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Critiques de Julie Estève (156)
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Moro-sphinx

Lola est une serial lover des plus particulières…



Elle butine. Les hommes.

Elle collectionne. Leurs ongles.

Comme des trophées. Sur l’autel de la solitude, de la détresse, de la misère affective.



Et puis un jour l’insecte se fait attraper et s’interroge sur l’Amour et son avenir, sur le pardon.



Julie Estève est un papillon qui vient d’éclore.

Sa trompe est d’une grande précision, tout à la fois crue et puissante et en fait au final un écrivain inoffensif mais nécessaire.

C’est une espèce peu commune, à sauvegarder (obligatoirement), dont on reparlera (forcément).




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Moro-sphinx

C'est un roman qui tape fort, qui ne ménage rien ni personne et dont on émerge comme l'on sort d'une catacombe, assoiffé de lumière, vacillant de doutes mais ébloui par le talent de l'auteur.

L'histoire de Lola n'a plus de temps à elle, de temps pour elle. Elle rabâche les mêmes gestes, les mêmes pulsions et la même vie à mort-amor. Le refus d'identification contamine les jours qui se noient dans l'indéfini de chaque chapitre : "un dimanche", "un vendredi, "un samedi"... Ces jours où Lola dérive de corps en corps, pour remplir le sien comme elle remplit un bocal d'ongles coupés à ses proies. Un seul ongle, une "petite ordure", "un minuscule déchet", comme une métaphore de sa souillure volontaire. Vide depuis la fin d'un amour, vide depuis le deuil, elle balance la coquille creuse de son corps sur le sexe des hommes qu'elle croise. Puisque l'amour fait mal, elle ne veut plus que faire mal à l'amour, le rogner, l'avilir. Et l'écriture évacue toute émotion pour ne garder que l'organique et le besoin. Si bien que le lecteur doit lui aussi combler les vides et s'insérer dans l'histoire pour trouver des raisons, des excuses, des causes alors que les pensées de Lola lui sont inaccessibles.

Et puis le temps redevient un repère. Des dates apparaissent pour scander un nouvel espoir, une nouvelle histoire d'amour qui écarte les démons sans les éliminer. La souffrance incendie le texte, souffrance des hommes abandonnés, souffrance de n'être plus aimée. Qu'est-ce qui peut combler le manque ?

Après la dernière page, on reste tétanisé, sidéré d'avoir plongé aussi profond dans une âme absente.

L'écriture m'a laissée en apnée, suspendue à un détail, écorchée par les ellipses, tailladée par la précision, époustouflée par cette maîtrise totale, impérative, dont fait preuve l'auteur.

Le roman de Julie Estève fait plus que bouleverser. Il entame.
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Moro-sphinx

Lola est une tabassée de la vie, de son passé affectif à base d'abandon on ne saura pas grand chose sauf les conséquences : la frénésie, la chasse, la collection, la consommation. Des hommes comme des proies, choisies parmi les moins évidentes. Noyade dans le désespoir, jusqu'à LA rencontre. La fin de la course à l'anéantissement ?

Un premier roman à fleur de chair, cru et désespéré.
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Tout ce que le ciel promet

Il faut être bien audacieux pour affronter l’invisible. Dans ce livre, elles sont deux à se lancer dans une quête spirituelle : la recherche de l’amour pour Agnès, le poids d’un secret familial pour Julie. Têtes brûlées, âmes blessées, elles sont prêtes à tout et à n’importe quoi pour avoir des réponses. Elles s’adressent à des guérisseurs, des médiums, des voyants, des spécialistes des vies karmiques, des hypnothérapeutes, des chamanes, des énergéticiennes, des sorcières… “Tout ça a l’air barré - je sais bien.”



Elles déposent dans ce livre, l’une après l’autre, ou ensemble, les révélations soufflées par ces gens qui voient, qui savent et qui guident. “Le médium est un genre de câble téléphonique” qui transmet une parole venue d’ailleurs - ou d’avant. Un peu comme un écrivain ?



Si différentes et si amies, Agnès et Julie apprennent que c’est souvent un traumatisme d’un passé plus ou moins ancien qui ouvre les portes de l’invisible. Dans la quête amoureuse de l’une comme dans l’enquête familiale de l’autre, il faut remuer le chaos et la boue des générations précédentes. “Le récit du médium, qu’il soit fable ou vérité vraie je m’en fous puisqu’il va m’aider à rompre le silence qui saccage ma famille.”



C’est un livre écrit à tâtons, à l’instinct. “Discuter sur WhatsApp avec mon ancêtre à travers une médium dans la Drôme me paraît à la fois complètement con et tout à fait normal.” Elles balancent le prix des consultations, elles se moquent l’une de l’autre, elles dépoussièrent, elles démystifient, elles doutent aussi. “Et si cette enquête, c’était du grand n’importe quoi ? Et si, au lieu de nous réparer, elle nous brisait ?”



On a envie d’y croire. Croire à quoi ? Peu importe. Quelque chose au-delà du ciel, comme une promesse.
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Simple

Simple est un roman particulier où l’écriture est adaptée au narrateur, Antoine, tant au niveau du vocabulaire utilisé que des constructions de phrases. La plume de l’auteure est au service de son personnage central pour immerger le lecteur dans les pensées de celui-ci afin qu’il vive au mieux le récit partagé. Antoine parle à sa chaise, mais il pourrait aussi bien parler directement au lectorat. Ce dernier est pendu à ses lèvres puisque c’est de lui que viennent les confidences et, plus tard, le fin mot de l’histoire.

Cette manière de procéder rend le texte touchant puisque porté par un protagoniste qui, à l’aide de mots simples et bruts, livre des idées pertinentes. Ses constatations sonnent justes et sont d’autant plus fortes qu’il les livre de manière désinvolte sans se rendre compte de leur portée.

Sa manière de dire les choses et la formulation de ces dernières poussent souvent le lecteur vers de mauvaises conclusions. Une manière ingénieuse de brouiller les pistes jusqu’à la révélation ultime peu prévisible. Cette dernière s’accompagne d’un détail annihilant tout espoir chez un liseur déjà ébranlé. Les dernières lignes sont émouvantes.

C’est ainsi un récit bien pensé que livre l’écrivaine. Un texte original, touchant, mais un rien lassant au fur et à mesure que l’écriture, répétitive, s’enchaine. Les pensées d’Antoine sont brouillonnes et se perdent parfois dans l’espace temps et dans des listes de mots semblant sans fin. L’attrait du lectorat baisse ainsi en intensité, mais est rehaussé en fin d’ouvrage par l’élucidation de la mort de Florence.
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Presque le silence

J’ai adoré les deux premiers romans de Julie Estève « Moro-sphinx « et « Simple ». Ce troisième opus confirme le talent de cet auteur.

Au début de l’histoire, Cassandre, 12 ans, rousse, frisée est devenue le souffre-douleur de ses camarades qui la surnomme « le caniche » ; elle trouve du réconfort auprès de son grand-père : elle est follement amoureuse de l’un de ses tortionnaires qui est le garçon le plus beau de la classe… Une biographie somme toute banale, ordinaire : une passion amoureuse, des tourments, des deuils, une visite chez une voyante pour savoir si l’amour sera un jour partagé et des prédictions de ladite voyante.

Nous poursuivons le récit en suivant cette non-héroïne année après année quand soudain, le prisme s’agrandit, une fenêtre s’ouvre et le destin de Cassandre va devenir celui de l’humanité.

Nous sommes, alors, happés par cette histoire de vie dérangeante. Le rythme s’accélère au fur et à mesure que nous entrons dans l’histoire. La construction si particulière et la qualité de l’écriture donnent une dynamique qui ressemble à une course éperdue.

J’ai été envoûtée par cette tragédie des temps modernes qui révèle la noirceur de l’être humain.

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Presque le silence

Presque le silence raconte 10 épisodes de la vie d’une femme, de son enfance à sa mort. Cette femme, c’est Cassandre, jeune fille rousse, frisée et haïe par les autres enfants. Elle est folle amoureuse de Camille, un garçon qui adore les chevaux. Un jour, elle décide d’aller chez un voyant qui lui annonce cinq abominables prophéties. Celles-ci se réalisent au fur et à mesure et la hantent tout au long de sa vie, bien qu’elle tente ce qu’elle peut pour les éviter.



Il n’y a décidément rien à lui envier tant elle croule sous le désespoir et le poids de la culpabilité malgré elle. Ce sont principalement ses silences et non-dits qui laissent le plus de marques profondes en elle.



Oui, son prénom est bien choisi en référence au syndrome de Cassandre. Il y a sans doute beaucoup de symboles dans ce livre qui traite (un peu) d’amour, de mort, de séparation, de cause animale, de maltraitance, du réchauffement climatique… De nombreux sujets intéressants, universels et intemporels. Tout ce qui arrive à son héroïne mis bout à bout est absolument horrible et beaucoup trop insupportable à encaisser pour une seule personne. J’ai trouvé pour ma part énormément de violence et de noirceur dans ce roman que j’ai hâte d’oublier.
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Presque le silence

"Presque le silence" de Julie Estève est un livre dérangeant. Cassandre, la protagoniste que nous allons suivre tout au long de sa vie, n'est pas une personne attachante. Elle est cruelle envers les animaux et ne semble pas avoir d'état d'âme. Elle est haïe par les autres enfants à cause de sa tignasse rousse et va développer une carapace en béton armé. Un jour, elle consulte un voyant pour savoir si le garçon qu'elle aime tombera amoureux de lui. Le voyant fera 5 prédictions qui la poursuivront jusqu'à sa mort.



Je n'ai pas totalement accroché au livre, principalement à cause de la protagoniste. Je n'arrivais pas à m'identifier à elle et une distance s'est maintenue. Aucune émotion ne m'a saisi à la lecture de ces pages... Tout est si noir, si sombre... Ce roman n'a pas fonctionné pour moi.

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Presque le silence

Magistral !



Cassandre est rousse et ses cheveux sont frisés. A l'école, on la harcèle, on la surnomme le "caniche". En secret, Cassandre est amoureuse de Camille, le garçon le plus beau et le plus cool de l'école. Elle ne rêve que d'une chose : lui rouler un patin. Mais comment faire quand on est détesté par tous ? Pour se donner espoir et courage, Cassandre se rend chez un voyant. pour connaître son avenir. Mais la séance tourne mal. Le cartomancien lui révèle cinq prophéties terrifiantes qui ne cesseront, au cours de sa vie, de la hanter.

Nous suivrons l'histoire de Cassandre de son enfance jusqu'à sa mort. Son histoire mêle amour, tragédie, abandon, espoir, deuil, folie, écologie, une fable où l’intime déchire l’universel.



Comme tous les romans qui m'ont émus, j'ai beaucoup de mal à trouver les mots. Alors, je vais laisser parler mon cœur.



Mon cœur a fait des bonds avec cette lecture ! J'en ai eu presque la respiration coupée... L'ambiance est tantôt suffocante, tantôt haletante quand on assiste impuissants aux drames qui rythment la vie de Cassandre, puis vient la folie où tout fait sens, on s'oxygène à nouveau, pour arriver finalement à bout de souffle comme après une course effrénée..

L'écriture est magistrale, très poétique. les mots sont à la fois très doux et très durs, parfois il vous frappent même comme des coups de poing.



"Presque le silence" est un récit incroyable : ne passez surtout pas à côté !


Lien : https://mademoisellechristel..
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Simple

Lu jusqu’à la page 100 !

Cette lecture m’a mise mal à l’aise !.

J’adhère pas.

C’est confus .

Désolée !!...
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Moro-sphinx

je ne comprends même pas que de tels "romans" puissent être publiés.

totalement creux, sans talent, vide, ennuyant, quelle perte de temps et d'argent!
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Simple

Ce livre est une double ou triple gageure. Nous conter l’histoire, l’existence et les pensées d’un “simple” dans une corse haute en couleur et en violence. On imagine qu’écrire ou décrire une situation complexe demande un travail confirmé, mais une non histoire, et la vie d’un “simple” me semble d’autant plus délicat que cet exercice requiert un travail d’une grande légèreté, d’une précision virtuelle, un peu comme un tableau impressionniste. J’ai trouvé l’écriture de Julie Estève, d’une grande qualité picturale, ultra sensible, pleine d’amour, et de tendresse. Elle a su éviter les poncifs, les préjugés, les jugements, les mots faciles ou prévisibles, elle est allée loin dans la compréhension de cette simplicité extrême aussi complexe qu’elle est impalpable. Bravo à l’auteur pour son talent, sa sensibilité, pour cet exercice d’écriture délicat. Julie Estève est un auteur généreux. Elle donne à lire, à penser, à comprendre, à partager.
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Simple

Bonjour à toutes et à tous…



“Simple” est une véritable ode à la différence !



L’histoire d'Antoine, l'idiot du village, “le baoul”, m’a vraiment beaucoup touché.

Je me suis laissé transporter dans cette histoire. Celle d’un simple d'esprit mais tellement clairvoyant, chaque mot a son importance et malgré son handicap, il porte sur le monde un regard juste et sincère, à la différence des autres habitants de son village.

Il sait qu’il est différent et la vie n’est pas simple pour lui. Rejeté par sa famille, sa mère est morte à sa naissance, rejeté par son village. Il fait peur, on l’accuse de tous les crimes, il vit en marge de tout, lui qui ne demande que de l’amour.

Alors, il décide de communiquer avec la nature, avec les arbres, les animaux et surtout avec une chaise.

Sa chaise, à qui il va raconter son histoire…



J’ai suivi et lu avec émotion l’histoire d'Antoine, de son enfance à l’âge adulte, ses amours, ses envies, ses erreurs aussi. Tout ne sera pas facile, vous devez vous en douter. Mais la force qui se dégage de lui va lui permettre d’accepter et de vivre la vie qu’il s’est choisi.



Je découvre Julie Estève avec ce superbe second roman.

Poignant sensible, une écriture à nulle autre pareil, une sorte de poésie se niche entre les lignes, entre les mots.

La magie a opéré pour moi dès les premières phrases.

L’utilisation de la première personne y est sûrement pour quelque chose puisqu’elle nous donne un coté immersif, je suis très vite devenu Antoine.

Mais il n’y a pas que cela !

Il y a un vrai style dans l’écriture de Julie.

Durant ma lecture, les répétitions narratives, correspondant à toutes les questions que se posent Antoine, ont résonné dans mon esprit comme certaines incantations venues d’un autre temps, tantôt directes, tantôt brutes, tantôt très imagées.



Il se dégage une grande force de “Simple”, que je vous conseillerai comme une lecture indispensable.





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Extrait :

“La mort c’est un trou ! On tombe dedans mais ça dure combien de temps la chute, et au bout du trou il y a quoi, on arrive où, quand on touche le fond, est-ce qu’on peut remonter, est-ce qu’on a le droit de recommencer, avoir une autre naissance, est-ce qu’on peut choisir qui on sera plus tard ou c’est le hasard et on est attribué au pif, moi par exemple, une fois de l’autre côté du trou, si j’ai envie, est-ce que je pourrais être une femme ou un sanglier ou Ayrton ou un cactus, essayer tous les métiers, tous les animaux, tous les arbres, ce serait bien d’être un figuier, un requin, un caillou, une bagnole, être quelqu’un, être un homme un vrai, et s’il n’y a pas de fin au trou, pas de fond, et si c’est un trou sans limite, est-ce qu’il fait nuit dedans ou c’est éclairé, est-ce qu’il fait froid ou brûlant, est-ce qu’on est tout seul dans notre trou ou tout le monde se retrouve dans le même, ce serait vachement encombré, mais dans l’idée qu’il y a un trou pour tous, ce serait possible alors que je revois madame Madeleine, en cherchant bien, et que je rencontre ma mère, on aurait plein de choses à se dire, ce serait l’occasion de se serrer et de m’excuser pour sa mort, mais les autres aussi il serait là alors, coincés avec moi, peut-être le trou c’est du vide, ça pèse combien le vide, pas grand chose, trois fois rien, mais sans le vide, y aurait pas le reste et alors ce serait le néant !”
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Simple

Le pari de l'auteur est d'inviter le lecteur à pénétrer le monde d'un "baoul", un "idiot", un "simple". C'est audacieux et réussi !

A travers sa langue, son âme, on regarde le monde qui l'entoure.

Et c'est moche.

Sans filtre, avec lucidité, Anthony, nous raconte son histoire de bouc émissaire. On souffre avec lui, on rit aussi.

J'ai beaucoup apprécié d'être au plus près d'un homme si singulier, sensible et intègre. Et je me demande : "Où sont les baouls de nos villes ? Sont-Ils devenus invisibles à nos yeux ? Ont-ils fui ? Ou bien comme Anthony, ont-ils été frappés d'ostracisme ?

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Simple

Antoine Orsini meurt à un âge d’homme mur. On peut supposer que la plupart des habitants du village se déplacent à son enterrement, mais il est peu probable que qui que ce soit y verse la moindre larme. Surtout pas la mère Biancarelli, la maman de Florence. Car Antoine, dit le Baoul, est simplet. L’histoire a beau se jouer à la fin du vingtième siècle, c’est la vie reculée d’un village corse haut perché que raconte Julie Estève. Tellement encastré dans la montagne, qu’au cimetière, les cercueils sont ensevelis à la verticale.

Antoine, dit le Baoul, raconte sa vie à sa chaise, devenue sa confidente. Il la raconte à la façon de l’arriéré qu’il est, avec un vocabulaire tout à lui, haché, sautant en permanence du coq à l’âne dans un discours incohérent.

L’incohérence est bien entendu construite, dans ce roman. Ne craignez pas d’entendre pérorer un fou dans un discours sans queue ni tête. Julie Estève a su, tout en conservant une structure totalement désorganisée du langage et des idées, monter au contraire une histoire qui a un début, un milieu et une fin. Si Antoine, dit le Baoul ne saura jamais qui a assassiné Florence dans les bois dans sa seizième année, n’ayez aucune crainte : le lecteur, lui, finira par le savoir.

« En 1985 moi j’ai trente-deux ans, et j’suis pareil qu’un gardien de phare, mais dans la montagne. Je m’assoie avec Magic en face la cabine et je note dans mon cahier qui appelle qui à quelle heure. C’est du boulot sept jours sur sept ! A trois heures du matin jeudi onze juillet mille neuf cent quatre-vingt-cinq, Dominique Casanova a passé un coup de fil à une fille alors qu’il est marié. Je l’ai consigné dans mon carnet. Il était saoul parce qu’il pensait parler tout bas alors que pas du tout. C’est facile pour lui de boire l’œil vu qu’il est le patron du bar ici. Il a aucun mérite. Sa femme, c’est Noëlle la murène. Elle se doute pas qu’elle est cocue en plus de son utérus bon à rien. »

J’ai eu beaucoup de mal, dans les premières pages, à rentrer dans le style si surprenant de Simple. Le langage primaire a de quoi dérouter. Puis j’ai réussi à me prendre d’intérêt pour l’histoire et son héros principal, au point d’en oublier les mots. Lorsque je m’en suis rendue compte, j’ai réalisé aussi avec surprise que j’appréciais la fusion entre l’histoire et la narration, qu’elle était même nécessaire. Simple ne pouvait pas être écrit autrement parce qu’Antoine, dit le Baoul est animal plus qu’humain.

Ce n’est pas la première fois qu’un simplet a un rôle principal, dans la littérature. Marcus Malte par exemple, s’est emparé du même type de personnage dans Le garçon (Zulma, 2016). Mais l’objectif des deux auteurs est très différent : Marcus Malte utilise son propre sauvage, muet, pour décrire des sensations et des odeurs et en cela, il utilise un vocabulaire à la fois naïf et chargé d’émotion d’une puissance extraordinaire. Julie Estève, quant à elle, se sert d’Antoine pour évoquer les rapports humains. Primaire et animal, mais social, comme il est le narrateur de son histoire, son langage ne peut qu’être pauvre et direct ainsi que Julie Estève l’a choisi et réussi à maintenir tout au long de l’histoire. Hélas pour Julie Estève, la force des deux romans en est très différente.

Je pense que je ne retiendrai vraisemblablement pas grand-chose de ce texte et je le regrette. Il n’est, hélas, à mes yeux, qu’un exercice de style, aussi intéressant soit-il. Comme l’auteur ne prend aucun recul avec son personnage principal (et comment en prendre, lorsque la narration est à la première personne ?), je ne sais pas où elle veut en venir, en matière de message, avec son intrigue. Et sans finalité autre que celle d’un polar écrit de manière originale, pour moi l’histoire n’a pas un énorme intérêt.
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Simple

Un type qui parle à une chaise, on aura tout vu…Bien la preuve qu’il est cintré, Antoine Orsini, gaga, barré, baoul, quoi…et peut-être pire, non ?Tous les doutes sont permis, toutes les questions sont ouvertes quand c’est un simple d’esprit qui raconte sa propre histoire, un peu en désordre, un peu en bazar, un peu comme ça lui vient, à la va comme j’te pousse.

Sous la plume de Julie Estève, extrêmement finaude, elle, pour le coup, on se laisse porter par cette voix rapidement familière et touchante, on se laisse mener, par la main ou par le bout du nez, dans la vie d’Anto, de Florence, de la Murène et de l’Extra-terrestre, on joue les voyeurs dans cette vie de village, dans cette Corse profonde où on ne rigole pas avec l’honneur , où les réputations se lavent dans le sang, où le silence n’est pas d’or mais de plomb.

Les chemins de la pensée d’Antoine sont escarpés et sinueux, ils nous offrent une balade magnifique dans un paysage humain varié, subtile et changeant selon les points de vue que propose la progression dans le récit. La langue, elle, est à l’image de ce baoul qui se raconte, simple, imagée, ensoleillée. Simple, comme ne le seront jamais les liens et relations qui gèrent cette microsociété de derrière les rideaux, où tout se sait sauf l’essentiel, où tout se tait sauf la rumeur, où l’on prête à autrui toute la noirceur dont on se sait capable.

C’est avec constance et avec une force mêlée de grâce que Julie Estève trace le sillon de son personnage et de son récit, feignant de les laisser se perdre dans des situations complexes voire sordides, là où il n’y a, finalement, qu’une histoire simple.

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Simple



Le « baoul » et une chaise toute rouillée, même pas jolie. Et voilà que Julie Estève fait une rétrospective de la vie d’Antoine Orisini. Un garçon simplet, moqué depuis son plus jeune âge, en marge des autres. Un personnage profondément encré dans le temps. Le temps de la différence de ceux qui ne perçoivent pas le monde comme la société l’entend. Un monde qui fout le camp et qui prend pour cible les plus faibles. Le monde a besoin d’un bouc émissaire. Les gens ont besoin d’un coupable à leurs fautes. Ici, c’est tout un village contre un enfant, puis un homme. Lorsque la petite Florence est retrouvée morte dans les bois, on accuse Antoine. Pourquoi chercher plus loin ?

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Les personnages qui gravitent autour de lui sont vils, cruels et profondément égoïstes. Tous se servent de lui pour arriver à leur fin. Il y a Florence, l’Extraterrestre, amoureux de la jeune fille, qui le paie pour l’observer. C’est malsain, mais Antoine s’y prête quand même. Parce qu’il est l’être à l’esprit le plus innocent de ce village.

-

Bien qu’il soit adulte, Antoine a un langage enfantin, sans code et retenue. Il parle comme ça lui vient. C’est désordonné, vulgaire, parfois. Cela m’a parfois dérangé, je trouvais que c’était trop, lourd. Lourd, comme Antoine. Mais après réflexion, j’ai compris le personnage. Il est prêt à tout pour se faire aimer. Il aime mal, c’est parfois démesuré, obsessionnel. Mais Antoine est pur, si pur. Les autres le rendent sale.

-

Florence est un personnage intéressant, dommage qu’il n’y ait pas quelques chapitres de son pdv. La cruelle vérité qui l’entoure est glaciale. Le seul à connaître la vérité ? Antoine. Antoine, le baoul. L’idiot, le fou. Celui que personne n’entend, ne croit. Nul être ne devrait subir la cruauté des autres.

Bien que l’écriture soit enfantine liée au langage d’Antoine, l’histoire est rudement menée, et on sent la maturité de la plume de l’auteure. Une plume qui décrit le monde, la société, le monde dans leur plus bref appareil.
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Simple

Le baoul, le gogol, n'a pas commencé sa vie sous les meilleurs auspices : sa mère est morte en lui donnant naissance et il devient vite la tête de turc de ce village corse, d'autant plus quand on retrouve le cadavre de Florence, enceinte jusqu'au cou.





Pourtant, il a tout de la bonne pâte ce simplet corse ! Il aime les gens, il aime la nature et les arbres, et sauf quelques fantaisies (téléphoner à la terre entière depuis la cabine du village et croire que Magic, son dictaphone, ou la chaise en plastique fendue, sont ses amis) et quelques coups de sang, c'est un bon gars.





Parce qu'en plus, tout bêta qu'il est, il a ce regard distancié sur ce qui l'entoure, tout benêt qu’il est, il a compris les règles sociales, s'en accommode, module et ...réfléchit !





Et on s'attache à cet Antoine, bousculé par la vie et qui nous conte son bout de vie entre tendresse et cruauté, entre fous rires et gros chagrins.





J'avais tant aimé Moro-Sphinx, j'attendais beaucoup du deuxième roman, et mine de rien, je suis toujours aussi enchantée !





Merci à Valentine et aux Editions Stock pour cette lecture en avant-première !
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Simple

Un roman original qui donne la parole à un homme trisomique, Antoine. Le contexte rural et Corse m'a paru trop exagéré, trop dans l'extrême. Cela m'a d'autant plus gêné que le narrateur est vraiment touchant, sa vision je pense très bien amenée et sentie. Une histoire qui ne laisse pas indifférent en tout cas.

Merci à Netgalley
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Simple

Ce petit livre est très facile et agréable à lire. Il propose une vision décalée d'un petit village de Corse. Il y a des passages assez drôles. Une petite astuce d'écriture qui nous mène sur une fausse piste mais qui est révélée dès la moitié du livre, c'est dommage. Néanmoins la lecture reste agréable grâce au point de vue original du personnage principal.
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