Citations de Hervé Jaouen (275)
L’âme humaine est faible, fût-elle celle d’une mère supérieure.
Un certain Hougo, ou Hugo, Victor si je ne me trompe pas. Il paraît qu’il choisit pour héros des gens du peuple et des malandrins. Comme si la vie des voleurs et des pauvres était un sujet de romans !
Quand la loi traînasse et que la persuasion ne suffit pas, on use de la force.
Ceux qui ne meurent pas s’enfuient, comme les rats d’Hamelin suivaient le joueur de flûte ils emboîtent le pas aux fifres des Anglais, répondent à l’appel des tambours et se réunissent autour des intendants des landlords pour écouter bouche bée leurs promesses de payer la traversée vers les États-Unis ou le Canada.
Isolda était devenue ce qu'elle était en naissant : une celtisante quintessenciée, jeune fille aux yeux gris-bleu et aux cheveux chatain foncé, pas très grande mais joliment briochée, de rondeurs et de carnation. Dès son premier cri, ses parents l'avaient langée dans le Gwenn ha Du -le drapeau breton- et jusqu'à son présent au moulin de Meil Gouspérou sa vie n'avait été qu'une remontée en ligne droite vers des sources que ses parents avaient dû quitter pour prendre l'ascenseur social. (p.195)
Le week-end suivant, les fiancés se déplacèrent à Vannes où les parents de Jean-Luc les reçurent à déjeuner dans leur hôtel particulier du centre-ville. Ils répondaient trait pour trait à l'image que Delphine s'en était faite à partir des réflexions lapidaires et peu amènes de Jean-Luc - "Des vieux cons qui ont toujours voulu péter plus haut que leur cul... Ils nous ont eu sur le tard. Moi d'abord, mes soeurs après, ric-rac sous le couperet de la ménopause et du cancer de la prostate...", chichiteux et perclus de conventions, directifs et péremptoires, courtisans et snobinards adeptes du naming de chef-lieu de canton. (p.31)
Une ville bombardée est plus facile à reconstruire que des vies détruites.
Monsieur le juge d'instruction, comme on gobe un oeuf après l'avoir percé au moyen d'une aiguille, vous avez aspiré notre passé, notre présent et notre avenir. Vous avez gobé notre bonheur.
Je suis une coquille vide, monsieur le juge d'instruction.
Nous sommes tous des coquilles vides.
Or donc, la rentrée judiciaire eut lieu. La justice astiqua son glaive, ôta ses lunettes de soleil, remit son bandeau, s'agenouilla au bord du fleuve de boue et empoigna sa brosse et son battoir à salir le linge propre.
Ce jeu commençait à l'amuser. Il s'y prenait d'une drôle de façon. Nonna, l'homme à femmes. A moins qu'il ne fût réellement transi d'amour, qu'elle l'intimidât au point de le paralyser, ce qui était tout aussi risible. Elle en connaissait des filles qui auraient déjà glissé leur culotte et basculé sur la banquette, les jambes en l'air. (p.52)
Je brode, Catherine. Je suis un secondaire. Mes dialogues qui auraient dû être sont toujours plus beaux que ceux qui ont été. (p.91)
On aurait tort de se figurer qu'une minifamille est unie comme les doigts de la main. Cette main-là, autant le dire tout de suite, ne ressemble pas à celle d'un palmipède. Enfin à la patte d'un palmipède. Il n'y a que deux doigts, aussi différents et aussi éloignés l'un de l'autre que le pouce et l'auriculaire. Entre les deux se situe le grand vide de fréquentations très épisodiques. Une question d'art de vivre. (p. 30)
L'Aurore boréale en cloque, l'assistante sociale qui surveille son bide comme un paysan le tour de taille de son cochon à l'engraissement, et la voilà à point, crac direction la maternité, et Madame pond son oeuf, le dénommé Eddy, comme Mitchell. Si elle avait continué à pondre, tout le hit parade y serait passé.[le premier enfant confié à la DDASS se nommait Johnny] L'oeuf, il a été ramassé tout frais pondu sous le cul de la pondeuse. comme si elle avait accouché en haut d'un toboggan. Poussez, poussez, qu'on lui dit, et hop, elle expulse le produit de la bête à deux dos, et hop il glisse direct dans le couffin de la DDASS. Adieu couvée ! C'est pas beau ça ? (p.54)
Les plus méchantes parleraient d'épouvantail à moineaux fabriqué aux Champs-Elysées : sur ces formes rebondies devant et derrière, sur toute cette chair, regardez donc cette robe cheuc'h [chic], enrichie -pour rappeler la collerette des gilles [la famille nordiste d'Aurore]- d'un mantelet en satin, aussi seyant à cette tête bouffie, à ces petits yeux derrière des lunettes d'écaille, à ces bajoues et à cette lèvre supérieure surlignée de duvet brun, qu'un col de gilet de sauvetage à une tête de veau sur l'étal d'un boucher. [...] Plus tard dans la journée, on apprendrait que la mariée [Aurore] compensait sa mocheté par sa gaieté et son appétit de réjouissances. A table, Aurore n'était pas du genre à laisser sa part au voisin, et jamais elle ne mettait sa main entre une bouteille de vin et son verre, et en pleines libations Madame n'était pas la dernière à pousser la chansonnette cochonne. (p27/28)
Mais il y a encore beaucoup de chemin à parcourir avant d’arriver en 1943. Il ne faut pas que je mange ma tartine avant d’avoir étalé le beurre dessus.
– Ne ressasse pas ce que personne ne pourra plus jamais changer. Le passé est le passé, Yvonne.
il faut bien faire le boulot que la police elle fait pas.
L’Opel Commodore se dirige en douceur vers un petit bourg du Sud-Finistère, qui ne sera pas nommé, où se déclenchent, chaque semaine, au p(tit bal du samedi soir, des bagarres sanglantes
Evel just, un bébé qui entend une langue lui entrer dans une oreille et un deuxième dans l'autre, venu un peu plus grand il les mélange à la sortie...
Paul-Bert étant à l'autre bout de la ville, nous y allions à vélo et, en fonction de la marée, pratiquions ... la pêche à pied. Mon vélo étant celui de ma mère. quel ado d'aujourd'hui accepterait la honte de se promener en vélo de fille, qui plus est enlaidi de sacoches, comble de ringardise ? En ces temps antédiluviens, les marques (de fringues, de godasses, de VTT ) ne dictaient pas le comportement des collégiens. J'étais fier de mon vélo. ses sacoches en carton bouilli se révélèrent précieuses.
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