Depuis leur haute tour de verre, dans des box blindés, derrière leurs écrans, les agents veillent à la bonne marche du monde. Le travail est la seule chose en soi qui n'ait de valeur. Aussi, travaillent-ils de 5h à 0h15, avec cinq pauses par jour, et vivent-ils sur leur lieu de travail. En dehors de leur boulot, ils sont libres... et luttent pour le rester mais aussi pour conserver leur poste. Des guildes se sont ainsi formées pour se protéger les uns les autres. Élisabeth, Solveig, qui n'a plus un seul poil sur le corps, Clara pour qui l'art consiste à se scarifier, Laszlo, un artiste qui filme tout, et Théodore qui, en vertu d'une date sur un calendrier dont lui seul a connaissance, s'est coupé les orteils, font partie d'une même guilde. Leur but : détruire les autres guildes afin de prendre possession de l'étage. Dès qu'un agent disparaît, il est aussitôt remplacé. Aussi l'arrivée de Hick, survenue après le suicide de Piotr, un homme plutôt âgé et habillé différemment, va-t-elle semer le trouble dans tout l'étage 122 de la tour 35S...
Grégoire Courtois nous transporte dans un monde futuriste où seul le mot travail a du sens et de la valeur. Les agents, d'ailleurs, ne connaissent rien d'autre, ils vivent pour et par le travail. L'on va suivre, au coeur de cette dystopie, le destin de cinq d'entre eux qui ont tous choisi, d'une manière ou d'une autre, de garder un semblant de personnalité en se distinguant des autres. Si la solidarité est le maître-mot au sein d'une guilde, l'on découvrira pourtant qu'elle a des limites. Avec ce roman d'anticipation qui fait froid dans le dos, Grégoire Courtois nous offre une vision d'un futur où l'humain en tant que tel n'a plus sa place, où les machines régissent le monde et où le mot « vie » a perdu tout son sens. Si le propos est fictionnel, il n'en reste pas moins glaçant. L'ambiance, tendue, nerveuse, est parfaitement retranscrite par cette plume acerbe et mordante.
Un roman singulier, surprenant et impitoyable...
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Je suis née en 2101, après des années de recherche dans des laboratoires, sous la direction du professeur Fransen qui travaille avec Nathan Laroche, président-directeur général de French Motors. Constituée uniquement de matériaux organiques (œil d'aigle, pelage de panthère noire, siège en peau de femme...), je révolutionne le monde de l'automobile. Pendant des années, l'on m'a exposée, essayée, admirée partout dans le monde... pour enfin m'adopter quelques années plus tard. Antoine et Christine Donnat sont dorénavant mes nouveaux propriétaires. À qui je dois, évidemment, obéir et faire plaisir... Mais, aujourd'hui, en 2110, je retrouve des odeurs et des lieux que je reconnais. Je suis de retour à la maison. Et Fransen est près de moi. À côté de lui, un homme que je ne connais pas et que j'identifie plus tard comme étant l'huissier Klein. Fransen doit extraire mes épisodes mémoriels par ordre chronologique puisque je suis la dernière à avoir vu Antoine qui a, mystérieusement, disparu...
Voilà un court roman pour le moins original puisque Grégoire Courtois donne la parole, non pas à un humain, mais à une voiture. Mais pas n'importe laquelle ! La BlackJag ! Dotée de qualités exceptionnelles parce que composée à 100 % de matières organiques, elle est également capable de recueillir et enregistrer des données. Et c'est là qu'intervient Jane qui retranscrit le flux informationnel. De là à imaginer qu'elle puisse ressentir et penser par elle-même, il n'y a qu'un pas. Née pour répondre à l'attente des humains (surtout les hommes) qui entretiennent une relation aujourd'hui amoureuse avec leur voiture. Au fil des enregistrements, l'on découvre peu à peu le passé de la BlackJag, ses relations aussi bien avec Jansen qu'avec Antoine et l'on va de surprises en étonnements jusqu'au dénouement qui nous laisse sans voix. Grégoire Courtois explore intelligemment et brillamment la relation de l'homme avec les objets du quotidien (ici la voiture) et les limites des progrès aussi bien scientifiques que génétiques. Un (trop) court roman percutant, fort original et parfaitement maîtrisé.
L'on pense évidemment à Christine de Stephen King. D'ailleurs, est-ce vraiment un hasard si la femme d'Antoine s'appelle Christine ?
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Intriguée par le résumé de mon amie Elo43 qui dit avoir pensé à ses amis instits, je ne pouvais pas passer à côté de ce livre.
waouh en effet. Ca dépote. On a là un thriller bien trash.
Je suis passée par tous les sentiments, de l'effroi surtout, du malaise, de l’incrédulité, de la peur. Bien contente de fermer ce roman en me rassurant. Non mais ce n'est pas possible de faire une sortie scolaire comme ça. On n'aurait même pas le droit. Dormir sous des tentes, dans la forêt, sans sanitaires? Non non. L'inspecteur taperait du poing sur la table.
Rassurée mais quand même. Lecture perturbante.
Instit ce n'est pas un métier c'est bien souvent un rêve de gosse, une vocation. Et pourtant, il peut arriver dans une carrière, une année qui se passe vraiment mal, qui fait douter, qui rend malade. Pour nous c'est arrivé l'année dernière. Un enfant de CP très perturbé dans la classe de mon mari. Enfant bizarre, violent, pervers. La machine éducation nationale longue à réagir alors que l'instit tire la sonnette d'alarme. Un an avant que l'enfant soit mis sous traitement, déscolarisé à mi temps. Un an, à voir mon mari sombrer, aller à l'école la boule au ventre, l'entendre rêver la nuit et crier le nom de cet élève. On a beaucoup souffert cette année là y compris mes enfants.
Alors cette histoire forcément elle me touche.
Une classe de CP de 12 élèves part camper dans la forêt du Morvan. Mais personne ne reviendra de cette excursion. On le sait dès le départ. Mais comment est ce possible? On découvre un enfant pervers qui devient criminel. Un premier meurtre (c'est l'instit le premier dézingué) et hop tout s'enchaîne. On suit ses 11 petites âmes au coeur de la forêt, la nuit, en proie à la peur, à la faim, plongées en plein cauchemar. Les monstres des contes prennent vie.
Lecture un peu dérangeante par rapport à l'âge des enfants c'est sûr et des scènes vraiment trash et gore. La scène du sanglier, mon dieu. Très réussie quand même parce qu'on prend le petit meurtrier en pitié.
Quand j'ai refermé mon livre, je n'ai pas pu m'empêcher de me dire "heureusement que mon mari n'avait pas prévu de classe verte l'année dernière".
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C’est grâce à marina53 que j’ai voulu lire ce roman vers lequel je ne me serais pas porté spontanément. Chance, je l’ai gagné à la dernière Masse Critique. Merci donc à marina, à Babelio et à Folio. Grâce à eux j’ai vécu un moment de lecture intense.
Je commence ma lecture et déjà je le regrette. Les premiers mots installent l’ambiance désespérée. J’ai tâté la température de l’eau avec le gros orteil et je l’ai ressorti vivement, comme agressé par un froid intense. J’absorbe les émotions décrites comme une éponge empathique. Mal ! Dans quoi est-ce que je me suis embarqué ? Ce n’est pas le moment de bouffer un bouquin qui me déprime. Pfff.
Ambiance :
Un décor de ville, probablement américain, qui ne voit jamais le soleil caché en permanence derrière des couches de nuages gris, ni le sol caché derrière une brume sûrement toxique en dessous de laquelle survivent, paraît-il, les chats : ces sans emploi. Des tours de trois cents étages identiques, rangées à l’infini comme un bataillon de Lego®. A chaque étage, des agents qui surveillent l’évolution d’indicateurs de performance et reçoivent des mémos de la direction qui les félicitent pour leur assiduité, les réprimandent pour leur oisiveté ou changent brutalement le règlement. Ils « vivent » là, dans leurs box blindés, bossent douze heures par jour et plus, quelques pauses d’un quart d’heure et le repas de midi. Ils sont organisés en guildes. Leur but : survivre. Car les guildes se livrent à une immense partie de Risk où il s’agit de conquérir les box voisins en tuant leurs occupants temporaires : au couteau, à la grenade, au fusil à pompe. A travers les vitres, les corps qui tombent des étages supérieurs forment un spectacle si permanent qu’il en est devenu banal.
Comment vivre dans cet environnement réglé par une direction assurément guidée par des IA ont une curieuse interprétation de l’expression « donner un sens à sa vie » ? La petite guilde à laquelle on s’intéresse donne le ton. On transforme la scarification et les jets de sang sur les murs des toilettes en art, on se coupe les orteils qui visiblement ne servent à rien, on s’épile le moindre poil y compris les cils. Chacun sa méthode.
Quel est le but de ce roman ? Juste nous plomber et nous faire déprimer ? Ça c’est réussi, J. G. Ballard n’est pas loin. J’hésite à poursuivre.
Mais… tiens, cela s’anime. Grégoire Courtois nous offre une intrigue : un nouveau vient de franchir la porte des Hairaches. Il n’est pas comme les autres. Il crie même à la cantonade qu’il serait heureux de rencontrer ses collègues autour d’un café ! Hallucinant. Du coup, cette proie facile pour les guildes les mieux placées sont dans l’expectative.
Et avec ça, un changement du règlement qui donne un gros avantage aux guildes qui possèdent des box adjacents : des prêts à des taux avantageux pourront leur être accorder, pour s’armer par exemple. Déstabilisation de la partie de Risk. Ça risque de chauffer bientôt.
Comment va réagir notre charmante guilde ?
Les événements se précipitent. La troisième partie est un long, très long morceau de chaos d’une violence inouïe. Je ne peux plus lâcher le bouquin. Je veux savoir.
Je finis par savoir.
Et je me pose la même question qu’au début, et les personnages survivants aussi : pourquoi tout ça ?
Est-ce que l’auteur voulait nous frapper en nous montrant l’inanité de nos existences de bureau (la mienne en tout cas) ?
Était-ce juste un exercice, non pas d’anticipation, mais d’extrapolation aux limites de la vie de bureau ?
Je sors de là essoufflé. Envie de légèreté.
Roman singulier, surprenant et impitoyable a dit marina53. Je ne trouve pas mieux à dire.
A lire, si vous l’osez.
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Dans la famille farce macabre pas crédible, je demande Les lois du ciel. Pourquoi farce alors qu'on sait dès la première feuille que toute cette joyeuse petite classe de CP ne reviendra jamais de son séjour découverte de la nature? Parce que tout est tellement exacerbé à force de sordide que c'en devient même grotesque. Un peu comme ces films d'horreur de dernière zone mettant en scène un groupe d'adolescents. Sauf qu'ici il s'agit d'enfants de six ans.
On sent les drames arriver les uns derrières les autres, souvent répugnants voire malsains. Le trash hélas ne remplace ni le talent ni l'originalité.
Fort heureusement le livre est court - moins de 200 pages. Sans quoi il me serait tombé des mains. A défaut des mains, dans les oubliettes de l'esprit et de la mémoire, c'est certain. Comme on évacue les déchets.
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Fichtre, voilà un petit bouquin bien surprenant !
Mis dans une PAL immédiate pour un challenge, je n'ai évidemment pas relu le 4ème de couverture avant de le commencer.
Du coup, le dépaysement et la découverte ont été complets.
J'avoue qu'au début du livre j'ai été complètement perdue. Qui parle ? That is the question.
On comprend assez vite, toutefois. Mais les questions demeurent. J'ai affaire à une voiture... Mais quel genre de voiture ?
Et c'est là que l'auteur est très fort, parce que de questions en révélations, ce qu'on découvre laisse pantois.
Quelle imagination ! Fascinant, prenant, déconcertant et un poil perturbant, voire écoeurant.
C'est très bien écrit, bien amené.
Si vous voulez lire ce livre sans rien en savoir (parce que quand même, je pense que le plaisir de la découverte ajoute facilement une étoile au total), faites comme moi, laissez-le dormir dans votre pal jusqu'à l'oublier, ressortez-le sans relire le pitch qui vous a attiré, et plongez dans ce futur étrange, aux concepts bizarres. (et surtout n'allez pas lire les avis qui spoilent tout, malheureux !!!)
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Quelle bonne surprise ! Pourtant, le genre – science-fiction – et le thème – une voiture du futur - n'avaient rien pour me plaire. Mais Grégoire Courtois, libraire de son état, a de l'imagination, c'est le moins que l'on puisse dire. Avec un thème pourtant souvent exploité (l'homme et sa relation à la voiture), il réussit à nous emporter dans son histoire futuriste où les voitures deviennent des êtres vivants à part entière.
Nous sommes en 2101. Imaginez une voiture avec un pelage de panthère en guise de carrosserie qui ronronne quand vous la caressez, des pattes à la place des roues, la vision d'un aigle, l'estomac d'un Yorshire et des sièges recouverts de peau humaine… de la peau de femme bien sûr. C'est doux, c'est sexy, c'est diablement séduisant. Cette voiture fabuleuse, cent pour cent organique, est la création de Jan Franzen, généticien, qui travaille pour le compte de la firme French Motors. Présentée au public puis commercialisée, la BlackJag est vendue à un couple, Antoine et Christine. Lorsque son propriétaire disparaît mystérieusement, la BlackJag est rappelée dans les laboratoires de French Motors. Franzen est chargé d'accéder à la mémoire de la voiture pour découvrir ce qu'il s'est passé. Au fil des enregistrements qui donnent accès aux souvenirs de la BlackJag, nous découvrons son incroyable histoire.
De nos jours et depuis longtemps déjà, il est clair que beaucoup d'hommes considèrent leur titine chérie, toute de métal et d'acier, comme un être à part, symbole de leur virilité destiné à flatter leur ego… Si en plus cette voiture est constituée d'attributs naturels sauvages et féminins, c'est le paradis ! C'est en partant de ce postulat que l'auteur a donné corps et poils à sa BlackJag, une voiture si envoûtante qu'elle ne va pas manquer de séduire son propriétaire Antoine, et rendre folle de jalousie la femme de ce dernier, Christine. le prénom de cette dernière nous apparaît forcément comme un clin d'oeil à la célèbre « Christine » de Stephen King mais la comparaison s'arrête là car les rôles sont quelque peu inversés. Notre Black Jag en effet n'est pas diabolique, loin de là. Obéissante plutôt, naïve dans son ignorance certainement. Son seul objectif est de répondre aux besoins de son propriétaire, même si elle ne comprend pas tous ses besoins justement. Ce n'est qu'une voiture après tout… mais allez le faire comprendre à ce cher Antoine !
Sa relation avec son créateur, Franzen, est également intéressante. Ce dernier martèle que sa voiture ne pense pas et ne ressent rien. Et pourtant… La BlackJag est capable d'analyser et de comprendre nos réactions. Peut-être est-elle même dotée d'une forme de conscience ? L'huissier Klein, qui enquête, pose les questions qui viennent au lecteur au fil de ce roman qui interroge le rapport de l'homme à la voiture. Des questions philosophiques, d'éthique et également scientifiques, l'ensemble posé dans un style dynamique et efficace.
L'intrigue menée autour des souvenirs de la BlackJag est excellente et nous happe facilement, tandis que la cocasserie de certaines scènes est à mourir de rire. J'ai ri en lisant ce livre comme j'avais ri, dans un style totalement différent, avec « Cul de sac/Piège nuptial ». Plus c'est énorme, plus c'est jubilatoire ! Bref, j'ai adoré.
Ah, Antoine et sa voiture… Quelle passion dévorante ! Une chose est sûre, après avoir lu "Suréquipée", vous ne ferez plus le plein de votre voiture de la même façon.
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Ce n'est même pas mon cœur de mère qui a crié Stop , car dès le début du livre le lecteur est prévenu : de cette sortie "classe verte " avec 12 écoliers de CP aucun ne reviendra .
Ce serait plutôt l'ambiance glauque et malsaine très vite installée ,.
La narration perturbée mêlant les pensées délirantes de plusieurs personnages à la fois dans la même phrase accélère le malaise .
Bref, l'insoutenable est arrivé particulièrement rapidement pour moi et j'ai refermé définitivement ce livre à la fin de la première partie , page 68 où déjà trois morts grotesquement violentes inauguraient ce tableau macabre ( et encore nous n'en étions qu'aux adultes ! )
Âmes sensibles, donc , passer votre chemin .
Ce thriller fait partie de la sélection du Polar en Poche 2018 de Gradignan , je peux affirmer d'emblée qu'il n'aura pas mon vote , je ne critiquerai pas le choix de cet ouvrage, il en faut sans doute pour tous les goûts .
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Excellent ! Dès les premières pages, j'ai été transportée dans un autre monde avec, comme narratrice, une voiture dans les années futures. Celle-ci est suréquipée. Elle a été conçue avec le meilleur de l'être humain et de l'animal. le propriétaire y est tellement attachée qu'il ira jusqu'à… Des chapitres courts où un huissier cherche à comprendre ce qui s'est passé. Un roman qui ouvre plein de questionnement comme l'idolâtrie de l'homme face aux machines sophistiquées. Bravo pour l'originalité ! Bouquin que je n'ai pas pu posé de la première à la dernière page.
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Superbe trouvaille faite grâce au libraire ! Ce roman étrange et atypique raconte l'invention d'une voiture organique, avec fourrure épaisse, ronronnant lorsqu'on la caresse et parlant bien sûr. A noter les huit paires d'yeux combinées d'aigle et de hibou, ainsi que le moteur au rugissement léonin pour donner une sensation de vitesse. Vaste question : est-elle dotée d'une conscience ? Elle sucite en tout cas des sentiments très humains. Fransen, son créateur, doit répondre aux questions d'un huissier soupçonneux enquêtant sur la disparition d'un homme à laquelle la voiture serait mêlée (peut-on parler d'une voiture ?). Un très bon roman de science-fiction laissant un léger malaise s'installer et ne plus nous quitter jusqu'à la fin. Qu'est ce qu'un homme ? "Si cette voiture est une machine alors nous le sommes tous", répond son personnage principal...
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🚌 Les lois du ciel - Grégoire Courtois 🚌
@folio_livres
Une classe de CP part en classe verte pour trois jours, douze enfants de 6 ans, Fred leur instituteur et deux mamans accompagnatrices. Ils vont camper, explorer la faune et la flore de la forêt du Morvan, partager des histoires autour du feu de camp... enfin ça c'est ce qui était prévu mais dès la première page on comprend bien que les choses ne vont pas se passer de cette façon : "Les enfants étaient partis. Et jamais ils ne reviendraient".
Je ressors mitigée de cette lecture. C'est une lecture extrêmement dérangeante, car vous l'aurez compris ce n'est pas un troupeau de licornes qui est venu prendre les enfants pour les emmener dans un monde merveilleux, non c'est une histoire très glauque. Glauque et pas très cohérente, l'âge des enfants ne correspond pas aux pensées, aux réflexions, aux paroles que l'auteur leur prête. On a peine à imaginer des petits enfants de 6 ans agir ainsi, des collégiens oui mais pas des petits CP. Mais l'auteur a peut-être voulu mettre en scène des enfants aussi jeunes pour ajouter à l'horreur de l'histoire, malheureusement ça ne fonctionne pas. Par contre on avance dans l'histoire en voulant savoir ce qui va se passer, on garde l'espoir que la première page nous a trompé, que quelque chose de bien va arriver. Quant aux dernières pages, je vous conseille de prendre du chatterton pour bien accrocher votre estomac...
Un roman noir dérangeant et perturbant qui privilégie le sordide à la cohérence.
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Je remercie Babelio et les éditions Folio SF pour l'envoi de ce petit texte qui fut très plaisant à lire.
On est vite emporté par l'histoire, entre fascination et horreur. La narratrice est la BlackJag, le tout dernier modèle de voiture, qui se trouve être un élément entièrement organique, composé d'un assemblage de gènes animaux qui la rendent le plus perfectionné possible. Elle est capable de prendre en compte son environnement extérieur et de s'adapter en fonction. Du coup, la question se pose : la BlackJag est-elle capable de penser ? Elle est aussi soumise à son propriétaire, et doit tout faire pour le satisfaire. Cela veut-il dire qu'elle peut éprouver des émotions ? Le simple fait qu'elle soit capable, à sa façon, de nous livrer ce récit apporte des éléments de réponse.
C'est un récit très maîtrisé, une belle écriture poétique et mélancolique. La construction est efficace, on alterne entre trois temporalités : le présent où l'inventeur des BlackJag, Fransen, rembobine la mémoire de la voiture pour comprendre ce qui est arrivé à son propriétaire mystérieusement disparu, le passé proche de la vie de la BlackJag avec son propriétaire et sa famille, et enfin un passé plus lointain, celui de la naissance et de l'évolution de la voiture auprès de Fransen. Ces dernières parties nous permettent de nous faire une image de la BlackJag, petit à petit. On découvre à quoi elle ressemble et de quoi elle est faite en même temps que la voiture elle-même.
La partie qui se penche sur Antoine et sa famille permet d'explorer le lien particulier que peut éprouver une personne pour sa voiture. et lorsque cette voiture passe de l'objet mécanique à un être organique, fait de chairs et de sang, cette relation peut vite devenir malsaine. Cela rappelle beaucoup Christine, de Stephen King, et cela m'a amusée que la femme d'Antoine, jalouse de la BlackJag, s'appelle justement... Christine. On pense aussi pas mal à Frankenstein dans les questions soulevées d'un point de vu moral et éthique.
Tout le texte possède à la fois ce côté concis, instantané d'une mémoire automatique, et ce côté tout en émotions complexes d'un être qui cherche son identité, son but.
Enfin, le roman pose des questions sur l'étendue de ce que l'humanité peut recréer, et sur l'éthique de faire naître un être vivant capable de penser, de souffrir, et qui a conscience de lui-même, mais en continuant à le traiter exclusivement comme un objet. Le problème devient encore plus épineux lorsqu'un attachement se crée, lorsque des émotions physiques ou des sentiments amoureux apparaissent pour la créature.
Au fond, pourquoi créer de toutes pièces un animal suffisamment intelligent pour nous transporter d'un endroit à un autre, et suffisamment soumis pour obéie à son maître sans protester ? Ces animaux-là sont déjà présents dans la nature. La réponse se situe dans le besoin de contrôle total de cet élément, du sentiment de puissance à posséder cette chose entièrement soumise à nos désirs.
J'ai trouvé la fin parfaite, choquante, horrible et pourtant parfaitement plausible. Tant dans la réalité du futur qu'on nous dépeint que dans ses conséquences. Au final, la voiture n'est plus conçue comme un moyen de transport, mais bien comme un compagnon, avec tout ce qu'il peut y avoir de dérangeant là-dedans, tant du côté des "pères" de ces créatures que du côté de leurs propriétaires.
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Un polar bien saignant, svp ! du lourd, du trash, avec des cadavres à la pelle !
Mais avec en sous-titre, un cynisme cruel, presque de l'humour (noir, noir, très noir !).
Attention, âmes sensibles !
Ici, ce sont surtout des enfants qui meurent, des tous petits, moins de sept ans, des fragiles qu'il aura fallu protéger de la folie tortionnaire d'un camarade de classe, élevé à la rude par un père chasseur un peu brute. Et puis, un concours de circonstances, des hasards malheureux, des situations fatales.
Et un sanglier aussi, dont on ne sait plus, en refermant le livre, si on se réjouit qu'il donne une "bonne" leçon au petit meurtrier.
Parce que ça saigne beaucoup, ça hurle, ça se tord de douleur !
Mais c'est très bon, à condition de ne pas être trop chochotte, il y a de quoi être rudement secoué par ce polar qui mélange les contes pour enfants à l'horreur vraie ! Vous êtes prévenus !
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Je ne suis pas tellement branché science-fiction, mais le côté éthique est souvent intéressant, en l’occurrence la limite floue entre le vivant et la machine. Alors quand c’est un libraire qui devient écrivain, cela ne devrait pas manquer de piment.
La voiture du futur n’est pas seulement intelligente (on en parle déjà assez aujourd’hui), elle est aussi organique, c’est-à-dire vivante.
On commence par une analyse du rapport entre l’homme et sa machine – en passant par le mec amoureux (de sa voiture) et la nana jalouse (de la même), sans parler du constructeur qui s’interdit d’être moral pour des raisons ‘éthiques’ qui lui sont propres (mais pas très longtemps). Tout ça pour dire qu’en 2110 il n’y aura pas beaucoup de changements à ce niveau-là…
Mais la machine, qui n’en est plus une, peut-elle penser, voire avoir des sentiments ? Pour le savoir il faudra lire ce petit livre de 160 pages diablement sympathique.
Quelques pistes :
« Fransen dit : Le bureau éthique vous interdirait probablement d’appeler ça des pensées. Ils parleraient de données ou de « flux informationnel », mais oui, dans les faits, c’est très proche. La seule chose qui distingue sa pensée de la vôtre, c’est qu’elle est incapable de formuler seule un langage. C’est là que Jane intervient. Jane est la plus avancée de nos consoles d’interprétation à ce jour. C’est de loin la plus créative. Une fois qu’on a branché les électrodes, Jane recueille les données brutes. Puis elle les interprète et enfin les passe par le filtre du langage. Grammaire, vocabulaire, énonciation. Si nous pouvons entendre penser ce modèle, si nous pouvons lire ses souvenirs, c’est uniquement grâce à Jane. Elle seule n’arriverait pas à les formuler. Les enregistrer oui, mais pas les formuler. Cette limitation est inscrite dans ses gènes sur demande du bureau éthique. Inversement, Jane ne peut rien produire ex nihilo. Son rôle se limite à l’interprétariat. (…)
Voix non identifiée 1 dit : Qu’elles puissent ou non les formuler, il n’empêche qu’elles ont des pensées. Alors elles pensent, non ?
Fransen dit : Peut-on penser sans langage ? C’est une question dont je laisse débattre les philosophes. Nous sommes des scientifiques. »
« Fransen dit : Monsieur, comme je vous l’ai dit, je ne suis pas philosophe. Mais ce que je pense sincèrement, c’est que, si la BlackJag est une machine, alors nous en sommes tous.
(…)
Fransen dit : Je ne suis pas philosophe, monsieur. Mais indéniablement, la BlackJag ne peut pas être une machine. Ou alors nous en sommes aussi.
(…)
Fransen dit : Je ne suis qu’un scientifique pragmatique, monsieur. Mais mon opinion, c’est que la BlackJag, de toute évidence, sait qui elle est. Tout comme vous et moi. »
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Tout d’abord un grand merci aux éditions Gallimard, à la collection Folio Science-fiction et à Babelio pour l’obtention gratuite de ce livre via l’opération masse critique d’avril.
L’histoire est pour moi assez originale. Une voiture biologique a été génétiquement créé, elle a la faculté de se souvenir de tout ce qu’elle a vécu, et elle est interrogée afin de comprendre comment a pu disparaître son propriétaire principal.
Cela est raconté à base d’enregistrements décryptés de la voiture, à travers une sorte de boîte noire. Mais l’on suit également l’huissier de justice en charge de l’enquête et le concepteur de la voiture. Une idée astucieuse afin de comprendre la fabrication génétique de cette nouvelle sorte de voiture, mais également un moyen de suivre les déboires psychologiques de la famille qui a acheté cette voiture de démonstration.
Ce livre est intéressant pour deux aspects : la psychologie des différents personnages de notre monde en 2100, et la fabrication de la voiture. Celle-ci est un assemblage poussé de tout ce qui se trouve de mieux dans la nature, une vraie voiture biologique. Mais on lui a également ajouté des données numériques afin de pouvoir interagir avec l’usager et les autorités.
Les personnages sont divers et acceptent différemment la présence de cette voiture non-mécanique. Et c’est cet aspect que je trouve le plus intéressant dans ce livre. Le propriétaire a une sorte d’ivresse et un certain amour pour elle, tandis que sa femme semble la prendre en grippe puis en haine. C’est une façon de comprendre l’attachement que certaines personnes peuvent porter à leur voiture, qui peut être suffisamment intense et étrange pour les autres. C’est le paradoxe de cet objet mécanique, devenu biologique, et qui est réellement personnifié. Un objet qui devient « humain ».
C’est un livre qui est agréable. L’écriture est un peu abrupte au premier abord, mais devient plus fluide par la suite. L’enquête est menée d’une façon originale faisant intervenir humain et non-humain d’une façon telle que le récit ne devienne pas ennuyant. Il s’alterne avec les présentations des caractéristiques physiques et génétiques de la voiture. Ainsi nous subissons des pauses dans les deux types de récits, ménageant des temps de légers suspens, et permettant de ne pas perdre d’intérêt. Je n’ai pas constaté de grands défauts à ce livre, mis à part le fait qu’il soit assez court et que la psychologie du propriétaire et du créateur gagnerait à être mieux exprimé.
C’est un bon livre, que je vous conseille si vous avez envie de passer un court moment avec un livre de science-fiction qui permet de réfléchir sur l’écologie et notre rapport à la voiture.
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Voilà un livre glaçant à souhait!
La trame de départ est claire : une classe de CP part en classe verte avec son instituteur et 2 mamans d'élèves comme accompagnatrices, dans la forêt française. Hélas personne n'en reviendra vivant. Glauque certes mais intrigant aussi. D'autant plus lorsque l'on sait qu'à part un banal évènement extérieur, aucun élément extérieur n'intervient, il n'y pas de catastrophe naturelle, ni tueur en série qui rôde, donc tout va se passer au sein de ce petit groupe, de prime abord inoffensif…
On est très vite happé par ce roman virtuose vu le sujet traité.
j'ai trouvé remarquable la manière dont l'auteur nous fait entrer dans la psychologie, les craintes et la vision du monde d'un enfant de 6-7ans.
Pour moi il s'agit d'un grand roman noir mais je peux comprendre que le sujet puisse en rebuter plus d'un.
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