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Citations de Ismaïl Kadaré (281)


Les vivants ne sont que des morts en permission dans cette vie trouve dans nos montagnes sa pleine signification.
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Dans aucun autre pays du monde, on ne peut rencontrer en chemin des gens qui, comme les arbres marqués pour être abattus, portent sur eux le signe de la mort.
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Sur la route passent les hommes, passe aussi le bétail, passent aussi les vivants, passent aussi les morts.
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L'espace d'un instant, dans notre perplexité, nous nous escrimâmes à trancher ce qui, des deux choses, était la plus grave: la disparition des oeuvres ou la disparition de soi-même. (p.130)
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Au moins, en ces instants, aurais-je aimé t'assurer (mère de l'auteur) une fois encore que le malentendu entre nous deux non seulement ne m'avait en rien entravé, mais m'avait été plus salutaire que toute compréhension. Car, comme j'avais essayé tant de fois de te l'expliquer, chez les individus, la question du don se manifeste souvent par son contraire: c'est plus souvent une chose qui fait défaut qu'une chose en plus. (p.145)
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Il y a des vérités puissantes, révoltantes, mais qui ne peuvent malheureusement produire d’effet sur le public, car, l’exposé en étant trop touffu, paradoxalement, l’abondance d’explications leur ôte tout pouvoir de persuasion.
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Même ceux qui pour des raisons diverses, contestent l'interêt de telles recherches, conviendront du moins que pour mieux comprendre l'univers artistique de la Grèce antique, il serait bon "d'aller sur le terrain". De faire descendre les statues de leur piédestal, de réstituer les contours du marbre (..) dans l'aire même où vivent aujourd'hui des hommes qui ne diffèrent qu'en partie de leurs lointains ancêtres.

Dans les années 1930, deux Américains spécialistes d'Homère (...) eurent l'idée origniale d'entreprendre un voyage à travers l'Albanie du Nord et le sud de la Yougoslavie, région qui constituait le dernier laboratoire vivant où l'on produisait encore une poésie épique de type Homérique. (...) L'exploration de la poésie orale Balkanique (...) est indispensable à qui veut entrer plus intimement dans la littérature antique. Par leur richesse et leur éclat, ces joyaux éclairent la profondeur des temps et peuvent aider à fournir une réponse à bien des questions que les savants cherchent à élucider, assis à leur table de travail.




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Selon le vieux code albanais c'était un devoir absolu que d'ouvrir sa porte à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit, dès l'instant qu'un visiteur, connu ou inconnu, y avait frappé et avait lâché ces simples mots "Ô maître de maison, reçois-tu des amis ?" Et tout manquement à ce devoir était sévèrement condamné comme un crime. Or c'est précisément cette loi, perpétuée par le coutumier albanais*, qu'Oreste met à profit pour pénétrer dans la maison des Atrides.

*la coutume Albanaise
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Car "les Perses" était non seulement son oeuvre la plus patriotique, un monument à la lutte contre l'envahisseur perse, mais en même temps un monument d'une valeur universelle pour la lutte de tous les petits-peuples contre l'agression des super-Etats ou super-puissances
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Suzana se sentit à nouveau fourbue et quitta le salon en silence. Cette angoisse touchait à sa fin. tant d'agitation intérieure ne préfigurait que sa dissipation toute proche. entre autres signes, le fait que les salons, après être demeurés si longtemps sous scellés, étaient enfin laissés ouverts, confirmait cette fin.
p; 118
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Dans l'annihilation de la vie terrestre de Shakespeare se résume l'essence des relations contre nature du génie avec son peuple, avec nombre de peuples, voire avec l'humanité toute entière.
C'est là plus ou moins une réédition de l'histoire de Jésus, où l'Art aurait pris la place du Ciel, là où le fils de Dieu, incompris des hommes, est monté trouver refuge.
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Sans attendre le dimanche suivant, je me rendis chez Babazot dès le mercredi. De loin, la demeure paraissait paisible, mais, lorsque je pénétrai dans la cour, la scène était si incroyable que j'en restai bouche bée. Face à Babazot qui, enfoncé dans sa chaise longue, tirait sur une pipe, Pero Luka ou "le Grand Manouche", comme on nommait le chef de la famille installée dans les communs, était en train de jouer du violon.
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Jamais je n'aurais imaginé que la soudaine parenté entre Suzana et Iphigénie - une de ces fulgurances aléatoires, aveuglantes et fugaces qui effleurent l'esprit humain plusieurs milliers de fois par jour - grandirait dans le mien jusqu'à y revêtir de telles proportions. L'identification était pour moi si complète que si j'avais entendu prononcer à la radio, à la télévision ou au théâtre une proposition telle que «Suzana, fille d'Agamemnon, etc», cela m'eût paru de prime abord tout ce qu'il y a de naturel. C'était cette identification qui m'amenait soudain à voir tout un pan du drame antique à travers le prisme de la situation de Suzana et de son père: les rapports Agamemnon/autres chefs, les luttes de pouvoir, les renforcements de positions, la raison d'Etat, l'application de châtiments exemplaires, la terreur...
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Comment te transformeras-tu en Asie, Toi qui es si belle, mon Arbérie?
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Durant cette période, une multitude de prophètes errants, de voyants épileptiques proclamés sacrés, de derviches loqueteux, de prêtres franciscains, de lépreux évadés de l'asile exhibant leurs plaies comme autant de signes prémonitoires, et de vagabonds miséreux allaient et venaient en tous sens. Le vendredi, la secte des rufaïs donnait ses spectacles horrifiants dans les cours des téqés, avec ses derviches qui se transperçaient de couteaux et de longues épingles. Les évangélistes, eux, déferlaient sous des pancartes portant des devises et des proverbes pacifistes. Une organisation secrète de brigands envoyait des menaces un peu partout. Des foules de pèlerins se dirigeaient vers l'église de Saint-Antoine, où, disait-on, après quatre-vingts ans, un œil du saint avait de nouveau tressailli sur l'icône. Au turbé du derviche Hatidjé également, un miracle s'était produit, mais un miracle effrayant : l'on avait découvert un matin sa main peinte en jaune tachetée de points rouges sur la voûte.
Troubles et affrontements avaient surtout lieu aux confins de régions ou de villages de religions différentes. À plusieurs reprises, des processions religieuses – les unes portant des icônes et des statues du Christ, les autres, des torches et un cheveu du prophète enfermé dans un écrin – s'étaient croisées, et leur rencontre muée en massacre. Mais on observa aussi des duels d'exaltation mystique, comme celui qui se déroula au lieu-dit du "Tombeau de Doruntine", que se disputaient deux zones de religions différentes et où, pendant vingt-quatre heures, des foules catholique et musulmane suivirent le tournoi macabre entre la religieuse Agnès, qui, ayant vu en rêve la mère de Georges Kastriote, avait consenti à se faire crucifier vivante pour démontrer la supériorité de sa croyance, et le derviche Ahmet, qui, pour la même raison, avait accepté d'être enterré vivant.

Lorsque, au bout de vingt-quatre heures, dans la fièvre, les larmes et l'écœurement de milliers de personnes, on descendit la religieuse de la croix et l'on déterra le derviche, tous deux étaient encore en vie, elle, pâle comme la cire, lui, le visage terreux, mais ni l'une ni l'autre n'était en état de parler, de sorte que le défi fut reporté.
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Entre-temps, afin de pouvoir s'orienter, les consuls reçurent chacun de leurs centres des données complètes sur les sens symboliques du baklava, sur les raisons pour lesquelles on l'offrait, sur les différentes manières dont il était fait suivant les cas, sur le nombre de ses abaisses et sur les variations des dimensions du plateau. Les indications devinrent encore plus claires lorsqu'elles furent accompagnées de notes sur divers baklavas historiques : le grand baklava de cent quarante abaisses qui avait marqué le tournant dans la politique de l'Empire turc envers Napoléon Bonaparte ; le baklava lilliputien de trente et une feuilles et d'un diamètre inférieur à deux empans qui avait annoncé le refroidissement des rapports avec le tsar ; le baklava de dimensions moyennes qui avait consacré le statu quo avec la Russie ; le baklava sans sirop de sucre adressé en 1741 à la Pologne, le baklava sans noix envoyé au shah de Perse, et jusqu'au baklava brûlé envoyé à l'archevêque des Arméniens à la veille de leur extermination.

Plus sombre encore étaient les indications concernant le rôle joué par le gâteau dans les événements intérieurs de l'État. Ainsi la nomination ou la destitution des vizirs était-elle, dans la plupart des cas, annoncée par un baklava, lequel précédait également la découverte des complots, les tournants politiques, la victoire d'un clan sur le clan jusque-là au pouvoir, etc. Puis venaient les baklavas perfides et trompeurs, tel celui qu'avait reçu en 1710 le grand vizir Numan Qyprili, une semaine avant sa chute ; le baklava piégé, comme celui, colossal, du banquet de la fête de Monastir où avaient été massacrés, en 1832, les chefs de l'Albanie ; les baklavas de la colère ouverte, de l'ironie, du mépris, du défi avant l'attaque, et jusqu'aux baklavas empoisonnés, dont certains l'étaient ouvertement, comme celui que le sultan avait envoyé au grand vizir Hajrédin avec cette recommandation : "Mange ce baklava tout de suite : et si tu le trouves doux, tel sera ton destin, et si tu le trouves amer, tel sera encore ton destin."

Ces précisions circulèrent donc dans la petite capitale, et cela avec une telle intensité que Dirk Stoffels regroupa ses notes de deux à trois semaines sous le titre commun de Baklavakroniek. "C'est alors que nous comprîmes, écrivit-il, qu'une partie de l'histoire, pour ne pas dire l'histoire entière, de l'empire médiéval des Ottomans était concentrée dans ce plateau qui nous avait d'abord fait sourire. Et nous comprîmes également – et c'est là l'essentiel – de quel univers horrifiant le pays où nous nous trouvions s'était détaché avec tant de peine. Je tiens à affirmer que je ressentis une grande compassion pour ce pays, l'Albanie, qui par sa petitesse ressemblait au mien, la Hollande, auquel Dieu, dans Sa miséricorde, avait réservé un meilleur destin."
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Le printemps était venu. Des fenêtres du deuxième étage je regardais retourner les cigognes. Voltigeant autour des cimes des minarets et des hautes cheminées, elles cherchaient leurs anciens nids et, aux ellipses qu'elles dessinaient dans le ciel, on devinait aisément leur tristesse et leur surprise de trouver leurs nids endommagés par les déplacements d'air causés par les explosions, par le vent et la pluie de l'hiver à peine écoulé. Je les observais en songeant que les cigognes ne peuvent jamais imaginer e qui peut arriver à une ville durant l'hiver, pendant leur absence.
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Incipit :
Il avait froid aux pieds et, chaque fois qu'il remuait un peu ses jambes engourdies, il entendait les cailloux crisser plaintivement sous ses semelles. À la vérité, la plainte était en lui. Il ne lui était jamais arrivé de rester aussi longtemps immobile à l'affût derrière un talus, au bord de la grand-route.
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En observant les balluchons bigarrés qui contenaient sans doute le trousseau de la mariée, ils se demandait dans quel coin, dans quelle boîte, dans quelle poche, dans quel gilet brodé les parents de la jeune mariée avaient placé "la cartouche du trousseau", avec laquelle, selon le Code, l'époux avait le droit de tuer sa jeune épouse, si elle tentait de le quitter.
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Le représentant des anciens une fois parti, Gjorg demeura comme engourdi dans un coin de la maison. Il avait devant lui trente jours sans danger. Puis il serait guetté de tous côtés par la mort. Telle une chauve-souris, il ne pourrait plus se mouvoir que dans l'obscurité, fuyant le soleil, le clair de lune et les torches.
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