Citations de Karine Reysset (134)
Au fond de nous l'étincelle,
Dans le calme orageux
Cet éclair dangereux
Des héros silencieux.
"_Elle voulait voler,voilà ce qui s'est passé.
Notre soeur, c'était un oiseau. Une fée, un papillon, ça ne vit jamais très vieux,c'est trop beau, trop fragile."
Comment vivre avec ce secret? Comment se regarder après ça? Je devais rester la même. Ne surtout pas éprouver de pitié, si c'était ce qu'elle redoutait, mais de la colère, un sentiment profond d'injustice, d'impuissance aussi. J'avais un goût amer dans la bouche. Un goût de sang et de cendres.
Nulle présence si ce n'est celle de la mer, avec son ressac comme un souffle incessant, et de cette minuscule lumière au loin.
Je voudrais m'éteindre pour ne plus m'entendre penser, me débrancher et qu'on n'en parle plus.
Je ne sais plus qui je suis. Cerveau pâte à pizza, coeur troué de part en part, je suis sans contours. J'ai toujours dû m'inventer, me réinventer pour plaire. J'ai toujours voulu plaire à quelqu'un.
[...] il y a trois semaines Garance [14 ans 1/2] est allée à une soirée du côté de Cancale. Je l'y ai déposée avec une copine. J'étais censé les récupérer à une heure du mat' et... en fait c'est l'hôpital qui m'a appelé. (Il hésite un instant avant de continuer.) Ils sont trois à avoir eu un malaise cette nuit-là à cause d'un mélange d'alcools trafiqués. C'est leur nouveau truc aux ados : se mettre minable le plus vite possible et ils semblent prêts à tout pour ça. [... Martin] a voulu jouer les apprentis sorciers à partir de conneries pompées sur Internet.
(p. 23)
La vision des arbres nus me transperce le coeur. J'ai été une enfant des banlieues et des campagnes. J'ai pensé être heureuse à la mer. Je vivote désormais à Paris.
Je suis en paix avec moi-même. J’ai mis de l’ordre dans mes sentiments. Je me reconstruis à chaque fois, avec quelques pièces en plus ou en moins. Je peux me réinventer à volonté. J’ai ce pouvoir, cette faculté.
Je dérivais doucement, me laissant porter par le courant. Je ne souffrais pas tellement de la solitude. Personne ne me connaissait, je me sentais libre.
" J'ai envie d'entendre la voix de Betty. La dernière fois que je l'ai vue, il y a quelques mois, elle faisait dix fois plus que son âge.Elle avait pris la facheuse habitude de trainer dans de gros pulls en laine et des salopettes en jean. Elle a toujours un côté un peu camionneuse "
La mer avait cessé de monter, elle pouvait lâcher prise.
Mettre de la musique ou profiter au contraire du silence et rester seule. L’intimité est un luxe que je peux aujourd’hui m’offrir.
Depuis que j'ai reçu son invitation à ses noces, elle réapparaît dans mes rêves. J'avais mis tant de temps à l'en chasser.
Son caractère s'est affermi au fil des années, et son âme est un soleil.
(...) je ne sais pas ce qui est pire, se souvenir trop bien ou pas assez. (p. 48)
On n'aime pas les porteurs de mauvaises nouvelles. Dans les drames shakespeariens, les messagers sont souvent tués.
Lena consulta sa liste. Elle tenait ça de Marianne. Comment sa mère s’en était-elle sortie ? Ils étaient trois à la maison, plus Achille l’été, les cousins cousines, les copains les copines qu’elle prenait en vacances. Avec seulement deux enfants, Lena avait l’impression de se noyer dans un verre d’eau. Elle sombrait, et personne ne s’en rendait compte. Elle devait courir après le petit, il bravait le danger à chaque seconde comme s’il cherchait à user ses nerfs, éprouver sa terreur. Elle ne le quittait pas des yeux, et avec sa fille, c’était pareil.
Vincent l’appela (elle se sentit prise en faute, les bagages étaient-ils prêts ?). Il préférait rouler de nuit, c’était plus pratique avec les enfants. Elle lui répondit « oui, presque » d’une voix faussement enjouée.
[Ma grand-mère] se met à me raconter qu'il a déjà suffisamment souffert comme ça, qu'il a le droit de vivre sa vie lui aussi, qu'il faut que je sache que rien n'angoissait plus ma mère que d'imaginer mon père seul et malheureux (...). (p. 77-78)
Je suis inondée de larmes à l'intérieur qui parfois débordent comme un trop-plein pour réguler le flux. (p.13)