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Critiques de Frédéric Verger (60)
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Les rêveuses

Le thème m’a de suite fait penser à une pièce de Jean Anouilh, "Le Voyageur sans bagage", dans laquelle le personnage phare, Gaston, devenu amnésique à la fin de la première guerre mondiale, est réclamé par la famille Renaud. Ici, Peter n’est bien évidemment pas touché par des pertes de mémoire. Cependant, il se retrouve dans une famille qu’il ne connaît pas mais qui ne dit rien. Pourtant, bien qu’aveugle, la mère de celui-ci découvre qu’il ne s’agit pas de son fils dès la première rencontre. Les cousines garderont également le secret. Pourquoi ? Cet homme est un imposteur qui a pris l’identité de leur Alexandre et personne ne le dénonce aux autorités ? Je n’en dis pas plus…



J’ai apprécié ce roman qui non seulement est bien écrit mais qui nous tient en éveil de bout en bout. Oui, en éveil. Car on se prend presque de compassion pour Peter et, comme lui, on craint la délation. Frédéric Verger a su rendre l’atmosphère angoissante qui devait régner en ce temps-là et a fait en sorte que son histoire soit crédible. Vie de fugitifs, émotions exacerbées, tout y est !



Je vous recommande ce livre et je vais suivre cet auteur car son style m’a vraiment plu. J’ai vu qu’il avait écrit un autre roman, intitulé Arden, que je vais me procurer.



Je remercie Babelio ainsi que les éditions Gallimard qui m’ont permis de découvrir ce roman et son auteur.
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Les rêveuses

Peter sait qu’en tant que juif, il risque la mort dans le Reich, alors, lors du dernier combat, il vole la plaque d’un soldat français mort sur le champ de bataille. Il devient ainsi Alexandre d’Anderlange. De retour à la vie « normale », il s’habitue tant bien que mal, jusqu’au moment où on l’informe que la mère mourante de celui-ci le réclame à son chevet.



Contrairement à toute attente, la mère, exilée russe, presque aveugle, fait semblant de le reconnaître et il va devoir entrer progressivement dans le rôle.



La construction de son personnage, un mélange de Peter et d’Alexandre, est très intéressante car Peter s’inspire des écrits d’Alexandre, se les approprie, les exprime lors des conversations. (cf P 131 et suivantes). Il puise aussi dans la garde-robe familiale pour créer son propre style.



« Il aperçut son reflet dans le miroir. Le personnage, les mains dans les poches, le fixant d’un air amical, insolent, semblait le mettre au défi de faire quelque chose de lui. » P 132



Le destin de Peter-Alexandre est loin d’être simple, et on assiste à une série d’actions-réactions en chaine, un effet papillon, qui le l’emmène d’aventures délicates en aventures difficiles et beaucoup de souffrance.



Les autres personnages sont tous bien caractéristiques, et font l’objet de descriptions assez savoureuses : Sofia la deuxième épouse du père d’ Alexandre, dont l’accent russe pimente les dialogues, les cousines Joséphine la rousse et Hélène la brunette, qui cherchent à trouver un mari pour retrouver leur splendeur passée, car la famille est ruinée, avec des histoires d’héritage hautes en couleur, sans oublier le majordome Emmanuel très stylé, vestige de l’ancien temps et bien-sûr Blanche, complice du vrai Alexandre, qui a été internée.



Sans oublier le commandant qui parcourt la campagne à la rechercher d’un vin qu’il a beaucoup aimé lorsqu’il était plus jeune et rêve de retrouver, recherchant un paradis perdu.



Frédéric Verger nous propose la petite histoire dans la grande Histoire, avec des détails sur les conditions de vie des prisonniers, les exécutions sommaires, les charniers…



Dans ce roman, on trouve toute une déclinaison autour du rêve: la rêverie, l’affabulation, onirisme, le délire, la folie, mais aussi l’ivresse de la musique, de la danse… Tout s’intrique, s’imbrique à merveille.



On sait très bien que le récit est construit sur des faits et une région, Blay, qui n’existent pas mais on se prend à y croire, et si le récit démarre très lentement, le rythme s’accélère, s’enrichit, un peu comme « le boléro » de Ravel et, de rebondissement en rebondissement, on ne lâche plus le roman.



Tout m’a plu dans ce roman, même les longueurs, car le style de l’auteur rappelle les feuilletonistes du XIXe que j’aime tant. La langue est très belle, de même que les descriptions de paysages inventés par l’auteur et qu’on visualise sans problèmes comme s’ils existaient vraiment.



Cette lecture m’a convaincue de lire le premier roman de Frédéric Verger: « Arden » pour lequel il a reçu le prix Goncourt du premier roman en 2014.
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Les rêveuses

Je tiens tout d'abord à remercier Gallimard et Babelio pour la découverte en avant-première du roman et de l'auteur Frédéric Verger.

Je ne vais néammoins pas tourner autour du pot, pondre une critique mi-figue mi-raisin, ni disserter sur le contenu du roman. J'ai eu beaucoup de mal à lire entièrement ce roman, tant je me suis globalement ennuyée. C'est d'autant plus étonnant que je reconnais que ce deuxième roman de Frédéric Verger est bien construit, documenté et fort bien écrit. De la belle ouvrage, incontestablement.



Malheureusement, je n'ai que très rarement été emportée par l'histoire, n'ai jamais été enthousiasmée. Les qualités de ce texte sont en quelque sorte devenues ses défauts.

La multiplication de longues descriptions, certes maitrisées mais pas toujours indispensables selon moi, conjuguée à un style impeccable mais sans « la patte véritablement personnelle » qui permet de s'attacher à un écrivain, ont fini par me lasser et m'ont donné l'impression d'entraver la progression de l'intrigue.



Dommage, l'usurpation d'identité d'un jeune soldat et l'évocation des rêveuses du couvent d'Ourthières avaient tout pour me plaire.

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Les rêveuses

Quelque part entre le hussard sous le toit, fête païenne chez Franz de Galay et récits de la Kolyma en Lorraine ?



J'ai reçu avant la rentrée littéraire le deuxième roman de Frédéric Verger. J'en remercie Babelio et Gallimard. Et je compte me procurer rapidement Arden, son premier ouvrage, car j'ai lu ce deuxième volume avec plaisir.



Plus de 400 grandes pages d'une prose dense, mais d'une lecture jubilatoire. Le sujet n'est pas léger : pendant la deuxième guerre mondiale, un soldat prend pour survivre l'identité d'un mort, comment va-t-il vivre dans la famille dont il prétend être membre ? Ami lecteur, sois averti : la guerre n'est pas ignorée, certaines scènes sont abominables , quoique vraisemblables.



J'ai aimé la capacité de Frédéric Verger à créer : des personnages, une région, des atmosphères surtout. Les situations sont instables, incertaines : jeux de l'amour et du hasard, de la faim, de la peur, de la folie, de la joie et de la mort.



Dès la première partie, le doute et la mort se mêlent. Peter n'est qu'un soldat prisonnier de dix-sept ans, on ne sait guère ce qu'il pense mais sa détermination à vivre est énorme. Les quatre autres parties principales sont presque des récits autonomes, avec unité de lieu, où Peter, les deux cousines si charmantes, la vieille mère si russe, son serviteur et le commandant allemand évoluent et tissent la trame du fond, toujours dans une ambiance où chacun lutte pour survivre. Leurs portraits sont beaux, complexes, et je les ai trouvés pleins de vérité, dans leur poids ou dans leur fantaisie.



Deux autres personnages sont plus fantomatiques, ils sont du domaine du rêve (qui comme chez Nerval est proche de la folie). Un amour d'une beauté surréaliste semble inspirer des actions bien folles, la bande de Breton est d'ailleurs évoquée clairement. Et globalement une atmosphère de rêve imbibe tout le livre.



Pour moi, Frédéric Verger s'intéresse plus au style qu'à la psychologie. Il y aurait eu matière à des pages de monologue intérieur, mais le narrateur froid ne nous livre presque rien des pensées des personnages. En revanche, les métaphores, parfois humoristiques, et surtout les descriptions font vraiment le plaisir de la lecture. Curieusement, en ce 21ème siècle, la minutie des détails observés et commentés donne à ces descriptions leur caractère onirique.



Globalement j'ai aimé la richesse de l'écriture, inventive, sensuelle parfois. Elle peut être terrifiante aussi, mais la distance que Peter semble garder avec les événements même les plus douloureux les rend supportables. A contrario, son amour impossible donne des scènes magnifiques, mais dans lesquelles une certaine distance subsiste.



PS : Quelques détails ont un peu troublé ma lecture : lisant des épreuves non corrigées, j'ai trouvé quelques fautes d'orthographe, une anomalie topologique, mais tout cela est sûrement déjà corrigé. L'introduction est faite pour frapper : mots rares, mention de « Diderot, attiré à Bray par le désir de faire l'amour à une dévote », géographie bizarre (le Pays de Bray existe, pourquoi reprendre ce nom pour créer une région à l'autre bout de la France?). Et j'ai souvent eu l'impression qu'il me manquait des clés pour décoder des allusions. Une mention d'Offenbach m'a permis de trouver l'origine d'une chanson, Google m'a révélé que la Marsovie venait du premier roman de Frédéric Verger, mais combien d'allusions ai-je manquées ? Je me suis aussi interrogé sur la raison de plusieurs passages subits au présent de narration. Tout cela dévoile un texte complexe, qu'on peut lire relativement naïvement, mais qui propose aussi une lecture profonde. (Plus que le hussard sur le toit, la troisième partie vous évoquera peut-être votre labyrinthe préféré, ou un jeu vidéo).
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Sur les toits

« Nous tournions en rond sur les tuiles brûlantes, sous le ciel impitoyable et c’est sans doute pourquoi le ciel bleu des après-midi d’été offre depuis ce temps à mes yeux l’image la plus parfaite du désespoir. Prisonniers de la spirale que dessinait l’entremêlement de tous ces petits toits, nous tournions en rond à la recherche d’une ombre où nous pourrions nous étendre. »



Du narrateur de ce roman, un garçon d’environ 14 ans, nous ne connaîtrons jamais le prénom. Il erre avec sa petite sœur, Liola, sur les toits de Marseille pendant l’occupation. Leur mère, gravement malade, a dû se signaler à la police. Elle est anglaise et sera conduite dans un établissement mi hôpital, mi centre de détention… Elle a persuadé ses enfants de se réfugier sur les toits de la ville et de s’y cacher. Ils y feront bien des rencontres inquiétantes.

Ce roman, qu’on pourrait presque qualifier de gothique, stylistiquement irréprochable, m’a fait forte impression. Il m’avait semblé essentiellement relever de l’imaginaire, avec ses côtés « La nuit du chasseur » rencontre « Gormenghast ».



Mais recherche faite, il s’avère à ma grande surprise qu’il s’appuie sur une vérité historique incontestable : en février 1943, après une rafle dans le quartier du Vieux-Port qui a vu plusieurs milliers de personnes arrêtées et déportées, l’armée allemande a procédé à la destruction systématique du quartier. 1200 immeubles ont été dynamités, sur une superficie de 14 hectares.



Ces toits sont bien ceux du désespoir pour ces jeunes héros, qui devront faire face à bien des épreuves. Le fond du roman est extrêmement sombre, inutile de le cacher. Et, comme les personnages, le lecteur que je suis a parfois trouvé interminables ces journées caniculaires ou froides passées sur des toits, qui finissent par prendre l’apparence d’un désert infernal.



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Les rêveuses



Une usurpation d’identité avec l’intention de commettre une action crapuleuse est un délit. Quand cette appropriation frauduleuse se fait au détriment d’un mort, pour sauver sa peau, est-ce effectivement un crime ? Ne serait-ce pas, tout simplement un devoir de survie ?

Ici, c’est une des substances originelles qui fécondent un roman précellent.

Peter Siderman, juif allemand, natif de la Sarre, est un tout jeune homme qui s’est engagé dans une unité ordinaire de l’armée française. Après la débâcle, pressentant qu’il allait être fait prisonnier et fusillé, sans autre forme de procès compte tenu de sa judaïcité et de son enrôlement dans les rangs ennemis, il s’approprie la plaque militaire et quelques lettres prélevées sur un soldat français, victime d’une crise cardiaque : Alexandre d’Anderlange.

Quelque temps après, il est libéré et reconduit en Lorraine, annexée, par le III e Reich, en pays de Bray, berceau natal présumé. Là, réside sa belle- mère, mourante, Madame veuve d’Anderlange née Sofia Eveseivna, venue de Russie.

Dès le premier contact, cette vieille femme aveugle qui simule sa fin prochaine, décèle la supercherie mais Peter n’est pas dénoncé et, bientôt, il fait partie de cette famille composite qui essaie de se recomposer pour affronter, ensemble, une misère noire et tenter de survivre : il y a le fidèle et dévoué majordome Emmanuel , les deux cousines Weissman , la brune Hélène, Joséphine la rousse , toutes deux, en quête d’un riche parti , il y a aussi Victor Van Versterhagen le vieux commandant allemand, bancroche, à la recherche de son eldorado, une propriété viticole où il fut hébergé quand il faisait ses classes , il y a plus de cinquante ans.

La vie s’égrène, petitement, une vie de survie, de sursis, de famine, de joies anodines aussi, qu’il faut savoir capter et savourer parce qu’il n’y a pas grand-chose d’autre à se mettre sous la dent.

Et puis il y a ces mystérieux courriers émanant de la cousine Blanche d’Etrigny-Weissman, qui appelle Alexandre à son secours, enfermée dans ce couvent où furent, jadis, cloitrées d’excentriques moniales qui rêvaient et racontaient à haute voix leurs songes : prophéties, inepties, affabulations, tromperies ? Légende enrôleuse, sans doute, et explication plus concrète à la page 188 concernant le titre de ce livre.

Peter-Alexandre va tenter de retrouver Blanche, et là les rebondissements se multiplient, les situations rocambolesques s’enchaînent, les déboires s’aggravent, les épreuves terribles redoublent, s’amplifient, s’accélèrent, et cela me fait penser à Cunégonde dans « Candide », qui cabossée, souillée, mutilée, étripée reste en vie malgré les terrifiantes épreuves auxquelles elle a été confrontée.







J’ai apprécié la maîtrise du style , l’écriture faconde et ondoyante de Verger, son vocabulaire généreux, ses comparaisons et métaphores foisonnantes, savoureuses, originales et , bien sûr ce récit singulier et tragique, quelque peu mystique , qui s’enrichit, au fil des pages, de multiples anecdotes, bâti avec deux matériaux : le concret : l’Histoire et ses atrocités en toile de fond et le fictif forgé par son imaginaire luxuriant : le décor omniprésent qu’il peint , celui du froid plateau mosellan , qu’on croit reconnaitre mais qui se travestit et s’estompe dans le givre hivernal au profit d’un cadre réimaginé, et ce mythe de nonnes rêveuses , qui subsiste et persiste grâce notamment à cette vaisselle « parlante »(1) en faïence rose, quelque peu ébréchée, qui raconte leur étrange histoire et ces vieux microsillons étiquetés « Les Rêveuses » - oratorio de Sémiroff,(2) (l’initiale du prénom étant quelque peu effacée, est- ce un A factice comme « Alexandre » ou un P authentique, celui de « Paul » qu’il faut tenter de déchiffrer ?) Antiquités, qu’on pourrait, qui sait, peut- être, dénicher sur l’étal de quelques brocanteurs perspicaces ou malhonnêtes, trouvailles fortuites qui accréditeraient cette histoire !

Un grand MERCI aux Editions Gallimard Blanche et à Babelio de m’avoir permis de savourer ce livre en avant- première de la Rentrée littéraire de 2017.

Après cette lecture j’ai découvert « Arden » avec le même plaisir.

1 - Assiettes parlantes : dites encore illustrés, historiées, animées…, type de vaisselle en faïence appréciées au XIXe siècle dont le bassin ou le marli est orné de motifs très variés : scènes animées avec des personnages ou des animaux, offrant des thèmes multiples : historique, militaire, politique, religieux, commémoratif, ou proposant des rébus, des devinettes, charades ...

2- Paul Semiroff : Elève de Ravel, secrétaire de Stravinski, compositeur de musique de chambre, d’une symphonie, d’un concerto pour harpe et hautbois. Mais il est surtout connu pour son oratorio Cinq rêves d’Ourthières (Soprano et chœur de femmes (d’après Villa Europa n° 7/ 2016 Frédéric Verger – Sur un plateau de Moselle)

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Les rêveuses

Comment se tirer d'une situation bien mal emmanchée au moment de la débâcle en 1940 quand on est juif allemand et de surcroît engagé dans l'armée française ?

Il faut un sacré coup du destin, me direz-vous… mais aussi et surtout une crise cardiaque opportune de la part d'Alexandre d'Anderlange, qui permet à Peter Siderman après un échange de plaques d'identité d'endosser et la nationalité et le patronyme du mort. Fait prisonnier, puis démobilisé, il sera renvoyé « chez lui ».



Une histoire d'usurpation d'identité comme il y en a tant dans la littérature. Arrivé chez lui, en territoire annexé, il ne sera ni reconnu des « siens », ni dénoncé à l'autorité allemande que représente Victor van Versterhagen, un officier en mal de souvenirs de jeunesse… S'ensuit une réadaptation à sa nouvelle vie : entre Sofia d'Anderlange née Eveseivna, une immigrée russe ruinée et son majordome, Emmanuel ; les cousines à marier Weissman…

Qui donc est cette cousine Blanche d'Etrigny-Weissman, dont les courriers appellent Alexandre-Peter à l'aide du fond de son couvent ? Une « rêveuse » sans doute…



« Les rêveuses », de Frédéric Verger, que je découvre ici, un pavé qui se lit tranquille, foisonnant, bien rythmé par de multiples rebondissements souvent causasses. Il n'aurait fallu qu'un style un peu moins lisse pour que je classe cet ouvrage dans mes coups de coeur de l'année. Dommage, mais malgré tout un grand merci aux éditions Gallimard et à Babélio pour cette lecture en avant-première d'un des titres de la rentrée qui ne manquera pas de faire parler.

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Les rêveuses

Passé à deux doigts – ou plutôt à deux voix – du Goncourt en 2013 avec Arden, Frédéric Verger devrait à coup sûr figurer à nouveau en belle position des prix littéraires cet automne. Et avec davantage de succès souhaitons-le, car Les rêveuses est un beau livre ; un grand livre.



Comme tant d'autres jeunes gens de son âge, Peter Siderman s'est engagé dans l'armée française au début de la Seconde Guerre mondiale. Sauf que Peter est Allemand. Et juif. Alors au coeur de la débâcle, quand les armées du Reich se rapprochent et qu'un soldat mort donne l'occasion à Peter de changer d'identité, il n'hésite pas une seconde et devient Alexandre d'Anderlange.



Rejoignant rapidement sa « nouvelle » famille, Peter va partager le quotidien de ces aristocrates mosellans désargentés, regroupés dans les quasi-ruines de leur demeure autour de Sofia la grande tante et d'Hélène et Joséphine, les cousines délurées en quête de maris. Outre le souvenir marquant d'Alex, Peter découvre l'ombre planante de Blanche, l'autre cousine, héritière putative de la fortune familiale mais désormais cloîtrée pour mieux lui faire y renoncer. Blanche, si éprise d'Alex. Blanche, dont la voix était si douce et belle. Blanche, qui n'avait pas son pareil pour retranscrire et compiler les songes des rêveuses du couvent d'Ourthières, autrefois célèbres pour la beauté et la poésie de leurs visions.



En plein coeur d'un terrible hiver et dans ce territoire de l'Est de la France où l'occupant allemand surveille prisonniers et populations, Peter va se lancer dans la dangereuse quête de Blanche.



Frédéric Verger réussit la prouesse de nous entraîner dans une grande fresque héroïque où il mêle l'histoire – la petite comme la grande -, l'amour, la passion mais aussi une certaine forme de cruauté, tout en le faisant avec une incroyable maîtrise de son écriture. Dans un livre dense (444 pages) et volontairement avare de dialogues, il réussit à installer un rythme alternatif, pouvant accélérer brutalement son action en un simple paragraphe, puis laisser trainer sa plume en longueur pendant de nombreuses pages sans que le lecteur n'y trouve matière à ennui. Un délice…



Mais surtout, Verger est un virtuose des mots, des styles, des métaphores, des caractères, des dialogues, des descriptions, des digressions… Bref, en bon prof de lettres qu'il est, il connaît l'incroyable richesse qu'offre la langue française à qui sait s'en servir, et ne se prive pas de le faire avec brio. En d'autres mots, il fait de la littérature, quand tant d'autres ne se contentent que de faire des livres.



Un dernier mot enfin : en grand amateur de littérature américaine en général et de nature writing en particulier, je me suis régalé des paysages de ce pays de Bray montagneux, forestier, froid, dur, mais rendu attachant par les descriptions de Verger, installant le livre dès son début dans une atmosphère particulière qui « tient » l'intrigue – et le lecteur – jusqu'à la fin.



Un grand livre je vous dis… Et un grand merci à Gallimard et Babelio pour cette belle découverte en avant-première.
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Les rêveuses

Tout d'abord je tiens à remercier les éditions Gallimard et babelio qui m'ont permis de découvrir en avant -première le nouveau roman de Frédéric Verger.

La débâcle de 1940. Peter Siderman , juif allemand, né à Trêves, engagé à 17 ans dans l’armée française va pour sauver sa peau face aux allemands prendre la plaque d’identité d'un soldat mort :Alexandre d’Anderlange. Fait prisonnier par les allemands , il est interné dans un camp . Les conditions de vie sont dures,même très dures. A sa grande stupéfaction ,il est renvoyé dans sa famille. Né en Moselle, la Moselle étant à nouveau dans les territoires du IIIème Reich, il est donc considéré comme allemand . IL arrive alors dans une datcha , fait la connaissance de Sofia Evseievna, d'Emmanuel son factotum, et de "ses deux cousines "Hélène et Joséphine d’Etrigny. Bientôt il va découvrir qui était Alex, et surtout apprendre qu’il existe une troisième cousine Blanche enfermée dans un cloître à Bray . Il décide de tout tenter pour l’aider à s’enfuir …

La vie est tout aussi dure ici qu'ailleurs, faim, froid sont à l'ordre du jour. Un camp de prisonniers russes jouxte la petite ville de Bray ... Frédéric Verger d'une "main de fer" nous relate les conditions de vie de ces prisonniers , celle de leurs geôliers surtout dominés par la figue étrange du commandant. Des pages douloureuses interrompues par des pages plus naturalistes, plus poétiques dirais-je . Une atmosphère lourde,pesante, un mal-être quasi permanent rendent cette lecture oppressante . La limite entre rêve et réalité est vite franchie, la folie guette et peut vous rattraper

sans crier gare. Une narration de grand talent mais une lecture qui ne m'a pas enthousiasmée . J'aimerais bien savoir quels faits historiques ont servi de point de départ à l'écriture de ce roman . La rentrée littéraire est imminente j'aurais sans aucun doute ma réponse.

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Arden

Si vous êtes adepte d'un style concis, sobre, si vous privilégiez les livres peu dodus, bien ordonnés par chapitre, passez, sans regret, votre chemin. Cette lecture n'est pas pour vous.

A l'inverse, si vous préférez une littérature enthousiaste, fleurie, où chaque détail est minutieusement amplifié par une pléthore d'adjectifs pétillants, surabondante en descriptions fantasques, logorrhéique en métaphores, foisonnante en figures de style alors ce roman luxuriant est bien pour vous et vous vous y plongerez avec bonheur.

Marsovie , au coeur de l'Europe , ressemble étrangement à une certaine principauté bordant la méditerranée. C'est un grand-duché d'opérettes . Quand on réside dans une telle contrée, il est normal de se passionner pour ce genre musical léger. C'est le cas de deux compères Alexandre de Rocoule, aux racines ardéchoises , polyglotte, gérant du Grand hôtel, un ancien sanatorium réhabilité en établissement de luxe et son acolyte, Salomon Lengyel, juif, comme son prénom l'indique.

Tous deux composent musique et écrivent livret avec une telle inspiration débridée et une telle surabondance que même en réunissant l'oeuvre de Franz Lehár, Jacques Offenbach, et Oscar Strauss, on n' arriverait pas à une telle production. Les titres sont alléchants et cocasses: « Un spirite amoureux », « La chance du pendu », « La princesse aux trois manies » et il y en a encore et des meilleurs ! Mais aucune de ces opérettes n'est achevée et jouée, il manque toujours quelque chose, des notes à corriger , une partition à compléter, un épilogue à réécrire, un acte à compléter … Il faut dire qu'Alexandre a de qui tenir : Louis, un de ses ascendants vivant au siècle des Lumières, fut le premier à composer des opéras comiques d'inspiration biblique qui attirèrent, semble-t-il l'attention de Voltaire. Et là, il faut saluer la prouesse imaginative de Frédéric Verger quand le philosophe évoque « un plaisant vieillard qui met en rigodons l 'histoire sainte », il fait, bien sûr, allusion à ce lointain aïeul !

Tout pourrait être le mieux dans le meilleur des mondes, sauf que la guerre gronde , blesse, tue partout où elle passe .Le grand duché va être, à son tour, impacté par la tourmente.

Dans ce premier roman, Verger troque son habit de professeur de français contre le frac de Monsieur Loyal. Son écriture devient un spectacle époustouflant. Il anime les mots qui, sous sa plume-baguette, s'élancent, se débrident, dansent , caracolent, tourbillonnent, s'assemblent pour faire les clowns, jouer les fildeféristes, les magiciens, les équilibristes, les trapézistes.

Du grand art.







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Sur les toits

Ce roman est étonnant !

Près de 400 pages, et très honnêtement, au bout des 50 premières je n’étais pas sûre de pouvoir le terminer.



Le pitch : Marseille, 1942. Pour échapper à un placement en foyer suite à l’hospitalisation de leur mère, deux enfants se réfugient sur le toit de leur immeuble, dans le quartier populaire du Panier.

Ils vont y passer presque deux ans, apprendre à survivre au froid et à la faim, et vivre d’incroyables aventures au sein d’une bande d’enfants voleurs totalement livrés à eux-mêmes.



Bon. En 400 pages, il ne se passe pas tant de choses que cela, et les péripéties sont un peu répétitives.

Mais : si j’ai poursuivi ma lecture, c’est parce que j’ai été séduite par la très jolie plume de Frédéric Verger, foisonnante de descriptions incroyables, où le sordide devient merveilleux, l’ignoble enchanteur, l’ordinaire loufoque et fantastique.



Fable, roman historique, roman d’aventures et roman d’apprentissage, Sur les toits est un récit intense et virevoltant qui m’a fait penser à Oliver Twist et à l’univers de Dickens.



Une curiosité littéraire qui séduira autant les adultes qu’un lectorat plus jeune amateur d’aventures.
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Arden

A l'instant ou je commence ce texte , je suis très surpris parce que les critiques sont très négatives ici , et a contrario pour ma part j'ai beaucoup aimer ...

Peut être n'ai je pas de goût en matière de litterature ....

J'ai lu ici que ce livre pour certains , n'est pas bien parce qu'il n'y a pas de chapitres , parce que le rythme est lent , parce que le texte est abscons , ect ...



Avons nous lu le meme livre ?

Ici le style , pour un premier roman est extraordinaire , d'une profondeur rare , avec un vocabulaire de grande qualité , on est au coeur d'une oeuvre qui pour un premier roman est simplement magistrale ....

L'histoire est certes un peu difficile a suivre parfois , mais il faut savoir si l'on fait le choix d'un livre pour avoir un texte facile à suivre , basique , sans profondeur , sans intérêt , ou bien si lorsque l'on ouvre un livre , on attend une expérience nouvelle , inclassable , qui ouvre les horizons du lecteur vers de nouvelles perspectives , de nouveaux univers ....

Ici l'on est dans le même genre de textes que Proust , un texte profond , ou il faut rentrer , qui ne se laisse pas lire avec facilité , et c'est cela qui fait l'intérêt de la litterature !

Ce texte à la capacité rare de prendre le lecteur en " otage" des le début , dès les premières phrases .

Cet univers que l'auteur propose de decouvrir , s'avère baroque et dans le même temps tres inscrit dans la réalité historique .

Oui l'auteur propose un pays imaginaire , au sein duquel il inscrit ces personnages dans une histoire qui de prime abord peut paraître non sensique , et qui au fur et à mesure prend ces bases dans une réalité qu'il travesti quelque peu , aménageant son histoire avec la réalité historique qui imprègne peu à peu cette histoire .

Les nazis font leur apparition , et peu à peu leur ombre grandissante impregne cette histoire et le côté kafkaïen de leur présence vient bouleverser la mélodie que l'auteur avait jusque là mis en place .

Les nazis , beaucoup en ont fait mention dans leurs œuvres , l'auteur prenait un risque de redite ici , il prenait le risque de perdre son roman dans une répétition qui lui aurait etait nuisible . Et c'est là que réside son tour de force , a aucun moment l'on ne trouve ici une redite , une répétition , tout est novateur , frais , c'est un texte d'une très grande qualité que cet auteur dont c'est le premier roman nous propose ici .

Alors certes , ce n'est pas un livre consensuel , il faut aller le chercher , être patient , savoir trouver dans ce texte au style magnifique , ce qui fait de ce livre une pépite . Pour autant , quand l'on s'intéresse à la litterature de manière véritable , et non comme un adulescent qui ne sait que lire des œuvres de distraction , certes tout à fait respectables , mais au potentiel tres limite , quand l'on a envie de faire une plongée dans la vraie litterature , il faut alors faire preuve de curiosité , accepter d'être " malmené " , que nos habitudes soient remises en question , comme c'est le cas ici avec le choix genialement déstabilisant de ne pas inclure de chapitres , avec ces descriptions qui prennent leur temps , rappelant par la meme Proust , Balzac , ou plus contemporain , le Nouveau Roman ....

Pour ma part , j'ai choisi ce livre parce qu'il m'a choisi , parce qu'il m'a parlé , parce qu'il a su répondre à mon envie d'un texte tout sauf consensuel , tout sauf " facile " , avec un style abouti , du vocabulaire peu commun , une histoire qui demande de la concentration , qui ne se livre pas facilement ....

Peut être suis je trop exigeant , un peu " élitiste " sur les bords , de manière inconsciente , mais j'ai eu un instant de jubilation intense a la lecture de ce texte , j'irais meme jusqu'à dire un " orgasme intellectuel " , et j'en suis ivre de joie ..,.

Je suis surpris de voir autant de mauvaises critiques pour ce livre , qui pour moi est une tres grande réussite , une oeuvre d'art , qui comble toutes mes attentes littéraires ....

Mais peut être n'ai je pas de goût en matière de litterature ...
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Arden

Arden est le premier roman de Frédéric Verger. Un premier roman publié chez Gallimard, on peut se douter qu'il y a de la qualité derrière, et sur ce point, pas de surprise. La plume est précise, poétique, parfois impertinente, mais toujours très bien maitrisée. En revanche, j'avoue tout de suite un bémol concernant la forme du roman : aucun chapitrage, aucun espacement entre les paragraphes, Frédéric Verger nous livre un roman bloc, duquel il est parfois difficile de s'extirper ... J'aime quand l'auteur découpe son histoire, car il m'indique indirectement quand je peux interrompre ma lecture, et m'autorise en quelque sorte à l'abandonner pour reprendre une vie normale. Là, j'étais comme happée, mais me sentais parfois plus prisonnière que sous le charme ...

Côté intrigue, il faudra passer sur de longues descriptions de la forêt, de l'hôtel, des personnages, du contexte, de la ville, avant d'arriver réellement sur les "aventures" d'Alexandre et Salomon pendant la seconde guerre mondiale. On ne peut reprocher le style, encore une fois très beau, mais ces descriptions m'ont semblé souvent longuettes ... Et ce découpage en bloc, ou plutôt cette absence de découpage a plusieurs fois eu raison de mon courage. Cependant, rendue à la moitié de l'histoire, j'ai oublié mon idée d'abandonner ce roman, curieuse de connaître le destin de personnages étranges, surprenants et aussi farfelus parfois que les protagonistes de leurs opérettes.

Les opérettes, voilà d'ailleurs un livre qui semble leur rendre hommage ... A commencer par le pays où se déroule l'histoire, la Marsovie, principauté imaginée par Franz Lehar, compositeur d'opérette du début du siècle, dans La veuve joyeuse. Même si je ne connais guère l’œuvre de ce monsieur et que je n'ai pas eu la chance d'échanger avec monsieur Verger pour comprendre le clin d’œil qu'il lui fait, je ne peux que constater la référence ! De même, l'intrigue en elle-même a parfois des airs d'opérette, oscillant entre comédie et tragédie, avec des fils conducteurs, des petits détails qui passent de l'un à l'autre des personnages par le jeu du hasard ...

Avec des airs parfois ubuesques, Arden nous entraine dans un univers de fiction mais en même temps ancré dans l'Histoire. On y découvre un peuple qui se croyait protégé et qui va devoir faire face aux atrocités de la guerre. Ou quand parfois l'absurde prend le dessus pour sauver les hommes et que la vie se transforme en partition d'opéra ...
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Arden

Certainement un roman d'une grande qualité littéraire- il a notamment recçu Goncourt du Premier roman ,ce Arden m'a malheureusement profondément ennuyé tant je n'ai jamais réussi à entrer dans ce livre entre le conte et le roman historique, trop dense, trop confus et trop abstrait pour me convaincre...
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Arden

C'est un petit royaume fictif d'Europe centrale qui sert de décor à Arden, le premier roman de Frédéric Verger. Il a failli avoir le Goncourt, à une voix près, il y a une raison à cela: le roman renoue avec le classicisme de la grande époque proustienne, balzacienne ou flaubertienne. Et comme dans nos chers classiques, il traîne un peu en longueur en posant le décor d'opérette de ce royaume d'opérette où l'on joue de l'opérette. Dire que je me suis ennuyé n'est pas exact, car le dernier tiers est plus vivant et intéressant. On se pose des questions d'autant plus réelles sur la montée du nazisme et le recours au stalinisme pour le contrecarrer que le royaume est fictif. Mais ce livre ne m'a pas apporté la détente de la lecture, peut-être manquais-je de concentration. Une tentative originale et audacieuse certes, mais qui pêche par excès de lyrisme.
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Les rêveuses

Une lecture déroutante, qui oscille entre plaisir et ennui.



Le thème de l'usurpation d'identité est à l'honneur dans ce livre, un sujet qui peut être passionnant.

Mais l'histoire gravite aux confins du songe et surtout de la folie jusqu'à finalement y sombrer.

Justement, ce qui m'a déplu dans ce roman, c'est qu'on tourne un peu en rond.

J'ai l'impression que l'auteur n'a pas approfondi la dimension psychologique des personnages pour se concentrer sur leur environnement.

La description des lieux et le contexte historique prennent une place importante dans l'histoire au détriment des personnages selon moi.

Aussi, un enchaînement de péripéties rocambolesques a eu raison de ma lecture et m'a lassée. J'ai bien failli m'arrêter en cours mais j'ai finalement poursuivi pour découvrir le dénouement.

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Les rêveuses

Merci à Babelio et à Gallimard. Ce cru découverte et avant-première est une assez belle réussite venant d'un auteur que j'ignorais et dont c'est le deuxième roman. Malheureusement et à mon avis, comme le cinéma, la littérature a oublié depuis longtemps les vertus de la concision,qui me sont si chères. Ainsi, et c'est dommage, le roman de Frédéric Verger s'essouffle par épisodes, étirant inutilement ses 442 pages. C'était pourtant très bien parti. Les rêveuses nous transporte dans la campagne lorraine de 1940, occupée par l'armée allemande. Ces rêveuses, quant à elles, sont des nonnes que l'histoire locale a retenues et qui confinent à ces légendes qui existent partout. Mois de mai. Les armées de Hitler fondent sur la France. Peter, un jeune Allemand de dix-sept ans engagé dans l’armée française, prend l’identité d’un mort pour échapper aux représailles. Prisonnier, il croit avoir évité le danger quand on lui annonce qu’on va le libérer et le reconduire dans sa famille. Comment sera-t-il accueilli chez ces gens qui ne le connaissent pas?



Peter, que l'on croit Alexandre, va ainsi dans ses fuites et ses geôles rencontrer Hélène et Joséphine, soeurs ou cousines ruinées, un commandant allemand obèse et contradictoire, la vieille Russe Sofia qui joue les moribondes et que l'on imagine forcément comtesse, et se mettre en quête de Blanche que sa famille a internée dans un couvent qui ressemble beaucoup à celui d'Ourthières d'où s'envolaient les rêves des nonnes. La déraison, enfin la presque déraison sera toujours en lisière de notre histoire. Diiriez-vous sortilège?



Les rêveuses ne manque pas d'air ni d'ambition. J'avoue m'y être quelque peu égaré comme en une forêt vosgienne car les sentiers y sont souvent sinueux et le fantastique sourd parfois sous la roche. Mais manifestement Frédéric Verger manie la prose avec dextérité, les cinquante dernières pages particulièrement riches, en grande partie aux bords de la rivière, occasion pour l'auteur de très belles métaphores, de bruissements et de musiques qui seraient élégiaques s'ils ne se déroulaient pas dans l'enfer belliqueux des années quarante, où les flammes, les plaies et la puanteur semblent annoncer des découvertes au delà de tout. Les rêveuses n'est pas loin d'être un très grand livre.

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Les rêveuses

En premier lieu, je remercie les éditions Gallimard et Babelio de m'avoir confié un exemplaire à critiquer dans le cadre de cette rentrée littéraire 2017. J'en suis flatté.



Ceci dit, c(e n)'est (pas) pour ça que je (ne) dirai (pas) ce que j'en pense vraiment.



Alors, qu'avons-nous ici : Un gros livre, 444 pages et des pages très denses. Pas le genre qui se lit vite fait bien fait. Non, il faut prendre son temps, si on ne lit pas attentivement on perd beaucoup.



Ceci est un vrai roman, l'auteur raconte une histoire, je ne sais où il l'a pêchée, ce qui ce quoi a pu l' inspirer mais a priori ceci n'est pas un récit ni une biographie. Soit.



Frédéric Verger est un écrivain. Aucun doute. Il a un style, assez classique, mais dans le sens "classe", c'est vraiment de la belle écriture, avec des métaphores bien trouvées, une recherche de vocabulaire, un approfondissement du sujet, des détails, des sujets du détail, du sujet des détails (je vais insérer plus bas des exemples de ce style).



Ceci est un livre de travailleur. Pas un truc de génie spontané, d'un mec qui écrirait comme ça, bam, bam, et ça ira comme ça, tout seul, premier jet ou presque. Non, ceci est un livre où on sent le travail, l'artisanat.



Mais ça parle de quoi ??



Deuxième guerre mondiale. Un type qui pour éviter de se faire buter par les Allemands prend l'identité d'un mort. Un Français. Ce type se voit démobiliser pour retrouver sa "mère" mourante. Elle n'est pas mourante, elle voulait retrouver son fils. Pas de bol pour elle, ce n'est pas son fils. Pas grave. On joue le jeu. Tout le monde à peu près joue le jeu. Des intrigues sentimentales se tissent. Une curieuse cousine qui avait une curieuse relation avec le cousin dont le héros a pris le nom s'est retrouvée au couvent où la supérieure s'intéresse à des écrits de rêves des moniales du passé. Mais ce n'est pas si simple. Ces écrits sont-il authentiques ? Le héros décide de faire sortir la cousine du couvent. Et se retrouve coincé dans un bâtiment où il risque mourir. Il est sauvé. Plusieurs fois dans le roman le héros va se retrouver coincé. Un gros trip de claustrophobie. L'auteur a-t-il un problème avec ça ? Il le fait très bien ressentir. Luxe de détails, de ressentis. Bravo sur ce point. Bref, finalement il la tire de là, mais il est rattrapé et tout ça part de nouveau en vrille...



J'oublie de parler d'un sacré commandant et de son chat, d'un sacré duo de cousines (beaucoup d'aspects charnels évoqués, avec talent), de la "mère" qui est aussi un sacré numéro. Et de tous les aspects sacrés, puisqu'il y a sous-jacent toute une histoire de croyances, de foi, on est aussi parfois dans un couvent.



Il y a tout un questionnement symbolique, autour de l'identité, de la construction d'une personnalité peut-être aussi...



J'oublie sans doute des aspects, bien des aspects car ce roman est foisonnant, violent, dur, malin, chaud, et subtil, plein de niveaux de lecture possible.



Alors, le style, disais-je :



Bravo pour les aspects charnels, corporels :



« On aurait dit un morceau de glaise malaxé au hasard qu'on n'aurait plus touché en découvrant soudain qui figurait une tête. Enfoncés dans leurs orbites, de petits yeux gris avaient l'air d'oiseaux cachés entre des pierres. »



« Ses plis tanguaient comme si toute sa tête mâchouillait un calcul. »



Quelques « drôleries psychologiques » :



« Vous avez rencontré le commandant ?



- Si on peut dire... Il ne m'a pas regardé. La seule fois qu'il m'a parlé, c'était pour me poser une question à laquelle il ne m'a pas laissé répondre.



- Le commandant, par goût et par devoir, ne délivre pas à grand monde des certificats d'existence », dit-elle, haussant les sourcils, fermant les yeux, comme si c'était là une fatalité qu'il fallait savoir accepter, et qui exprimait peut-être une vision juste de la vie. »





« C'était l'un de ces hommes chez qui, sans qu'on sache pourquoi, l'habileté semble un attribut de la bonté, et qui inspirent une confiance trompeuse parce qu'on s'imagine en les voyant que la bonté, comme leurs mains, vient à bout de tout. »



« Réveille-la au moins, dit-il finalement en montrant Blanche.



- Pourquoi ? Tout le monde sait qu'elle n'a pas toute sa tête. La folle qui dort est comme tout le monde. »







De fines métaphores :



« Fermant les yeux, la rousse baisa Peter des deux côtés très lentement, comme si ses joues infusaient des confidences. »





« Plus qu'à ceux d'une aveugle, ses mouvements faisaient penser à quelqu'un qui n'a pas confiance en ses yeux, s'imagine qu'ils sont des gamins sarcastiques qui inventent des pièges. »





« Peter sursauta, effrayé par le jaillissement des voix. Il avait quelque chose de splendide et de sauvage, comme le feuillage d'un grand arbre bouleversé par le vent. »





Mais, le gros bémol, c'est que, moi, ce livre pourtant blindé de qualités ne m'a pas touché. Je suis resté spectateur d'un beau travail mais ne l'ai pas ressenti dans mes tripes. Je trouve que ce livre, même si il est évocateur, charnel et corporel, manque de tripes et de trip (je ne peux m'empêcher un parallèle avec les Bienveillantes de Jonathan Littell, tant par le titre, que par l'époque... où le style était tout aussi beau et évocateur mais Littell allait plus loin dans chaque aspect, notamment l'aspect onirique, limite délirant, qui ajoute une puissante couche à l'ensemble. Je ne retrouve donc que des aspects un peu minorés de Littell. La comparaison fait un peu mal.). Et je ne vois pas où est l'auteur dedans. Oui, où est-il, qui est-il... Ce sont, à mes petits yeux de lecteur lambda, des choses, si pas les Choses les plus importantes que j'attends d'un livre. Je ne les ai pas assez trouvées, en tout cas pas assez ressenties, assez vécues. Je n'ai pas vécu avec ce roman, du coup je suis certain qu'il ne restera pas inscrit longtemps dans ma mémoire. Un peu comme disparaissent, à la fin du roman, symboliquement les inscriptions sur les mobiliers mortuaires, physiquement les corps, et... ce qui fait un être.





Bref, bravo tout de même, mais (pas de) dommage(s) sur le lecteur et la personne que je suis.
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Les rêveuses

Les tribulations d'un jeune allemand enrôlé dans l'armée française pendant la guerre de 40.

Il doit y avoir un souffle épique dans cette histoire;et ce souffle m'a vaincue.

Recommandé par ma libraire préférée, Gallimard, la Blanche :me voilà heureuse.

Au bout de 100 p, je ne savais pas trop où j'étais, et au bout de 200 , complètement larguée.J'ai terminé cette lecture en diagonale, ce qui ne m'est pas arrivé depuis des lustres.

Onirique, certes, les célèbres sœurs rêveuses (elles parlaient en dormant) du couvent d'Ourthières, pays de Bray , servent de fil rouge à cette histoire échevelée .

Romanesque aussi, des pseudo cousines plus ou moins folles,un vieux couvent, des soldats russes.

Et bien sur, la guerre, en fond de paysage.

Tout cela donne j'en suis certaine un beau roman , mais malheureusement je suis passée complètement à côté.
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Arden

Nous voici dans la forêt d'Arden - oh combien décrite à maintes reprises dans de nombreuses pages - plus précisément dans l'hôtel du même nom. Un hôtel, un peu comme un décor d'opérette avec beaucoup de personnages typés, un immense buffet, de grandes tentures et multitude de décorations...



Le maître des lieux : Alexandre de Rocoule, homme à femmes sur le retour, amateur de Strauss et d'opérettes anciennes. Il en a composé une multitude, toujours inachevées..



Son ami et complice d'écriture est Salomon Lengyel, il est tailleur de son état, il est juif. Il a une fille Esther qu'il n'a plus vu depuis 3 ans, elle vit à Budapest. Il lui écrit très régulièrement.



Nous sommes en Marsovie, pays imaginaire , principauté d'Europe centrale. Ce pays imaginaire est un pays d'opérette. Effectivement, saviez-vous que ce nom fut inventé par Franz Lehart dans le cadre de sa célèbre "Veuve joyeuse" ?



Pour la petite histoire, Franz Lehart était un compositeur hongrois très apprécié de Hitler et Goebbels, le régime nazi utilisa même sa musique à des fins de propagande. Franz Lehart utilisait toujours des librettistes juifs. Son épouse d'origine juive s'était convertie au catholicisme avant leur mariage.



Je vous raconte tout cela, car c'est troublant, nous sommes en pleine fiction, dans un monde imaginaire, des rues, des personnages fictifs, ce livre ne se veut pas historique et pourtant on trouve ici un clin d'oeil avec l'Histoire avec un grand H et la montée du nazisme, la lutte contre le bolchevisme.



Un livre dans lequel nous passerons sans cesse d'une chose à son contraire: la joie, l'exhubérance, l'homme à femmes qu'est Alexandre, la sobriété, la tristesse et la rigueur de Salomon. Dois-je en déduire un parti pris de l'auteur? Est-ce pour nous bousculer ? Tout comme l'écriture en bloc, sans châpitre, ni paragraphe?? Est-ce pour nous désarçonner ? Nous enlever des repères ?



Nous sommes donc dans les environs de la forêt d'Arden , un pays de cocagne qui basculera dans la triste réalité de la guerre, des pogroms et du nazisme. Alexandre fait partie des nombreuses personnes qui n'ont jamais pris Hitler au sérieux. Il rit et se moque de la frayeur des juifs, jusqu'au jour où le roi Karol en 1942 autorise un corps de volontaires pour lutter contre le bolchevisme : les gardes noirs.



Les gardes noirs défilent dans les rues le vendredi et le 28 mars 1944 un fait divers sème la terreur : l'assassinat du père Molodine. C'est le début de l'horreur de la guerre. Peu de temps après, les allemands envahiront la Marsovie. des pogroms auront lieu aux frontières, la peur arrive, les juifs doivent être recensés.



Salomon fera revenir sa fille Esther et Alexandre décidera de les cacher.



Voilà, je ne vous en dis pas plus. J'avoue avoir rencontré des personnages haut en couleur mais le style de l'époque proustienne, flaubertienne n'a malheureusement pas entraîné mon imaginaire dans ses trop, beaucoup trop longues descriptions à mon goût.



J'ai vraiment eu du mal à me concentrer dans cette lecture, le livre ne m'a absolument pas fait voyagé, mon imaginaire n'a rien décodé. C'est dommage car la plume pourtant est très juste, précise, poétique, très bien maîtrisée. Le vocabulaire est riche. Mais que de longueurs pour ce livre toujours en lice dans la dernière sélection du Goncourt 2013. J'ai été jusqu'au bout de la lecture, le dernier tiers étant un peu plus vivant, souhaitant malgré tout connaître le destin de nos protagonistes.



Je reprendrai pour conclure une critique de Libération de ce 25/11/2013



"Arden a de quoi susciter chez le lecteur l'ennui le plus profond ou le plus déconcertant enchantement. Dans le premier cas, il lui sera insupportable d'être pris dans un texte aussi dense, stylistiquement léché, lourd de réminiscences de classiques rébarbatifs."





Ma note 6/10


Lien : http://nathavh49.blogspot.be..
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