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Citations de Gaëlle Nohant (823)


La peur des pauvres. C'était la maladie qui les tenait tous, les bourgeois, les aristocrates, les financiers. La hantise de ce grouillement informe qui enfantait des révolutions, des attentats, des épidémies de peste et de tuberculose, à la manière d'un monstre tentaculaire dont chaque tête fulminait de colère.
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- Moi d'abord ! hurla-t-elle d'une voix rauque, envoyant une volée de coups de coude , et Violaine tomba sur les genoux, le souffle court, peinant à se relever, y arrivant enfin, aidée par une grande femme qui était derrière elle. Elle avait perdu son tour dans la file d'attente.
La femme qui l'avait fait tomber était à présent hissée vers la fenêtre, et Violaine reconnut la marquise de Fontenilles. Un instant, elle la revit en train de lui refuser l'accès au Bazar de la Charité, et un sourire douloureux força ses lèvres fendues.
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"Que le deuil des grandes familles n'éclipse pas celui des gens de la rue, comme il le fit si souvent dans l'Histoire. Qu'on n'oublie pas ce petit Alfred que sa mère reconnu à ses godillots usés, et qui était venu trouver les dames de charité dans l'espoir d'être hébergé car la misère ne permettait plus à sa mère de le garder auprès d'elle. Ses chaussures fendillées, brûlées aux extrémités, aux lacets faits de bouts multiples noués ensemble, dépassaient son petit cadavre. Le cri que sa mère a poussé à la vue des souliers me reste dans le cœur. Alfred David avait quatre ans.
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S'il était irréel qu'une créature aussi raffinée que l'homme pût frire comme une côte de bœuf, le voir de ses propres yeux, c'était mordre par surprise dans le fruit de l'arbre de la connaissance. Un poison entrait dans la tête et le corps, qui vous changeait à jamais.
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Aimer rend fort et fragile.
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Je pense souvent à ce que vous m'avez dit. Ne pas laisser leur mort éclipser leur vie.
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Elle marche sur eux, et la mélancolie qui l’envahit, comme l’humidité ronge un mur, porte le fantôme des rues effacées, et de ceux qui en étaient l’âme. Est-ce qu’ils hantent les habitants du quartier ?
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Elle en était venue à aimer sa souffrance physique parce qu’elle accaparait par moments toute l’attention de son cerveau, la délivrant d’un mal plus souterrain.
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Dès lors ce fut le chaos, un océan démonté de corps entrechoqués, de cris de douleur et d'épouvante.
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L'exil est un poison tenace, tu le sais mieux que moi. J'avais rendez-vous avec les lambeaux de ma vie.
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Il mesure l’abîme entre les mondes : celui de ces propriétaires pour lesquels le plus grand scandale est une femme seule qui reçoit de la visite après huit heures du soir, un bébé qui fait ses dents. Celui de ceux qui rêvent simplement d’une journée à ne rien faire, à regarder tomber la neige au chaud. Et qui s’endorment en brûlant d’entendre ces mots : « Vous êtes engagé. »
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Comme son regard s'attardait sur lui un peu plus longuement que les convenances ne le permettaient, il leva la tête vers elle et la dévisagea. Rougissant dans la pénombre, elle sentir palpiter en elle une émotion souterraine dont elle avait oublié l'existence. Elle se détourna et reflua dans l'ombre, savourant cette douce morsure du désir qui s'accrochait à l'instant et ne cherchait nulle absolution.
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Il voudrait tout voir et tout saisir, retenir le visage tanné des enfants qui se poursuivent en criant des injures mélodieuses, les silhouettes marmoréennes des vieilles Castillanes dont le regard ne cille pas et semble une concrétion de larmes séchées, l’haleine douce des patios débordant de fleurs, les odeurs de cuir, de corde, de sueur et d’ail. Et partout, ces notes rouges, fleurs de sang et chiffons écarlates, qui donnent à la ville l’allure d’un piège à taureau, d’une anémone de mer à la séduction mortelle. Les rues populeuses désertées à l’heure de la sieste, les appels rauques dans la nuit trébuchante, les jeunes filles altières qui remontent vers la cathédrale avec cette manière de ne pas vous voir qui embrase la rêverie… Sous la joie de vivre des Madrilènes, Robert perçoit une tension latente qui explose au coin des rues après quelques verres, à l’heure où les poignées de main dégénèrent en rixes. Dure et sensuelle, Madrid est la soie ondoyante et le couteau qui la déchire, frôlement de muleta et banderille. Son vacarme incessant est une diversion. Derrière la symphonie heurtée de milliers de sons qui charment ou irritent l’oreille, Robert entend l’épaisseur du silence. Un silence de vies bâillonnées, de blessures inguérissables, de conjurations.
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La poésie n'est pas l'apanage des intellectuels.
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-Hier soir,j'en ai écrit un pour les enfants.Un mélange de réel et de fantaisie. Il s’appelle La Fourmi, précise Robert avant de réciter:

Une fourmi de dix-huit mètres
Avec un chapeau sur la tête,
Ça n'existe pas, ça n'existe pas.
Une fourmi traînant un char
Plein de pingouins et de canards,
Ça n'existe pas, ça n'existe pas.
Une fourmi parlant français,
Parlant latin et javanais,
Ça n'existe pas, ça n'existe pas.
Eh! Pourquoi pas?

-Hum... La fantaisie est manifeste, mais où se cache le réel? sourit Verdet.
-Eh bien, répond Robert, cette fourmi de dix-huit mètres ne ressemble-t-elle pas à une locomotive, et son chapeau à un panache de fumée? Dix-huit mètres, c'est la longueur précise d'une locomotive avec son tender à charbon. et ces passagers de toutes les races parlant des langues différentes...
- ...sont les déportés? souffle Verdet, songeur.
- C'est bien possible, murmure Robert. Et le fait qu'on emporte tous ces gens vers un lieu effrayant, que disparaissent ainsi des milliers de femmes et d'enfants, c'est tellement dur à croire... Et pourtant...
-Mais vous l'adressez aux gosses, qui s'arrêteront à la fantaisie.
-Bien sûr, répond Robert. et c'est bien ainsi. Le réel donne au poème son sens caché. Eux n'en ont pas encore besoin, ils le découvriront bien assez tôt.

p.167-168
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Son regard l'avait fait fondre comme les rayons d'une aube incendiée réveillent la forêt sous le givre.
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Elle avait besoin de marcher, de retrouver la pulsation enfiévrée de la ville sous son pas, le concert de protestations des cochers, les coups de sifflet stridents des tramways à impériale, tout ce remue-ménage de vendeurs à la sauvette qui tentaient d'arrêter la foule pressée, les bourgeois amidonnés, les petites dames élégantes traversant pour aller cher leur couturière ou s'engouffrer dans ces nouveaux temples de la consommation qui avaient pour noms le Bon Marché, la Samaritaine ou le Printemps. La vie parisienne rechargeait l'énergie de Violaine et son animation incessante opérait une transfusion de sang, rejetant ses humeurs noires dans l'eau boueuse des caniveaux.
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Violaine de Raezal se disait que s’il était un bonheur possible sur cette terre, on ne pouvait y accéder qu’en laissant mourir certaines choses en soi.
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LA MARQUISE DE FONTENILLES n'en finissait pas de la faire attendre dans cette antichambre aux allures de Bonbonnière. Érodé par l'impatience et la nervosité, l'assurance de Violaine de Raezal s' effritait. Elle espérait tant de cette entrevue! La marquise était un des sphinx de dentelle vêtus qui gardaient les portes du Bazar de la Charité. Sans son accord, la comtesse de Raezal avait peu de chances d'y obtenir une place de vendeuse.
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Après qu'elles eurent quitté la duchesse, elles entrèrent ensemble dans le torrent furieux des candidats à la survie, main dans la main pour ne pas être arrachées l'une à l'autre. Quelques femmes avançaient à contre-courant, hagardes, les cheveux en partie consumés, cherchant un enfant, une sœur, une mère. Une enseigne de comptoir enflammée s'écroula en grondant sur l'une d'elles qui tomba pour ne plus se relever ; déjà le feu était sur elle et la garda. Dans les flammes et la fumée, on n'y voyait plus à trois mètres. Le feu avait barré les fenêtres avant qu'on ait pu les ouvrir, il fermait le chemin aux victimes entassées dans la partie gauche du Bazar, il avançait vite, escorté de crépitements, de chuintements, de sifflements lugubres. La foule terrifiée trébuchait sur des cadavres en grande partie calcinés dont les crânes éclataient à la chaleur dans un craquement sinistre.
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