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Critiques de Hélène Cixous (52)
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Portrait de Dora : Paris, Théâtre d'Orsay, 26..

Dora est jeune. Mais Dora sait, ressent, se rebelle, repousse, déverrouille, verrouille, rejette.

Qui jette la clé, qui la garde, qui la donne, qui l'arrache, qui la porte ? Dora est en souffrance. Elle n'est pas folle. Mais souffrance . Souffrance de voir et de ne pouvoir dire, formuler. Dora parle. Le père s'inquiète, Freud écoute. Mais qui entend  Dora? La mère s'efface. L'autorité l'écoute, veut l'amener, la mener , la conduire. Mais Dora parle , elle sait. Elle voit. Elle comprend le mensonge. Elle sait qu'ils ne voudront entendre que ce qui leur conviendra. «  Elle m'encourageait à vive. Ignorant l’énormité de ma douleur. «  Leur propre désir, leur propre loi, La mascarade se joue et met sa chair et son coeur en croix.

En rêve…., rêve-t-on une réalité ? «  Faire monter les rêves, les souffler, les faire cuire, les rouler, les prendre dans ma bouche ».

Épousailles, soupirail, secrets de famille, déchirure, défigure, et les silences se glissent entre les carences et le geste. Petite fiancée de mon secret, je te ferais complice…malgré toi.

Désir, amour, théâtre et poésie. Parce que c'est au théâtre que le risque se prend. Là où il est grand, il a l'espace, la liberté, et le temps.

«  Celui dont les lèvres se taisent bavarde avec le bout des doigts ». «  Piqué, percé, cousu, décousu, c'est un travail de femmes »…Qui garde la clé ?

Le vertige s'éprend. Dans cet espace où la nuit ferme les yeux et que les hommes se parlent, dans cette nuit, qui n'est pas vraiment la nuit mais l'annonce d'une lumière. Une mise en lumière. Un je d'ombres se dessine à claire voix. « Elle connaît l'horreur du regret beaucoup plus puissant que le désir ». Mais le fantôme d'un meurtre rôde, la déchirure du ventre, la chambre..., le verbe entre en camera, inversion du temps. Dora ne subira pas. Elle sort de son ventre, elle sort de la chambre, elle sort de mémoire ; elle sort du passé. Lumière. «  Il n'est pas de plus grande douleur que de se souvenir de l'amour, et cela Freud le savait ». Qui est en proie, qui est chasseur ?..

«  Tout ce qui lui arrivait, ne lui arrivait que déjà passé. Elle vivait dans la mémoire. En proie au passé. Sans aucun espoir d'atteindre jamais quelque chose qui serait le présent. »

Le père s'inquiète, il craint le débordement. Il faut soigner Dora. Mais Dora n'est pas malade, elle est humaine, tragique.

La voix du théâtre, celle de la pièce. On entend cette voix.

Qui a entendu une fois la voix d'Hélène Cixous ne l'oublie pas. Plaisir à lire ce texte, plaisir à l'entendre. Jeu de « parle » et de « viens », jeu de « va » et « tout nous revient », jeu de vie et de mort, poupée russe des corps , plaisir, délire, désir, dégoût, l'amour brûle un jour. Dora cherche, Dora demande, Dora est femme. Elle part. L'image se meurt celle du père, de l'homme, de Freud, ou de dieu sait qui. Dora reste en vie.

Portrait de Dora, texte d'Hélène Cixous, mis en scène par Simone Benmussa, création le 26.02.1976, séquences filmées par Marguerite Duras, avec la participation dansée de Carolyn Carlson. De grandes voix au service d'un grand texte.

Astrid Shriqui Garain















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Homère est morte...

Les livres d'Hélène Cixous nous tiennent les mains, nous tiennent la tête, comme sa mère le fit si souvent aux parturientes et à leur enfant naissant. Ils nous tiennent en vie.
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Homère est morte...

Ce qui frappe sans doute, c’est qu’écrit dans l’énergie de cet affrontement avec la mort, le livre ne raconte aucun deuil, aucun pleur d’après. Seulement la vie.
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Osnabrück

Hélène Cixous, c’est d’abord une écriture. Une écriture qui subvertit le langage, tord la syntaxe. Hélène Cixous se love dans les mots, s’y roule, s’y enroule, les roule, les enroule et les déroule, les retourne, les cogne, les entrechoque, les télescope. Elle prend des libertés inouïes — c’est-à-dire "inentendues", inattendues — avec la composition et la formulation des phrases, avec l’usage commun de la ponctuation, des traits d’union, des capitales, répétant les mots, les sons, s’en jouant. Son jeu sur les virgules est singulièrement libre, libéré, audacieux quand elle aligne les mots sans coupures de virgules, puis, brutalement, avec, pour donner la nuance d’un sens particulier à ses énumérations. Hélène Cixous crée des mots-valises, réunissant plusieurs termes en un seul ou les liant par des traits d’union inhabituels, avec des orthographes fantaisistes, puisant ses inventions aux sources de l’enfance. La langue d’Hélène Cixous s’entend, s’écoute: «L’évidence d’Ève m’évide.» «Toujours avec elle la jouissance à tire d’elle. Vole à la tire.»

Ce livre raconte, dit, évoque sa mère Ève à partir du berceau familial d’Osnabrück, en Basse-Saxe, autrefois en Prusse (Hanovre), où a été signé le fameux traité de Westphalie. Première phrase du prologue : «À l’âge de trois ans et demi je perdis ma mère.»

Tout au long du livre éclate alors, sans nulle complaisance («Elle est mon contraire, comment lui en vouloir ? ») la présence-absence de cette mère, souvenue et revenue de l’enfance, rêvée, fantasmée, fantôme, tour à tour nommée : Ève, maman, ma mère.

Des phrases comme des uppercuts selon la formule de Roberto Arlt :

«Je ne la suis pas née.»

«J’épousai ma mère dans la tombe.»

«Ma mère n’est pas maman, c’est une substituée.»

Dans ce récit à la chronologie éclatée, les temps se mêlent, enchevêtrés entre passé et présent, rêve et réalité : récit saisissant, poignant, de l’omniprésence de l’absence maternelle : «Ève-d’après-comme-avant.»

Enfin, Hélène Cixous, auteur de très nombreux livres et de pièces de théâtre, pose ici des questions fondamentales sur les limites et sur l’éthique de l’écriture, sur le fait qu’écrire est toujours, inévitablement, mentir, sur « l’auteur armé » (d’un stylo) face à son « sujet sans arme ». « Je mens : j’avoue : je mens : j’écris : même si j’avoue je mens je mens : j’écris. Je ne peux pas vivre autrement.» «Je ne peux pas écrire de ma mère vivante. Morte non plus.»

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Une enfance algérienne

Un livre prêté avec quelques autres (je vous ai déjà parlé de La mémoire mutilée de Mohamed Cherid et vous parlerai prochainement des autres) par une amie quand elle a vu que je participai au défi sur le monde arabe organisé par Schlabaya... Cette fois, il s'agit d'un recueil de nouvelles rassemblées par Leïla Sebbar, une auteure que j'ai déjà abordée sur ce blog avec Mon cher fils et L'arabe comme un chant secret.



Ces nouvelles ne sont pas toutes égales dans leur force et leur écriture, mais ont toutes été écrites par des écrivains nés en Algérie et vivant en France. Il montrent surtout la grande diversité culturelle de l'Algérie, le melting-pot entre Européens, arabes et juifs. très peu abordent le sujet de la guerre d'indépendance, encore moins l'Algérie d'après l'indépendance.


Lien : http://vdujardin.over-blog.c..
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Revirements

L'auteure est à nouveau auprès de sa mère, Ève, devenue centenaire. Cixous choie, couve le centre de sa vie avec autant d'attention qu'on le ferait pour un tout petit enfant, accompagne ses déplacements, la borde avant le sommeil, dialogue, rit avec elle, devient plus que jamais la mère de sa mère.Le lien semble resserré en raison de la « cacochymie » d'Ève, mot absurdement recomposé en une myriade de « ca » « ca »faisant se tordre de rire l'enfant-mère. Comme à son habitude, l'écriture ramasse les mots qui sortent de la bouche maternelle, restitue le plaisir enfantin à entendre les mots sonner avec une inquiétante étrangeté mais aussi l'étonnement de vieillir, le désarroi, l'absurdité incroyable de se retrouver acculée si près de la fin.

Malgré tout, si la mort semble cerner la maison et l'écriture, l'amour est là et donc la vie et les mots qui permettent de vivre : Tour, principe autour de laquelle la vie de Cixous s'articule. Même usée, même décrépite, la Tour est là, solide. Tour dans laquelle Montaigne s'isolait pour écrire, tour d'écriture c'est à dire Mère, lieu qui n'est autre que le corps de sa mère pour Cixous, un corps de mots érigé dans la solitude jusqu'à l'immortalité aujourd'hui fissurée.

On ne sait pas ce qui le déclenche mais un océan de fureur se déchaîne soudain, faisant violemment vaciller le fragile mais parfait édifice. Le danger émane de O., l'homme qui menace l'osmose entre H et la Tour, H. et sa mère. Terrifiante crise de couple entre H. et O. dont l'écriture rend magistralement la théâtralité mais aussi la sensation et la conscience d'emprisonnement des acteurs dans leurs rôles. Les acteurs se déchirent d'autant plus violemment que la rupture semble irréelle.O. semble ne pas trouver sa place auprès de H., il ne lui reste plus qu' à faire exploser son couple ou une cervelle. Tout au long de cette scène d' une grande violence verbale et physique où le déchirement intérieur des protagonistes s'expose, la lecture se fait en apnée, il faut que cela passe mais les liens de fureur puis l'impuissante lassitude qui enchaînent les acteurs et le lecteur aboutissent au point de non retour.

Pensait-on.
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Eve s'évade

Ève, mère de l'auteure, personnage récurrent, imprègne une très grande partie de l'œuvre. Elle en est un soleil, voire le soleil, tout en l'ignorant délibérément. Au fil des livres, on la voit se moquer de la gloaaare littéraire de sa fille, regarder l'inspecteur Derrick, raconter sa vie, donner son avis sur tout, perdre l'ouïe. Cette perte est vécue comme l'arrivée d'une étrangère : Surdité est désormais là, imposante, toujours plantée au beau milieu de l'échange. Avec un amour inquiet, Cixous note tout, le langage tout personnel entremêlé d'allemand, les avis tranchés, les menus et immenses changements quotidiens, les désirs, les inquiétudes, les reproches, les joies, tout ce qui constitue le lien filial.

Une scène mémorable est celle du commentaire du tableau Le Rêve d'un Prisonnier de Moritz von Schwind. Avec espièglerie, l'auteure restitue en un même récit les commentaires de Freud et ceux de sa mère, les faisant se rencontrer dans cet espace de possibles magiques qu'est l'écrit.

Ailleurs, Ève perd Schirm, le Parapluie et appelle sa fille en catastrophe. La manière de restituer cet abandon majeur rend compte de l'évènement avec beaucoup d'humour, ne dépossédant pas pour autant la scène de son tragique. Tragique qui témoigne de la tendre attention de Cixous à ce qui surgit dans la vie de sa mère : la suprême trahison de Schirm qui ne pouvait pas disparaître.

Ève s'évade semble n'être qu'un chapitre d'une seule et même œuvre de Cixous. Dans ce chapitre, l'évènement central est peut-être qu' Ève devient centenaire, ce qui suppose plus que jamais l'angoisse de la fin. La mère est observée au microscope, la narration s'adapte à tout ce qui fait événement dans une vie pleine de quotidien. On pourrait craindre, vu le continent abordé, un enlisement, une pesanteur liée à celui-ci, ce n'est pas le cas. Les regards vifs et même allègres des protagonistes le garantissent absolument. En effet, si la prison est un thème qui se décline, métaphore du temps acculant la mère à un seuil que le chiffre cent fait retentir comme un glas, le titre tient sa promesse et Ève s'évade d'une manière tout à fait inattendue.
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Lettres dans la forêt

Conversation entre deux autrices sur les mots, les fantômes, la forêt ; les origines. Ce dialogue de confinement se révèle aussi exercice d’admiration, d’amitié où se partagent ce que peut-être un récit, sa capacité, notamment par son invention langagière, son retour à d’autres langues, à se transmuer en épreuve de non-appartenance. Cette correspondance d’écrivains, entre Hélène Cixous et Cécile Wasjbrot offre une ouverture sur leurs œuvres réciproques, celles en train de se faire, leurs retours sur leur commune obsession de la seconde guerre mondiale, sur les mythes et motifs qui les animent. Lettres dans la forêt ou la mise en dialogue des à-côtés de l’écriture.
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Le livre de Promethea

L'amour ou la fusion des identités ; l'écriture ou la confusion, dans un dense réseau métaphorique, de l'être aimé et de celle qui tente d'en saisir le présent. Le livre de Promothea, parfois diaboliquement intellectualisant, capte la sauvage silhouette, la brûlure, ardeur et absence, d'un amour saisi dans ses antagonismes. Hélène Cixous offre ici une belle réflexion habilement mise en récit et en miroirs.
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Hyperrêve

1. Une fille lave les ulcères de sa mère malade, proche de la mort. A la Tour abolie sa seule étoile se meurt. Le tout est plein de calembours, de crases amphibologiques à la Lacan, pas toujours heureuses et qui, sorties de leur contexte peut paraître très lourdes et caricaturales. Mais je retiens de cette première partie de l'ouvrage ce witz :



« Si Dieu avait vu les yeux de Job. Mais non. Dieu n'a pas d'yeux. Il n'y a pas Dieu. ».



L'agonie de la mère est certes un impossible à vivre, et quelque part l'échec du langage – dans ce livre – à le dire est peut-être un beau témoignage de cet impossibilité. Mais à ce compte je préfère la ligne claire du « journal de deuil » de Barthes.



2. Le sommier de Benjamin. C'est très drôle. La mère apprend à sa fille qu'elle a récupéré dans les années 1930's le sommier d'un appartement parisien occupé par certain M. Benjamin, intellectuel allemand. Oui, oui, en 2005 Hélène Cixous apprend que sa famille possède le sommier parisien de Walter Benjamin. Emballement. Et Jacques Derrida, l'ami disparu, qui venait de faire une lettre posthume à Benjamin en 2001. « Fichus ». Ah, le frère d'Hélène Cixous a dormi pendant des années sur le même sommier que Walter Benjamin sans y penser. Sans être ventriloqué par le fantôme de Benjamin. De fait. Mais Hélène dort dedans et fait un rêve majestueux. Ah si elle avait dormi dans ce sommier toute sa vie, quelle vie d'écriture et de pensée c’eut été ! Bon, elle se pose un peu la question sur la reproduction technique de l’œuvre « sommier » et décide du caractère « auratique » du sommier de Benjamin. Bientôt exposé au musée avec sa brosse à dent (et sa brosse à moustache, ah brosser sa moustache avec celle de Benjamin...). Ça m'a fait penser à ce commerçant du « Maître du Haut Château » de Philip K Dick qui refourgue ses vraies fausses antiquités ayant soi-disant appartenu à des célébrités nord-américaines. On constate que le fétichisme ça marche aussi pour les intellectuels (voir avec les lunettes de Sartre, dormir dans le sommier de Benjamin, etc.).



3. La permission. Il s'agit d'un rêve de Derrida revenant. C'est beau ça. Derrida qui revient fantomatiquement à Cixous via le sommier-mediumnique. Ca c'est un "hypperêve", non ? Parce que quand même c'est pour cela que je me suis investi dans le livre pour découvrir une dimension nouvelle, des galaxies d'hypperêve. Eh bien pas grand-chose.



« Et pourtant tous les événements de cette vie suraigüe ont l'air d'être taillés dans l'hyperrêve. Tous en effet se présentent accompagnés d'une voix qui me murmure dans le cœur « ça ne va pas durer ». »(p.178)



Le terme « taillés dans » suggère une matérialité, l'aspect fantomatique (tout a une fin) oscille avec le côté rêve lucide : tu vas te réveiller, tu es dans un rêve. L'hyperrêve serait une sorte de rêve du « mourir », de l'agonie dont ne peut se réveiller, ce serait le temps de l'oubli en devenir, de la mort en suspens, les yeux ouverts. On serait aussi tenté de lire cet hyperrêve comme un retournement de « l'hyperréalité » de Baudrillard, une consistance du rêve qui atteint à la réalité, mais rien ne fait signe vers cet ailleurs. Mais je crois en fait que Cixous ne tient pas en fait à forger un concept précis d'hyperrêve mais plus faire trembler la mort par la parole qui s'efface. Cet hyperrêve demeurera donc dans des confins lointains.
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Homère est morte...

Quel livre difficile: Hélène Cixous a connu cette espérience: celle d'accompagner sa mère jsuqu'à sa mort, à l'âge de 103 ans. Elle voit cette femme, autrefois forte, sage-femme qui a mis jusqu'à 240 enfants au monde en un mois, qui a milité pour la cause féminine, décliner, s'affaiblir, jusqu'à ne plus être elle-même, s'approcher de la mort, d'abord ne pas mourrir, voir son corps changer, s'enlaidir, se déformer, et son esprit s'éloigner, divaguer. Elle nous présente cette évolution comme un mystère. Il y a de la poésie dans ce récit, beaucoup d'amour aussi, mais l'intellectualisme de l'auteur, le choix du style, la complexité des analyses, et aussi le caractère hyper réaliste des descriptions d'un corps en décomposition mais vivant pourront rebuter. J'admire le talent de l'auteure et sa puissance intellectuelle, mais j'ai du mal à la suivre. Que ce texte est douloureux !
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Homère est morte...

Tant qu’il y a de la vie…





En retrouvant dans une malle les cahiers où sa mère, ancienne sage-femme, consignait ses cours d'accouchement sans douleur, Hélène Cixous comprend que c’est à elle de prendre le relais et de veiller sur elle avec l’attention qu’elle avait autrefois porté aux jeunes accouchées.



En parallèle des cahiers de sa mère s’écriront les siens, journal de l’accompagnement d’Eve, âgée de cent-trois ans, dans la traversée de sa dernière année de vie. Ces carnets donneront naissance à « Homère est morte », prix Marguerite Duras 2014.



C’est le récit d’une année de lutte et d’affrontement avec la mort ; c’est aussi le récit d’une année de vie et l’évocation d’une vie toute entière. Entre horreur et douceur, Hélène Cixous ne cache rien du quotidien et de la lente désagrégation d’Eve qui de mère est devenue l’enfant, qui de la force coule vers la faiblesse et l’impuissance.



Le lecteur est témoin d’une odyssée, d’un long voyage, le dernier qui conduit la fille au bord du gouffre et la mère sur les rives du Styx. Du deuil et de l’après, il ne saura rien ou presque mais il a fait le chemin avec l’auteure et sa mère…
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Rêvoir

Dans ce récit débuté en mars 2020, la narratrice va de bribe de mémoire en bribe de mémoire. Tout fonctionne par association d'idées et celles-ci sont parfois insaisissables.



Le travail sur la langue est remarquable, notamment sur les polysémies et homonymies, mais globalement, son rêvoir - réservoir à rêves comme précieuse source de liberté en ces temps confinés - laisse de marbre. Trop difficile d'accès.
Lien : https://tomtomlatomate.wordp..
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Homère est morte...

103 ans, c'est à cet âge lors du 1er juillet de l'année dernière qu'Eve Cixous la mère de l'auteure est morte. A l'heure où la mort des personnes âgées se déroule loin des domiciles familiaux, sa fille l'a voulue chez elle. Etre deux quand la mort commence à rôder, se féliciter de petites victoires, dire encore et toujours tout son amour à son mère, assister à la dégradation du corps, devenir la mère et Eve l'enfant, réconforter mais également "souffrir de cette fin sans fin".



la suite sur : http://claraetlesmots.blogspot.fr/2014/12/helene-cixous-homere-est-morte.html
Lien : http://claraetlesmots.blogsp..
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Lettres à Shakespeare

Le lecteur de Shakespeare n’est pas tenu à un sérieux académique, cette œuvre nous enseigne bien au contraire les vertus de la digression, elle relance notre curiosité pour les voies d’un savoir non tracé, sans oublier le rire de Falstaff, les incessantes trouvailles d’une énonciation étincelante, et toujours le jeu.
Lien : http://www.nonfiction.fr/art..
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Une enfance algérienne

La nouvelle de Leïla Sebbar est autobiographique et dédiée aux parents de l'auteur, instituteurs en Algérie de 1935 à 1965.



L'auteur, alors petite fille, ne saisit pas tout ce que disent les grandes personnes, elle entend des noms de lieux, des débuts ou des fins de mots, des mots qui la rassurent comme instituteurs ou institutrices, amis aussi fusil, sang, et elle comprend que l'on a tué des instituteurs et institutrices, et que ses parents pourraient mourir.



On parle de caïd musulman / capitaine de l'armée française, on parle de départ, de tout laisser et d'entasser ce que l'on peut dans la Peugeot 202 pour rejoindre la France.



Le 1er novembre 1954, un car est arrêté par des hommes armés vêtus de kaki et le visage couvert d'un foulard. C'est là que des instituteurs et le caïd sont tués, c'est le début des insurrections du FLN contre la colonisation, c'est le début de la guerre d'Algérie.



Dans cette nouvelle où une petite fille comprend avec horreur qu'on tue des gens, qui font le même métier que ses parents, Leïla Sebbar évoque le pays de son enfance, ses lieux célèbres rebaptisés, ses paysages, son histoire et sa compréhension progressive de la réalité de la guerre et de ses dangers.



C'est comme un puzzle dont l'auteur rassemble petit à petit les pièces, qui sont ses souvenirs d'enfant, anachroniques, incomplets, supposés, tendres, apeurés...
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Mdeilmm : Parole de taupe

Les mots de l’âme en revenance, voyage dans les pages, de livres comme de carnets, dans cette biréalité, dans cet au-delà de la langue qui parviendrait de saisir, se souvenir, réinventer les derniers mots. Dans sa prose délicate, précise dans sa très grande attention aux associations sonores et à ce qu’elles peuvent nous apprendre, ardue aussi parfois, Hélène Cixous laisse revenir ses morts, Isaac Rabin, son père, son enfance à Oran, cette faim qui nous anime sans rien terminer et qui, peut-être n’aura pas le dernier mot : Mdeilmm. Mdeilmm, le mot échangé entre Hugo et Shakespeare dans une séance de spiritisme, une communication entre les esprits que le livre, par un travail de sape de taupe, mime admirablement.
Lien : https://viduite.wordpress.co..
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Eve s'évade

Critique de Aliocha Wald Lasowski pour le Magazine Littéraire



Voici le dernier secret : « On vit au sein d'un grand rêve avec ses continents et ses empires. » Hélène Cixous traverse les événements de la vie comme elle se livre à l'écriture : avec la même attention donnée à la rêverie. « Vieux récits et petites idylles, je me livre toute à mes enchantements. » Il y a chez chacun de nous les êtres et les choses, les lieux, les souvenirs, une lumière mystérieuse, un éclat qui attire : la complicité d'un frère, l'image du cousin Albert, le columbarium des catacombes à Rome, la tour de Montaigne. Voici les rues d'Alger, les chats sauvages à Oran. On entend un choeur d'écoliers. Un joueur de flûte s'égare dans la mémoire. Fil zigzagué de l'écriture. « On roule entre les hasards. » Traces chéries d'un rêve, angoisses qui s'engrappent autour d'une vision. Cixous peint sa mère aux magnolias, son visage de pietà, « saisie muée transie tournée traduite ». Elle lui montre le tableau de Moritz von Schwind, Le Rêve du prisonnier, que Freud utilise en 1916 pour sa conférence sur les Kindertraüme. Le rêveur prisonnier est réveillé. Rêvasion, dit Cixous. Entre la « librerie » et la prison. La geôle et le jardin. La ruine et la vie. Langue de rêve, idéale, légère comme une soie. « On ne pénètre pas, on naît rêvé, on est navigué, on est échoué. » À la fois reine et louve, Vierge et Minerve, sainte et Circé, Ève s'évade. La vérité est un songe. Le rêve seul est du côté du vrai.
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Rêvoir

Le rêvoir, c'est le langage nouveau-né. C'est le manque de points et de majuscules parce que les mots se bousculent, comme dans ta tête comme dans un rêve. Tout se précipite dans ma tête aussi et quand j'écris avec toute l'honnêteté de mes pensées, on va à la ligne sous le coup de l'émotion pour un mot pour une



Pause.



C'est ce qui est merveilleux avec ce livre, c'est le premier qui m'a confirmé (moi qui avait commencé un manifeste de l'écriture non conventionnelle) que oui, les histoires les plus pures sont celles qu'on ne peut comprendre qu'instinctivement. Ce n'est plus une histoire, ce sont des émotions brutes qui prennent forme de la manière la plus fidèle qui soit.
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Insister - À Jacques Derrida

Dans ce beau livre (y compris sur le plan de l’édition), Hélène Cixous rend un touchant hommage à son ami, le philosophe Jacques Derrida. Des années durant, sur les bancs de l’EHESS, boulevard Raspail, lorsque ce dernier y donnait ses cours, elle a été présente ; sage écolière attentive et silencieuse, sauf lorsque Derrida requérait humblement son contrôle quand il lui arrivait de faire référence à la littérature anglophone. Après Sartre et Beauvoir, eux aussi auront, à leur façon, formé un couple qui aura marqué l’histoire de la pensée. Combien j’eusse aimé entendre, à leur insu, ces deux-là converser ! Deux brillants esprits ; deux âmes sensibles pétries d’une humanité qu’ils n’auront cessé de cultiver et de faire rayonner ; deux philosophes espiègles aussi…

Dans ce livre, je retrouve la voix d’Hélène Cixous : la même que j’avais entendue à la lecture de Prénoms de Personne (le Seuil, 1974), il y a une quarantaine d’années ; une voix qui donne à penser, qui donne envie d’écrire.

Longtemps, je me suis demandé ce qu’elle voulait dire par "écriture féminine". Je n’ai pas la réponse et, sans doute, n’y en a-t-il fort heureusement pas, car la doxa n’aurait pas manqué d’en faire un système qui en aurait trahi l’essence. Le féminin ne saurait être épinglé ; présence toujours non assignable qui apparaît, réapparaît toujours là où l’on ne l’attend pas ou sous une forme qui, toujours, déroute notre phallogocentrisme…

Pas de réponse théorique donc. Cependant, comme Jean Genet qu’elle citait en exemple, Hélène Cixous a su trouver dans/par l’écriture une voix singulièrement incarnée. Comme c’est étrange de la reconnaître – physiquement - à la radio ! Comme c’est rassurant de se dire que tant qu’on ouvrira ses livres, on continuera de l’entendre nous parler !
Lien : https://www.franceculture.fr..
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