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Citations de Hugo Boris (200)


Elle n’est pas sourde, elle le devient.
Rester assise dans une baignoire dont l’eau lentement se retire, s’étrangle avec le vertige d’une toupie. L’œil du cyclone qui la regarde, sa peau qui doucement se granule. Une souffrance à huis clos, un silence à crier où l’on entre malgré soi, comme dans la lumière un insecte affolé. Et voila qu’on se promène du lundi au samedi avec les oreilles endimanchées. Deux tympans habillés pour l’enterrement. 
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Il se lève, s'assoit sur le velours où elle se tenait assise à l'instant, et, sans toucher au clavier, cherche la place exacte où elle était, la position de son corps, de ses bras à demi levés, veut retrouver en tâtonnant la position juste, se glisser dans le souvenir qu'il a d'elle.
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La route écrasée de soleil a des brillances. Le parking, un air vacant. Juillet flamboie. Il ne manque vraiment que le bourdonnement d'une autoroute à quatre voies. Elle lève les yeux vers le ciel et les y laisse, pour s'éblouir un peu. Un bleu doucement mécanique, un ciel d'Espagne. Ici, à cette heure, il ne peut rien lui arriver. Cet instant est à elle, on ne peut le lui retirer, une certitude qu'elle a. Il fait si chaud, si lourd, qu'il fait presque mauvais, qu'importe, c'est à elle. La route noire, les pelouses, la mécanique bien huilée des gerbes d'eau, le ciel pâli par la chaleur, tout.
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L'étoile a pleuré rose au cœur de tes oreilles
L'infini roulé blanc de ta nuque à tes reins
La mer a perlé rousse à tes mammes vermeilles
Et l'Homme saigné noir à ton flanc souverain

Arthur Rimbaud
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Chacun veut la loi pour les autres et la liberté pour soi, pas vrai ? L'ensemble compte plus que l'individu.
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Christophe Jacquemart dans le no 16 de Dragon Magazine toujours :
 
Il existe un autre niveau de résistance à la fuite, davantage relié à notre mémoire sociale qu’à notre mémoire biologique. Les êtres humains sont une espèce fortement hiérarchisée, au sein de laquelle le statut est de première importance ‒ notamment chez les individus de sexe masculin. En effet, dans l’environnement prétechnologique, le niveau hiérarchique d’un homme impactait directement sur son accès à la nourriture, au meilleur emplacement et aux femmes. Notre système nerveux n’ayant pratiquement pas évolué depuis cette époque, la lutte masculine pour le rang est un problème grave, considéré avec le plus grand sérieux par les mâles humains. Lorsqu’un homme défie un autre homme, le menace, l’humilie ou le provoque en duel (un simple regard appuyé suffit chez les primates), il leur est à tous deux extrêmement difficile, sinon impossible, de faire machine arrière. Les protagonistes sont littéralement aspirés dans le conflit par un mécanisme psychologique très ancien et très stable. 
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Depuis son entrée dans la police, elle a vu un père enfermer son fils dans un frigo pour le punir et l'y oublier, un détenu des sous-sols du Palais de justice lui cracher au visage pour essayer de lui refiler son hépatite, des Versaillaises à serre-tête de velours se prostituer, une petite vieille de quatre-vingts ans se faire défoncer la gueule pour vingt euros, des pendus se vider dès qu'elle les touchait, des victimes du chômage de longue durée perdre l'argent qu'ils n'avaient pas en jeux de grattage, un chat manger les parties molles du visage de son maître décédé depuis une semaine, les rues de Paris défiler à plus de 110 km/h, les traces de sang d'un collègue sur l'ordinateur après qu'il s'était tiré une balle dans l'oeil, un enfant survivre à une chute du quatrième étage. Elle a vu surnager tout cela parmi les mille tâches ingrates qui forment son ordinaire, elle est allée perdre sa tranquillité d'âme dans les mauvais lieux, obligée de vivre au-dessus de l'étonnement, de tout connaître du pire de l'existence, pour un salaire à peine décent, et elle se demande toujours comment elle n'a pas les yeux sales, stupéfaite qu'ils n'aient pas conservé, dans leur profondeur, le pâle reflet de la misère.
(p. 11-12)
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À la vue de son menton qui s'est mis à trembloter, Magali retient Émilien pour laisser Andrew tranquille. Le vieil homme plonge les mains dans ses poches, extrait des poignées de sable mouillé qu'il a dû ramasser sur la plage, les aplatit grossièrement sur la croix, essaie de combler les rainures des lettres gravées dans le marbre. Il essuie la surface avec le plat de sa manche pour retirer le surplus. Le nom de LEE J. GARNETT apparaît en lettres dorées, alors il sanglote pour de bon, la poitrine soulevée de hoquets.

Fatigué de rester immobile, Êmilien échappe à la vigilance de sa mère et se rapproche. Andrew lui attrape la main et ils restent quelques instants côte à côte, le vieillard et l'enfant, offrant à Magali le spectacle inattendu de leurs deux silhouettes asymétriques, de leurs peines indicibles, l'un devant la tombe de son camarade perdu, l'autre devant celle, imaginaire, de son père disparu.
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Il ne sait pas qu'ils n'ont jamais tiré que sur des cibles en papier. Comment pourrait-il imaginer que, la première fois qu'elle a sorti son arme en service, elle a appelé ses parents pour le leur dire ? Il a le regard vide des torturés auxquels on a ravi à jamais la possibilité de faire confiance.
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Les parachutistes du 82e étaient ébahis de voir les paysans continuer de travailler dans les champs autour de Sainte-Mère-Église bombardée. Elle devine maintenant ce qui peut l’expliquer, surprise par la force d'inertie de l'intendance quotidienne et par l'asile provisoire qu'elle lui offre. Elle ressent un pincement d’anxiété au moindre ralentissement, dès que ses pensées vagabondent. Pendant un arrêt à un feu qui s'éternise, seule dans sa voiture, la question revient toujours : qu'est-ce qu'elle n'a pas vu ? Qu'est-ce qui lui a échappé ? La question est assise à l'avant de la voiture pendant chaque trajet, tapie derrière chaque arbre, chaque haie. A la maison, elle l'accompagne dans chaque pièce. La nuit, si elle entend du bruit dans la cuisine, elle se dit qu'elle va la surprendre en train de chercher quelque chose à manger dans le frigo. Elle porte en elle la question comme elle a porté ses enfants.
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Il meurt un homme par seconde. Il en va de lui comme de tous les autres. Un bourreau n'est pas un assassin. Cet homme est tadjik mais demain il sera angolais, irakien, afghan, syrien, tamoul, kurde, ivoirien. Personne n'a dit qu'il fallait être indifférent, mais on ne peut pas se sentir responsable du sort de chaque être humain qu'on rencontre.
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Il n’est plus tout à fait sûr que le monde existe en dehors de la perception qu’il en a.
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Si il y en a dans ton groupe qui se réjouissent des morts allemands, lui avait-il dit une fois, ou qui viennent ici en conquérants, persuadés d'être du bon côté de l'histoire, tu leur parles des dix mille déserteurs américains qui erraient sur les routes de Normandie comme des bandits de grand chemin pour attaquer leur propre convoi et revendre les marchandises au marché noir. Et si ça ne suffit toujours pas, tu leur parles des trois mille cinq cent femmes qu'ils ont violées.
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On ne connaît pas les gens (…). On ne les connaît jamais vraiment. Même ses propres enfants.
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— S'il y en a dans ton groupe qui se réjouissent des morts allemands, lui avait-il dit une fois, ou qui viennent ici en conquérants, persuadés d'être du bon côté de l'histoire, tu leur parles des dix mille déserteurs américains qui erraient sur les routes de Normandie comme des bandits de grand chemin pour attaquer leurs propres convois et revendre les marchandises au marché noir. Et si ça ne suffit toujours pas, tu leur parles des trois mille cinq cents femmes qu'ils ont violées.
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Elle se sent fatiguée soudain, usée par l'uniforme, usée par la détestation ordinaire des gens. [...] Aux yeux des Français, la police est tracassière, provocatrice, basse du front, fainéante, alcoolique. Aux yeux de ce [migrant], elle est forcément tortionnaire et assassine.
(p. 126)
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On lui coule le bébé dans les bras, elle le pose au creux de son ventre tiède, ouvre la serviette pour sentir sa peau contre la sienne. Elle caresse le duvet de son crâne, dessine la fontanelle. Son petit s'ébroue avec des gestes alentis, écarquille les doigts. Elle lui mange le visage de petits baisers, le goûte. (p. 94)
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Lu dans le no 22 de Dragon Magazine, revue spécialisée dans les arts martiaux, une interview du chercheur Christophe Jacquemart, dont les travaux sont consacrés à une approche cognitive et neurobiologique du combat rapproché :
 
Les prédateurs mammifères s’attaquent en priorité aux individus présentant une apparence malade ou affaiblie, afin d’obtenir de la nourriture avec un minimum de risque et d’énergie dépensés. De manière analogue, les prédateurs humains recherchent une victime facile. Ils évaluent toujours les signes annonciateurs de force et les marques de faiblesse chez le candidat à l’agression. La force apparente agit comme un “feu rouge”, tandis que la faiblesse apparente agit comme un “feu vert”. À ce titre, le prédateur humain fonctionne à rebours des comportements sociaux bienveillants habituels, dans lesquels les marques de peur, de vulnérabilité et de détresse suscitent la réassurance et le soutien ‒ alors que le prédateur n’y voit que des failles à exploiter. Qu’entend-on par signes annonciateurs de force ? Que regardent les criminels chez un inconnu pour déterminer sa réactivité potentielle ? Le tueur en série Ted Bundy déclara dans une interview qu’il pouvait détecter une bonne victime à la manière dont elle marchait, inclinait la tête et, d’une manière générale, à sa« façon de se tenir. Diverses études convergentes ont validé cette assertion et les chercheurs ont observé des corrélations entre certains éléments non verbaux et la vulnérabilité perçue. Sont identifiés comme plus vulnérables que les autres : les personnes qui marchent à trop grands ou trop petits pas ; qui oscillent leur buste d’avant en arrière, de droite à gauche, ou de haut en bas en avançant ; qui balancent leurs bras sans rapport avec le rythme du pas, ou qui ne balancent qu’un seul bras tandis que l’autre reste collé au buste ; les personnes qui bougent avec des mouvements étriqués ou ne remuent que les mains pour s’exprimer (au lieu de faire des gestes amples avec les bras) ; les personnes avec un visage triste, honteux ou inquiet ; les personnes ayant l’air distraites ; les hommes trop maigres. 
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...la noirceur de l'âme est telle qu'on peut toujours trouver un fond de vérité dans celles que l'on reçoit.
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Quand on a des amis comme vous, on n'a pas besoin d'ennemi …
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