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Citations de Elsa Morante (224)


Où allons-nous ? Où nous emmène-t-on ? Au pays de Pitchipoï.

On part quand il fait encore noir et on arrive quand il fait déjà noir.

C’est le pays des fumées et des hurlements.

Mais pourquoi nos mères nous ont-elles abandonnées ? Qui nous donnera de l’eau pour la mort ?
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Elle se leva, indécise, et ce ne fut que lorsqu’elle fut arrivée à la moitié du Ponte Garibaldi, qu’elle fut consciente qu’elle se dirigeait vers le Ghetto. Elle reconnaissait l’appel qui l’attirait là-bas et qui, cette fois, lui parvenait comme une nénie basse et somnolente, mais telle qu’elle engloutissait tous les sons extérieurs. Ses rythmes irrésistibles ressemblaient à ceux avec lesquels les mères bercent leurs enfants ou avec lesquels les tribus s’appellent au rassemblement dans la nuit. Personne ne les leur a enseignés, ils sont déjà écrits dans la souche de tous les vivants sujets à mourir.
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LETTRES D'AMOUR

Un autre poussa le raffinement jusqu'à m'envoyer une lettre écrite sur le sachet d'une pâtisserie où étaient imprimées : "Bonbons et friandises". Il compléta de sa main en griffonnant : " Plus que les "bonbons et friandises" c'est ta bouche magique qui m'attire."
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Moi, après mes dix ans, je me distinguai de ces fillettes par ma ferme aspiration à une somptuosité royale.
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Mais un jour de ce printemps 45, sa mère qui l'avait laissé attendre un moment à l'extérieur d'une boutique le retrouva en train d'observer certains magazines illustrés sur le côté d'un kiosque à journaux, à une certaine hauteur au-dessus de lui. Une double page de celui qui était le plus bas était presque entièrement occupée par deux photographies d'actualité. Sur la première on voyait une avenue bordée d'arbres, qui longeait le parapet d'un pont à moitié détruit. De chaque arbre de cette avenue pendait un corps...
Sur la deuxième photographie de la même page, on voyait un homme âgé, au crâne gras et chauve, pendu par les pieds et les bras grand ouverts, au-dessus d'une foule dense et imprécise...
Useppe, la tête levée, examinait ces scènes avec une stupeur hésitante et encore vague. On eût dit qu'il interrogeait une énigme, de nature ambiguë et monstrueuse, et pourtant obscurément familière. "Useppe!" l'appela Ida; et lui, après lui avoir docilement tendu la menotte, la suivit, perplexe, mais néanmoins sans lui poser de question. Quelques instants plus tard, sa curiosité attirée par une quelconque nouveauté, il avait déjà oublié le kiosque à journaux.
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La nature, en général, fournit aux animaux terrestres, aquatiques et aériens, les instruments sensibles pour qu’ils s’orientent selon les moyens qui leur sont propres. Il est donc naturel, pour un hirondeau qui a grandi, de suivre l’envolée collective vers l’Afrique, ou pour une jeune anguille de remonter, avec les autres, depuis la Mer des Sargasses le cours des rivières. L’instinct primaire de chaque créature est d’égaler – ou de dépasser – ses semblables, ceux qui appartiennent à la même espèce, en s’orientant dans le milieu commun avec les instruments qui lui sont propres.
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Les îles de notre archipel, là-bas, sur la mer napolitaine, sont toutes belles.
Leur sol est en grande partie d'origine volcanique, et, plus particulièrement dans le voisinage des anciens cratères, il y pousse des milliers de fleurs spontanées dont je n'ai jamais retrouvé les pareilles sur le continent. Au printemps, les collines se couvrent de genêts: lorsqu'on est en mer au mois de juin, on distingue leur odeur sauvage et caressante aussitôt que l'on approche de l'un de nos ports.
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"Le monde est dégueulasse. Il est trop dégueulasse et il pue. Mais cette puanteur même est source d'exultation. Car il y a des femmes qui puent pas vrai ? Et parce qu'elles puent elle nous font bander. Moi.. C'est toute la puanteur du monde qui me fait bander.. "
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L’idée… L’idée n’est pas un passé ou un avenir… elle est présente dans l’action… Et la violence la tronque à la racine… La violence est pire que tout.
(p. 323)
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L'étrangeté de ces yeux rappelait plutot la mystérieuse idiotie des animaux, lesquels, non point avec leur esprit mais grâce à un certain sens de leurs corps vulnérables, "savent" le passé et le futur de tout destin.
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L'idée de se faire avorter d'une manière quelconque ne lui vint même pas à l'esprit.La seule défense qu'elle put imaginer,ce fut de cacher son état à tout le monde aussi longtemps qu'elle le pourrait.
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Il eut été facile maintenant ,à l'exemple de Judith dans la Bible ,de tuer ce garçon;mais Ida,de par sa nature ,ne pouvait concevoir une telle idée, même sous la forme de rêverie.
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Les rêves reposent souvent dans les fragments de la veille ou du passé.
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Le vin n’avait jamais été pour lui un vice, mais un plaisir. En plus de sa saveur et du prétexte que cela constituait pour lui de se trouver en compagnie, le vin lui avait procuré de véritables satisfactions d’amour-propre, le rendant vif, bavard et, même, éloquent ; et en lui donnant en outre la fierté de la résistance, car il pouvait en boire beaucoup sans être ivre.
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La beauté est la pudeur de Dieu...
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L’unique chose inquiétante, à cette époque, c’étaient ses rêves, qui avaient
recommencé à la fréquenter assez souvent avec leur ancienne violence. Elle
est en train de courir çà et là, toute nue, sur une vaste place qui semble
déserte mais qui pourtant de toutes parts retentit d’insultes et de rires... Elle
est incarcérée dans une sorte de chenil, et de derrière sa petite fenêtre
grillagée elle voit passer des jeunes femmes, grandes et vêtues d’habits
multicolores comme certaines nourrices de grand luxe, et qui portent dans
leurs bras des bébés très beaux qui rient.
Ces jeunes femmes la connaissent, mais elles se détournent pour ne pas la
regarder ; et les bébés aussi, ce n’était pas pour elle qu’ils riaient. Elle
s’était trompée quand elle l’avait cru...
Elle se promène avec son père, lequel l’abrite sous sa houppelande, quand
voici que cette houppelande s’envole comme d’elle-même et que son père a
disparu. Et elle se retrouve toute petite, seule dans des sentiers de
montagne, des ruisselets de sang coulant de son vagin. Pour aggraver
encore plus le scandale qui menace, on entend en bas le sifflement bien
connu de Ninnarieddu ; et alors, elle, comme une idiote, au lieu de s’enfuir,
s’est arrêtée dans le sentier pour jouer avec une chevrette... Mais comment
ne s’aperçoit-elle pas que la chevrette hurle, qu’elle est dans les douleurs,
qu’elle est sur le point de mettre bas ! Et pendant ce temps, là, déjà prêt, il y
a un fourrier des abattoirs électriques...
... Des tas de gosses polonais, en haillons, jouent à faire rouler des petits
anneaux d’or. Des petits anneaux consacrés, et eux, ils ne le savent pas. Ce
jeu est interdit en Pologne. Il est puni de la peine de mort ! ! !...
Ces rêves, même les plus anodins, laissaient en elle une lourde angoisse ;
mais ensuite, au cours de la matinée, elle les oubliait.
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Elle fut réveillée à six heures par la sonnerie du réveil. Et ce matin-là et les
matins suivants, elle fit sa classe avec la sensation opiniâtre d’avoir autour
du corps un halo visible, comme un autre corps qui aurait été sien (tantôt de glace, tantôt brûlant) et qu’elle devait continuellement déplacer. Elle avait le sentiment de ne plus être la même Ida qu’avant, mais une aventurière à la double vie. Et il lui semblait que ses membres projetaient sur ses élèves et sur tout le monde le déshonneur de son viol, et que sur son visage, comme sur une cire molle, étaient imprimées les traces des baisers de cet homme. Dans sa vie, à l’exception d’Alfio, elle n’avait jamais approché aucun homme, fût-ce même en pensée ; et à présent son aventure lui semblait écrite partout, tel un adultère sensationnel.
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Toute créature, sur la terre, s'offre. Pathétique, ingénue, elle s'offre : « Je suis né ! ici, me voilà, avec ce visage, ce corps et cette odeur. Je vous plais ? Vous voulez bien de moi ? »
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Aracoeli ! s'exclamaient les dames, quel beau nom ! Quel nom étrange !" J'ai appris par la suite qu'en Espagne il est d'un usage commun de baptiser les filles de semblables noms, même latins, trouvés dans l'histoire de l'Église ou dans la liturgie. Toutefois, avec l'âge adulte, peu à peu ce nom d'Aracoeli s'est inscrit dans mon souvenir comme le signe d'une différence, tel un titre unique : où ma mère demeure séparée et enclose ainsi qu'à l'intérieur d'un cadre tors et massif, couché d'or.
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Et, de fait, Ida était restée, au fond, une fillette, car sa principale relation avec le monde avait toujours été et restait (consciemment ou pas) une soumission apeurée.
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