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Critiques de Ella Maillart (66)
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Oasis interdites : De Pékin au Cachemire, une..

Quatre jours de lecture et y être qu’à la page 150, pas bon signe ! Je me faisais une joie pourtant de lire cette aventurière suisse dont Nicolas Bouvier en a fait l’éloge. Son compagnon de voyage est Peter Fleming. Son frère s’inspirera de sa vie pour créer le personnage du fameux James. Je reste en lisière, n’arrivant pas à pénétrer dans ces rencontres et problèmes d’intendance. J’aurais aimé y lire les motivations de Ella Maillart, être dans le vécu de ces 6 000 Kilomètres de la Chine à l’Inde en 1937. Peut-être trop d’ambiguïté concernant les problèmes économiques et politiques de l’époque ! Abandon à la moitié.
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Témoins d'un monde disparu

Si vous connaissez déjà Ella Maillart, grande voyageuse suisse, vous n'apprendrez sans doute pas grand chose avec ce tout petit livre, mais vous pourrez toujours apprécier la magnifique présentation que Nicolas Bouvier fait d'elle.

Dans ce portrait, on lit toute l'admiration, le respect et l'affection qu'il a pour cette grande dame, cette femme qui dans les années trente a parcouru toute l'Asie en compagnie de Peter Fleming - celui-là même qui a inspiré le personnage de James Bond à son petit frère! - et a maintes fois recommencé seule ou accompagnée, jusqu'à ses 80 ans passés!

Quelle personnalité! Enfant, elle se passionne pour les grandes villes soviétiques aux sonorités exotiques, dévore les récits de voyages et d'explorations, rejoint la Corse en bateau seule avec son amie Miette - future maman de Delphine Seyrig - à vingt ans. Puis fréquente les milieux bohèmes, avant de se lancer dans un reportage sur le jeunesse russe, prétexte à partir, enfin, pour la grande aventure.

Quand, en 1952, le jeune Nicolas Bouvier lui demande quelles routes prendre pour aller de Genève à Madras, elle lui répond: "partout où des hommes vivent, un voyageur peut vivre aussi..."

D'abord fascinée par les différences, elle finit par apprécier, plus tard, les ressemblances, ce qui nous unit plus que ce qui nous sépare. Son regard sur le monde se veut à l'écoute de ce qui l'entoure, hommes comme nature.

Les quelques photos présentées dans ce livre,allant de l'Ouzbékistan au Tibet, sont empreintes d'humanisme et de beauté, montrant des portraits pris sur le vif. Je suis restée un long moment émerveillée devant le visage extatique d'un jeune pèlerin tibétain, en 1935, venant à me demander ce qu'avait bien pu être sa vie par la suite, son portrait étant si net.

Une petite anecdote pour finir: invitée chez Pivot à 86 ans, alors qu'elle évoquait Pékin, un invité lui demande si elle aurait par hasard croisé le chemin de cette femme aventurière qui a traversé l'Asie et la Chine en compagnie de Fleming. Amusée, elle s'est écriée: "c'est moi!"
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La voie cruelle

Juin 1930 : l'Europe se prépare à entrer en guerre, mais 2 femmes que tout oppose vont partir au volant d'une Ford puissante vers l'Afghanistan pour " vivre en accord avec leur coeur " !

Ella Maillart ( l'auteure ) qui est une sportive de haut niveau ( ski alpin/hockey ) a déja visité l'Asie et fait des reportages ! Elle est calme, solide, endurante et,

Christina ( Anne-Marie Scharzenbach ), séparée d'un mari diplomate est une poètesse, une écrivaine fragile, maigre et toxicomane.

Parties de Suisse dont elles sont originaires, elles vont traverser l'Italie Mussolinienne, la Serbie, la Bulgarie, la Turquie pour l'Afghanistan !

Elles vont coucher sous la tente, chez des hôtes, des amis et se faire régulièrement contrôler par les autorités qui les prennent pour des allemandes, elles ne peuvent pas faire des photos et, elles doivent cacher leur matériel sophistiqué , mais elles vont découvrir des paysages somptueux, des mosquées, des tombeaux prestigieux chargés d'histoire, des villes saintes, des villages souvent accueillants ou parfois à l'abandon, des barrages, des européens qui y travaillent et bien sur des Afghans avec leurs coutumes, leurs modes de vie si éloignés d'elles !

C'est Ella qui encourage Christina, la guide, et tente de lui faire passer son addiction à la morphine. En effet si Ella cherche " un paradis perdu, un monde originel simple et harmonieux", sa compagne fascinante, énigmatique est masochiste : elle s'impose des épreuves pour alimenter une souffrance permanente, elle est " un ange déchu" qui cherche refuge dans l'alcool, la drogue ! Elles s'admirent mutuellement et, se respectent car elles sont 2 femmes brillantes bourrées de talent.

A Kaboul, elles vont se séparer , la guerre est déclarée : Ella veut se réfugier en Inde alors que Christina persiste à vouloir retourner en Suisse.

Ella Maillart nous raconte ce voyage étonnant et téméraire de 2 femmes seules dans des pays qui étaient déja dangereux en une période qui l'était tout autant !

Le titre " la voie cruelle"a été donné par Ella : car Christina choisissait toujours celle de l'enfer car elle croyait à la souffrance qui mène à la grandeur !

L.C thématique de juillet 2021 : les voyages
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Témoins d'un monde disparu

Sublime, je n'ai pas d'autre mot pour décrire ce tout petit livre qui contient tellement de choses.



Nicolas BOUVIER nous offre dans un style magistral, poétique et attendri, la biographie d'une voyageuse éternelle Ella MAILLART qu'il rencontra en 1952.

Ce que l'on ressent à la lecture de cette biographie, une impression de plénitude et de sérénité je dirais, comme a dû l'être la vie de cette femme extraordinaire.

Le livre se termine sur une dizaine de pages remplies de magnifiques photographies noir et blanc qui font état des voyages d'Ella MAILLART. Saisissant sur le vif l'instant figé d'un monde aujourd'hui disparu, où le temps avait une valeur.



Cette lenteur, ce calme tant dans l'écriture du biographe que dans les photos qui suivent imprègnent le tout d'une douceur ouatée. Une invitation au voyage, des envies d'ailleurs. Une Asie multiple, lointaine, inaccessible car perdue dans le temps à présent mais qu'il serait doux d'effleurer des sens ce qu'a vécu cette grande dame. Magicienne du réel.
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La voie cruelle

Le récit de voyage entre Europe et Asie ( Afghanistan - Inde ) est marqué par le livre de Nicolas Bouvier L'usage du monde qui raconte ce périple dans les années 1950.

Pourtant d'autres compatriotes suisses ont réalisé ce voyage en 1939 entre Suisse et Afghanistan à bord d'une Ford moteur V8 de 18 chevaux.

Il s'agit d'Ella Maillart et d'Annemarie Schwarzenbach.

Ella Maillart est une ancienne athlète de haut niveau reconvertit dans le cinéma et le récit de voyage.

Annemarie Schwarzenbach deszcend d'une riche famille industrielle et s'est vite dressée contre les conformismes de son milieu. Personnage androgyne et morphinomane, elle est l,opposée d'Ella Maillart.

L'une est calme, posée; l'autre est fragile et maladive.

Ce récit de voyage est écrit par Ella Maillart. Annemarie Schwarzenbach prendra le nom de Christina.

Ce récit de voyage est double. Il nous raconte l'avancée de ces deux jeunes filles vers l'Asie, mais aussi la souffrance de Christina vis à vis de la drogue. En cela le titre du livre ne laisse aucune ambiguïté . Ce périple est une voie cruelle durant laquelle Christina peut être rattrapé par ces démons.

La part belle du livre reste néanmoins le voyage.

Et quel voyage. Il faut se rappeler que l'on est en 1939 ,que le nazisme a pignon sur rue et que la guerre frappe à la porte de l'Europe.

Cette traversée des pays du Moyen Orient et des anciennes Républiques soviétiques nous rappelle qu'hormis des changements de frontières et de régime , cette région reste d'une instabilité effrayante.

Alors que dire de ce périple féminin dans un monde masculin où la place de la femme n,est sûrement pas au volant d'une Ford V8.



Ce mélange de périple et de fuite en avant de Christina nimbe ce récit de voyage du mystère humain et de ces silences.

Un joli pendant au livre L'usage du monde de Nicolas Bouvier










Lien : https://auventdesmots.wordpr..
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Oasis interdites : De Pékin au Cachemire, une..

Ella Maillart est comme une icône du récit de voyage, mais j’ai toujours hésité à la lire, ne comprenant pas bien le mélange de ses exploits sportifs et de ses voyages. Suite à un portrait que je qualifierais d’attachant et de lumineux dans l’émission hélas maintenant disparue « Partir avec… » de Stéphanie Duncan (que j’ai déjà cité à plusieurs reprises comme inspiration pour des lectures), je me suis finalement décidée à franchir le pas.

Je ne m’étais guère trompée, et je ne sais toujours pas pourquoi Ella Maillart entreprend ses voyages. Que cherche-t-elle ? L’amour du risque et de l’interdit, la difficulté et le dépassement de soi ? Ce livre est à l’image du bercement monotone du cheval sur le dos duquel elle parcourt tant de kilomètres d’un interminable désert. On y apprend finalement peu de choses sur les zones traversées, hormis quelques anecdotes assez insignifiantes sur les conditions du voyage et les démêlés avec l’administration.

Pourtant, étrangement, j’ai lu ces quelques trois cent pages de longues chevauchées avec plaisir, emportée par les pas des chevaux et des ânes successifs qu’Ella Maillart monte, ou mettant mes pas dans ses pas qui font s’ébouler les dunes de sable ou de rocs. Je ne sais comment, dans ce texte qui égraine les jours et les heures monotones, Ella Maillart réussit à transmettre son bonheur d’être à sa tâche quotidienne, heureuse des efforts et de la fatigue physique. Rien ne résume mieux cette apparente contradiction que la juxtaposition de ces deux phrases qui décrivent ce voyage :



Fatigue intense… Une fois encore, il ne s’agit plus que de durer, de tuer une heure, et puis une encore. (p. 186, Chapitre 5, “Adam djok ! Adam bar ?”, Partie 2, “L’imprévu”).



Je suis toute à la curiosité de cet avenir incertain, au sentiment d’être délivrée désormais des obstacles des hommes ; toute à la joie de sentir que chaque jour, maintenant, sera neuf, et qu’aucun ne se présentera deux fois ; toute à mon application de n’observer plus qu’une seule règle :celle de marcher droit devant moi. (p. 85, Chapitre 9, “Far-West chinois”, Partie 1).



Peut-être ai-je aimé ce livre parce que j’y ai trouvé l’écho à d’autres lectures. Il a notamment rendu plus proche les nouvelles de Yasushi Inoue dans Lou-Lan, il m’a fait recroisé diverses figures déjà croisés dans Bouddhas et rôdeurs sur la Route de la Soie de Peter Hopkirk, en particulier Sven Hedin, dont deux livres m’attendent sur mes étagères. Peut-être l’ai-je aimé parce que tout comme moi Ella Maillart ne peux s’empêcher de faire des parallèles saugrenus, ici entre les paysages traversés et certains souvenirs de sa Suisse natale ou (plus justifiés) de ses voyages précédents.

Je l’ai aimé probablement parce que, par petites touches à peine évoquées, Ella Maillart donne une vision de la vie et du bonheur qui font écho à mes propres préoccupations, à mes interrogations et à mes contradictions. Parce qu’elle cherche le bonheur dans les creux des dunes et dans les sommets enneigés, et parce qu’elle ne trouve qu’elle-même au bout du chemin.



Le bonheur le voilà : cette ivresse que crée un instant d’équilibre entre un passé qui nous satisfait et un avenir immédiat riche de promesses. (…) Un fou rire de gamine s’empare de moi tandis que je bourre les côtes de Peter de coups de coude, incapable d’exprimer autrement la joie qui bouillonne en moi. (p. 262, Chapitre 12, “En Kachgarie”, Partie 2, “L’imprévu”).
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Oasis interdites : De Pékin au Cachemire, une..

En 1935, Ella Maillard, jeune femme suisse d'une trentaine d'années, fait un périple de 6.000 km et sept mois en Asie centrale de Pékin à l'Inde à pied, à cheval et en chameau.

Elle est envoyée par le journal "Le Petit Parisien".

Elle y rencontre Peter Fleming (le frère de Ian Fleming / James Bond), qui est journaliste au Times.

Elle parle le russe car elle a déjà fait un périple dans des provinces russes profondes, et lui connait un peu le chinois.

Mais, douée d'un solide tempérament, elle hésite à accepter d'être accompagné par un Occidental pour ce périple.

En effet elle n'aime rien tant qu'être seule avec les nomades, vivre leur vie quotidienne, découvrir chaque jour, chaque paysage, seule pour les apprécier pleinement.





Leur souhait est de faire cette traversée alors qu'une partie des routes est interdite et contrôlée par l'armée.

Et de toutes façons c'est interdit aux Occidentaux, l'expédition Citroën de la "Croisière jaune" n'en est pas revenue.

La guerre civile fait rage et le Japon tente d'envahir les provinces chinoises.

C'est dans ces conditions extrêmes qu'ils traverseront ces contrées accompagnés de guides, de chevaux, de chameaux, partageant complètement la vie des nomades, ils suivront même la suite d'un prince. Les rencontres se font naturellement, l'hospitalité prime partout.





Malgré tout, rien n'est écrit et pendant ces mois il faudra mener une vie très dure, l'eau n'est pas forcément au rendez-vous, les réserves de fruits secs et de thé s'épuisent.

Heureusement Peter Fleming est un bon tireur et les joies de la chasse les distraient et les nourrissent !





Dans ces conditions on ne peut plus difficiles, Ella Maillart resplendit de bonheur d'être dans ces contrées lointaine où aucun Occidental n'est jamais venu.

Cette petite femme a une énergie et une aptitude à l'allégresse qui transporte littéralement le lecteur !

Comment ne pas être séduit par son humanité, son amour des gens, son admiration de la nature, son respect de l'autre !





Un récit de voyage inoubliable, que j'ai fait suivre de son pendant, le récit de Peter Fleming "Courrier de Tartarie" (à croire qu'ils n'ont pas fait le même voyage !)

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La voie cruelle

Juin 1939. Deux femmes éprises de liberté, d'une soif d'aventures et de grands espaces, loin de l'atmosphère angoissante de la guerre qui se rapproche inexorablement... Si l'objectif premier de leur périple est de rejoindre le Kafiristan, province montagneuse du Nord de l'Afghanistan pour y étudier ses peuplades sous prétexte d'ethnologie, on comprend vite que le voyage sur les pistes à travers déserts, steppes ou montagnes compte plus que l'objectif. Ella Maillart et son amie Christina sont en quête d'un absolu qu'elles ont du mal à définir, surtout Christina, morphinomane, qui traîne sa souffrance et son mal de vivre dans une vaine tentative de s'en sortir. Sous le pseudonyme de Christina se cache son amie Annemarie Schwarzenbach, photographe.



Les deux femmes quittent Genève au volant d'une Ford et traversent successivement l'Italie, la Yougoslavie, la Bulgarie, la Turquie, l'Iran pour arriver finalement à Kaboul. Mais presque jusqu'au bout du voyage, elles seront confrontées à la peste brune qui se répand comme une traînée de poudre dans tous les lieux traversés.



Ella Maillart couchait par écrit son voyage pour envoyer articles et photos aux journaux qui lui finançaient son périple. Elle décrit son éblouissement devant les minarets turcs, les mausolées mongols ou les mosquées iraniennes, la volupté éprouvée devant les falaises de Bamiyan qui abritait les grands bouddhas sculptés dans la roche, l'âpre beauté du plateau anatolien, la monotonie des paysages arméniens, son émerveillement face aux six lacs du Band-i-Amir qui sont enserrés entre des falaises roses...



Voyage intérieur, fuite en avant, méditation sur la vie patriarcale menée par les peuples qu'elle rencontre sur sa route, Ella Maillart ne cesse de se questionner : faut-il vraiment moderniser l'Iran et l'Afghanistan, troquer leur vie simple de bergers de moutons et de paysans cultivant du blé ou des melons contre une vie matérialiste, industrialisée avec une population éduquée ? La grande voyageuse ne répond pas mais on ressent son attraction pour cette vie rude, simple, où pourtant les femmes ne sont que des ombres sans visage.



Ella Maillart s'étend rarement sur les désagréments rencontrés sur la route : pannes mécaniques de la Ford, fréquents enlisements dans le sable, chaleur extrême, attaques multiples d'insectes piqueurs. On devine une femme qui ne redoute ni l'inconfort, ni les péripéties habituelles à ce type de voyage. Elle s'attarde plus volontiers sur les soucis rencontrés avec les autorités policières de chaque pays pour avoir l'autorisation de franchir la frontière, pour ne pas se faire confisquer les pellicules déjà utilisées ou leurs appareils photo, car, plus elles vont vers l'Est, plus les interdictions se font nombreuses.



Son récit est aussi tissé de nombreuses évocations historiques que j'ai moins goûtées, n'ayant pas l'érudition nécessaire pour les apprécier toutes.



C'est un livre qui se lit en prenant son temps, en lambinant, en s'interrompant pour regarder pour la nième fois le tracé en pointillés de son trajet ou pour aller chercher sur Internet à quoi ressemble le mausolée du prince mongol Oldjaytu (Oldjaïtou) dont l'email turquoise éblouit Ella Maillart à Soltaniyyé en Iran.



Challenge multi-défis 2023

Challenge plumes féminines 2023

Challenge non fiction 2023
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La voie cruelle

J'avais depuis longtemps envie de lire Ella Maillart.







La voie cruelle raconte son voyage jusqu'en Afghanistan, en voiture, en compagnie d'une amie Christina ( l'écrivaine Annemarie Schwartzenbach) à la veille de la Seconde Guerre Mondiale. Elles traversent l'Italie, la Serbie, la Bulgarie, la Turquie et l'Iran, campent parfois, le plus souvent logent dans des maisons d'hôtes aménagées pour les voyageurs le long de la Route de la Soie, sont souvent invitées chez les notables...







Ce n'est pas le premier voyage des deux voyageuses dans ces contrées. Ella Maillart a séjourné dans la région. Christina est la femme d'un diplomate à Téhéran. Point de découverte ou d'exotisme mais une réflexion sur le voyage très originale.



ella maillart et annemarie



"Ce voyage ne sera pas une folle escapade, comme si nous avions vingt ans ; et d'ailleurs ce serait impossible avec l'actuelle tragédie européenne. Ce voyage d'étude doit nous apprendre à atteindre notre but: devenir des êtres conscients, capable de répondre d'eux-mêmes. Il m'est devenu insupportable de vivre ainsi à l'aveuglette...Quelles est la cause, quelle est la signification de ce chaos qui sape hommes et nations. Et puis il doit y avoir quelque chose que je puisse faire de ma vie, une idée un but pour lequel je puisse mourir avec joie ou vivre..."



déclare Christina.



Ella Maillart essaie aussi de détourner son amie de la drogue.



Le récit aura donc plusieurs facettes : la description des paysages, mœurs, et coutumes d'Orient mais aussi l'aspect psychologique et enfin une réflexion politique sur le chaos qui se dessine en 1939. Regard féminin (féministe?) de ces deux femmes indépendantes dans un pays où les femmes sont invisibles.



Ella Maillart est une merveilleuse conteuse. Elle raconte l'histoire, les légendes attachés aux monuments qu'elles visitent. Elle décrit merveilleusement bien les paysages :



"Il était encore tôt le matin lorsque, émergeant d'une gorge, nous atteignîmes Haibak, le Samagan des légendes persanes. Le jeune soleil baignait une scène idyllique. Les ruines impressionnantes d'un château crénelé couronnaient une colline[....]



Assises sur une natte et buvant du thé dans des bols de porcelaine, nous admirions les montagnes où nous allions pénétrer, puis les champs ambrés qui entouraient le village. Plus près encore, les têtes superbes et le maintien aristocratique de trois "anciens". Il y avait aussi, près d'une pile de melons tachetés un vendeur. Avant de faire son achat, chaque client opérait un choix minutieux. Plus loin, un mouton pendait à un arbre, habilement dépecé par le boucher. Derrière nous, une rangée de théières rondes brillaient doucement dans l'ombre d'une étagère tandis qu'un garçon éventait le charbon de bois de son samovar. Deux hommes portaient des calots brodés, gais comme un bouquet de fleurs vives. [...]Etudiant attentivement les étrangères, un garçonnet caressait sa perdrix d'une manière machinale...."



Juste après cette vision élégiaque elles découvrent la construction d'un barrage électrique sous la direction d'un ingénieur allemand. Enfer de la construction mais aussi destruction d'une vie nomade et industrialisation. Réflexion des deux journalistes sur l'irruption du monde moderne dans cet Afghanistan encore médiéval.





Elles campent à Bamyan, découvrent les vestiges bouddhiques, ainsi que les traces du passage d'Alexandre le Grand.



En quoi cette route était elle "cruelle"?



interrogation de la lectrice.



Au contraire cette route m'a paru particulièrement douce, en considérant les contrées désertiques, les très hautes montagnes, le handicap d'être deux femmes seules (elles le détournent pour en faire un avantage.) La cruauté sera à la fin du voyage : Kaboul, la maladie de Christina, Ella qui l'abandonne, malade et dépressive. Cruauté aussi qui les attendent avec l'irruption de la Guerre en Europe. Que vont faire les deux Suissesses?



Je referme ce livre avec l'impatience de retrouver Ella Maillart dans Des monts célestes aux sables rouges qui m'attend à la bibliothèque.




Lien : http://miriampanigel.blog.le..
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La voie cruelle

À l'heure où la malheureuse actualité internationale nous parle de l'éventualité de ré-établir des couloirs humanitaires aériens (de Mazar-i-Sherif et de Kandahar vers Islamabad, Pakistan et Machhad, Iran) pour évacuer une population afghane meurtrie par une vicennale dernière agression militaire étrangère misérablement perdue (dernière d'une série de cinq depuis les Moghols et les Seldjoukides...), ce livre relate le périple de deux femmes en automobile, quittant l'Europe à la veille de sa chute dans une guerre mondiale, en juin 1939. Ella Maillart, déjà célèbre notamment pour avoir voyagé seule jusqu'au Turkménistan soviétique en 1937 et avoir interviewé au passage Kemal Atatürk et Reza Shah Pahlavi, cherche à prendre de la distance d'avec les ressorts d'une modernité qui présente les signes avant-coureurs du suicide collectif, et elle propose de se faire accompagner par Christina, alias de la journaliste et écrivain Annemarie Schwarzenbach, qu'elle veut sauver de la toxicomanie et de la dépression.

J'ai trouvé dans ce récit de voyage très touffu et extrêmement touchant, humainement et émotionnellement, trois matières tout aussi intéressantes l'une que l'autre. D'abord le parcours qui ne se focalise pas principalement sur les aventures des conditions matérielles du déplacement ou sur les tourments de la mécanique du véhicule, contrairement aux récits écrits par des hommes, dont celui de Nicolas Bouvier qui, me semble-t-il reprend le même itinéraire qu'Ella Maillart quelques années plus tard. Délesté de ces préoccupations, le récit se concentre donc davantage sur les lieux, sur les rencontres et sur les évocations historiques, culturelles et artistiques qu'ils permettent. Et défilent ainsi des sites – entre l'Italie, les Balkans, la Turquie, l'Iran et l'Afghanistan – que je connais ou dont je rêve de m'y rendre.

En filigrane, et surtout par le non-dit dû à la pudeur et à l'époque, il apparaît la profondeur tragique des sentiments amoureux qui lient ces deux femmes. Ella Maillart ne semble pas assumer une attraction homosexuelle, qu'elle prête pourtant à sa compagne (cf. cit. 6), mais déclare explicitement à plusieurs reprises un amour pour elle qui ne ressemble à celui de personne d'autre (cf. cit. 2), qui détermine la nature de la mission de rédemption qu'elle s'assigne à son égard. Dans cette mission elle a, à l'évidence, un succès très relatif. Quant à la rédemption, elle est double : par rapport à l'addiction aux drogues, mais plus généralement, vis-à-vis de la souffrance qui caractérise une partie de la personnalité de Christina qu'Ella récuse avec violence comme étant insincère voire empruntée.

Comme si la droguée souffrait d'un dédoublement de personnalité.

Troisième matière qui en découle : la tentative de traitement de la toxicomanie par le voyage nous est décrite à travers les rares moments de dialogue entre les deux femmes, et surtout les interprétations d'Ella dont elle pourrait découvrir, à chaque rechute de l'amie, qu'elles étaient probablement erronées, ou a minima inadaptées. Ella possède un tempérament trop trempé pour remettre en question radicalement son diagnostique et sa méthode de persuasion de l'autre. Peut-être à la fin atteint-elle les limites de son amour : « Je faisais appel à toutes ces excellentes raisons pour voiler le fait que je redevenais égoïste. J'étais fatiguée de Christina, mes pensées avaient été centrées sur elle durant les six derniers mois et je ne pouvais plus soutenir cet effort. » (p. 352).

Pour développer cette partie, il faut assurément écouter aussi la parole de Christina, et j'ai la chance d'avoir découvert que, en 2002 et sous la forme d'articles, le journal de ce voyage par Annemarie Schwarzenbach a été publié sous le titre très suggestif de : Où est la terre des promesses ? - Avec Ella Maillart en Afghanistan (1939-1940).

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Croisières et Caravanes

Ella Maillart a à peine cinquante ans quand elle fait ce récit rétrospectif sur sa vie. Connue comme une voyageuse intrépide qui a parcouru de nombreuses contrées fermées aux Européens et surtout aux femmes européennes, elle éprouve le besoin de faire le point. Que cherche-t-elle par ce besoin incessant de voyager, va-t-elle continuer toute son existence, après quoi court-elle ?



Enfant, elle habite en Suisse et elle découvre très tôt les plaisirs du ski, puis de la voile car ses parents passent l'été au bord du lac Léman. Ainsi, avec sa meilleure amie, elles sont à peine 16 ans qu'elles régatent déjà et qu'elles commencent les compétitions de voile. Rapidement Ella fera partie de l'équipe suisse aux régates olympiques de 1924 dans la catégorie Voile en solitaire. mais c'est le ski qui restera la grande passion sportive de sa vie. Membre de l'équipe suisse de ski, elle défend, pendant quatre ans, les couleurs de la Suisse aux championnats du monde de ski : de 1931 à 1934.



Puis c'est la découverte des grands espaces : Moscou, le Turkménistan, puis le grand voyage en Asie d'"Oasis interdites"



Ella continue de voyager pour le compte du Petit Parisien jusqu'en 1939 : La Turquie et l'Inde, à travers l'Iran et l'Afghanistan et donne des conférences dans plusieurs pays d'Europe.



C'est en Inde ensuite qu'elle se plonge pour une véritable recherche spirituelle et plus tard, bien que continuant à voyager et faire des conférences, ce sera bien l'hindouisme qui mènera sa vie.



Quelle femme étonnante et quel parcours hors du commun raconté avec modestie mais gourmandise par celle qui sera un modèle pour Nicolas Bouvier ! A lire pour élargir notre champ de vision et pour partager son bonheur de la découverte de l'autre !

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La voie cruelle

J'ai souvent entendu parler des récits de voyages d'Ella Maillart en termes assez (et uniquement) dithyrambiques: cette femme exploratrice, courageuse, voyageant seule à une époque où ça ne se faisait pas, pionnière de l'émancipation féminine, etc.



Curieuse depuis longtemps de découvrir son écriture, je me suis enfin lancée dans un des ses livres, La voie cruelle, où elle relate un voyage en Ford de la Suisse à l'Afghanistan, en passant par la Turquie et l'Iran, en compagnie d'Annemarie Schwarzenbach, autre figure de l'orientalisme du début du XXème siècle.



Alors qu'Ella dégage l'impression d'être une femme très saine, solaire, simple, toujours prête à aller de l'avant, Annemarie (renommée ici Christina) est son versant obscur : icône androgyne à l'orientation sexuelle peu claire, elle est torturée par ses pensées, rongée par l'addiction à la morphine et la dépression. Un bien étrange duo, qui s'aventure dans des contrées lointaines et évidemment, le voyage physique vers l'inconnu s'accompagne d'un voyage intérieur qui ne va pas bien se terminer pour Annemarie.



Je ressors assez déçue de cette lecture, et je vais essayer de formuler une critique pas trop injuste.



Bien sûr, pour l'époque (et je dirais même encore plus aujourd'hui, alors que ces pays se sont tragiquement radicalisés), ce voyage réalisé par deux femmes est exceptionnel, et nous permet de découvrir des régions mal connues depuis l'Occident: un must pour les fans de voyage, d'Orient et de dépaysement.

Mais à lire Ella Maillart, le voyage est loin d'être aussi risqué et "émancipateur" qu'annoncé.



Partout où elles arrivent, les deux Suisses se font accueillir par les expatriés ou les autorités locales, et traiter avec pleins d'égards, inviter à manger et à dormir. J'ai un peu tiqué quand Ella avoue débarquer dans une ville turque où "à la meilleure auberge de la ville on délogea un docile commis voyageur pour nous donner sa chambre."



"Lorsque nous avions besoin d'eau pour nos radiateurs surchauffés, l'appel du gouverneur faisait surgir des hommes portant des outres pourvues de bretelles".



Et les exemples dans ce genre se multiplient.



Loin d'avoir à affronter à un moment ou l'autre un réel danger ou à faire appel à des ressources personnelles insoupçonnées, les deux femmes sont tout le long littéralement escortées par des hommes, certes (parfois trop) curieux de les voir là, mais empressés de les nourrir, aider et de réparer leur voiture. Pas vraiment ce à quoi je m'attendais en termes d'aventure ou de découverte authentique des cultures locales....



Il m'a semblé qu'Ella Maillart pose un regard sur le monde qui reste très suisse/occidental et, il faut le dire, bourgeois. L'argent et les ressources en tout genre ne semblent jamais être un problème pour elle, avec sa longue liste de contacts parmi les élites culturelles et économiques de tout le continent. Son regard sur l'Orient est celui d'une touriste aisée, cultivée certes, mais un regard qui reste distant, supérieur, à la "National Geographic".



Alors que Nicolas Bouvier, par exemple, se retrouve malade et désorienté à la fin de son voyage où il passe des mois seul à Ceylan, remettant tout en question dans un semi-délire qui donnera naissance à son plus beau texte, Ella Maillart garde en tout temps son sang-froid, son bon sens, et suit son plan de départ à la lettre. En quelque sorte, pour reprendre les mots de Bouvier, le voyage ne la défait pas. Alors, à quoi bon partir, si c'est pour aller voir ailleurs ce qu'on sait déjà, pour ne faire que confirmer nos idées préconçues?



Le personnage tourmenté de Christina introduit un peu d'imprévu dans le récit mais à nouveau, Ella Maillart, trop raisonnable, ne parvient jamais à la comprendre, ni son questionnement sur sa sexualité, ni son mal-être, qui semblent l'agacer plus qu'autre chose.



Alors que Christina, en plein sevrage, souffre le martyre et gît au lit avec des doses d'aspirine, Ella achète les manteaux brodés qui lui plaisent (directement à leur propriétaire!) et se "goinfr[e] de coq au vin suivi d'un soufflé un chocolat"... Malaise...



J'espère ne pas être trop dure avec cette critique. Bien sûr, il faut replacer ce texte dans son époque et ce voyage est en lui-même un témoignage passionnant de l'histoire, de la culture de ces régions et des rapports complexes entre Orient et Occident. Rien que pour ça, il vaut tout à fait la peine d'être lu. Mais si vous venez à ce texte avec l'intention d'être "secoué" par un voyage et une écriture, vous risquez comme moi d'être un peu déçu.
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Ma philosophie du voyage

Ella Maillart (1903-1997) est une voyageuse, écrivaine et photographe suisse. Membre de l'équipe suisse de ski, elle défend, de 1931 à 19343, les couleurs de la Suisse aux quatre premiers championnats du monde de ski alpin. Des talents multiples pour cette aventurière toujours en mouvement au nombreux voyages intrépides à travers l’Asie. En 1930 et en 1932, elle découvre le Caucase et l'Asie centrale, en 1935, en Chine, elle accomplit un raid extraordinaire dans les contrées désertiques au nord du Tibet et au Sinkiang et de 1940 à 1945, elle passe cinq ans dans le sud de l'Inde auprès des maîtres de sagesse. Toutes ses aventures sont consignées dans de nombreux et magnifiques livres que je vous conseille fortement de lire. Les manuscrits et documents d'Ella Maillart sont conservés à la bibliothèque de Genève, son œuvre photographique au musée de l'Elysée à Lausanne (20 000 négatifs et 10 000 positifs) et ses films à la Cinémathèque suisse de Lausanne.

Ma philosophie du voyage, ouvrage qui vient de paraître, est un recueil de 17 textes inédits ou introuvables, écrits entre 1937 et 1969. Ils se partagent entre deux groupes, ceux sous forme de récits de voyages en format court et ceux dans lesquels Ella Maillart nous donne sa définition du voyage, ses motivation, sa philosophie du périple.

Du premier groupe, évocation de ses aventures au Turkestan, au Népal ou au Tibet etc. Ce qu’il faut bien garder en tête c’est que ces voyages se déroulent à une époque où les moyens de transport n’étaient pas ceux d’aujourd’hui, les conditions du voyage non plus et qu’Ella Maillart est une femme (sic !) donc une réelle aventurière avec un « A » majuscule. La force des écrits de l’écrivaine tient dans son art pour nous décrire avec facilité ce qu’elle voit ou pense, le texte s’attardant tout autant sur l’histoire des pays traversés, les mœurs et coutumes, l’ethnologie, l’économie locale et la géopolitique d’une époque dont on a appris les soubresauts dans nos livres scolaires. Récits qui nous permettent de comparer l’hier et l’aujourd’hui comme avec son séjour en Afghanistan.

Le deuxième groupe de textes, peut-être le plus intéressant pour ceux qui ont déjà lu Maillart, nous livre ses réflexions sur l’explication qu’elle nous donne sur sa vocation de voyageuse, sa définition du voyageur (« Le vrai voyageur est celui que pousse à partir un besoin physique, esthétique, intellectuel tout autant que spirituel ») et ce qui pour elle est le vrai voyage : « chaque matin on charge ses chameaux, on selle son cheval ; et lentement, sans arrêt, pendant huit ou dix heures, on avance… »

Une femme animée d’une volonté farouche, « Dès le début, j’ai voulu vivre ma vie propre et, patiemment, contre vents et marées, j’ai affermi ce désir », ne reculant devant rien, jamais.

Une lecture recommandée et qui vous incitera à plonger dans son œuvre, si ce n’est déjà fait.

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Oasis interdites : De Pékin au Cachemire, une..

J'ai découvert il y a longtemps Ella Maillard avec ce livre magnifique. Voyager est le contraire du tourisme et il faut la personnalité sportive et intrépide d'Ella Maillard pour passer outre les interdictions, les dangers et l'absence totale de confort qui a de tous temps été la marque d'un voyage aventureux. Son tempérament fougueux et très directif s'associe pour ce voyage à celui nettement plus flegmatique mais tout aussi "prêt à tout" de Peter Fleming. Celui-ci, dans Au coeur de la Tartarie, donnera un texte très différent mais très complémentaire à celui d'Ella Maillard et ça n'est pas le moindre des attraits de ces 2 livres de voir comment 2 personnages aussi différents de caractères ont pu traverser ce périple jusqu'au bout sans s'étriper mutuellement.

Avec les oeuvres de Nicolas Bouvier, ce livre et celui de Fleming sont ce que j'ai lu de plus réalistes et de plus forts sur les voyages aventureux
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Des monts célestes aux sables rouges

Je venais tout juste de refermer le volume de La Voie Cruelle et déjà j'étais impatiente d'ouvrir Des Monts Célestes..Cheminer avec Ella Maillart est un grand plaisir.



Des monts Célestes... raconte une expédition en 1932: Ella Maillart se joint à deux couples d'alpinistes soviétiques dans les montagnes du Tien Chan aux confins de la Chine. Ella Maillart âgée d'une trentaine d'années est une sportive confirmée, marin, skieuse de compétition, hockeyeuse, et , Suissesse, aguerrie à la montagne. Elle bluffe pourtant quand on lui demande si elle est une bonne cavalière (et s'en tirera avec tous les honneurs). C'est aussi un écrivain reconnu.Elle part avec un Leica et son livre qui lui sert de lettres d'introduction



Pourtant la bureaucratie soviétique lui laisse peu d'espoir pour ce voyage, les deux premiers chapitres relatent toutes ses démarches auprès de la Société du tourisme prolétarien. On suit ensuite le trajet en train - 4000 km et cinq fois 24h.



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C'est à Bichkek, capitale du Kirghizistan , appelée dans les années 30 Frounzé, que commence la véritable équipée. En camion tout d'abord, il leur faudra acheter les chevaux. Paradoxe, c'est la Route du Fer qu'Ella suit :



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Après Karakol et son lac, ils trouvent enfin les chevaux qui vont les conduire jusqu'aux yourtes kirghizes et aux plus hauts sommets.



ella chevaux



Quel plaisir de vivre les aventures des cinq alpinistes et de leurs guides! les nuits sous la yourtes, les repas partagés avec le gibier que chassent les guides,le Koumois, lait fermenté de jument, les costumes pittoresques! Ella Maillard décrit avec précision le montage d'une yourte, la traite d'une jument, le bol qui passe de convives en convive, nettoyé avec l'index.



Merveilleuses descriptions de la montagne, de la lumière qui change, de la neige, d'un lac à la couleur étrange.



Aventures sportives que cette randonnée solitaire à ski, cette escalade qui la mène sur une vire glissante comme du marbre gelé, ces cavalcades où les chevaux sautent de rochers en rochers, parfois se blessent....Cols à plus de 4000 m sommets à près de 7000!



Ella Maillart est aussi attentive à l'histoire : celle du soulèvement nationsl



Kirghizes, aux transformations soviétiques, et à la collectivisation des troupeaux, mal vécue par les nomades. Très attentive aussi à la condition féminine : elle constate avec un certain regret la sédentarisation des nomades mais salue l'émancipation par l'éducation de certaines femmes; J'ai refermé le livre à la fin de la première partie pour découvrir Tachkent, Samarcand, Boukhara et Khiva avec des yeux neufs.



Déjà, dans l'avion du retour, j'étais impatiente de continuer le récit d'Ella Maillart. Quelle expérience ! En 1932, à bord du train de marchandises, sur un rafiot descendant l'Amou Daria, vole dans un petit Junker, à dos de chameau, dans un pays où les transports sont réservés aux privilégiés du régime, où le pain manque, où tout déplacement est réglementé....



Malgré les difficultés, journaliste plutôt que sportive (dans la première partie De Moscou à Alma-Ata, c'était plutôt la sportive qui s'exprimait.



Journaliste donc, elle rencontre le président Faïsoulla Khordjaev, elle assiste à Samarcande au procès des bassmatchis, brigands ou contre-révolutionnaires, prélude des procès staliniens qui ont décimé l'intelligentsia ouzbèque (Khordjaev lui-même). Féministe attentive à la vie des femmes, femmes voilées cachées derrière le parandja, l'écran de crin noir, Maroussia la russe camionneuse, les ouvrières, juives ou arméniennes, elle voit même le peintre Benkov peindre le tableau la Journée du 8 mars au Reghistan quand les femmes brûlent leur parandja.



A Samarcande, elle loge dans les cellules de la Madrasa Tilla Kari, madrassa dorée.



"vivre dans la cour d'une médressé de Samarcande! Voilà...le rêve réalisé"



Conteuse merveilleuse elle évoque, Timour et Bibi Khanoum raconte l'histoire de l'architecte qui lui a volé un baiser, histoire de Nassim m'a raconté dans la cour de la Mosquée de Bibi Khanoum. Elle raconte les émirs, les esclaves du Khorezm où l'esclavage ne fut aboli qu'en 1873...



Si elle décrit les monuments de Samarcande, à "Bokhara, la déclassée", elle consacre plus de ligne à la description des passants, en haillons ou morveux qu'à la madrasa d'Ouloug Beg. Elle n'a pas le regard touriste , happée dans le quotidien de ceux qui cherchent du pain, du riz pour le plov...





Comme j'aurais aimé rencontrer cette dame!




Lien : http://miriampanigel.blog.le..
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Ti-Puss

Ella Maillart est très chère à mon coeur. Pour ces livres de récits et pour ses photos.

Longtemps avant qu'ils soient tous édités en français j'avais commencé à lire ce que j'avais trouvé, et écrit aux éditions Payot qui heureusement m'avaient affirmé qu'ils allaient tous les ré-éditer.

Et j'ai relu Ti-Puss plusieurs fois : pour Ella, pour l'Inde, pour sa chatte.

C'est après l'avoir lu que j'ai écrit à Ella. Sa carte en réponse représente sa chatte sur le balcon de la terrasse de Chandolin.

C'est un talisman pour moi.

J'y puise une force vive. Ella est un guide.

Ti-Puss est la concrétisation de cette idée que les chats nous comprennent, saisissent nos intentions, et ne sont pas toujours attachés simplement à un lieu, bien plus souvent à leur maître.

C'est en tout cas ce que je vis avec ma chatte, qui m'accompagne partout comme celle d'Ella.
Lien : http://lyjazz.cheminsinstant..
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Parmi la jeunesse russe : De Moscou au Cauc..

Nous sommes en 1929, douze ans après la révolution russe. Ella Maillart, grande sportive quitte Genève et s'en va découvrir cette Russie qui l'intrigue tant, tant on en parlait à cette époque.

Le Moscou qu'elle découvre n'est pas celui qu'elle pensait. Elle note tout ce qu'elle voit, surtout dans le domaine sportif, avant de se joindre à un groupe de jeunes qui s'en va découvrir les régions reculées du Caucase...

Dépaysement assuré...
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La voie cruelle

2 femmes dans une Ford, en 1939-1940, partant de Genève pour arriver à Kaboul, traversant des pays réputés hostiles aux femmes. Alors en effet, elles n'en croisent que peu (y compris en Italie), elles n'ont elles-même que peu d'ennuis en raison de leur sexe. LE fait qu'elles soient parfois accompagnées (contre leur gré) par des gendarmes tient plus au fait que la situation mondiale est instable (la seconde guerre mondiale se déclenche pendant leur pérégrination).

C'est d'ailleurs à cause de cette même instabilité européenne que Maillard décide de partir. Elle cherche où et quand l'Europe s'est fourvoyée, au point de se perdre dans deux guerres successives. L'Asie est pour elle le meilleur endroit pour cela, source de plusieurs sagesses millénaires ou conservant des modes de vie non corrompus par la mécanisation européenne : moins de perte de sens de sa vie, grande place de la religion, pas (encore) d'État central fort... L'autre raison de ce voyage dans les étendues désertiques, c'est d'arracher sa binôme et amie, Annemarie Schwartzenbach, à son addiction à la drogue. Au moins là, elle ne pouvait pas en trouver.

C'est un parcours à la fois géographique et historique qui s'offre à nous, tout autant qu'un voyage intérieur, des questions que se posent les 2 voyageuses, ou uniquement Maillard. C'est un genre de journal intime voyagé, où elle nous offre questions, émerveillement et amour pour ces paysages sévères et parfois hostiles.

Et pour nous, lecteurs à 70 ans de distance, d'une ironie assez mordante : tous les évènements qui se déroulent actuellement dans cette région de monde étaient presque tous en germe. Fanatisme religieux en Afghanistan, union des tribus de l'Arabie Saoudite par un chef de tribu nommé Seoud avec les conséquences prévisibles (mais aucune mention des chefs religieux), modernisation forcée de l'Iran qui finira en révolution par le renversement du Shah, influence de plus en plus forte de la Russie communiste. Tout est là, et c'est très étrange de le lire.

Un livre qui nous fait oublier la situation dramatique de cette région du monde, en nous rappelant son histoire riche et son architecture magnifique.



Challenge Plumes Féminines
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La voie cruelle

Juin 1939. Alors que l’Europe se prépare à entrer dans la Seconde Guerre Monde, Ella Maillart et son amie Christina (en fait, Annemarie Schwarzenbach) prennent la décision de partir vers l’Afghanistan au volant d’une Ford. Le roman retrace les étapes des deux jeunes femmes de ce incroyable voyage.

On découvre leur traversée de plusieurs pays : la Turquie, l’Iran, l’Afghanistan ainsi que leur culture, leur histoire. C’est un voyage dans l’espace et dans le temps. Parfois un peu trop dans le temps, on aimerait profiter plus des personnes rencontrées que celles ayant marquées l’histoire de leur pays.

J’ai trouvé dommage qu’elle ne parle pas plus de Christina et de la voie cruelle, la voie choisie par Christina, la voie de la souffrance ; sauf pour conclure.

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Ti-Puss

Quelle vie! Je vous invite à découvrir la biographie de l'auteur, grande voyageuse dont je rêve de lire Des monts célestes aux sables rouges ou Oasis interdites (oui, Papillon!). Pour l'instant, voici Ti-Puss, qui relate son séjour en Inde au début des années quarante.







Qui est Ti-Puss? Un adorable chaton (euh, c'est un pléonasme, non?) devenu une chatte au caractère bien trempé (aussi caractérielle que la mienne) qui partagera quelques années de sa vie. Amoureux des chats, ce livre est pour vous! Portrait d'un chat qui la suit dans ses voyages et ses promenades, attachement profond pour une petite bête gardant cependant son indépendance (à ses dépends, souvent). Magnifique.







Mais Ella Maillart n'est pas en Inde uniquement pour une histoire d'amour avec un félin, si attachant soit-il, elle suit les enseignements de différents sages hindous et finalement sa chatte lui sert d'objet de réflexion sur elle-même.



"De toute évidence la chatte est venue satisfaire mon besoin d'aimer mais vais-je désormais souffrir d'un lien que je me suis forgé au moment même où un sage me guidait sur la voie de l'immuable liberté? Quel illogisme! Je ne donnerai pas la chatte par renoncement car mieux vaut comprendre pourquoi j'ai noué une servitude. C'est important, car c'est mettre en pratique l'enseignement quotidien. La nature d'un attachement peut être transformée si elle tend constamment vers l'amour infini -source de nos joies et de nos affectations- vers cette puissance d'Amour qui, dit-on, forme notre essence. M'étant consacrée à cela, je ne pouvais devenir sujette d'un animal qui peut et doit être la pierre de touche de mon progrès vers la vérité."



"Suis-je incapable d'appliquer l'enseignment du Sage et fais-je autre chose qu'obéir à la loi qui veut que l'on souffre le plus là où l'on aime le plus?"







Une chatte, une quête spirituelle, et aussi : l'Inde! Ella Maillart réside de régions montagneuses plus fraîches à des plaines desséchées, du nord au sud et de l'est à l'ouest, se déplaçant en bus ou en train. Elle porte le pantalon, estimant cela plus correct que des robes courtes, vit comme les indiens (au grand dam de certains brahmanes et de quelques européens) mais fréquente tout de même des amis blancs.



Elle décrit avec vivacité ses voyages en train, y cotoyant des femmes qu'elle croque avec humour. "Ceux qui préfèrent voyager en première classe ne savent pas ce qu'ils perdent."







Au final, ce n'est pas un livre mineur de cette grande voyageuse, et j'ai aimé cette première lecture où elle se dévoile avec honnêteté. Et puis quelqu'un qui décrit si bien les chats ne peut être que fréquentable. Je la relirai, séduite aussi par sa façon de croquer paysages et habitants.







"J'éprouve profondément qu'un pacte nous lie à l'animal que nous adoptons. Ne pense-t'il pas, très vraisemblablement, que nous sommes tout-puissants et responsables du bien et du mal qui lui arrivent? Et si nous faisons notre devoir envers lui, il nous communiquera sa beauté, ses peines et ses joies. Dans le cas contraire, la possibilité d'échanges sera perdue, nous n'aurons pas accès à son univers fait pour enrichir le nôtre. mais pour éviter que ce pacte ne se transforme en désir de possession -désir qui m'enchaînerait- je décide de considérer la chatte comme un don toujours renouvelé, don à accueillir avec reconnaissance."







Lecture aisée malgré les changements de temps passé/présent, et fort heureusement pas trop de passages "sagesse hindoue" que je devais relire à chaque fois pour comprendre.
Lien : http://en-lisant-en-voyagean..
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