Citations de Françoise Giroud (452)
S'il fallait parier, je dirais qu'elle avait peur d'avoir un enfant, la seule chaîne incassable.... On ne se délivre pas d'un enfant comme d'un amant, et c'est tous les jours qu'il vous le rappelle - quelle horreur ! Je crois que Lou s'est défilée, composante féminine en berne, ce jour-là !
Quoi de plus rare qu'une femme heureuse qui le proclame, qui le porte sur sa figure, qui dit aux autres femmes : "Goûtez bien la chance que vous avez de n'être pas des hmmes ! Être une femme, c'est épatant et tellement mieux !"
Voilà donc Lou Andreas-Salomé telle qu'elle m'est apparue. Un cas parfait d'heureuse cohabitation entre une composante féminine et une composante masculine.
... tout en rejetant fermement toute parenté entre religion et sexualité, elle reconnait que la représentationd e Dieu est également une projection érotique. La volupté n'est certes pas de nature à souiller ce qui rest religieux ; disons plutôt que Lou lie très intimement la proère et le sexe, lesquels demeurent éternellement dpendants l'un de l'autre.
L'appétit réputé insatiable, la capacité illimitée de jouissance des femmes, le risque d'insuffisance des hommes, c'est la plus vieille obsession du monde.
La civilisation du sex-shop, collection dossiers du Nouvel Observateur, 1991
Les hommes politiques... les pauvres... La plupart d'entre eux ont des rapports misérables avec les femmes parce qu'elles leur servent essentiellement de cautères sur les plaies de leurs échecs.
Le vrai danger qui nous guettait, c'était l'homme marié. Celui qui n'est jamais libre le dimanche, rarement le soir, et qui fait l'amour en regardant sa montre mais-tu-sais-bien-que-c'est-toi-que-j'aime. Fuyez l'homme marié, fillettes, fuyez. Il vous volera votre jeunesse.
[...] Il m'est apparu que les hommes étaient peu fiables. Ils disparaissent quand on a besoin d'eux.
N'ayez pas la vulgarité de croire qu'une femme libérée d'elle-même se met aussitôt à courir comme une chienne comme les hommes courent les femmes.
C’était un temps où nombre de journalistes compromis dans la collaboration avaient été évincés des rédactions, de sorte que les places ne manquaient pas. Mais c’était aussi un temps où il y avait très peu de femmes dans la presse. Aucune dans un poste de responsabilité, chef de service, aucune à la rédaction du Monde, à celle du Figaro, quelques-unes seulement au groupe France-Soir où le patron, Pierre Lazareff, ne sous-estimait pas leurs capacités, mais dans de petits emplois.
C’est dire que Marine ne fut pas assise sur un piédestal. Mais, soutenue par H.M., on lui donna assez de petites choses à faire, enquêtes, encadrés, traductions, pour qu’elle s’aiguise les griffes et montre qu’elle voulait travailler.
L'avenir, c'est une notion inconnue de ceux qui se battent tous les jours avec le présent pour garder la tête hors de l'eau.
Parfois, une griffure au coin de mes yeux m'alarmait...Alors je quêtais le regard des hommes. Il y en avait toujours un sur mon chemin pour me rassurer.
L'Avoir-plus, ce stimulant rustique et fort, ne me mobilise guère. Il n'est pas pour me faire courir ni même marcher.
"Bonheur : faire ce que l'on veut et vouloir ce que l'on fait."
À l’origine, Denis était de la chair à malheur et aurait dû le rester. L’enfant était « né sous X », c’est-à-dire d’identité non déclarée, abandonné à sa naissance par sa mère.
Or, le bébé malingre promis à une triste destinée était devenu ce beau jeune homme doré, ardent, audacieux, rieur, sain de corps et d’esprit, adulé par des parents attendris – un magistrat, une avocate, des chrétiens de gauche bon cru. Lui avait un visage maigre et sensible, intelligent, tourmenté ; elle, un lourd chignon blond qui croulait sans cesse, et alors, avec ses joues à peine poudrées et ses yeux larges, très bleus, elle semblait une adolescente.
Depuis vingt ans, les Sérignac s’étaient souvent interrogés, surtout au début : fallait-il prévenir Denis qu’il était un enfant adopté ? Et puis, devant la résistance d’Agnès, le couple avait refoulé toute velléité de lui révéler le secret de sa naissance. Un secret bien gardé, d’ailleurs. Mis à part la sœur d’Agnès et son médecin, nul n’était au courant ni ne s’était d’ailleurs étonné qu’il y eut un jour un bébé au foyer des Sérignac. La vérité avait été si profondément enfouie qu’on l’aurait crue dissoute. Mais la vérité que l’on cache ne se dissout jamais.p.18
L'indifférence est une infirmité de l'esprit et du coeur."
Mardi 17 octobre 1995
Nouvel attentat dans le métro parisien. Pas de morts, mais des blessés grièvement atteints.
Il fallait s'y attendre. Il est clair qu'aucune mesure de prévention ne peut éliminer tous les risques, tant il paraît simple de déposer une bombe rudimentaire dans un lieu public. M'est revenue en mémoire la phrase de Chateaubriand : "Je ne connais rien de plus servile, de plus méprisable, de plus lâche, de plus borné qu'un terroriste."
On a peine à comprendre, dès lors que les assassins se sont clairement désignés que Jacques Chirac ait choisi de rencontrer, le 22 octobre, le président algérien Zeroual et qu'il mette ainsi de l'huile sur le feu. Est-ce bien opportun?
Reste qu'il nous faut désormais vivre avec le terrorisme et vivre calmement.
Lundi 9 octobre 1995
Les attentats ont été revendiqués par un document signé du GIA dans un texte qui fait allusion à une missive secrète adressée à Jacques Chirac et le sommant de se convertir à l'islam. Si tout cela n'était tragique, ce détail serait comique.
Mais le document, signé Djamel Zitouni, est lourd de menaces.
Elle était en pleine expansion, une expansion nécessaire à sa survie. Je pouvais continuer à écrire librement ; je ne pouvais pas m'opposer à l'exploitation du goût naturel que porte les Françaises aux heurs et aux malheurs des familles royales. Encore que l'on puisse parler de cela aussi autrement. Mais quand on en parle autrement, on retient dix lecteurs, on en écarte mille.
On peut aussi penser qu'il faut savoir en attirer dix et en retenir mille avec de la confiture, et glisser ici et là la dose de vinaigre qu'ils absorberont avec. Ce n'est pas l'un des moindres problèmes qui se posent à ceux qui dirigent des journaux.
À quoi cela sert-il de bien penser et de bien écrire pour cinq mille personnes, convaincues d'avance au demeurant ? Oui mais à quoi cela sert-il de ne rien penser et de ne rien écrire pour deux millions de personnes ?
Je n'ai pas de solution à proposer. Ou plutôt j'en avais une, intermédiaire : L'Express. À l'époque, je n'aurai pas su dire ce que je voulais exactement, mais je le voulais plus que tout. C'est pourquoi je l'obtiens, retrouvant à la fois lance et dragon.