Ryoko Sekiguchi Patrick Honoré le Club des gourmets et autres cuisines japonaises. Traduire. Où Ryoko Sekiguchi et Patrick Honoré tentent de dire de quoi est composé "Le Club des gourmets et autres cuisines japonaises", présenté par Ryoko Sekiguchi, et comment a été traduit du japonais ce recueil de Kôzaburô Arashiyama, Osamu Dazai, Rosanjin Kitaôji, Shiki Masaoka, Kenji Miyazawa, Kafû Nagai, Kanoko Okamoto, Jun?ichirô Tanizaki traduits par Ryoko Sekiguchi et Patrick Honoré, à l'occasion de sa parutuion en #formatpoche aux éditions P.O.L et où il est question notamment de la traduction à deux mains, de Patrick Chamoiseau et de mangas,et des mots pour dire la nourriture et la cuisine.
"Si le Japon est connu comme un pays de fine gastronomie, sa littérature porte elle aussi très haut l'acte de manger et de boire. Qu'est-ce qu'on mange dans les romans japonais?! Parfois merveilleusement, parfois terriblement, et ainsi font leurs auteurs, Tanizaki, Dazai, Kafû du XIIe siècle à nos jours, dix gourmets littéraires vous racontent leur histoire de cuisine."
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Kimie, simple serveuse de bar, voulait bien tout ce qu'on voulait en matière d'esthétique ; elle voyait des jeunes hommes et des jeunes femmes nus s'étreindre parfois en présence de la multitude et, ce faisant, dessiner toutes sortes de figures, et elle s'était demandé quel genre de personnage se révèlerait, si elle pouvait avoir un rendez-vous avec lui, l'homme qui faisait commerce de ce genre de chose. Son état d'esprit ne différait en rien de celui d'une geisha débauchée patronnant un lutteur de sumô, ou d'une étudiante amoureuse d'un champion de base-ball.
Le mécanicien se retourna vers moi en retirant son chapeau et commença à me parler. Je vis alors que c'était une femme ayant de peu dépassé la vingtaine. Elle avait à la main un flacon de whisky dont elle m'offrit un verre, et je compris qu'elle me proposait de faire de la voiture une chambre à coucher de fortune. N'est-il pas singulier que plus le filet des lois se resserre, plus se développe l'ingéniosité pour y échapper ? Que l'arc et la flèche soient remplacés par des armes plus efficaces, l'oiseau vole plus haut. Perfectionnez les filets et les appâts, le poisson plonge plus profondément. Depuis trois mille ans, le monde n'a pas changé.
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Exposer mes livres au plein soleil pendant les dernières chaleurs de l’été, et brûler les feuilles mortes de mon jardin, un après-midi sans vent au début de l’hiver : telles étaient les occupations les plus agréables de ma vie solitaire. De fait, lorsque je sortais les livres, je contemplais ceux qui étaient restés longtemps empilés sur de hautes étagères, l’époque où je les avais savourés me revenait en mémoire, et c’était l’occasion pour moi de percevoir l’évolution des courants du temps et celle de mes goûts. Le plaisir que j’éprouvais à brûler les feuilles mortes venait du fait que j’en oubliais, ne fût-ce qu’un moment, que je menais une vie de citadin.
Chapitre 9
Cet été, comme l’année précédente et celle d’avant, je sortais chaque jour de chez moi avant le coucher du soleil, mais la vérité est que je n’avais nul lieu à atteindre, nul endroit où marcher.
Chapitre 5
L'allée centrale frangée d'herbes aux turquoises était bordée d'un côté par des arbres fruitiers luxuriants : pruniers, châtaigniers, plaqueminiers, jujubiers, et de l'autre par un bosquet de bambous à épis comestibles dont les pousses vigoureuses prenaient la tournure de jeunes sujets d'un beau vert, tandis que les branches des vieux troncs laissaient continuellement choir leurs fines feuilles voltigeantes. C'était l'époque où les corolles épanouies des fleurs des châtaigniers exhalaient leur entêtante odeur, où les jeunes feuilles des plaqueminiers, surpassant même les érables, offraient le vert le plus tendre. A mesure que la cime des arbres laissait filtrer des rayons de soleil dont le chatoiement dansait sur la mousse épaisse, le murmure du vent vous parvenait comme celui d'un ruisseau tout proche et le ramage d'on ne savait quel oiseau s'élançait avec une vigueur plus grande que celle de la pie grièche qui se fait entendre au matin des beaux jours d'automne.
Il n’est pas rare que le sol des palais de l’équité soit jonché d’excréments d’oiseaux ou de rats, et c’est à l’inverse au fond des vallées du vice que l’on peut cueillir et amasser en abondance les belles fleurs des sentiments humains et les fruits parfumés des larmes.
Chapitre 7
Kikuko avait fini par s'endormir tout en pleurant. A peine réveillée, le lendemain matin, elle pensa à sa bague. Regardant ses doigts nus, elle se sentit comme dépouillée de tout. Elle eût préféré perdre ses kimonos ou ses ornements de coiffure que sa bague ornée d'un diamant. Lorsqu'elle avait reçu l'ordre brutal de le rendre elle avait été stupéfaite, et il lui avait semblé que ses plus intimes sentiments avaient été mis à nu. Elle l'avait retirée et jetée en affectant une complète indifférence, mais maintenant, elle se demandait pourquoi elle n'avait pas montré comme d'habitude un dépit enfantin et déclaré que c'était la seule chose qu'elle ne pouvait faire. elle aurait pu lui dire d'un air câlin :
-Si nous devons nous séparer, donnez-moi au moins cette bague en souvenir de vous.
Une femme en chambre garnie ( Cambourakis p 78)
Même ces quartiers nouveaux, qui se forment en des lieux aussi retirés, ne peuvent échapper aux vicissitudes de l’Histoire. Que dire alors de la vie des êtres humains ?
Chapitre 6
D’entre les livres empilés près du mur, il sortit des exemplaires reliés, cinq ou six, les épousseta des deux mains et me les confia :
« Dépôt légal, douzième année de Meiji (*). Quand on lit des revues de cette époque, on a l’impression de vivre plus longtemps, n’est-ce pas ? »
(*) 1879
Chapitre 1
Ce disant, Kimie défit et rejeta son pagne, et cambrée en arrière, se renversa complètement sur les genoux de Yata.
- Enlevez-moi tout, même mes socquettes.
Dans ce genre de situation, quand elle se trouvait pour la première fois en tête à tête avec un homme, et plus qu'avec un amant maintes fois rencontré, son plaisir était multiplié par deux et elle ne se sentait pas satisfaite tant qu'elle n'essayait pas d'envoûter son partenaire autant qu'elle le voulait. A quel moment ce penchant singulier lui était-il venu ? De cela elle prenait de temps à autre conscience au beau milieu des câlineries et voulût-elle y mettre fin en cours de route qu'elle n'y pouvait pas parvenir ; plus encore qu'avec un beau gars, quand elle avait pour partenaire un vieux bonhomme repoussant ou quelqu'un dont elle n'avait pas voulu d'abord, l'instant critique arrivé, Kimie retombait dans son tic habituel, mais amplifié jusqu'au déchaînement, quitte après coup à frémir intérieurement de tant de dépravation ; elle n'eût su dire combien de fois cela lui était arrivé.
Ce soir-là encore, harcelé par ce Yata dont l'affectation lui était d'ordinaire odieuse, Kimie, happée en cours d'opérations par cette frénésie-là, se laissa une fois de plus glisser sur la pente perverse.