestré quand la Gestapo venait les arrêter, même dans les bras des amants qu'il ira trouver à Paris, même dans les bras de Julien.



Le style chaotique tente de refléter l'état d'esprit de Klaus qui ressasse les atrocités subies, ressasse encore, que de mots, trop!

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La Province des Ténèbres

Au XIII siècle, parti de la province de Cilicie (Arménie) Vicente Montefoschi ambitieux marchand vénitien, ambassadeur du pape auprès de Kubilaï le grand Khan, mène une caravane avec « Vartan Ovanessian moine et enlumineur dont l'unique obsession est de peindre les merveilles du monde ». Hovsep, l'eunuque, les accompagne il est le compagnon intime de Vicente, « l'éros du voyage ».

Le but de ce long périple : évangéliser au catholicisme ce lointain pays. Tous donc, cheminent sur la route de la soie vers La Province des ténèbres, ils traversent les forêts de Sibérie, la steppe mongole, les hautes chaines du Pamir, enfin en Chine ils rencontrent le khan des khans.

Daniel Arsand dans un style flamboyant, et beaucoup de rythme (les chapitres très courts) nous ensorcelle en nous projetant dans une caravane vivante et colorée. Nous entrons dans des contes fantastiques, nous traversons des villes fascinantes, dont les noms déclenchent mille rêveries : Sis, Kayseri ses fontaines et son caravansérail, Erzincan ses tapis et draps de soie, Tabriz et ses bordels, Kasham et ses fabriques de faïences, les hautes dunes et le brouillard du Tarim. Nous cheminons dans un monde d'hommes, un monde rude, brutal et sauvage. le récit est sensuel, tous nos sens sont en éveil : le jour, sur les marchés, on s'affaire dans les odeurs des épices, le chatoiement et le froufrou de la soie. le soir tombe et on se perd dans les dédales des rues, à la recherche des plaisirs de la chair… rencontres fortuites, étreintes furtives même Vartan le moine se laissera tenter par ces lascives rencontres.

Il faut lire et se laisser porter par le style incisif, pittoresque et dynamique de Daniel Arsand que du plaisir !



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Moi qui ai souri le premier

La lecture de ce livre m'a particulièrement bousculé. Tout d'abord, après quelques pages, j'ai hésité à continuer. En effet, le style d'écriture de l'auteur ne me convenait pas : étrangeté dans la construction des phrases, phrases relativement courtes... J'étais prêt à abandonner le livre. Mais, peu à peu, l'écriture s'est faite plus intime, plus intense et forte. Le récit autobiographique s'est affirmé avec douleur et lucidité. Finalement, je ne regrette d'avoir lu ce récit jusqu'au bout. Il est marqué par beaucoup d'émotions, de douleurs et de souffrance mais aussi par de la beauté et le partage d’un parcours de vie.



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Je suis en vie et tu ne m'entends pas

Ouvrage tres important pour moi,j'ai beaucoup aime l'ecriture;les mots,les phrases courtes,une ponctuation qui donne le ton.Ce livre devrait etre lu a voix haute,pour en saisir toute la portee affective.

Le theme de la sexualite homosexuelle,de la brutalite provoquee dans le camps de Buchenvald,la haine qu'inspire encore et toujours l'homosexualite ddsont traites avec beaucoup de justesse et de realisme.

Ce n'est pas un livre facile a lire mais ce temoignage fait partie des trop"rares".

Comment peut-on encore etre dans l'incomprehension de la difference,de l'autre autrement,pas comme soi?Le temps passe mais les mentalites ne changent pas.La haine et l'incomprehension sont toujours trop vivaces a mon gout!
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Moi qui ai souri le premier



Le titre questionne : A qui le narrateur a-t-il souri ? A quelle occasion ?

Le sourire comme arme de séduction à double tranchant.



La réponse n’est pas donnée au début de ce roman à la veine autobiographique.

Daniel Arsand commence par revisiter les lieux de son enfance, en particulier la rue Emile Poirot dont il décrit l’architecture .

Il radiographie les jardins ou ce qu’il en entrevoit.

Dans cette rue habitait une aïeule qui aimait converser avec lui, ce qui n’était pas du goût de sa mère qui « miaulait » être pressée !



Il réorganise ses souvenirs , constate des blancs, s’étonne de sa mémoire défaillante.l se pose une foultitude de questions dans sa tentative de décrypter son moi.Il aime la solitude déjà à 4 ans, se sent marginal quand il grandit.Ado, il est fan de Sylvie Vartan, s’ennuie dans les réunions familiales.Etre différent c’est se cacher pour éviter le harcèlement. Pourtant le voilà «  fils et fiotte ».

Dans ce récit intime, il fait défiler trois expériences amoureuses initiatiques, traumatisantes qui ont laissé leurs empreintes, traces indélébiles.



C’est au lycée , en classe de seconde qu’il repère un étudiant, Marc, à la voix d’adulte. Quand celui -ci l’aborde dans la rue, il est chaviré, tourneboulé, étonné qu’il connaisse son nom Daniel. Encore plus stupéfait d’entendre un éloge de son père, qui est en fait le tailleur du père de Marc.

Son émotion, sa sidération devant ce garçon rappelle les premiers émois que Philippe Besson relate dans Arrête avec tes mensonges.

Lui, encore puceau ignore tout des codes., mais les garçons l’excitent.

Voici le narrateur envoûté par les savoureuses odeurs émanant du corps de Marc , mêlant «  savon de Marseille et eau de Cologne à la lavande ».

Il attend beaucoup de la rencontre que lui propose Marc dans son immeuble bourgeois. Il fantasme sur leur tête-à-tête. Angoisse, fébrilité. Pour lui, les mots posséder, être possédé ne représentent rien.



Cette première expérience racontée dans les moindres détails, depuis la mise en scène théâtrale, les effleurements, les attouchements, sa soumission, la violence subie ( gifles) aura un impact traumatisant sur le narrateur.

Le voici comme un chat échaudé qui craint l’eau froide. Fréquentant une piscine municipale, à quinze ans, il teste une façon de drague. Assis sur le bord du bassin, ce poste de vigie lui permet ainsi d’observer les nageurs. C’est un trentenaire, Julien, qui l’aborde et le chavire par « l’appétit de tendresse » qu’il diffuse. Les rencontres se multiplient, le comblent. Julien devient son amant.Quel désespoir quand il constate que celui-ci s’est évanoui! Sentiment de perte, d’abandon, voire de trahison. Il ne lui avait pas laissé son numéro de téléphone.



La violence du dernier récit convoque tous les faits divers de harcèlement qui existent toujours, souvent aux dramatiques conséquences.

Comment va-t-il rebondir après ces épreuves subies à l'adolescence? Comment s’engager dans la vie au moment de l’entrée dans le monde adulte ?



C’est ce qu’il explique dans la dernière partie. Il a « épousé sa solitude », a renoncé à l’amour, pas aux aventures passagères ( pour lesquelles il faut sortir couvert pour se protéger de la maladie fatale, causant de multiples pertes, parmi ses amis). Il reconnaît avoir vécu «  en marge du sentiment amoureux ». Il s’est forgé de « robustes et scintillantes amitiés ».

Un réconfort salutaire : «  enfouir son visage dans la fourrure d’un félin et ronronner à l’unisson avec lui ». Cette évocation convoque «  Que Tal », roman dédié à son amour de chat.

L’écriture lui a permis de grandir, de prendre du recul avec son passé cabossé, «  écrire, assombrit, puis régénère ce qui semblait acquis ». Il fait confiance aux mots, les mots envahissent son être entier. Il montre le pouvoir des mots : «  un mot suffisait pour qu’une scène ancienne lui arrive en boomerang ».

Sa vocation de libraire est née de son engouement pour les mots.

Il glisse des confidences quant à sa relation avec ses parents, eux qui n’ont jamais su son penchant pour les hommes. Il leur témoigne toute sa gratitude.



Ce court récit au style haché , est constitué de phrases courtes, d’un flot de mots ( comme dans l’épilogue), en réaction à la parole empêchée.

Le corps en est un personnage central. Un corps qui a souffert, subi des humiliations, un lynchage à vomir, dans les «  chiottes » d'un établissement scolaire ou , au contraire, a vécu « des nuits d’un flamboyant bonheur ». Des évènements occultés ont resurgi dans la mémoire de l’auteur et lui ont permis de raconter l’innocence saccagée.

Ce manuscrit longtemps en sommeil, très intime, aura certainement eu un effet cathartique et réparateur pour Daniel Arsand. Sincère, charnel, touchant.Un opus qui incite à lire ou relire ses romans précédents.



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Je suis en vie et tu ne m'entends pas

Il y a un sorte de beauté déconcertante dans ce texte poignant, sensible et même poétique; le combat d'une vie pour survivre. Qui est Klaus Hirschkuh? Klaus est une jeune Allemand inverti -homosexuel- dans l'Allemagne nazie. Il est arrêté en 1941 à l'âge de 19 ans et envoyé au camp Buchenwald. Son amant, Heinz Weiner choisit le suicide et se défenestre lors de l'arrestation. A Buchenwald, Klaus subira toutes les humiliations tant de la part des kapos que des autres prisonniers. Les homosexuels étaient reconnaissables au triangle rose cousu sur leur uniforme de prisonniers.

En 1945, il est libéré et rejoint sa famille qui avait fait le deuil de leur fils depuis un moment déjà avec un certain soulagement peut-être. II est reçu sans effusions majeures. Ses mœurs n'ont jamais été les bienvenues. C'est dans l'exil en France qu'il va lentement se reconstruire, se faire des amis et retrouver l'amour en la personne de Julien. Le livre se termine dans les années 1980. Klaus s'engage dans le combat contre le SIDA. Il a toujours cru en le triomphe de la vie et s'est battu toute sa vie pour cela même dans les jours les plus sombres où il n'était plus un être humain mais le paragraphe 175, matricule 5395 arborant le triangle rose. Ce livre est d'une force terrible, pas facile à lire tant par le style que par le sujet. Je recommande cette lecture hors du commun.
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Je suis en vie et tu ne m'entends pas

Je suis en vie et tu ne m'entends pas traite de la déportation sous un angle peu souvent abordé, celle des homosexuels. En l'occurrence, celle de Klaus Hirschkuh au camp de Buchenwald.



Le livre parle de l'enfer vécu par ces hommes élevés au dernier rang de l'humanité, mais aussi de la difficulté de se reconstruire, d'être simplement avec les autres, de dire.

Mais l'histoire va plus loin et s'étale dans le temps pour évoquer l'homophobie persistante encore bien des années plus tard (et l'actualité ne vient malheureusement pas le démentir, même en 2018 !), le début des années sida - le "cancer gay" - et la force qu'il faut pour ne plus se taire, ne plus se résigner à être une victime, tout en revendiquant que ce statut soit aussi reconnu.



Sur le fond, le sujet de ce roman est donc sans conteste très intéressant. Mais je n'ai malheureusement pas du tout adhéré à la forme. L'écrivain utilise des mots anguleux, cassants contre lesquels on vient se cogner comme aux os saillants de Klaus; son écriture pleine de rudesse, regorge d'aspérités, de mots crus, violents, indécents. Sa narration est hâchée, déroutante, presque délirante. Effet de style à mon avis inutile et superficiel qui éteint l'émotion, rend la lecture laborieuse.



J'ai déjà pu remarquer que les témoignages de déportés étaient souvent pleins de sobriété et de pudeur et que néanmoins ils atteignaient sans détour leur cible : notre coeur, notre mémoire, notre réflexion.

Ici, cet écran de fumée de mots qui veulent choquer, comme souvent lorsque les écrivains tentent de traduire le vécu d'un déporté, est vain. L'horreur se suffit à elle-même sans qu'il soit besoin, à mon avis, d'en rajouter dans l'obscénité.



En bref, je n'ai pas été émue. Pire encore, je me suis ennuyée.

Dommage.
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Je suis en vie et tu ne m'entends pas

Ce roman me faisait de l'oeil depuis très longtemps et en même temps me faisait aussi un peu peur.



Peur car la thématique, bien que chère à mon coeur, est généralement très dure et peut être très violente au niveau du ressenti et de l'immersion.



Je ressors de ma lecture avec un avis en demi-teinte. J'ai beaucoup apprécié la plume de l'écrivain, ces phrases et ces mots qui surgissent par flots ininterrompus, qui s'entremêlent, qui nous perturbent, un style si représentatif de ce qu'il peut se passer dans certains cerveaux. Puis, j'ai beaucoup moins aimé les nombreux souvenirs qui sont répétés et répétés, et bien sûr, les passages les plus violents. Je l'ai lu une fois, j'ai bien saisi la chose et n'ai pas forcément envie de le relire et le relire. Mais je comprends cette volonté de l'auteur, lorsqu'une personne subit un traumatisme, elle le revit encore et encore, les souvenirs affluent au beau milieu de n'importe quelle situation lamda, sans prévenir. Et ça l'auteur le retranscrit très bien !



Après, l'histoire m'a bien sûr touchée, le jeune homme aussi. Envoyé à 19 ans dans les camps de la mort car homosexuel...qui se fait torturer et violer par tous, aussi bien prisonniers que gardiens...et qui revient dans sa ville natale au sein d'une famille qui aurait préféré qu'il soit mort. La famille est assez intéressante, leur culpabilité, leur fausse compassion, leur égoïsme sont particulièrement intriguants. J'aurais aimé que la relation avec le grand frère soit plus creusée car on sent qu'il y a quelque chose de très malsain, que ce qu'il ressent pour son petit frère n'est pas anodin et cela aurait mérité plus de profondeur.



Enfin, une fois passé la première partie qui pour moi traîne pas mal en longueur, j'avoue avoir lu la plupart des pages en diagonales car j'étais beaucoup moins ancrée dans le récit. Le jeune homme que je trouvais attachant au début me paraissait antipathique. J'ai par contre aimé les diverses thématiques abordées dans ces deux dernières parties : le racisme, l'homophobie, Paris à cette époque, les débuts de la lutte contre l'homophobie...



C'est un livre qui me restera en tête car j'ai appris pas mal de choses sur le traitement infligé aux homosexuels dans les camps de la mort mais c'est un livre qui ne restera pas dans ma bibliothèque.
Lien : https://labullederealita.wor..
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Des amants

En 100 chapitres, courts avec des phrases brèves, des mots jetés sur la page mais toutefois choisis, Daniel Arsand nous conte (tel un conte, un sauvetage, un amour qui jaillit, des forêts, des animaux, un château, un roi), l'amour incandescent entre un jeune paysan et un noble au XVIIIème siècle, deux êtres coupables de s'aimer car hommes parmi ceux qui ne conçoivent pas imaginable leur passion charnelle. Alors que les mignons jouaient à Versailles, ces deux là ont perdu.
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Je suis en vie et tu ne m'entends pas

J'ai eu quelques difficultés à m'acclimater à l'écriture torturée et écorchée de l'auteur. Pourtant, après quelques pages, cette plume acérée s'est avérée adéquate. Ce livre est une incursion dans l'esprit d'un jeune homosexuel allemand de retour d'un camp de concentration nazi. Une libération, une délivrance,... ou un long chemin vers une reconstruction, psychologiquement et physiquement, inaccessible ? Un livre bouleversant, perturbant et poignant à la fois.
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Un certain mois d’avril à Adana

Avril 1909 à Adana, dans le sud de la Turquie. Une chaleur moite écrase l’ancien royaume arménien, la plaine fertile et ses champs de coton, la ville encore paisible où une sourde tension, pourtant, s’installe peu à peu. Certains chrétiens ne veulent, ne peuvent pas y croire - la vie ici est un fleuve au cours paisible que rien ne saurait détourner. D’autres s’inquiètent, devinent la violence qui lève lentement, éclatera bientôt. Les musulmans, quant à eux, ne se font déjà plus d’illusions - que ce soit pour saluer le feu qui dévorera les infidèles ou pour déplorer le massacre qui s’annonce, pour appeler à la guerre ou pour tenter d’épargner la paix.



Il y a là Diran Mélikian, poète dont les vers n’ont jamais chanté que la beauté du monde, son épouse bien-aimée et son ami, le turc Üzgür bey. Il y a Atom Parpazian, le joailler, son jeune fils tout en silences, il y a Vahan, le révolutionnaire maladroit, l’homme qui le cherche pour le tuer, qu'il a trahi et qui l’aime pourtant. Il y a des notables, des bergers et des artisans, des hommes et des femmes, des enfants et des vieillards, des craintifs et des ardents - et bientôt, tous, ne seront plus que gibier, fuyant dans les décombres ou luttant, armes à la main, pour tenter de sauver ce qui peut l'être. Soit pas grand chose.



Avant que le gouvernement ottoman ne décide de régler pour de bon, en 1915, la question arménienne, les populations chrétiennes avaient déjà subi plusieurs flambées de violence meurtrière - massacres hamidiens entre 1894 et 1897, massacres d'Adana en avril 1909. Daniel Arsand (dont le père est né arménien à Istambul la même année) retrace ceux-là en une fresque poétique, très intimiste, dont le but est bien moins de dénoncer que de saisir l'âme, les désirs, les illusions et les peurs, de quelques personnages à l'instant où le destin s'apprête à basculer dans l'horreur.

Le résultat, succession de petits tableaux ciselés au détail près, est littérairement très abouti mais a eu longtemps du mal à retenir mon attention. Un peu trop fragmentaire pour moi, ce récit, trop peu de temps consacré à chaque personnage avant de basculer sur un autre, puis un autre encore, pour que je réussisse à me familiariser avec eux et me laisse vraiment toucher par leur sort. Du moins pendant toute la première partie du roman. Par la suite, les pages qui évoquent le massacre proprement dit prennent une dimension dramatique puissante, presque épique parfois, qui recentre l'attention et peut difficilement laisser insensible.

Légère inadéquation, donc, plus que réelle déception, qui vient sans doute aussi d'un certain manque de concentration de ma part et nuance plus qu'elle ne remet en question mon intérêt pour cet écrivain.
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Je suis en vie et tu ne m'entends pas

Comment vouliez-vous que je résiste à ce délicieux jeune homme qui m'attendait, clope aux lèvres et regard provocant, sur une table de la médiathèque ? Une photo de Marianne Breslauer judicieusement choisie, tant pour attirer l’œil que pour illustrer ce superbe roman qui s'inscrira parmi mes plus belles découvertes de l'année.



Nous voici à Leipzig, en 1945. Un homme détruit avance dans une ville en ruines, qu'il reconnaît à peine. Autrefois, comme dans un autre monde, il y a eu le plaisir, l'insouciance, un amour comme on en rencontre rarement. Et puis quatre ans plus tôt, des hommes ont enfoncé leur porte, son bel amour s'est envolé et Klaus Hirshkuh a été traîné vers un de ces camps dont on revient rarement, où il a survécu pourtant, quatre ans durant, à tous les sévices et toutes les infamies. Triangle rose, dans ces camps-là, fait de vous un sous-homme aux yeux mêmes des autres détenus...

A présent, la liberté retrouvée est un abîme d'incertitudes. Dans un monde de privations, il faut rafistoler tant bien que mal le corps et l'esprit, apprivoiser le deuil, affronter déjà ceux qui ne savent pas, ne veulent pas savoir, ne peuvent pas tolérer d'ouvrir les yeux. Puis partir ailleurs pour réapprendre à vivre, peu à peu, à désirer à nouveau, à aimer peut-être, et un jour enfin, un jour lointain, ne plus baisser les yeux, ne plus chercher l'oubli et le silence, mais oser dire enfin, clair et fort, ce que l'on est et ce qu'on a subi. Ce qu'on peut subir encore jusque dans la paix depuis longtemps revenue.



Je suis en vie et tu ne m'entends pas... Voilà un de ces textes trop rares qui parviennent à concilier, sans aucune lourdeur démonstrative, un propos de fond engagé (la déportation des homosexuels et sa trop difficile reconnaissance, symbole d'une homophobie subsistant sous tous les régimes) et une exploration de l'intime remarquablement juste et puissante. La psychologie est fine, les personnages sont vrais, même les troisièmes rôles, même ceux qui servent surtout à illustrer un propos, ceux qu'il ne sert à rien d'expliquer et que chacun connait plus ou moins pour avoir déjà croisé leurs semblables. L'écriture, surtout, est formidable, dense, âpre, capable de dire avec autant de force l'horreur et la violence, le sang, la merde, l'humiliation, que la beauté irréelle de la jeunesse enfuie, la mélancolie suffocante des amours disparues, l'ivresse d'un baiser, le vertige d'une caresse. Un torrent sans cesse bousculé, qui entraîne le lecteur au plus près (cœur, âme, corps) d'un homme redoutablement attachant, abîmé, hanté, bien plus fort pourtant qu'il ne le sait lui-même et dont l'existence se fait peu à peu un bel hommage à la liberté de vivre et d'aimer.
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