Citations de Frédéric Dard (2224)
La mère rit de mon treuil, comme disait le patron d’une péniche.
Dans le domaine du discours, l’improvisation ne prend force et valeur que dans la mesure de sa minutieuse préparation.
Le seul intérêt réel de l'existence réside dans ses bouleversements.
L'ignorance est une page blanche sur laquelle il faut écrire la vérité.
S'il y a de l'honneur à savoir, il n'y a pas de déshonneur à ne pas savoir.
« Croyez-moi, les meilleurs anges, ce sont les anciens démons. Mordez Vidocq, par exemple. Ancien bagnard, truand patenté... Pedigree à plusieurs feuillets, mais le jour où il s’est mis à en croquer il est devenu chef de la poule ! Voilà comment on fait les bonnes grandes maisons. Le mal par le mal, c’est la thérapeutique reine.
- Le monde évolue, Majesté. Ce sont les croisements qui assurent la solidité de la race humaine. Lorsque tous les habitants de la planète auront la même couleur indéfinissable, le même gouvernement et la même religion, alors seulement les conflits cesseront et l'homme sera digne de lui même.
Notre filet est posé, il ne reste plus qu'à attendre.
C'est bien joli d'attendre.
Mais c'est long.
Le temps est plus difficile à tromper que les femmes.
Quand on attend pour attendre, on finit vite par se demander ce qu'on attend et par comprendre que, dans la vie, il n'y a qu'une chose de vraiment raisonnable à tenter ; c'est d'oublier le temps. Comment diantre oublier le temps lorsqu'on attend ?
Je continue de la baratiner comme quoi elle a les plus beaux lampions du monde, les crins les plus romantiques, la menteuse la plus alerte, la peau la plus veloutée.
Ensuite je chique au gars jalmince qui veut garder pour lui tout seul ces trésors.
— Tu vois, articule Béru, la bouche pleine, cette viande est pas mauvaise, mais c’est le goût qui y est pas. Y z’ont donc pas d’ail, d’oignon et de persil dans ce bled ? Ah, vivement demain qu’on se cogne un vrai gueulement, misère !
Je le laisse avaler avant de lui dire.
Je ne voudrais pas que mon cher Béru meure d’étouffement.
— Tu vois, soupire mon Courageux. Ça fait plusieurs jours qu’on est ici, et j’ai pas seulement envoyé une carte postale à Berthe.
— En fait de carte, c’est un faire-part qu’elle recevra, prophétisé-je.
La Calle Igula est une venelle obscure dans le bas quartier de Le Corona. Quelques estaminets brillent encore. On entend lamenter des guitares, et des voix avinées psalmodient des trucs qui feraient chialer un pétomane.
Sa venue chez moi me faisait l'effet d'une fourchetée de fumier sur les coussins de cuir d'un cabriolet décapotable.
Mais faut bien admettre que la plupart des gens ont la frime de leur turbin. Par exemple, tous les croque-morts sont de joyeux lurons, un peu pâlots et sentant le décès ; tous les bistroquets sont des gars placides et ventrus ; toutes les repasseuses des souris tristes et molles, et toutes les bonniches d’hôtel de passes de pauvres greluses ravagées qui ont la couleur des bidets qu’elles passent leur garce de vie à ramoner en rêvassant aux palétuviers roses du bouquin pastel qu’elles planquent dans la fouille de leur tablioche.
Les hirondelles, on n’y fait plus attention. Comme dit cette grosse enflure de Bérurier : la différence qu’il y a entre une chaude-piste et une hirondelle, c’est qu’on ne peut pas attraper une hirondelle !
Maintenant, ça va être le gros labeur. M’est avis que je vais devoir agir prompto si je veux consolider ma réputation. Quand un acrobate veut en remontrer à ses confrères, faut qu’il réussisse le quadruple saut périlleux sur un doigt, ou alors il est juste à point pour laver la vaisselle à l’Armée du Salut !
Lorsque le grand patron me reçoit, Mignon, l’inspecteur principal de la Criminelle, est déjà là.
Mignon porte mal son blaze car il pèse près d’une tonne. Il est sanguin, jovial et élégant comme un mannequin de province. Il est de Saint-Flour et ça s’entend dans sa voix.
Je ne sais plus quel endoffé a écrit quelque part que les bords de la Saône, dans les environs de Lyon, dépassent en beauté les plus baths coins de l’Île-de-France. Il n’était pas plus crétin que ça, le mec en question, et y en avait autant dans sa pensarde que dans un tube de pâte dentifrice.
Le café de M. Stéphane, c’est plutôt une auberge perdue dans la banlieue coquette. Il y a de la verdure, des jeux de boules, des tonnelles, beaucoup de soleil et des poules qui picorent sous les tables de la salle commune.
Il est seul dans son bistro lorsque j’apparais. C’est un homme d’une cinquantaine d’années portant beau. Il a une bouille d’empereur romain. Remarquez que je n’ai jamais eu d’empereur romain dans mes relations et que je n’en ai jamais rencontré non plus chez mon buraliste habituel, mais je suppose qu’ils devaient avoir la physionomie de Stéphane, les empereurs romains.
Le temps est plus difficile à tromper que les femmes.