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Critiques de Jean-Philippe Toussaint (580)
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L'échiquier

Avec l’échiquier, Jean-Philippe nous offre un coup de maître! Sûr de son art, il s’offre le plaisir de jouer avec son lecteur autour d’une partie en 64 coups, comme tout autant de cases que comporte l'échiquier. A la fin, c'est la littérature qui gagne.

Chacun de ces 64 chapitres est pour lui l’occasion de se livrer, de confier son amour de la littérature et des événements qui l’ont amené à en faire sa vie.

Comme toute partie d’échecs, ce livre comporte une ouverture pendant laquelle le joueur déploie ses pièces (sa jeunesse à Bruxelles, ses amitiés adolescentes, les souvenirs de la maison paternelle) et un final où le Roi sera mat!



Aussi dans certaines parties, on perd un peu le fil de notre idée originelle. C’est aussi le cas de ce récit et il l’assume complètement…Alors il continue à nous balader sur l’échiquier de ses confidences, pas au rythme linéaire du pion, plus à la manière d’un cavalier, cette pièce fantasque et intrépide qui se permet de sauter par-dessus d’autres pièces de faire deux coups en arrière et un pas de côté. Sur ce terrain, il excelle, ayant été initié très jeune aux subtilités des jeux de stratégie et il s’amuse, à notre plus grand plaisir.



Jean-Philippe Toussaint souhaitait que son livre soit “sensible, concret, malicieux, humain, ombrageux, imprévu, généreux” et c’est absolument réussi.

L’élégance de son style, l’audace de la structure et la finesse de son regard en font un bijou de littérature. Une des merveilles de la rentrée littéraire 2023.

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L'instant précis où Monet entre dans l'atelier

Cette lecture est mon bonheur du jour.

Un peu plus de vingt pages suffisent

à Jean-Philippe Toussaint

pour nous dire l'infinitésimal et l'universel.

Que se passe-t-il dans la tête de Monet

alors qu'il peint et que la guerre gronde?

La porte de son atelier de Giverny

serait elle un checkpoint entre réalité et création ?

Monet écrit à Clemenceau le jour de l'armistice

pour l'informer qu'il offre cette œuvre à l'Etat français.

Les nymphéas deviennent ainsi le symbole de la paix.

L'orangerie recevra tous les tableaux.

Comment les présenter ?

Une chorégraphie des différents panneaux

installés sur roulettes offre plusieurs combinaisons

au peintre et à son ami Clemenceau.

Peaufiner cette œuvre encore et encore

Ne pas la terminer, ne pas mourir!



C'est beau et fort comme un petit verre de liqueur!







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Faire l'amour

Première incursion dans l'univers de Toussaint, que je voulais découvrir depuis longtemps. Et "faire l'amour " m'a beaucoup plus.

Une histoire simple et triste, la fin d'un amour.Toussaint tout en douceur mélancolique, sensuelle, dans un style épuré, raconte ses signes annonciateurs quand le feu ardent du désir s'éteint peu à peu, ou ni les paroles, ni les réconciliations réactivent cet amour. Et cette rupture apparait comme un séisme, c'est aussi pour celà que Toussaint à basé cette fin à Tokyo. Un très beau roman qui me donne envie de découvrir son univers.
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L'échiquier

« J’attendais la vieillesse, j’ai eu le confinement » C’est sur ce quasi alexandrin que J.P Toussaint commence ce que l’on pourrait nommer son  « journal de confinement.» En effet, comme l’explique l’auteur hanté par la vision du désoeuvrement, dans la mesure où tout ce qui était prévu fut soudain annulé, il fallut trouver d’autres occupations. Ses projets partent alors dans trois directions : une traduction du « Joueur d’échecs » de S. Zweig (roman dans lequel un personnage central est confiné lui aussi!), un essai sur la traduction (qui va très vite être abandonné) et un livre autobiographique qui prendra la forme d’une plongée en soi-même, d’un va-et-vient constant entre les lieux d’autrefois et ceux d’aujourd’hui, un texte qui sera en somme une espèce d’« échiquier de la mémoire ».

Jamais me semble-t-il le ton de J.P Toussaint n’a été aussi personnel ni aussi intime.

Ce confinement le ramène dans un premier temps vers les lieux du passé : l’école de la rue Américaine, le quartier de l’enfance : les rues Jules Lejeune et Washington, la place Leemans à Bruxelles, le collège de l’Ermitage... À vrai dire, j’avais l’impression de lire un texte de Modiano : les mêmes évocations un peu troubles, la même opacité qui donne un caractère étrange et mystérieux aux souvenirs. Des noms et des prénoms reviennent mais pas forcément des visages. L’auteur raconte le destin incroyable d’amis qui sont morts, très jeunes souvent. Il semble surpris par le peu de choses dont on se souvient des gens qu’on a croisés. Toussaint nous transporte dans un passé lointain et gris duquel émergent des êtres aux contours flous tandis que d’autres visages se font plus précis.

Évidemment l’auteur s’interroge : « L’heure de l’autobiographie, pour moi, aurait-elle sonné ? » La mort rôde… Difficile de ne pas se sentir concerné par le temps qui passe. Le ton devient mélancolique.

Les souvenirs d’enfance conduisent l’écrivain à évoquer le jeu d’échecs auquel il jouait régulièrement avec son père, grand journaliste et directeur du Soir. Se dessine alors la relation au père et le souhait de ce dernier que son fils devienne écrivain. « Je n’ai pas eu la vocation, j’ai eu la permission.» Et de préciser : « Le livre que je suis en train d’écrire est un livre d’origine. C’est l’histoire d’une vocation, non pas comment je suis devenu joueur d’échecs - non, je ne suis pas devenu joueur d’échecs-, mais comment je suis devenu écrivain. »

J.P Toussaint propose aussi des analyses, des réflexions théoriques au sujet de la littérature. Il dit ce qu’elle est ou n’est pas. Il dit de quel ordre est son travail sur la langue et les mots.

À cela s’ajoutent des passages vraiment très drôles : certaines scènes sont franchement irrésistibles comme celle où il essaie des masques dans une pharmacie, celle du rendez-vous chez l’ophtalmologiste, le docteur Praggnanandhaa ou bien la scène où il avoue à Madeleine, sa femme, que cette crise sanitaire « finalement, ça l’arrange » (en effet, visiblement, il a plutôt très très bien vécu son confinement!) Nous assistons là à de véritables scènes d’anthologie ! Ses réflexions sur ses problèmes de traduction sont aussi très amusantes. Cela crée des ruptures de ton étonnantes où l’on surprend l’auteur dans sa vie quotidienne..

Toussaint nous propose ainsi un récit autobiographique fragmenté en 64 chapitres (comme les 64 cases du jeu d’échecs.) Le propos semble moins structuré qu’à l’ordinaire et donne l’impression d’épouser le flux de la mémoire : on passe d’un souvenir à l’autre, d’une anecdote à une réflexion sur l’écriture ou la vie. Tout est mouvement et l’on se déplace librement sur l’échiquier de l’existence : « Tout au plus me contenterai-je de promener négligemment mon Cavalier de case en case au gré de mes souvenirs, en tâchant de redonner vie à quelques fragiles silhouettes furtives et émouvantes qui ont traversé ma vie. »

« L’échiquier » est un texte très intime dans lequel on a l’impression de découvrir un auteur qui dit souhaiter que ce livre soit « un rempart contre le monde extérieur, un talisman, une égide. Je voulais que ce livre soit une réflexion plus ample sur la littérature, je voulais que ce livre dise l’origine de ce livre, qu’il en dise la genèse, qu’il en dise la maturation et le cours, et qu’il le dise en temps réel. Je voulais que ce livre soit sensible, concret, malicieux, humain, ombrageux, généreux, je voulais que ce livre soit tout à la fois un journal intime et la chronique d’une pandémie, je voulais que ce livre ouvre la voie à la tentation autobiographique, qu’il soit une conjonction de hasards et de destinée, de contingences et de nécessité... »

Oui, le livre est tout cela. Il m’a beaucoup touchée.
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L'instant précis où Monet entre dans l'atelier

Peu de pages, mais quelle émotion !

Jean-Philippe Toussaint tente de saisir et de nous faire partager l'instant où Claude Monet entre dans son atelier pour travailler encore et encore aux grands panneaux des Nymphéas.

Un pur bonheur de lecture, bref, trop bref, mais quelle importance.

Jean-Philippe Toussaint réussi à nous faire partager en moins de 30 pages des moments intimes entre un peintre et l'oeuvre de sa vie qui lui semble toujours inachevée, toujours imparfaite.

Un texte magnifique où le talent de l'écrivain sublime celui du peintre.

En conclusion je reprends la phrase de jack56, qui m'a permis cette découverte et qui résume parfaitement mon ressenti : « C'est court, très court, mais que c'est beau ! »





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L'instant précis où Monet entre dans l'atelier

Ce qui frappe chez Toussaint, c’est toujours la clarté du style, la transparence du propos, la précision du détail. Il tente ici de nommer, de décrire, de dire une traversée, une transition : le passage de la vie à l’art, du commun au sacré, un moment de basculement, hors du temps, de l’espace, de l’Histoire où le créateur s’apprête à créer. L’instant est fugace, éphémère. Il faut être vif « je veux saisir ce moment-là », précis « où il pousse la porte de l’atelier », nuancé « dans le jour naissant encore gris ». Saisir ce moment relève du miracle. Parce qu’il faut dire ce que personne ne voit. Capturer l’instant magique, le passage à l’acte créatif, c’est révéler le sublime, réitérer le miracle. L’auteur « veut ». Rien ne dit qu’il pourra. C’est un pari. Et ce « je veux » a quelque chose de performatif. À ce moment-là, l’écrivain écrivant se situe lui-même à une frontière, à un seuil, à l’aube même de son texte. Rien n’a commencé, rien n’est arrivé. Pour lui aussi. Rien n’est écrit. Il « veut » follement. Fabuleux désir. Énergie en fusion. Et pour saisir l’essence de Monet, il va passer par son « je » de créateur -l’homme à l’aube, dans le silence- à un « nous ». Sans que l’on s’en rende compte, il aura suffi d’une page à l’auteur pour nous entraîner, nous lecteurs, dans l’atelier « de l’autre côté de la porte » et nous faire témoins du miracle de l’art, initiés. Toussaint s’est fait passeur. Il nous porte, nous ouvre les yeux devant « les nuances de bleus », « la lumière déclinante », « l’apaisement du monde ». Nous observons alors quelque chose de sacré. Le prodige se réalise : la vie déposée sur la toile dans une fabuleuse « opération de transsubstantiation », une « conversion de la substance éphémère et palpitante de la vie en une matière purement picturale. » Et du monde, déjà, nous avons glissé dans la toile, de l’autre côté, « paysages d’eau et de lumière, fragments de branches inclinées de saules pleureurs, reflets bleutés, ciels, transparences. » Matière à jamais inachevée, toujours vivante, mouvante, en déplacement.

Par les mots, le miracle a lieu. Et nous en sommes les témoins. Rien ne nous a été totalement dévoilé et pourtant, tout est clair.

Le mystère demeure.

Mais nous avons vu.
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L'échiquier

Livre prétentieux et sans intérêt

Comme disait Brel : « et moi qui suit le plus fier , je parle encore de moi »

Ce que fait Philippe Toussaint tout au long de ce livre sur fond de confinement

Il veut traduire Le joueur d’ échecs de Stefan Zweig

Pourquoi pas mais aussi en faire un tryptique

Cette ambition se heurte à un description du quotidien ou à une évocation de sa vie personnelle .Il est loin du talent de Sweig

Philippe Toussaint a un égo un peu surdimensionné et se considère comme un écrivain majeur au point de prendre de haut toute critique avec un mépris certain pour celui ou celle qui oserait critiquer son œuvre, car, n’est-ce pas, il faut un certain niveau pour comprendre des auteurs majeurs comme lui

Que de suffisance !

il doit être pourtant bien introduit dans le milieu fermé des éditeurs pour que ce livre soit noté cinq étoiles par certains

On est loin de Primo Levi, Dostoïevski Steinbeck ou Victor Hugo ,etc… qui ,eux , méritent, la note maximale

A tout mélanger, on discrédite les grands textes

Celui-ci, L’ échiquier , est une petite production par temps de confinement qui sera vite oubliée

Un livre inutile, tout simplement
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La vérité sur Marie

C’est à l’occasion de mon post sur le dernier roman de Jean-Philippe Toussaint qu’une personne m‘a laissé le commentaire suivant : « avez-vous lu « La Vérité sur Marie » ? Elle semblait insister. Immédiatement, je notai le titre, difficile à trouver dans les librairies de mon coin qui, étant donné l’immense quantité de livres publiés, n’ont plus de fonds, comme avant. J’ai fini par le dénicher dans une petite bibliothèque. Il est sorti en novembre 2009. Je le lis seulement maintenant. Il m’a fallu 15 ans pour découvrir cet incroyable texte. Mille mercis à celle qui me l’a conseillé, elle se reconnaîtra.

« La Vérité sur Marie » est un texte de haute volée, immense, envoûtant, avec une scène centrale d’une rare intensité. Toussaint écrit superbement, il nous entraîne, nous capte, nous impressionne. Il est magicien. On en ressort subjugué. Il faut lire « La Vérité sur Marie », pas pour Marie, personnage que je trouve sans intérêt, énervant, un peu daté pour le coup. On frôle un peu le cliché avec Marie. Non, en fait, le personnage central est un cheval, un pur-sang, qui se déploie dans une scène folle, au rythme insensé,  une scène d’anthologie, inoubliable. Il y a beaucoup d’érotisme, de sensualité, de violence dans la prose de Toussaint. On marche en équilibre entre l’amour et la mort sans jamais savoir lequel des deux l’emportera.

Mais au fond, peu importe le sujet, c’est l’écriture qui prime, le style : Toussaint est comme Flaubert capable d’écrire un livre sur rien. Il ne se passe pas grand-chose dans les livres de Toussaint et c’est très bien comme ça. On n’en apprécie que davantage l’exceptionnelle beauté du style, les sonorités des mots, dont on se régale, et le rythme puissant des phrases.

Allez, je vous aurai prévenus, jetez-y un coup d’oeil, on en reparlera !
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L'échiquier

Je ne suis pas faite pour intégrer un site comme celui-là. Pourquoi me direz vous ? Tout simplement à cause de mon système de notation et de mon appartenance à des valeurs universelles. Primo, je note entre 1 et 5 étoiles, secundo, je ne peux pas admettre qu'une oeuvre comme "L'échiquier" soit notée aussi généreusement par une partie des adhérents à ce club. Pourquoi biaiser le système, quel est votre but ? Nous sommes tous perdants au final.



J'ai bien conscience de ma médiocrité en tant qu'écrivaine, je n'ai d'ailleurs jamais tenté ma chance, et croyez moi, j'ai beaucoup d'estime pour chacun des auteurs. Lorsque je note leur travail, je ne note pas la personne, mais leur livre. Faut-il le rappeler à Jean- Philippe Toussaint ?



Je connais l'homme, et c'est avec humilité et modestie que je lui dit bravo pour s'être mis à nue dans son dernier roman. Mais, tout lecteur, amateur d'échecs ou pas ne peut pas être accaparé par sa prose et son histoire.

Je suis désolée d'avoir noté cet ouvrage à la hauteur de mon ressenti, et je peux comprendre que certains puissent mettre 3 étoiles. Je reste néanmoins totalement dubitative lorsque je vois fleurir des 5 étoiles au cimetière des hypocrites.



Je sais que ce post déchainera des critiques à mon encontre. J'assume mes propos. Par exemple, j'assume 5 étoiles pour " Si c'est un homme" de Primo Levi, alors comment puis je donner une note comparable à " L'échiquier" qui n'est autre qu'un délire égocentrique que j'espère passager.

Soyez indulgents à mon égard, je suis déjà si triste d'avoir passé un si mauvais moment en compagnie de ce bouquin.



Le 11 octobre:

Je crois avoir été un peu trop excessive sous le poids de la souffrance infligée par cette lecture, je révise ma note en pensant aux trente dernières pages qui sont à la hauteur de mes attentes. Mon avis en donnant une seule étoile est sans doute une sanction trop forte.

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La Clé USB

Jean-Philippe Toussaint a beau nous emmener en Chine et au Japon dans ce roman, le centre de cette histoire se situe pourtant bien à Bruxelles, cité européenne s'il en est et ville où l'auteur a vu le jour.



Son narrateur, Jean Detrez, est fonctionnaire à la Commission européenne. C'est un conseiller technique spécialiste en prospective. Il s'intéresse aussi de près aux crypto-monnaies et au blockchain (je ne suis pas certain d'avoir compris de quoi il s'agit vraiment !).



Il va être la cible de lobbyistes douteux et tenaces.



La bifurcation de ce livre, qui aux deux tiers est un roman à suspense, se trouve à la fin. Difficile d'en tirer des conclusions, sinon qu'on n'est jamais aussi détaché de ses sentiments qu'on le pense...



L'écriture n'est pas en cause, précise et superbe comme toujours chez cet auteur. Mais j'en suis quand même resté sur une note d'insatisfaction.
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Les Emotions

Rappelez-vous dans La clé USB, Jean-Yves Detrez haut fonctionnaire de la Commission européenne rentrait de Chine où il s'était fait embarquer dans une sombre histoire de bitcoins (d'autant plus sombre que j'ai complètement oublié l'intrigue mais c'était vraiment très très bien…) Bref, nous le retrouvons ici dans différents lieux. Tiens, d'ailleurs, si vous cherchez un sujet de thèse (ça arrive tous les jours, hein, de chercher un sujet de thèse ...), en voici un : « Espace public/espace privé dans l'oeuvre de J.P Toussaint ». En effet, ce qui nous est donné à voir dans le deuxième opus de cette future trilogie, ce sont des lieux (publics surtout) où s'inscrit une histoire intime, celle du narrateur.

En effet, outre la Commission européenne (le chantier du Berlaymont) que nous explorons lors d'une visite guidée de l'architecte Pierre Detrez, frère du narrateur, nous découvrons le château d'Hartwell House (belle demeure datant en partie du XIe siècle, située dans le Buckinghamshire au nord-ouest de Londres) pour un séminaire autour de la prospective (eh oui, certains sont payés pour lire dans une boule de cristal afin d'élaborer des scénarios plus ou moins plausibles…), nous déambulons aussi bien entendu dans les rues de Bruxelles, rue de Belle-Vue, avenue Émile Duray, place du Châtelain… (Tiens, finalement, il y aurait bien un petit côté modianesque dans ce roman…) En tout cas, nous est donnée à explorer une véritable géographie toussaintienne (?) tout à fait passionnante...

En effet, ce qui peut sembler paradoxal, c'est que les émotions naissent et s'épanouissent dans un espace public qui, par définition, est organisé, structuré, codifié, et c'est notamment en franchissant légèrement les limites de cet espace public que surviennent lesdites émotions (notamment à travers des rencontres amoureuses) : on court dans les sous-sols labyrinthiques de la Commission européenne, on marche la nuit tombée dans les sous-bois de Hartwell House, on se caresse la main sur un coin de table de la cafétéria de l'Eurocontrole en pleine crise de volcan islandais en furie.

En revanche, l'espace privé est étroitement lié à la mort de l'amour - c'est le lieu où l'on étouffe, où on ne supporte plus la promiscuité des corps - mais aussi à la mort tout court, celle du père, au coeur même du roman. On observe ainsi une espèce d'inversion : le sentiment tire son origine et sa force dans un espace où il n'a pas lieu d'être (l'espace public). Au contraire, il s'affaiblit et finit par s'évanouir totalement dans un espace où il aurait a priori tout pour se fortifier (l'espace privé). On a l'impression que chez Toussaint l'espace public porte en lui des promesses, un avenir possible contrairement à l'espace privé (la chambre, la salle de bains) qui pousse vers la destruction, le néant. En effet, l'appartement du couple subit une inondation… Tout prend l'eau. Et d'ailleurs leur première union intime a lieu dans une baignoire de salle de bains (ce qui n'est pas vraiment bon signe chez Toussaint.) Tout se passe comme si l'espace confiné, retiré du monde, l'espace pascalien s'autodétruisait de lui-même, comme s'il lui manquait une ouverture pour respirer, de la place pour s'épanouir et se développer...

En tout cas, comme le fait remarquer le narrateur, englué dans ses histoires de prospective ou de volcan islandais Eyjafjöll provoquant un blocage de tout l'espace aérien européen qu'il faut choisir de prolonger ou non, « si dans ma vie professionnelle, j'avais une maîtrise incontestable de l'avenir, je me rendais compte que, depuis quelques temps, je ne maîtrisais plus rien dans ma vie privée. »

Il y a donc un espace que l'on maîtrise (celui du travail) et un espace qui nous échappe (celui du coeur). Et Toussaint joue des contrastes entre ces deux espaces, notamment lorsqu'ils se télescopent lors d'une rencontre intime dans le cadre du travail, d'un coup de fil privé au bureau ou bien lorsque l'émotion privée s'empare d'un haut fonctionnaire tandis qu'il fait un discours public.

Si l'on peut (j'ose l'espérer) tirer quelques bénéfices de la prospective publique, elle semble totalement inefficace lorsqu'elle touche le domaine privé (même si la rencontre avec sa femme Diane a commencé sur un « - Comment ? » qui annonçait déjà une communication un peu compliquée...)

Encore une fois, chez Toussaint, l'humain échappe aux codes, aux grilles de contrôle, aux tableaux de prospective. Il est inattendu, surprenant, souvent imprévisible, parfois indéchiffrable, n'obéit ni aux codes ni à la raison encore moins à la logique. Et surtout, il est capable de créer un espace de liberté précisément là où c'est interdit. D'ailleurs les corps semblent parfois agir sans aucun sens du rationnel, de la cohérence ou de la sagesse, ils ne se plient à aucune loi, échappent à tout commandement, à la moindre prévision. Ils sont le vacillement, le mouvement, le pas de côté (n'oublions pas que la racine d'émotion est « movere » qui signifie « mouvoir »).

Hors du temps et hors de l'espace, ils sont un espace à eux tout seuls, retranchement ultime où il est peut-être encore possible d'accéder au bonheur... Une dernière forme de romantisme désespéré (comme chez Houellebecq), espèce de bouée de sauvetage hélas, déjà percée...

Par ailleurs, au coeur même du roman, la mort du père, homme public, européen convaincu, viscéralement humaniste, intervient précisément au moment où les sphères publique, politique, sociale, religieuse s'écroulent, se fracassent : 2016, le referendum du Brexit, l'élection de Trump, la brutale montée des populismes, les attentats. Les émotions publiques grossières, vulgaires et « dangereuses » s'emparent de la raison : on crie, on tweete, on s'insulte, on se frappe, on tue… Elles envahissent l'espace public mais elles ne sont que la caricature des vraies émotions qui « sont intimes et silencieuses », extrêmement ténues, fugaces, si fragiles et si précieuses.

Le père meurt parce qu'il n'a plus sa place dans un monde sans repères.

Juste deux mots encore : Toussaint est bien le seul auteur avec Carrère (on pourrait d'ailleurs les rapprocher sur bien des points) à être capable de me passionner avec des histoires de blockchain, de bitcoin ou de prospective… S'il y a du Carrère dans Toussaint, on y respire aussi Proust parfois au détour d'une phrase sur le temps… C'est vraiment un très grand conteur parce que, quand même, (tenez bon, ce sont les derniers mots), quelle écriture, quelle magnifique et incroyable fluidité …
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Faire l'amour

Souvent, je lis la quatrième de couverture et une ou deux chroniques choisies parmi les amis.

Mais rien ne vaut la saisie du livre, la lecture de l’incipit : “J’avais fait remplir un flacon d’acide chlorhydrique, et je le gardais sur moi en permanence avec l'idée de le jeter un jour à la gueule de quelqu’un.”

Le titre ne pouvait laisser indifférent, je n’étais pas tout à fait vierge pour “Faire l’amour” car je me souvenais d'être passé par “La salle de bain” de cet auteur, il y a quelques dizaines d’années.



C’est amusant parfois comme on trouve chez un auteur une écriture, un style dont on se sent proche en se disant : “tiens, j’aurai pu écrire ça ! ”

Oui, Jean-Philippe Toussaint use des paradoxes entre l’amour et les réflexions acides sur la rupture.

Oui, le côté un peu désabusé du narrateur m’a parlé.

Et pourtant…

Je ne peux pas dire que le romancier belge soigne le sens de la narration. Après nous avoir intrigués à propos de sa rupture avec Marie, il nous emmène à Kyoto pour un séjour ennuyeux où il ne se passe rien : “Les heures étaient vides, lentes et lourdes, le temps semblait s’être arrêté, il ne passait plus rien dans ma vie.”



J’ai pensé un peu au film “Lost in translation” ; décidément, les hôtels de Tokyo attirent la langueur et la vie en peignoir/chaussettes !



Ce livre m’a laissé sur mon quant-à-soi, le sentiment d’une imposture au style parfois alambiqué comme dans cette phrase : “... scène qui restait en quelque sorte prisonnière d’une gangue d’indécidabilité des infinies possibilités de l’art et de la vie, mais qui, de simple éventualité - même si c’était la pire - pouvait devenir la réalité d’un instant.”... J'entrave que t’chi !

Loin de servir le livre, le commentaire de Laurent Demoulin de fin d’ouvrage fait de “Faire l’amour” une pratique hautement intellectuelle et n'apporte qu'interrogations sur cet objet : “Un roman polysémique, pluriel, avant-gardiste, poétique et métaphysique.”



Je ne peux pas mettre à l’index ce roman et le jeter à la poubelle comme Rodin-Marcel, car il a touché une fibre en moi, même si je ne sais pas laquelle !

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La disparition du paysage

« La Disparition du paysage a été créé le 12 janvier 2021 au théâtre des Bouffes du Nord avec : Denis Podalidès, sociétaire de la Comédie-Française » trouve-t-on en exergue de ce magnifique texte de Jean-Philippe Toussaint. J’aurais aimé y être… Ce très bref récit de 48 pages (et il commence à la page 9), imprimé avec des marges et une police conséquentes, m’a entraînée dans un tourbillon d’émotions. Peut-être depuis des mois, un homme, convalescent, en fauteuil roulant, regarde par la fenêtre d’un appartement situé à Ostende. Il reçoit matin et soir la visite d’une aide-soignante qui ne parle pas français. Il ne sait pas ce qui lui est arrivé, il ne sait pas pour combien de temps il est là, il ne souffre pas, mais éprouve « un étonnement inébranlable » et perçoit le présent avec une acuité nouvelle. Voilà ce que nous apprend le premier paragraphe.

***

Je ne crois pas avoir lu quelque chose de Jean-Philippe Toussaint depuis La Salle de bain, roman qui, je l’avoue, ne m’avait pas conquise, alors que ce texte me bouleverse. Ce convalescent qui n’a pas complètement perdu la mémoire et qui cherche à rassembler des souvenirs qui lui échappent est un écrivain : il ne sait pas trop ce qui appartient au réel ou ce qui résulte d’un univers qu’il se construit en regardant par la fenêtre. C’est une odeur qui le transportera d’abord à Ostende, puis dans un autobus à Bruxelles, lui infligeant alors « une intrusion intolérable du réel dans [s]on univers personnel. » L’écriture est magnifique, précise, intense, bouleversante. Les trois dernière pages… à pleurer. Lisez-le, d’urgence !

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Nue



Nue de jean-Philippe Toussaint est un hymne à la féminité, "il émanait d’elle quelque chose de lumineux, une grâce, une élégance, une évidence...”.



C'est une parabole magique sur les rapports amoureux entre un homme et une femme, entre le conteur et Marie, une page illustration pour le livre Fragments d'un discours amoureux de Roland Barthes.



Marie styliste habille la femme, pose sur elle une parure, lui fait une enveloppe, pour la rendre plus belle, après la robe en gorgone et ses fruits de mer, elle présente la robe miel, où la parure se minimalise, la peau devient la robe talquée, rehaussée, pour devenir la Parure suprême de la femme, une femme nue juste un peu laquée de miel comme un parfum.





Ce prologue à Tokyo, où la robe est présentée, installe Marie dans une recherche de perfection, où la haute couture avec ou sans couture, doit donner au corps de la femme sa splendeur.



Pages visuelles qui suscitent le toucher et la sensualité du lecteur. "elle, faisant tinter délicatement les coupes l'une contre l'autre, c'était deux épidermes hypersensibles que l'on mettait pour la première fois en contact, comme deux lèvres qui se rapprochent et s'effleurent".

 

Jean-Philippe Toussaint avance encore vers Marie, le séjour à l'île d'Elbe lui offre toutes les poses, les éclairages, les senteurs pour décrire Marie, habillée désinvolte, nue ou à moitié nue, le conteur est fou de son modèle. "cette disposition océanique que j'avais repérée en elle, qui acérait sa sensibilité, l'exacerbait, faisait vibrer ses sentiments".



Tout est fragile en amour, le cœur se dévoilera, après une longue absence, les pas dans le cimetière réveillent le corps, l'odeur du chocolat mêlée à d'autres senteurs aqueuses prennent Marie à la gorge, elle est enceinte. Un autre femme émerge une femme amoureuse, pleine d'énergie et de désirs.





Cette scène est l'une des plus belles, si bien colorisée et si étrangement olfactive, que des sensations traînent dans votre propre corps, et quand elle vomit ses tripes c'est aussi son passé qui s'en va.



Un beau prix Fémina qui n'en fût pas, à quoi rêvent les jurys ?

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L'urgence et la patience

Pour cette lecture, je pense avoir fêté Pâques avant les rameaux!

En effet, j'aurais adoré découvrir ces secrets d'écriture, d'inspiration, de révélations d'extase éprouvé à la découverte de grands auteurs, si ces aveux avaient concernés un de mes écrivains fétiches. Non que je fustige Jean-Philippe Toussaint, c'est juste que je ne le connais pas.









Il n'en reste pas moins que certains passages m'ont conquise, comme cette histoire d'arroseur arrosé, lorsque l'épisode de la première lecture de Proust devient lui-même une madeleine (la relecture suscite le souvenir des circonstances exactes de la lecture initiale!). De même pour la comparaison très adroite des relations analogues entre littérature et cinéma et entre mathématiques et biologie.









Je vais donc devoir faire le chemin à l'envers et aller à la découverte des écrits précédents de l'auteur, pour pouvoir relire cet essai (ce n'est pas un pari intenable, il faut à peine une heure pour le lire) et devenir cette fois complice de ces secrets partagés, du plus matériel ( carnets, stylos, machines à écrire) au plus conceptuel (de l'influence de Beckett) en passant par les rencontres marquantes (Jérôme Lindon, Beckett encore).
Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Faire l'amour

Bon c'est un livre qui m'a été offert à Noël. Ça se lit vite très trop ? Un mec et sa nana artiste évidement partent à Tokyo pour une expo et là c'est le drame le monsieur il aime plus la dame, alors ils sont tristes, bon ok je caricature, mais je suis pas amateur des grands blabla larmoyants, les dialogues sont pas terribles, les descriptions du Japon sont froides comme un sushi, pourtant de temps en temps il y avait un petit côté Djian dans ces errances mais qui retombe vite.



L'espèce d'analyse de texte à la fin m'a achevé par sa platitude et son inutilité. Si vous êtes un, une ado c'est pour vous, si vous venez de vous faire larguer, c'est pour vous, si vous êtes beau riche intelligent en bonne santé entouré d'amour, passez votre chemin.



Je vois sur le bouquin que Toussaint est l'auteur de la photo de la couverture de son livre, c'est cool elle est raccord avec son histoire, c'est flou.
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L'instant précis où Monet entre dans l'atelier

Voici une miniature littéraire, une mignardise, consacrée aux Nymphéas de Monet. Que dire de plus sans dévoiler quelque chose. Si ce n'est qu'à défaut de s'appeler Toussaint et d'avoir tout son passé éditorial, ces quelques pages n'auraient sans doute jamais été imprimées, si ce n'est à compte d'auteur.
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La Clé USB

- Tu fais quoi toi dans la vie ?

- Je travaille dans la prospective.

[Moment de solitude...]



Roman rédigé à la 1ère personne, le narrateur nous explique son quotidien professionnel au service de la prospective au sein de la Commission européenne. L’institution, dans un monde numérique en constant développement, doit assurer sa cybersécurité et empêcher le cyberespionnage industriel.



Alors qu’il est approché de façon insistante par un certain John, notre narrateur soupçonne qu’il soit lobbyiste. En effet, ces derniers sont légion et John représente une entreprise bulgare de minage qui a constitué un dossier de demande de subvention auprès de la Commission.

Parallèlement à cela, John perd un soir une clé USB lors d’un rendez-vous avec notre narrateur qui la récupère. C’est plus fort que lui, il a envie de mener sa petite enquête : il découvre que l’entreprise bulgare ne serait que l’intermédiaire d’une entreprise chinoise dont les ambitions dans le monde de la blockchain seraient bien plus importantes que ce que laissait entendre John avec son entreprise bulgare. Les Chinois voudraient-ils profiter de fonds européens pour dominer le monde numérique ? Quel est leur but ultime ?



Ce n’est pas un sujet facile ni distrayant que Jean-Philippe Toussaint aborde ici. Je soupçonne moi une certaine part autobiographique. C’est intéressant pour qui se passionne pour l’économie, le numérique, l’Europe... La fin est un peu déroutante car elle touche la famille du narrateur et le lecteur ne s’y attend vraiment pas.

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La Clé USB

Qu’est-ce qu’une chute libre d’eurocrate ? Oh, pas grand-chose, à peine un frémissement, poli, contenu, stupéfait, résigné. De cet état minimum, et avec une simple clé USB, délicieusement déjà obsolète, Jean-Philippe Toussaint vient de faire un thriller cyberpolitique haletant, mais certainement pas pour les raisons que les lecteurs de John Le Carré s’imaginent. Comment a-t-il fait ? Et d’abord, un roman sur fond de nouvelles technologies et de Commission européenne, aux éditions de Minuit ? il devait y avoir un truc. Et la dernière partie vous le dévoile, oui, ce « truc ».

Le narrateur, chef d’une unité de prospective à la Commission européenne (ne partez pas, c’est fait exprès) nous raconte comment, approché par des lobbyistes, il s’est retrouvé en Chine quasi clandestinement, à tenter de comprendre le minage de bitcoins et les perspectives de la blockchain, le tout savamment expliqué aux plus nuls dont on perçoit légèrement que notre bon narrateur expert en ferait bien un peu partie, dans un grand bluff généralisé où l’on se doit de comprendre et appliquer – du moins de mourir plutôt que d’avouer n’en avoir aucune envie – à l’échelle d’un continent des sciences folles qui mutent de mois en mois.

Dans le récit saccadé, obstiné de cette aventure de 190 pages, rien ne se consomme impunément. À la frénésie qui semble inévitable, la tournure inquiétante, la vitesse que prennent les événements, Jean-Philippe Toussaint oppose une densité non négociable, parfaitement claire et sobre, mais truffée des détails les plus anodins de notre vie technologique, sans aucun transport, sans parti pris féroce, une simple démonstration pratiquement exhaustive du quotidien d’un haut fonctionnaire, dont la toute dernière partie finit d’achever, le terme est choisi, le tableau.



C'est un roman tout à fait feutré, étouffé. J'adore lorsque la forme se coule exactement sur le contenu. Il a réussi à forger un style d'ascenseur d'hôtel chinois interdisant la connexion internet, et de MacBook de deux générations de retard, sans jamais que nous, nous décrochions. C'est le sentiment diffus de tout utilisateur de tech lambda, même hautement qualifié, qui a appris et intégré la pondération, l'endurance et le lisse parfait à opposer à toute difficulté apparente, et ne se laisse pas facilement décontenancer par une nouvelle évolution de son matériel, mais enfin, finit par fatiguer, à la longue, sur cette autoroute sans fin où il semble ne jamais vraiment réussir à obtenir le permis. De l'Europe, évidemment, il sera sans cesse question, et de sa juste place dans cette course à l'armement, et toujours avec finesse, il s'agira ici de savoir si vous arriverez à l'heure pour les soins palliatifs, si vous passerez ou non à côté de l'essentiel.



Et c’est absolument réjouissant comme, sans fioritures et sans posture, n’ayant nul besoin de la satire mais avec les termes exacts et pesés (quel plaisir de croiser « faconde », ou « impétueux », là où rien d’autre n’aurait pu convenir), nous sommes souffle court, à tenter de comprendre ce qui se trame, pour finir par jubiler, lorsque « rien » devient une réponse non pas désolée et désabusée, mais le givre blanc, définitif, qui recouvre brutalement la Plaine finale de Bruxelles, et son personnage hébété. Il fallait enfin, grâce à un romancier infiltré et doué, que l’on comprenne tout, de ces nouvelles technologies. Qu’on les résume. Qu’on en vienne par nous-mêmes, grâce au refus inspiré de Toussaint d’intervenir dans notre pérégrination, à prendre ces vessies pour ce qu’elles sont. Et ce qu'elles nous font.
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L'instant précis où Monet entre dans l'atelier

Le titre est le leitmotiv de la narration qui introduit chaque nouveau paragraphe décrivant Monet à l’œuvre de ses nymphéas. Ce texte court, brillamment écrit montre bien l’attitude de l’artiste face à son travail colossal qui sent que son achèvement sera également sa finitude d’être humain et qui le corrige, l’amende par petites touches pour faire durer le plaisir de l’accomplir et de repousser la mort. L’auteur nous offre également une remarquable description des souffrances de la vieillesse qui s’installe progressivement, mais dont les effets délétères sont atténués par la création artistique.
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