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Critiques de Jacques Ancet (16)
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L'éthique démontrée selon l'ordre poétique

J'ai rêver d'une alliance entre le verbe

et l'espérance,même si la vie n'est

pas mûre pou nos rêves

et les peersonnes plus difficiles

que la volonté.

Je connais bien les Choses du Monde,

et la lentille polie m'enseigne

la manière dont les êtres fatigués

sse brisent contre le temps,

mais j'ai rêvé.



Sorti dans la collection Planètes au édition Caractères,Car voici un livre, comme il en existe très peu, qui rend en quelque

sorte à la philosophie la monnaie de sa pièce. Dans la mesure où ce n’est plus la philosophie qui, du haut de son savoir,

viendrait donner un sens à la poésie, lui expliquer en quelque sorte ce qu’elle ne sait pas qu’elle dit ou fait, mais où

c’est la poésie qui investirait la philosophie de sa puissance sensible et la ferait non plus seulement comprendre

intellectuellement mais éprouver physiquement.

Si vous appréciez les bons textes les instants poétique,ce lvre est pour vous aussi !

on se retrouve très vite pour de nouvelles chroniques.

d'ici la de bons môments lectures

philo
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L'identité obscure

Dans son très beau recueil L’identité obscure, Jacques Ancet aborde dans une écriture attachante et sensible l’altérité du regard, l’envers de notre perception des choses. Treize chants composent ce livre, treize chants dans lesquels la pensée du poète œuvre à rassembler les preuves tangibles de l’existence, d’une vie telle qu’elle apparaît devant notre regard et telle que nous la percevons.



Comme dans un rêve éveillé, la pensée oscille, se disperse puis se retrouve, comme si elle se tenait au bord des choses et des êtres, tout au bord du temps. Les mouvements, les images se succèdent, faits de convergences et de divergences, comme placés dans un mouvement perpétuel d’attraction et d’opposition, s’étirant dans l’unique et le multiple. C’est dans tous ces intervalles de contraires, dans tous ces interstices de la parole et du souffle que naît la beauté sombre et lumineuse de L’identité obscure, dans la très belle écriture de Jacques Ancet.



[…]

l’appel

qui traverse le corps de si loin que la mémoire

n’en revient plus, on deviendrait le centre du cercle

et sa circonférence, le jour tombé, levé,

un seul éclat trop éblouissant pour qu’on le dise,

des fragments, c’est tout ce qu’il en reste , on les ramasse,

ils brillent dans les yeux et c’est l’amour, la beauté,

sur le ciel le jour s’en va en longues traînées mauves,

tout est immobile, la nuit monte des collines,

deux lumières brillent à travers l’encre des feuillages,

quelque chose est là entre ce qui vient et s’en va,

un fil tendu sur lequel il faut toujours marcher,

on avance, on vacille, comme le peu de jour

qui s’éteint, on souffle sur lui pour qu’il brille encore,

on écoute tout proches, les battements du coeur,

rien là qui vous appartienne , l’obscur d’une poche

invisible, tenace, fragile, on cesse de

respirer pour entendre son murmure muet,

son morse, noir sur blanc, ses chuchotements, ses voix,

il n’y a déjà plus que lui, on a disparu.



(extrait du Chant VIII)
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L'imperceptible

Laisser venir à soi l'imperceptible, cette rumeur du dehors, cette part furtive et imprévue d'un mouvement, d'une présence. Dans son recueil L'Imperceptible, Jacques Ancet livre, dans une une écriture intime et introspective, sa réflexion sur ce quelque chose étrange et invisible qui furtivement effleure notre conscience, ce mouvement de l'esprit qui vacille entre ombre et mémoire.



" On regarde, on ne sait pas

pourquoi déjà. Ce n'est ni

la feuille qui tombe ni

l'ombre qui vient ni la nuit

ni même le temps ou l'âge.

C'est là, pourtant ça s'en va,

ça s'éloigne, simplement,

sans qu'on puisse le comprendre.

Ça ne va plus être là,

qu'y faire, ça se retire. "



Ce peu de choses, ce presque rien qui est là et se perd au bout du sens, c'est l'imperceptible des choses, cette part infime de la vie qui vient à l'improviste nous submerger. Un silence dans la voix, une absence dans le regard, un chant d'oiseau sans oiseaux, le rire d'un enfant dans la cour, la lumière oblique du soleil qui traverse la pièce, un sentiment de tristesse quand vient le souvenir,... Tout un oublié du silence et de l'image.



" Plutôt cette déchirure

de chaque instant. Quelque chose

germine et meurt. Une absence

qui est présence ou l'inverse.

Le feu brûle dans le froid.

Ce qui s'achève commence.

On voudrait pouvoir le dire

mais c'est toujours à côté

ailleurs ou entre. Jamais

dans ce jardin, cette rue. "



Jacques Ancet recense les formes, les sonorités de cet imperceptible. Dans le style lumineux et réservé qui est le sien, le poème s'empare de l'instant et devient l'expression d'une sensation pure, fragile et belle. Tout est là sans être là, tout est dit sans être dit. Tout est poésie.



.
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La ligne de crête

La Feuille Volante n° 1211

La ligne de crête – Jacques Ancet – Tertium Éditions.



On peut être ému par un être, par une chose ou par un paysage au point d'en parler avec des mots sur du papier ou des couleurs sur une toile. Ici c'est une montagne, masse de pierre et de terre qui domine un paysage de plaine. C'est un endroit qu'on voit de loin, que d'emblée, l'auteur tente de définir simplement : c'est un lieu, « un espace où habiter », quelque chose avec quoi on « commence » où on attend (« C'est peut-être l'attente qui fait le lieu »), sans peut-être savoir très bien quoi, une forme ou des nuances colorées à quoi on prête une signification personnelle qui font appel au soi profond, au souvenir (« quelque chose comme un grain d'enfance ») au point d'en être fasciné. Elle un côté sacré et mystérieux, dangereux et secret qui a toujours eu, pour les humains un côté fascinant. Sans nous révéler son nom, se contentant d'évoquer Cézanne qui en immortalisa une célèbre en moult exemplaires, il l'évoque dans un tourbillon de vie, de fragrances, de sons et de silences, de pierre et d'herbe mêlées, de couleurs et d'ombres, de cassures et de marqueterie des prés qui constituent un cadastre tourmenté où l'oeil se perd. La nommer serait pour lui réducteur et il se contente de noter qu'elle domine une ville, qu'elle abrite l'activité parfois dure et ingrate, mentionnant les toits roses, le tintement des cloches, les façades crèmes des pavillons mais aussi la boue des chemins, le remugle des écuries, de parler de la vie qu'elle suscite par les eaux qui naissent d'elle, de révéler les nuages qui parfois cachent « la dispersion d'images » qu'elle donne à voir quand le regard migre vers le sommet, comme une allégeance qui inspire l'humilité et où alternent le silence et les vibrations de l'air. Parler des choses c'est les faire vivre, les faire exister face à l'indifférence ou la banalité. Il concentre son attention et son imagination sur la ligne de crête, une bordure de quelque chose, une limite « déchiquetée »entre le ciel et la pierre où se conjuguent les couleurs et les formes patiemment tressées qui festonnent le paysage en dents inégales et acérées de lumières et d'ombres, de forêts et de champs que cachent par moments quelques liserés de nuages. La montagne alterne le minéral et le végétal dans l'horizontalité ou la verticalité des couches de calcaire, indéchiffrables graffitis où se bousculent des nuances que les mots, entre pic et vallée, « balcon incurvé du sommet » et contrebas, peinent parfois à traduire. On peut y lire une géologie millénaire ou un instant fugace, fragilité et contingence de notre existence humaine. Les hommes naîtront et mourront dans la permanence de sa stature qui demeurera après eux. Dès lors ce panorama devient espace et une pénétration subtile s'effectue entre le narrateur et le paysage qui fait naître chez lui une manière de compréhension, un attachement malgré l'impuissance qu'il ressent mais qui est pour lui aussi une motivation.



Pour le spectateur attentif, cette vision suscite des échanges silencieux et complices, comme un message qui lui serait adressé à lui seul parce qu'il est seul à pouvoir le déchiffrer au-delà de la banalité des choses quotidiennes. Puis c'est l'ascension entre la résonance des falaises et le crissement des pas sur les cailloux de la pente. Il prend conscience que marcher et écrire c'est la même démarche, la même découverte de choses nouvelles dans le vertige ascensionnel si semblable à celui de la création littéraire. On entre dans un décor comme on entre dans une image, « les mots et les choses brillent du même feu » et la voix de l'inspiration progresse elle aussi au-dessus du vide comme le marcheur qui connaît la fatigue, le froid et le doute. Marcher et écrire c'est fuir avec pour but cette ligne de crête comme un objectif à atteindre en délaissant le monde d'en bas, celui des villes et des gens. En marchant comme en écrivant on va au-devant des souvenirs, ceux de l'enfance de ses mystères et de ses fantasmes, ceux de l'adolescence et de ses projets souvent trahis par la timidité. La vie dévide son fil dans le déroulement des saisons et la fuite du temps avec au bout la mort qu'on combat avec l'écriture



Je remercie Babelio et les éditions Tertium de m'avoir permis de découvrir ce texte poétique qu'il faut lire à haute voix pour en goûter toutes les intonations et les nuances, l'ambiance particulière que les mots distillent. Cette lecture se doit d'être lente, avec de longs moments de silence, de retours en arrière et de pauses, ce qui donne une autre dimension à ces quelques cent pages qu'il faut honorer d'une grande attention pour apprécier toute l'émotion et le dépaysement qu'elles suscitent.



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La ligne de crête

La montagne (et dans la dernière partie, il dit l'histoire de cette attirance), cette montagne là dont il ne donne pas le nom mais qu'il regarde, qu'il essaie de connaître en tous ses détails, en tous ses aspects, selon les heures, le temps, la vision qu'on en a depuis l'emplacement où s'est arrêté le corps, et même la carte, les noms, l'histoire, pour la dire, pour que ses mots soient la montagne comme Cézanne voulait cerner la montagne Sainte Victoire.

Les moments où il est encore à distance. L'approche délicate, précise, entêtée de tous les aspects, toutes les façons de la connaître, son silence, les bruissements, les senteurs, la quête de cette chose indispensable et effrayante, la beauté, et le corps en mouvement qui s'oublie dans l'effort pour monter. (Et, toujours, dans le même mouvement que la marche l'écriture, la phrase, qui doit être serpentine comme le sentier, en un élan sans cesse renouvelé.) Jusqu'à arriver « dans » le motif, dans la montagne que l'on tente de mettre en mots. Y cheminer sur la ligne de crête. Et puis redescendre vers le village, la grande ville un peu plus loin.

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La ligne de crête

Je suis en général toujours un peu perplexe devant trop de descriptions dans un roman.



Ce livre, ce n'est pas un roman et ce n'est que descriptions. Mais c'est beau et émouvant. Peut-être parfois un peu difficile pour ma concentration volatile, plus facile à lire dans un bus que devant la télé ! Vous me direz, pourquoi regarder la télé quand on se promène à la montagne.



J'ai parfois cru retrouver la poésie de...Taniguchi ! une certaine similitude dans la façon de rendre hommage aux paysages majestueux.



Je remercie Babelio dans le cadre de son opération masse critique, ainsi que Tertium Editions, qui au passage avait intégré deux marque-pages de la maison et une carte postale dans son envoi.



Jacques Ancet est un auteur à découvrir.



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La ligne de crête

Lorsque j'aborde une œuvre dont je ne connais pas l'auteur, je commence par lire les premières lignes, parfois aussi les dernières, comme pour en«goûter»l'écriture. Je découvre Jacques Ancet et ne dispose que de brèves informations au dos de La ligne de crête: né en 42, originaire de Lyon, vit en Haute-Savoie. Je lis la première phrase, puis la première page, la deuxième...

La thématique est annoncée d'emblée: comment appréhende-t-on un lieu, comment la géographie interagit avec nos parcours personnels. Je suis captivée par les mots. Ils trouvent en moi un réel écho, comme j'imagine en n'importe quel autre lecteur. Le thème est universel. Nous faisons tous l'expérience à un moment ou à un autre de notre vie d'un attachement particulier à un lieu qui nous renvoie à notre enfance, à une rencontre, ou à un moment précis de notre existence.

La ligne de crête va donc rendre compte de ce qui lie l'auteur à sa Haute-Savoie. Il va se livrer, nous livrer les secrets de son vécu, de l'étrange alchimie qui opère alors qu'il aborde un pays familier. La ligne de crête, véritable tableau vivant, est une évocation des couleurs, silence, lumières, rythme, et sons propres à la montagne. Son récit n'est pas descriptif. Ses mots ne nomment pas. Son écriture fait surgir l'émotion comme par magie. Elle suit le mouvement du regard sur la montagne, elle-même en changement constant. L' impermanence habite le texte.

Jacques Ancet nous invite à errer, plus qu'à randonner, au pays de l'écriture. Il nous entraîne dans une très belle et fraîche échappée, car il possède l'art d'éveiller les sens, sans quoi rien de cela ne serait possible.
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La ligne de crête

Sublime jeu de lumières, de couleurs et d'espaces sur la montagne, toutes les impressions liées à sa vue, aux chemins qui la parcourent, toute la marche et l'écriture pour parvenir jusqu'à elle apparaissent dans ce très beau recueil de Jacques Ancet « La ligne de crête ».

Au gré des pages et d'une prose subtile se dessine cette bordure de l'instant et du lieu qui porte le regard, le souffle, le coeur, le corps éprouvé du marcheur, jusque vers l'étonnement, l'émerveillement.



La montagne porte en elle une intensité, la part immuable du temps et de l'espace, le revers de notre vie de passage. Elle porte en elle toute notre "solitude première face aux forces soudain hostiles d'une nature dont l'indifférence, cette autre face de la beauté, vous réduit à n'être rien que l'éphémère d'un souffle et d'un regard."



Lumineuse et sombre, accueillante et hostile, l'auteur décrit avec beaucoup de grâce et d'humilité tout ce que lui inspire la montagne, ce décor massif qu'il observe chaque jour de sa fenêtre et qu'il va parfois gravir. Cette vue de la montagne agit comme une promesse à venir, la nostalgie de "quelque chose comme un grain d'enfance."

c'est un beau chemin que la très belle écriture de Jacques Ancet, celui qui mène à l'infinité des paysages et de leur poésie.
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La lumière et les cendres : Milonga pour Juan..

Maintenant on ne sent rien

il faut tenir on est seul

la neige autour étincelle

le ciel s'ouvre c'est un vide

ou le retard se dissout

le présent est un désert

nul ne vient nul ne s'éloigne



Vous y trouverez juste en dessous sa traduction Espagnol



Un livret regroupant quelques-uns des plus beaux textes de Juan Gelman,

des textes chargés d'émotion.

Ce livret écrit à quatre mains, avec l'aide de Rodolfo Alonso pour la traduction, fait bien ressentir et ressortir l'émotion

de ce grand homme de l'écriture que fut Juan Gelman.

Une présentation simple mais un contenu très riche, voilà ce que nous proposent les éditions caractères,

honnêtement j'ai apprécié de me relaxer en lisant tranquillement ce livret, je vous souhaite la même chose.

A bientôt pour de nouvelles chroniques.

Philo
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La tendresse

Le premier texte : «un travail du noir» : savoir que c'est là, présence devinée, recherchée, appel entendu, à côté de la femme aimée, des enfants - avancer dans cette quête, le souffle retenu, haché par le texte qui progresse en groupe de mots attentifs – et, avec crainte, depuis l'obscur, aller vers cette lumière, tenter de connaître, de saisir. Le calme qui vient avec le jour, la présence qui se devine, indistincte encore et que le jour efface, mais qui s'approche, qui va émerger, depuis les profondeurs de l'histoire humaine, des recherches des hommes de toujours, en accouchement/éloignement. Et les mots, toujours, dans la quête. C'est tendu et très beau.



Le second : « l'air » : brèves strophes entre des textes avec cette même écriture haletante : l'air entre « je » et toi l'enfant, l'air respiré, l'air et la solitude, l'air qui sépare, ce peu d'air entre nous.



Le troisième « la tendresse » : comme « un travail au noir » longs paragraphes-chapitres, lyrisme tendu, mots pressés et plages de bonheur : garder l'enfance de l'enfant, les instants (et c'est plus que ça, un besoin impérieux, tendresse et altérité, abolir ce qui fut maladroit, retrouver l'immédiateté de la tendresse qui est chose immense, ce qui est entre le « je » et le, puis les, fils, à ce moment de leur fragilité et différence – et le souvenir du père
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la voix de la mer

lecture entreprise au fil des mois, texte par texte, avec cette attention agréable qu'ils demandent, et puis délaissée pour d'autres. Mais là, plongée délicieusement appliquée dans "un homme assis et qui regarde" et "la voix de la mer" et comme chaque fois, celui en cours me semble primer, être plus évident. Comme "la voix de la mer" : et mes petites notes de béotienne : La philosophie et la poésie, leur parenté, deux portes pour connaître, leurs différences, une autre appréhension du monde... L'écriture refermée sur elle, autre, au risque de l'obscurité et d'un formalisme.. Le réel plutôt que la réalité... le retour à Deleuze, Spinoza, Bergson et puis la philosophie chinoise, et enfin une écriture poétique
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Le jour commence

La lecture d'un recueil de poésie agit toujours comme une parenthèse placée au coeur du temps, ouverte sur le seul instant et les résonances secrètes que portent en eux les mots. J'ai particulièrement éprouvé cette impression à la lecture du livre de Jacques Ancet, le Jour commence.



Je connaissais déjà la poésie de Jacques Ancet au travers de plusieurs de ses recueils mais aussi de ses traductions faites de l'espagnol des oeuvres de Saint-Jean-de-la Croix, de Roberto Juarroz ou encore de Jorge-Luis Borges et d'Alejandra Pizarnik.

Le jour commence est le premier volume d'une série d'ouvrages consacrés à l'oeuvre poétique de Jacques Ancet. Il regroupe des poèmes écrits de 1966 à 1976



La durée et le rythme sont des composantes importantes de son écriture. Chacun accentue le sens et la tonalité des mots et fait naître des images évanescentes au charme envoûtant.



« souvenons-nous toujours de la lumière

sur les fleurs roses du pêcher

de la lenteur des gestes

une main sur un front

de la lenteur des choses

cette lenteur terrible de la vie

comme une boucle qu'on dénoue »



Pris séparément, chaque vers porte en lui une image, une sensation. Accolé progressivement à d'autres, il créé un récit d'une troublante beauté, comme un sens qui se démultiplie et fait naître le poème.



Dans des textes de longueur variable, le poète s'enquiert de l'intime, du temps passager, d'un geste simple, d'un jeu d'ombres et de lumière, des rumeurs du dehors, de la présence d'un objet pour faire advenir les mots, les sonorités les plus sensibles.

Le corps, les mains, les yeux, le son d'une voix, un paysage lointain ou encore un arbre dans le jardin, une saison finissante, le vol d'un oiseau, sont quelques-uns des réceptacles les plus utilisés par Jacques Ancet pour rendre compte des nuances, des changements, des surgissements de couleurs, de temps et de silences.



« et chaque fois que nous posons les yeux

sur la page quelque chose

se dérobe à nous

de l'incroyable beauté des choses

le temps à peine de le dire

la montagne brûle et s'éteint

la rose dans la haie retient le silence

comme la lèvre son haleine

les oiseaux dans leurs cris

semblent se disputer

ce que le vent en passant a laissé

de l'éphémère parfum d'un monde qui s'en va »



Même si les textes de la fin du recueil tendent vers l'abstraction, où les vers semblent se désagréger, les mots se séparer les uns des autres, ils restent tous empreints de nostalgie, de fatalité mais aussi et surtout d'émerveillement, et rendent compte d'un précieux rapport au monde.



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le silence des chiens

j'ai lu d'une traite, il y a quelques jours, "Le silence des chiens" de Jacques Ancet, emportée, saisie, comme par une lame, dans le mouvement incessant de la vie, la nature, la saisie sensuelle du monde, le calme ordinaire contaminé par l'inquiétude et la charnelle douleur des tortures, celui qui écrit et celle qui souffre, le glissement des plans, les sons, tout cela qui court, se modifiant peu à peu, au fil de la longue phrase de 161 pages (et je freinais parfois, avec des petits retours).
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Puisqu'il est ce silence

N°435– Juin 2010

PUISQU'IL EST CE SILENCE – Jacques Ancet – Éditions Lettres Vives.



Le poète, essayiste, linguiste, traducteur de l'Ancien Testament, théoricien du langage poétique, Henri Meschonnic est mort en avril 2009 à l'âge de 76 ans. Il fut aussi un polémiste, suscitant de vifs débats dans le monde littéraire. Ses prises de positions autant de ses écrits de création étaient des moments forts. Autant dire que le personnage ne pouvait laisser indifférent. Ce recueil de textes lui est dédié.



Il est l'absent, mais un absent bien présent quand même (« On l'entend. Il parle. Dans le silence. Puisqu'il est ce silence. Sans lèvres, il parle » - « On le sent glisser, reculer, se retirer »). L'auteur sent sa permanence dans la nature, partout (« Il est dans le marronnier monté plus haut que le ciel, dans les deux filles qui passent, dans le bougé des ombres, le roucoulement des pigeons. ». « On le cherche dans le foisonnement de l'herbe, le frissonnement des feuillages, la face noire de la montagne. ».



Il a d'abord été une voix, à la fois forte, pertinente, éclairante (« Combien sa voix portait celle qu'on a parfois. Combien elle la rendait plus nette, plus sûre. »), une voix porteuse d'un message, permanente malgré l'absence (« On se dit que c'est dans sa voix plus encore, parce qu'elle est là, toujours, quelque part entre mémoire et jour gris, dans cette force silencieuse qu'on sent si proche, comme une brusque éclaircie »), une voix omniprésente malgré tout, faite de couleurs, de vibrations (« Sa voix ressemble aux traînées jaunes sur les champs. Elle est partout, dans les trilles du merle, le grésillement des feuilles. Dans l'air qui passe, dans l'odeur de la terre, le voyage de la lumière. »)

Il était aussi silence, parce que les mots appellent leur contraire, la réflexion, la méditation, le recul nécessaire face au monde (« Son silence roulait devant lui, sa boule de langage où se mêlent plissements hercyniens, décharges, crépuscules, douleur et cet imperceptible où il posait l'oreille. », il est maintenant entré dans un autre silence et on souhaite que les mots, ceux que les autres forment pour lui, en sa mémoire, l'y accompagnent...



Malgré la mort, il est aussi un sourire (« Dans l'impossible retour, dans l'impossible demain, juste là, au bord, sur le fil du présent, il sourit, il vacille, il sourit. »), un visage qui s'est imprimé dans notre mémoire (« Je fais visage de tout, dit-il. »), une vie arrêtée (« Il est dans un instant suspendu, un élan arrêté »), un rire aussi (« On entend son rire comme une grésillement, une écume brève. »), un rire qu'on entendra toujours (« Son rire scintillera dans la flaque de soleil, passera de fleur en fleur, d'aile en aile. »). Il est la complicité avec sa femme, par amour (« Quand on dit lui, on les voit tous les deux... L'écriture continue l'amour, dit-il. »



Mais ceux qu'on aime restent ici malgré tout. Lui est encore là, obstinément présent « On le voit, petit poucet perdu dans la forêt des jours qui sème devant lui les petites cailloux de ses paroles. ». Malgré la souffrance du corps, il reste une voix « Elle dit ce qui passe et demeure », une présence, un sourire et sa présence à lui rayonnait. L'auteur file la métaphore pour montrer combien sa présence était rassurante, apaisante : «  Tout autour ses cheveux faisaient un soleil blanc. On y voyait mieux. ».



En guise de conclusion l'auteur note :« On se dit qu'on pourrait peut-être le rejoindre, avoir ses paroles dans la bouche et passer avec lui de vie en vie, de monde en monde. »









 Hervé GAUTIER – Juin 2010.http://hervegautier.e-monsite.com
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Vingt-quatre heures, l'été

Dans ce très beau recueil de Jacques Ancet, les heures sont des pages et entre les lignes et les mots, c'est tout l'été qui doucement se répand. Tout un partage d'ombres et de lumières, de sons et de parfums, une abondance d'impressions qui s'offrent à la conscience du lecteur.



Une phrase, un passage, accrochent l'attention, font remonter des souvenirs, des impressions diffuses. La lecture se fait plus lente, l'esprit s'égare, reconstitue en lui par touches successives des sensations passées. Ce recueil nous fait écouter et regarder l'été comme on le ferait de notre enfance, de moments d'insouciance et de rêveries.



Dans "Vingt-quatre heures, l'été", la saison avance lentement au rythme des heures, sur cette horloge imaginaire fait de nuances, de variations.

 

"On ne cherche plus, on est

là, on écoute le vent,

son bruit de mer dans les feuilles

ou dans l'enfance. le corps

va rentrer dans la douceur

de ce qui trouve un nom.

Entre le jour, son envers

il y a comme une fissure,

aux vitres comme des flammes

qui ne brûlent plus. Les mains

reviennent vers les objets,

les visages vers leur image.

Le souffle de l'éphémère

à sept heures tisse les

ombres, les détisse. Un peu

de cendre se mêle au bleu,

au présent un peu d'oubli.

Le soir ressemble à de l'eau :

on l'attend, on ne le voit pas."



Au gré des pages de ce livre de Jacques Ancet, on oublie le temps qui nous définit, le temps qui nous échappe. Un autre lentement le supplante qui nous enrichit, nous apporte le présent (le cadeau) de notre passé, de nos souvenirs enfouis.

Il n'est pas de fin à l'été, aux saisons, au temps qui passe. Il n'est pas non plus de fin à l'intarissable bienfait de la poésie.

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Zone franche

« La poésie est un art de la mémoire, mais aussi de l’oubli ». Au travers de ce propos, Jacques Ancet définissait les contours de son écriture, plus largement aussi ceux de la création poétique et de sa perception. Art éphémère, du temps qui passe, la poésie est là bien présente mais sait se faire oublier, qui au travers des mots de l’écrit saisissent le lecteur pour mieux s’éloigner de lui, une fois le livre refermé et les jours passant.



C’est cette part de brièveté, d’impermanence de l’écrit poétique que Jacques Ancet met en évidence dans son recueil Zone Franche publié aux éditions Tarabuste. Dans des poèmes écrits de 1974 à 1980, le poète s’essaie à une écriture épurée, quasi minimaliste, qui tend vers la recherche d’une origine, d’une mise en résonnance de l’écrit poétique.



« y aurait-il autre chose



ce bleu derrière

les mots

ces veinules immobiles

comme les signes sur la page



ce blanc

ce cri

sans mot

sous l’ombre »



Le texte semble renfermé sur lui-même, avec son sens abstrait, son absence de rythme, ses sonorités contenues,… Seul accès à cette poésie, seule attitude pour en saisir la plénitude, être



« L’homme

penché

qui regarde

germer les mots

sur la page terre »



Dans des textes courts, l’écrivain et le lecteur, à voix hautes, murmurées ou silencieuses, s’entendent dire des mots, des couleurs, des mouvements, tout le dénommé et le perçu de la page. Ici, le mot se substitue au vers comme unité du poème. À lui seul, est accordé le temps d’un rayonnement et d’une résonance possible. Isolé, le mot se révèle, avec lui tous les éléments de sa signification, toute sa charge d’évocation, mais aussi la potentialité d’un lien, celui qui le relie aux autres mots et fait s’ouvrir le germe du poème.



« autre chose au bout des phrases nues

Chemin très lent dans le bleu tiède

(branches blanches)



Montrant le vide



Le silence »



Le mot, cet impensé du poème, Jacques Ancet lui donne toute sa place par des décrochés, des blancs au milieu du vers, une quasi absence de ponctuation et de majuscule. Le mot seulement.



Chez Ancet, la poésie ne vaut que pour ce qu’elle a d’essentiel. Il y a comme un besoin chez lui, une envie de retrouver l’origine d’une parole qui soit indépendante, profonde et ductile, de retrouver une parole qui va des mots sur la page jusqu’à la sensibilité du lecteur.



« le voyage est sans fin

derrière le mot

d’autres mots

bougent

frôlent

un buisson d’étincelles

la main s’efface dans la page »





(*) Ce livre est le prolongement de Le jour commence (Poèmes I - 1966-1976).
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