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Critiques de Lola Lafon (1371)
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Quand tu écouteras cette chanson

La collection "ma nuit au musée" permet à des auteurs de passer ...une nuit dans un musée . En contre partie d'un petit texte bien sur !

C'est dans ce cadre que Lola Lafon a passé un nuit au musée Anne Frank à Amsterdam.

Pourquoi ce choix ?

Sa famille maternelle a particulièrement souffert de la Shoah, le livre est dédiée à sa mère, et l'auteure veut aussi profiter de "ce moment" pour présenter quelqu'un à Anne Frank.



J'ai beaucoup aimé ce texte , tout en sensibilité, comme si l'auteure écrivait à voix haute et nous plongeait dans le monde de ses émotions. C'est fin , empli d'humanité , d'humilité aussi devant l'histoire.



L'analyse du fameux journal , de son élaboration à son interprétation est brillante et le petit détour par le monde du spectacle et l'utilisation faite de ce texte est à lui seul une raison , édifiante, de lire ce livre. Et oui, brave gens , il faut vendre et l'industrie vous le rendra bien avec de multiples récompenses et la postérité assurée.



Ce livre transpire l'honnêteté et Lola Lafon s'applique à nous donner une vision non édulcorée d'Anne Frank et de sa famille. Avant d'être une victime , Anne Frank était une ado avec son caractère trempé et son attirance naissance pour la sexualité. Omettre ces faits, c'est manquer de respect, une nouvelle fois, à cette victime et sa famille.

C'est bien écrit , et l'on sent toute la petitesse que l'on peut éprouver devant L Histoire.



Une très belle lecture , émouvante, où l'histoire personnelle de l'auteure vient se fondre dans L Histoire avec le plus grand talent.



Enfin pour tous ceux qui se demanderait pourquoi ce titre et cette couverture ...soyez patients, votre curiosité sera recompensée !
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Quand tu écouteras cette chanson

Il y a plusieurs années, j'ai "visité" l'annexe où a vécu Anne Frank avec ma fille . La première chose qui m'a questionnée correspond à ce qu'évoque si bien Lola Lafon.

" Je suis venue en éprouver l'espace car on ne peut en éprouver le temps"

Comment la vie d'une adolescente, d'une famille s'est-elle rétrécie jusqu'à ne plus exister.

C'est aussi un peu le défi que nous lance Lola Lafon à travers son " errance" le temps d'une nuit dans la dernière chambre qu'à connue Anne Frank.

Ce qui m'a énormément touchée dans ce récit, c'est aussi le destin de la famille de Lola Lafon qui s'entremele au destin tragique de tous les juifs qui ont connu la Shoah et leurs descendants.

Comment les enfants des survivants vivent ce passé innommable?

Lola Lafon nous confie, qu'elle même pour y survivre doit s'en écarter.

"L'histoire des juifs d'Europe Centrale, je m'en suis écartée à l'adolescence. J'ai tourné le dos à l'abîme.Je ne voulais pas entendre, pas savoir."

Il est très émouvant aussi de connaître le motif du choix de Lola Lafon de passer une nuit dans ce musée.

Et, là, encore son histoire personnelle la lie à Anne Frank. Sa grand-mère : Ida Goldman lui a offert alors qu'elle avait une dizaine d'années une médaille dorée frappée du portrait d'Anne Frank.

Ce récit ,ces interrogations, ces confessions, ces questionnements soulevés par Lola Lafon m'ont bouleversé.

Que dire du titre: Quand tu écouteras cette chanson lorsque Lola Lafon nous révèle les balbutiements d'un premier amour broyé lui aussi sous d'autres cieux et sous une dictature.



J'avais un peu peur d'être déçue en lisant ce livre. C'est tout le contraire, il m'a enrichi et porté tout le long.

" Les hommes sont complices de ce qui les laisse insensibles"

Georges Steiner
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La petite communiste qui ne souriait jamais

Nous sommes en 1976, aux jeux olympiques de Montréal. Nadia Comaneci, vient d’effectué son exercice sur la poutre devant une salle médusée, des spectateurs aux juges en passant par les gymnastes des autres équipes.

En moins d’une minute, tout le monde est sous le charme et on attende la note qui tarde à venir et finit par s’afficher : 1 virgule zéro, zéro ??? Que se passe-t-il ? Nadia a-t-elle fait une grosse bêtise que son entraîneur (Béla Karoly) n’a pas vue ? La foule conspue les jurés. Et le soudain le président du jury fait signe à Nadia : les deux mains en écartant les doigts.

En fait, la petite fée a obtenu la note maximum, mais ceci n’était pas prévu dans l’ordinateur !!! Le petit écureuil (c’est ainsi que Béla appelle ses gymnastes) a même détraqué la machine sensée être infaillible.

Ensuite, le livre raconte, la façon dont les petites filles ont été choisies et entraînées par Béla qui a fondé sa propre école, non sans mal, car c’est le règne du génie des Carpates : Ceausescu. On découvre donc les entraînements, la vie de ces petites filles pour arriver au stade de la compétition.

Il y a un va et vient permanent entre la vie de Nadia et celle de la dictacture des Ceausescu et leur évolution réciproque….

Ce que j’en pense :



Ce roman, comme le dit d’emblée son auteure, n’est pas une biographie exhaustive de Nadia Comaneci. Lola Lafon imagine un dialogue entre elle et Nadia pour tenter d’expliquer ce qu’on ne sait pas vraiment et faire la part de la réalité et de ce que la presse a pu écrire. A priori, c’est une bonne idée, mais en fait, cela m’a gênée dans la lecture (ces chapitres là sont écrits en italique) car on ne sait pas s’il y a des choses vraies ou s’il s’agit de ses spéculations.

L’auteure met très bien en évidence le formatage de ces petites filles qui ont six ans en moyenne quand débute l’école. Elles sont affamées, on compte les calories sans arrêt car elles doivent rester menues, peser le moins possible. Sur le plan de la gymnastique, l’entraînement est inhumain, elles s’entraînent pendant des heures, les mains pleines d’ampoules, se lancent dans le vide sans savoir qu’elles risquent leur vie(ou la paralysie) à chaque saut, mais Béla dit qu’elles peuvent le faire et doivent le faire car il leur donne tout !!!

Elles obéissent toutes, Nadia plus que les autres car elle est perfectionniste donc prête à tous les sacrifices pour Béla et pour la Roumanie. Cela va jusqu’aux vomissements tellement elle a peur de peser cent grammes de trop au contrôle et finira par des troubles du comportement alimentaire (alternance anorexie et boulimie). La perversité de cet entraîneur est sans limite et il exerce une emprise terrible sur ses « petits écureuils » comme il les appellent. Nadia le considère probablement comme un père de substitution donc elle obéit pour qu’il l’aime. Seule la mère de Nadia se méfie mais elle ne fait rien.

Un livre dur, qui fait réfléchir sur beaucoup de choses. Je connaissais assez bien la vie de Nadia Comaneci car en Occident on se posait beaucoup de questions sur les conditions de vie de ces athlètes, dopage ? Quel était ce fameux régime spécial ? les pubertés retardées évidentes ???

Ce livre m’a d’autant plus remuée que je lisais en même temps « Je viens de Russie », un autre ouvrage sur les conditions de vie du temps de l’ex URSS et les réflexions sur ce qu’est la liberté.

Note : 7/10

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La petite communiste qui ne souriait jamais

Biographie romancée de cette extraordinaire gymnaste

*

Une lecture assez mitigée et confuse autant sur le fond que la forme. En fait je suis perplexe quant à mon appréciation.

Je vous explique un petit peu.

La vie de la très célèbre gymnaste roumaine Nadia Comaneci a de quoi remplir un livre. Biographie, mémoires, confessions, récit de vie... Cette femme a vécu énormément de déboires. On parle bien sûr de sa surmédiatisation dans le milieu sportif, sacrifiée sur l'autel de la gloire dans un pays en pleine guerre froide et dictatorial. Course contre la montre biologique, Nadia a été surexploitée puis "mise au rebut". Mais comment peut-elle en sortir indemne ?

*

Sous forme de conversations fictives entre l'auteure et Nadia, le fil se déroule petit à petit , puis se ré-enroule entre digressions et réfutations. J'ai eu beaucoup de mal à suivre la narration. On ne sait jamais ce qui est fait réel de ce qui est imaginaire. Cela m'a déconcerté.

Mais il m'a remué tout de même. Suivre ces petites filles tout au long de leur carrière, pressées de toutes parts, les conditions de vie de ces athlètes sont tout bonnement inhumaines. Pour récolter un peu de gloire, le prix est lourd à payer.

*

L'auteure d'origine roumaine met aussi ce fameux régime dictatorial communiste en lumière à travers la vie de Nadia. Domination, espionnage, régime draconien, asservissement, moqueries, la petite fée communiste en a bavé, là-bas, en Roumanie.

Aujourd'hui c'est une femme accomplie, équilibrée, rayonnante, comblée qui entraîne de jeunes gymnastes dans son pays d'adoption, les Etats-Unis.

A-t-elle fait le deuil de ses années de privation?

On aura du mal à le savoir... elle est si discrète, Nadia....
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La petite communiste qui ne souriait jamais

Très beau texte, sensible et intelligent, captivant loin au-delà de la gymnastique féminine.



Publié en janvier 2014 chez Actes Sud, ce texte de Lola Lafon est le fruit d’un étonnant travail de construction littéraire à partir d’un contenu historique et journalistique, puisqu’il s’agit ici de décrypter la figure emblématique que fut Nadia Comaneci, qui révolutionna la gymnastique entre ses 14 ans et ses 18 ans, des jeux de Montréal en 1976 à ceux de Moscou en 1980, figure nécessairement choyée et mise en avant par le régime communiste roumain, avant de fuir le pays quelques jours avant la chute de Ceausescu en 1989.



Décrypter le sens et le contenu d’un tel emblème, en acceptant, voire en proposant, les controverses - qui ne manquèrent pas - à l’intéressée elle-même, par courrier électronique ou au cours de nombreuses conversations téléphoniques, une année durant, représentait un défi, que Lola Lafon parvient à mener à bien, en ne cachant rien de ses émotions, de ses admirations, de ses doutes profonds, en acceptant surtout, avec une intelligente humilité et une belle humanité, de prendre à la fois le risque de questionner parfois rudement Nadia Comaneci, et celui de l’écouter, réellement, de prendre en compte le poids de ses mots, aussi réticents fussent-ils par moments, et plus encore le poids de ses silences.



Se replonger ainsi dans le triomphe de Montréal (accompagner la lecture en voyant ou revoyant quelques-unes des nombreuses vidéos d’époque disponibles sur le net n’est d’ailleurs ici pas du tout inutile), mesurer la révolution que représenta le débarquement de ce prodige juvénile tout en fragilité apparente, en prise de risque physique jugée parfois insensée et en détermination proprement hors du commun, rappeler l’appropriation du corps exalté par le pouvoir communiste propagandiste (et écouter absolument Nadia Comaneci lorsque, malgré tout sur la défensive, elle mentionne l’appropriation similaire opérée par le capitalisme publicitaire contemporain), sentir la présence permanente et rayonnante, pour le meilleur et pour le pire, du « coach » Béla Károlyi, percevoir tout le trouble et la gêne des uns et des autres autour de la fuite de 1989 par les champs enneigés de la frontière hongroise, et de l’arrivée spectaculaire et terriblement « ratée » aux États-Unis, avec ses profondes séquelles médiatiques : c’est à un parcours exceptionnel de sensibilité et d’intelligence que nous convie ici Lola Lafon.



On regrettera peut-être, et ce sera l’unique bémol ici, que les réactions de Nadia Comaneci soient parfois laissées en points de suspension, peut-être pour ne pas effaroucher un lectorat que l’on peut soupçonner de ne pas être spécialement virulent vis-à-vis des modèles politique et économique de l’Occident (étendu) contemporain, particulièrement lorsqu’elle défend ou minimise la « récupération » dont elle fut l’objet, ou lorsque l’arrivisme forcené de son coach se dévoile. Un peu plus que pour l’anecdote, le visionnage de « Olympic Gold », le reportage sur et avec Mary Lou Retton, la gymnaste américaine propulsée à l’or de Los Angeles par Béla Károlyi, après sa fuite à l’Ouest en 1981, est particulièrement édifiant, tant le triomphalisme cynique et décomplexé de l’athlète américaine et du coach y apparaissent éloignés de la pudeur et de la gêne quelque peu rageuses ou désespérées exprimées par Nadia Comaneci au long du livre de Lola Lafon.



On saluera en revanche sans aucune réserve la subtilité et le respect de l’auteur lorsque seront abordées les péripéties sentimentales et terriblement humaines qu’affrontera la jeune prodige en Roumanie auprès de l’entourage de Ceaucescu.



On trouvera aussi ici, discrètement menée mais intense, une interrogation sur le sens du dépassement sportif, qui évoque curieusement, quoique d’un tout autre angle, le « Mateo » d’Antoine Bello et son exploration footballistique de la parabole des talents en univers capitaliste occidental.



On y trouvera enfin une magnifique leçon de questionnement des récits, des propagandes et des convictions intimes, dans laquelle l’auteur accepte de se « mettre en danger », en montrant ses propres doutes, ses propres raccourcis ou présupposés : la scène presque finale de l’enquête « sur place », à Bucarest, est un moment particulièrement intense du récit, de ce fait.



Un très beau texte, intelligent, sensible et captivant, y compris et peut-être surtout lorsque l’on n’éprouve pas de passion a priori pour la gymnastique féminine.
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Quand tu écouteras cette chanson

Quand tu écouteras cette chanson aborde Anne Frank comme une écrivaine prodige et pas seulement comme un symbole, son journal comme une œuvre et pas seulement comme la dernière trace d’une adolescente juive assassinée par les nazis.

Quoi qu’il en soit, il n’y a jamais assez de livres pour rappeler la Shoah, et tout ce qu’elle a arraché au monde. C’est le cas de chaque génocide.

C’est une nuit dans un appartement d’Amsterdam, resté vide depuis que la Gestapo a arrêté la famille Frank et leurs amis. Comme l’a voulu Otto Frank, le visiteur se confronte à l’absence.

Lola a beau se défendre, réfuter le symbole, dire qu’Anne Franck n’appartient à personne, l’émotion est bien là et l’empêche de pénétrer dans la chambre qu’Anne occupait avec la dernière personne venue se réfugier dans l’Annexe.

Saviez-vous — c’est Lola Lafon qui me l’a appris — qu’Anne Franck a retravaillé son journal en espérant qu’il soit lu ? C’est bien l’œuvre d’un écrivain que l’on donne à lire aux écoliers, sans le préciser, j’imagine, aujourd’hui comme hier.

Lola Lafon boucle son livre sur une autre histoire de massacre que je vous laisse découvrir parce qu’elle est poignante et qu’elle avertit : personne n’est à l’abri d’être considéré comme un danger qui doit être éliminé.

Merci à NetGalley et aux éditions Stock pour cette lecture.


Lien : https://dequoilire.com/quand..
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Quand tu écouteras cette chanson

POIGNANT



Dans le cadre de l'opération "Une nuit au musée" Lola lafon va passer une nuit dans le musée Anne Franck à Amsterdam. Elle va, plus particulièrement, passer une nuit dans l'annexe qui a abrité la jeune fille et sa famille pendant la seconde guerre mondiale.

Anne Franck, on la connait tous... de nom. Beaucoup ont lu son journal, certains ont lu pas mal de littérature autour de ce journal, tout le monde connait son nom.

Ses mots, certains se les sont appropriés, lui ont ôté du sens, ont enlevé les références juives pour être plus vendeurs, les ont transformés en romance, les ont nié en arguant qu'il était impossible pour la gamine que tu étais d'écrire de cette façon.

Tes mots, c'est ce qu'il reste de toi, morte comme tant d'autres dans les camps nazis.

Le vide, c'est ce qu'il reste d'Anne, de Margot dans cette annexe. Le vide, c'est ce que va éprouver Lola Lafon. Ce vide immense peuplé de souvenirs.

Ce vide qui mène à l'introspection.

L'autrice va se tourner vers ses propres souvenirs, ses grands-parents juifs venus en France avec l'espoir d'être intégrés, de devenir français. Ses souvenirs d'enfance, d'un adolescent lâchement assassiné par les Khmers rouges.



L'écriture de Lola Fafon, tout en finesse et en retenue m'a captivée tout au long de ce récit poignant et émotionnel. Une très jolie lecture.

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Quand tu écouteras cette chanson

À quoi bon poster une critique de plus ? Tant pis ….

Je le fais quand même .



«  On ne pourra pas dire qu’on ne savait pas; on pourra dire qu’on ne savait pas que faire de ce qu’on savait » écrit l’auteure avec la lucidité qui la caractérise.

Autre passage «  Au cœur même du vide , un père inscrit tous les mois, au crayon à papier , à la pointe fine , des preuves de vie » .

Lola L. le remarque en s’approchant du papier peint , vestiges émouvants , indicibles , des marques griffonnées de la main d’Otto Franck….

Le père désirait suivre la croissance de ses filles.

Anne Franck sera arrêtée le 4 août 1944, puis déportée à Auschwitz , et assassinée à Bergen- Belsen.

Lola a vécu une expérience personnelle intime tout à fait ambivalente , une très courte incursion dans la cachette aux fenêtres obturées où la famille Franck se terra plusieurs mois, dans l’espoir tragique mais vain d’échapper au génocide nazi.

Le 18 août 2021, elle a passé une nuit au musée Anne Franck , la maison de celle- ci à Amsterdam , en obéissant aux règles qui offre à des écrivains de raconter leur séjour nocturne., depuis quatre ans , dans la collection littéraire «  Ma nuit au musée » …



Une écriture juste, directe , touchante beaucoup de questions traversent ce récit , interrogation à propos des paradoxes de l’obligation de mémoire qui pèsera toujours sur les survivants , l’auteure sonde aussi les béances de sa propre généalogie :

«  L’histoire des juifs d’Europe Centrale , je m’en suis écartée à l’adolescence . J’ai tourné le dos à l’abîme . Je ne voulais ni entendre, ni savoir . Leurs cauchemars ne seraient pas les miens » .



Récit intime très fort résonnant avec l’histoire de sa propre famille: anciens souvenirs d’exil et de fuite liés à elle, pogroms et ghettos de Russie et de Pologne .

Elle rend un émouvant hommage à Anne , tout en restituant à cette adolescence sa vraie place d’écrivaine.

Deux écrivaines se parlent même si l’une d’elles est morte en 1945.

Maîtrisé , bouleversant !

«  Comment imaginer vingt - cinq mois de vie cachés à huit dans ces pièces exiguës ? »

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Quand tu écouteras cette chanson

Avant d'entamer la lecture de ce roman, j'ai relu le Journal d'Anne Franck puis visité en ligne (à défaut de pouvoir aller le visiter sur place) la Maison Anne Franck à Amsterdam afin de mieux comprendre le désir presque obsessionnel de Lola Lafon pour vivre une nuit dans "l'Annexe" et retrouver les conditions de vie d'Anne Franck, celle de sa famille et amis proches avant sa déportation.

Derrière ce désir, c'est aussi sa propre histoire familiale qu'elle raconte avec délicatesse comme un besoin d'apaisement et de sérénité.

Un beau roman plein de sensibilité.

PS : il y a déjà tellement de citations que je n'en n'ajouterai pas une de plus de peur de créer un doublon.















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Quand tu écouteras cette chanson

Et bien voilà, je crois mes ami(e)s que nous tenons là, l'un des premiers grand roman de cette rentrée littéraire. Comment aurait-il pu en être autrement quand on connaît le talent d'écriture et la sensibilité d'une autrice qui, de livre en livre, construit un peu plus chaque jour, une oeuvre littéraire d'une rare intégrité dans sa démarche d'autrice, la qualité de son travail, sur la forme et sur le fond. "Ma nuit au musée" est une collection publiée aux éditions Stock, Leila Slimani et bien d'autres auteur(e)s talentueux se sont soumis avec un plaisir indicible, à cet exercice de style consistant pour chaque auteur(e) à passer une nuit dans un musée de son choix, afin d'en retirer une expérience intellectuelle, émotionnelle et même spirituelle. Lola Lafon a choisit le musée "Anne Franck" et plus précisément "L'Annexe", à Amsterdam en Hollande, le lieu si exiguë où de juillet 1942 au début d'août 1944, Anne, Margot et leurs parents Edith Franck et Otto Heinrich Franck se cachent pour éviter l'arrestation par le SD (Gestapo) puis la déportation. Ils sont rejoins, dans ce lieu dont la porte donnant l'accès à l'Annexe est cachée derrière une bibliothèque, par quatre autres personnes : Hermann, Augusta et Peter, puis en novembre 1942 par Fritz Pfeffer. le 4 août 1944, au matin, Anne Franck et les sept autres personnes présentes, sont arrêtés par un sous officier SS Karl Silberbauer. Tous meurent dans les camps d'extermination nazi sauf le père d'Anne Franck, Otto. Une histoire douloureuse et une mémoire attaquée, violée par les négationnistes et autres nostalgiques du IIIème Reich. "Le Journal" d'Anne Franck est un témoignage hors du commun pour sa qualité à la fois sur le fond et dans la forme. Comment ne pas tomber dans le piège de la redite ? Une histoire connue de tous. Lola Lafon aborde, ce lieu de mémoire où vécu Anne Franck et sa famille jusqu'à leur arrestation, en évoquant la place de l'écrivain, la puissance de l'acte d'écrire qui fait abstraction de la mort pour permettre à l'auteure de laisser une trace dans le temps. Un peu à l'image des hommes préhistoriques et de leurs peintures rupestres. Ecrire c'est se confronter à soi-même. La force du témoignage d'Anne Franck s'est de permettre de ne jamais oublier la Shoah, "plus jamais ça", mais c'est aussi un formidable témoignage d'universalité du crime génocidaire. Lola Lafon se livre et au fond, elle nous parle d'elle, de son rapport à sa judaïté longtemps cachée dans sa famille. L'assassinat d'Anne Franck dans les camps nazi et la volonté de Lola Lafon de parler de cette toute jeune adolescente juive, symbole de l'oppression aveugle, des massacres commis par tous les régimes autoritaires quels qu'ils soient. D'une lucidité impressionnante, d'une qualité d'écriture peu commune, Lola Lafon confronte les fantômes du passé, ceux d'Anne Franck bien sûr mais aussi dans ce que je perçois comme un cri libérateur, l'accouchement des souvenirs, des non dits, des secrets et des blessures transgénérationnelles qui la traverse. le voilà ce grand roman de la rentrée : Lola Lafon "Quand tu écouteras cette chanson" paru chez Stock. Fruit d'une nuit passée à l'Annexe, le lieu où Anne Franck se cacha avec sept autres personnes jusqu'à leur arrestation par la gestapo en août 1944, le nouveau roman de Lola Lafon est une plongée sidérante et cathartique sur l'acte d'écrire et le rôle alloué à la mémoire. C'est LE grand roman à lire en cette rentrée littéraire.
Lien : https://thedude524.com/2022/..
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Mercy, Mary, Patty

Le syndrome de Stockholm, tout le monde connaît : la victime d’un enlèvement, généralement féminine – encore que, le baron Empain, de son propre aveu, était à…un doigt de l’éprouver lui aussi !- s’entiche de son ravisseur, adopte ses idées et se met même à les professer avec force, reniant un passé de nanti , une vie de bourge, un confort de nabab…



On appelle cela aussi un lavage de cerveau. Ou un processus de radicalisation, dans une perspective plus actualisée..



Au cinéma, Cassavetes dirait- puisqu’il s’agit de femmes- « Femme(s) sous influence »



Femmes sous influence….ce serait la meilleure façon de résumer le livre de Lola Lafon construit autour du procès de Patricia Hearst, fille de milliardaire enlevée en 1972 par le groupe d’extrême gauche S.L.A. , qui épousa si bien la cause de ses ravisseurs qu’elle participa-dirigea ?- un braquage de banque avec eux.



Tous furent massacrés – et brûlés vifs- par le FBI à l’exception de deux d’entre eux, dont Patty dont le procès défraya la chronique. Elle avait pour la circonstance retrouvé son collier de perle et sa coiffure à barrettes, trainaillait élégamment sur les syllabes façon gentry, bref on ne retrouvait plus la pétulante chef de bande au verbe haut qui accusait les siens d’être des affameurs du peuple.



Mais où était le lavage de cerveau ? Avant, après ou pendant son enlèvement ? Où était la vraie Patty ?



Chargée par la famille de préparer un rapport sur la presse et l’abondante littérature portant sur le sujet, Gene Neveva, prof de fac américaine en congé sabbatique sur la côte landaise, embauche pour l’aider une petite gourde anorexique de bonne famille dont le regard neuf sur cette affaire américaine et l’évidente envie de bien faire lui seront d’un grand secours. Elle s’appelle Violette mais elle n’aime pas son nom : qu’on l’appelle Violaine, comme l’héroïne claudélienne, ce sera parfait. Tiens, tiens...Patty Hearst non plus n’aimait pas son nom et s’était rebaptisée Tania…



Gene comme Violaine vont se prendre au jeu de cette enquête et devenir les…otages de leur sujet. La petite gourde va rompre les amarres familiales, la prof de fac prendra elle aussi ses distances avec la famille Hearst et le système de défense qu’ils ont choisi…





Une troisième femme entre dans la danse, 40 ans après, qui se passionne pour le cas Patty : c’est la narratrice (Lola Lafon ou son alias) .



De Gene à Violaine, de Violaine à Lola, femmes en quête d’une vérité sur l’influence négative , le lavage de cerveau, l’embrigadement, la radicalisation …qui, sous un autre angle, peuvent aussi devenir l’influence positive : la formation, l’émancipation, la prise de conscience, la révolte…



Femmes en mouvement, femmes en voie d'émancipation, femmes d'influence sous influence...



Vaste problème, enquête nourrie, débat d’une brûlante actualité.



Mais, mais, mais….



Mais ….à trop embrasser, on étreint mal. J’ai peiné, souffert même sur un début où les pronoms narratifs – le vous, à Gene, le elle, pour Violaine, le je pour la narratrice - m’ont pris la tête au point d’avoir envie de lâcher un livre pourtant passionnant. Puis soudain, le sujet prenant son envol j’ai cessé de me crisper sur ces afféteries formelles, et dévoré d'un coup le reste du bouquin.



Mais… le titre est trompeur : Mercy, Mary sont de jeunes colons ( colones ?) américaines enlevées par les Indiens au XVIII siècle et ayant refusé de réintégrer leur famille…Elles viennent plomber encore le sujet et embrouiller la trame… mais Lola Lafon - sans doute bien occupée à gérer ses pronoms personnels et sa chaîne de femmes en voie d’émancipation- n’a pas trop insisté sur ces visages pâles qui ont choisi de rester squaws , archétypes emplumées du syndrome de Stockholm. Heureusement, sinon je crois que j’aurais rendu mon calumet !



Restent un joli titre , Mercy, Mary, Patty, une documentation très fouillée sur une affaire passionnante, et une furieuse envie de débattre la question. Ce n’est déjà pas si mal !





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Quand tu écouteras cette chanson

« Les hommes sont complices de ce qui les laisse insensibles. »



J'aime beaucoup les musées, ils ont une âme, ils expriment, à travers le temps et l'espace, la mémoire de notre passé.

Lorsque j'ai visité Amsterdam il y a de cela quelques années, je n'ai pas manqué de me rendre dans certains lieux incontournables de la capitale, notamment le musée Van Gogh et le Rijksmuseum. Mais je n'ai jamais été autant bouleversée que par la visite de la maison d'Anne Frank. C'est un lieu de mémoire, mais je me suis sentie gênée, presque honteuse de faire la queue pour visiter cet endroit, comme si je n'avais pas place dans cette histoire.



Cette jeune fille a vécu cachée, pendant vingt-cinq mois, avec sa famille, au deuxième étage d'un immeuble qui ressemble à beaucoup d'autres. C'est dans le silence indispensable de « l'Annexe », une cachette aménagée par son père dans son entreprise, qu'elle va commencer à rédiger un journal, s'inventant une amie imaginaire, Kitty, à qui elle raconte sa vie quotidienne et lui confie ses peurs, ses angoisses.



« Anne n'oeuvrait pas pour la paix. Elle gagnait du temps sur la mort en écrivant sa vie… Son Journal est l'oeuvre d'une jeune fille victime d'un génocide, perpétré dans l'indifférence absolue de tous ceux qui savaient. »



*

Je découvre Lola Lafon avec ce livre intimiste, lequel m'a particulièrement touchée. « Quand tu écouteras cette chanson » assortit admirablement pudeur et respect, authenticité et simplicité, justesse et finesse, délicatesse et sensibilité, partage et transmission.

Vous allez peut-être penser que je suis dithyrambique, trop excessive, mais ce que j'ai ressenti est difficilement exprimable. L'autrice m'a emportée dans son histoire, dans celle d'Anne Frank et de sa famille, et plus généralement dans l'histoire de toutes ces familles victimes de la Shoah.



*

Lola Lafon a choisi de passer la nuit du 18 août 2021 dans « l'Annexe » du Musée Anne Frank, marchant sur les traces d'un passé, celui d'Anne Frank, de sa famille et de leurs amis.



« Cette nuit, je la passerai là où huit personnes, vingt-cinq mois durant, ont dû se plier au silence, en apprendre toutes les nuances, des chuchotements jusqu'aux pas feutrés en passant par l'immobilité totale. »



La solitude et le silence de la nuit accompagnent l'autrice dans ce lieu chargé d'histoire, imprégné d'une atmosphère à la fois feutrée, lourde mais authentique.

C'est avec beaucoup de maîtrise et de finesse que Lola Lafon entrelace passé et présent, le texte d'Anne Frank et le sien. Les mots se fondent ainsi dans la nuit en une narration à deux voix qui se rencontrent et s'entremêlent.



« L'angoisse, écrit-elle le 8 novembre 1943, est une masse sombre qui ne nous pousse ni en bas, ni en haut, mais se tient devant nous, mur impénétrable, qui s'apprête à nous détruire mais ne le peut pas encore. »



*

Ainsi, Lola Lafon raconte cette nuit émotionnellement forte qui va constituer un véritable moment d'introspection. Aux réflexions d'une grande lucidité d'Anne Frank quant à la barbarie des nazis ou au génocide des juifs, vont se superposer celles de l'autrice, sur son identité juive et son histoire familiale tronquée par des vides et des silences.

Des destins de gens ordinaires s'invitent dans cette nuit si particulière, des vies anéanties par les mouvements imperturbables de l'Histoire avec un grand H.



« Un jour, cette horrible guerre se terminera enfin, un jour nous pourrons être de nouveau des êtres humains comme les autres et non pas simplement des juifs, écrit Anne Frank, le 11 avril 1944. »



*

En pénétrant dans les pièces de cette « Annexe », c'est un sentiment de vide et d'absence qui nous enserre. Et de manière très étrange, en même temps, on a l'impression qu'au coeur de ces lieux austères et inhabités, Anna Frank et les siens y « habitent » toujours.

Mais pour les huit personnes qui ont vécu dans l'inconfort de ces minuscules pièces pendant de si longs mois, qu'a représenté cette « Annexe » ? Un refuge ? Une prison ? Un piège ? Un supplice ? Un espoir ?



« On ne peut pas se représenter la lourdeur des heures, l'épaisseur des semaines. Comment imaginer vingt-cinq mois de vie cachés à huit dans ces pièces exiguës ? »



Des mots de l'autrice me reviennent à l'esprit au moment d'écrire ces lignes : courage, combat, vie, mort, confiance, espoir, tristesse, souffrance, extermination.

Mais celui qui revient le plus souvent dans le texte de l'autrice, c'est la peur qui a habité continuellement les pensées d'Anne Frank. Cette peur qui revient sans cesse, laissant une empreinte indélébile sur ce récit : peur d'être entendus, peur d'être dénoncés, arrêtés et séparés, peur de mourir, peur de perdre l'espoir.



« La peur est-elle un envahissement brutal, semblable à un courant d'arrachement, cette force qui entraîne au large contre laquelle on ne peut lutter, ou la peur se dilue-t-elle dans les jours qui passent, et on finit par s'y faire, à la peur ? »



Le journal d'Anne Frank s'achève le 1er août 1944 lorsque les clandestins sont dénoncés anonymement, arrêtés et déportés. Anne Frank meurt du typhus dans le camp de Bergen-Belsen à l'âge de 15 ans. Des huit clandestins, seul, le père d'Anne Frank survivra aux camps de la mort.

Le livre de Lola Lafon s'achève sur le vide laissé par la mort d'une personne qui habite ses pensées. Une autre époque, plus récente, un autre régime politique, mais avec toujours cette folie meurtrière qui pousse les hommes à des génocides.



« I started a joke

Which started the whole world crying

Till I finally died, which started the whole world living

Oh, if I'd only seen that the joke was on me »

Bee Gees (*)



*

C'est dans un style épuré et posé, doux et amer, nostalgique et mélancolique, que l'autrice appelle l'intime pour aborder avec beaucoup de profondeur, les thèmes de la mémoire, des souvenirs, de l'identité, des traumatismes transgénérationnels.



Avec subtilité et pertinence, Lola Lafon va être également amenée à s'interroger sur l'acte d'écrire, sur le sens et le poids des mots, et à évoquer la censure du texte de la jeune autrice à sa parution, un sujet malheureusement d'actualité avec Agatha Christie retitré ou Roald Dahl réécrit ou retouché.



« Peut-être commence-t-on parfois à écrire pour faire suite à ce qu'on a perdu, pour inventer une suite à ce qui n'est plus. Pour dire, comme le petit rond rouge sur un plan, que nous sommes ici, vivants. Si la mémoire s'étiole, les mots, eux, restent intacts, ils sont notre géographie du temps. »



*

Pour conclure, c'est avec honnêteté et délicatesse que Lola Lafon nous transmet un récit poignant et émouvant. Sans jamais supplanter Anne Frank, sans jamais édulcorer les propos de la jeune femme, l'autrice redonne vie au passé, à Anne, à sa soeur Margot et aux six autres personnes recluses, à cette « Annexe » marquée par ces deux années d'enfermement. Je me suis glissée dans les pas de l'autrice, ils m'ont ramenée dans ces pièces sombres et exiguës. A ses côtés, j'ai retrouvé les traces du passage d'Anne Frank.



« Quand tu écouteras cette chanson » est un très beau roman qui perpétue la mémoire, pour que le passé ne s'efface jamais et que personne ne puisse dire un jour que les déportations massives et les camps d'extermination n'ont jamais existé.



« L'amour s'en va comme cette eau courante

L'amour s'en va

Comme la vie est lente

Et comme l'Espérance est violente »

Apollinaire



****

(*) Traduction de la magnifique chanson des Bee Gees

J'ai voulu faire une plaisanterie, qui a mis en pleurs le monde entier,

Mais je n'ai pas compris que c'était de moi qu'on rirait, oh non.

Jusqu'à ce que finalement je meure, ce qui permit au monde entier de vivre

Oh, si seulement j'avais compris que c'était de moi qu'on rirait

****
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Quand tu écouteras cette chanson

Il y a quelques jours je suis tombée sur une photo qui m'a particulièrement touchée : celle d'Otto Frank qui revenait dans l'Annexe quelques heures avant l'inauguration à Amsterdam de la Maison d'Anne Frank en 1960...



Soixante-et-un ans plus tard, Lola Lafon va à son tour monter les marches de ce lieu sacré pour y passer la nuit... Depuis la déportation de la famille Frank, rares sont ceux à avoir vécu cette expérience marquante... Lola Lafon, par sa magnifique plume nous offre un roman bouleversant et très immersif. Alors que la nuit passe, nous avons l'impression que le temps s'est arrêté. L'écrivaine va, le temps de ces quelques heures nous faire part de son ressenti et donner ses impressions lors de ses déplacements entre l'annexe et le musée. Par ailleurs, l'auteure va également se livrer sur son histoire familiale qui comporte de nombreuses similitudes avec celles des Frank.  



Premier ouvrage lu de cette auteure dont j'avais beaucoup entendu parler, j'ai eu un coup de coeur pour "Quand tu écouteras cette chanson", un texte très abouti dont les paroles resteront longtemps en mémoire...



Je tiens à remercier les Éditions Stock et Netgalley France pour cette belle découverte livresque...
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La petite communiste qui ne souriait jamais

Tout d'abord je tiens à remercier Babelio et les éditions Audiolib pour l'envoie de ce livre en version audio, grâce à la géniale opération de masse critique.



C'est une agréable découverte pour moi puisqu'il s'agit de mon tout premier livre audio.

Je me suis laissée portée par la voix de Chloé Lambert qui lit brillamment cette histoire. Elle utilise toujours les bonnes intonations et sait faire preuve de dynamisme en marquant certains passages avec des rythmes plus soutenus pendant sa lecture. Bref, très agréable à écouter.



J'ai été très touchée par cette histoire puisque c'est une fiction basée sur des faits réels. En effet, l'auteure s'inspire de Nadia Comaneci, la petite gymnaste à la destinée exceptionnelle qui avait gagné les J.O. de Montréal en 1976.

Lola Lafon, nous offre ce beau roman après un travail colossal de recherches sportives, de documentations chronologiques et politiques. C'est assez subtil de sa part puisqu'elle a tenue à garder les faits et les dates exactes, pour ensuite projeter le reste dans la fiction.

La structure du roman est très rythmée puisque l'auteure alterne entre la narration et des échanges entre l'auteure et une Nadia imaginée.



J'ai été assez bouleversée par cette histoire, même si ce n'est pas un portait à l'identique de la gymnaste, mais le fond reste réel. C'est "l'histoire d'un corps féminin" comme l'indique Lola Lafon. Comment ne pas être touchée par cette petite fille qui est jugée en permanence et à qui on trouve toujours quelque chose à reprocher? Au fur et à mesure de l'histoire, l'auteure décrit les transformations du corps de la jeune fille, sa puberté, les moments de difficultés pour s'en tenir à un régime alimentaire très strict pour rester aussi svelte que possible, et aussi plus tard des jugements sur sa sexualité. Difficile de voir une jeune fille acclamée par tous et pris en exemple par les plus jeunes, mais à qui on reproche de grandir et de devenir une femme.

On découvre l'envers du décor d'une Roumanie révoltée où l'endoctrinement fait rage. Mais également les durs entraînements de Béla toujours plus exigent et qui la fait travailler sans relâche.

Adulée par les médias du monde entier, on suit cette figure emblématique qu'est Nadia à travers ses déplacements, sous les subtiles descriptions de l'auteure sur son regard d'adolescente.



Dans cette version audio du roman, j'ai particulièrement aimé la dernière plage qui nous offre un entretien avec l'auteure à Paris au mois d'avril 2014, où elle nous explique notamment les motivations qui l'ont poussées à écrire cette histoire.

D'ailleurs la vraie Nadia avait répondu à ce propos "Je ne comprends pas ce qui a pu autant inspirer cette auteure, je n'ai fait que mon travail".



Une très belle découverte. Un texte percutant, intelligemment écrit et très bien raconté de manière extrêmement captivante.

Un grand bravo à l'auteure ainsi qu'à la lectrice pour cette belle version audio.
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Quand tu écouteras cette chanson

Que d'émotions à la lecture de ce court ouvrage de la collection « une nuit au musée »

Émotion de (re)découvrir sous la plume de Lola Lafon l'annexe que j'ai visité le matin même à Amsterdam

Émotion de retrouver Anne Frank, l'adolescente, l'icône, la témoin, l'écrivaine

Émotion de lire le parcours de Lola Lafon, autrice mais également petite fille juive de Roumanie, à l'histoire familiale impactée par la Shoah

Émotion enfin de constater que les hommes n'apprennent jamais du passé et que des massacres subsistent toujours dans un coin du monde



« On ne pourra pas dire qu'on ne savait pas ; on pourra dire qu'on ne savait pas que faire de ce qu'on savait. On pourra dire l'impuissance qui nous saisit, qui nous écrase, plus on sait et moins on peut. »



Un texte pudique, fort, que j'ai terminé la gorge serrée

Un ❤️
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Chavirer

Moi aussi, j’ai eu 13 ans.



Moi aussi, j’ai lu ce roman, j’ai ainsi visité le monde de la danse professionnelle et j’ai eu de la peine pour ces filles coupables d’avoir 13 ans et trop d’ambition et de rêves.



Moi aussi j’ai été révolté par les personnages de ces pédophiles qui utilisent des filles jetables après usage et par les complices, cette femme trop gentille qui recrutent les filles, mais aussi par les parents qui étaient contents de tout cet argent, de tous ces cadeaux qu’un homme faisait à leur fille de 13 ans.



Moi aussi je n’ai pas été recrutée par la Fondation Galatée, mais j’ai senti le malaise, la convoitise du vieux schnock. Ce n’est qu’un roman, mais elles ont existé pour vrai ces jeunes skieuses, ces jeunes patineuses abusées par leur entraîneur ou ces filles à qui on a promis un rôle si elles étaient gentilles. Des filles qui ont quitté le sport, la scène, la danse, ou même l’école à cause ça. (Et il n’y a pas que des filles, des jeunes garçons aussi…)



Moi aussi, j’ai eu 13 ans et j’ai appris à me méfier. J’ai entendu cette maman impuissante qui disait à sa fille « arrange-toi pour n’être jamais seule avec ton patron ».



Moi aussi, j’ai eu la chance de connaître des coaches honnêtes, des profs consciencieux, des hommes bons. Mais ça n’empêche pas que Moi aussi, je veux que le monde change et que plus jamais nous ne soyons complices…

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La petite communiste qui ne souriait jamais

Une jeune fille d'une douzaine d'années

Lourdement sur la poutre s'est lancée

Pour une roulade avant qu'elle a ratée.

Elle recommence, mais a failli se rompre le cou

Nous sommes en 1976, les années Ceaușescu

La gymnaste empotée, c'est moi, je l'avoue !

Pendant ce temps en Roumanie, sylphide,

Un papillon blanc est sorti de sa chrysalide,

Qui s'envole dans les airs, acrobaties fluides

Nadia Comaneci, la grâce absolue

Les médailles, elle les a toutes eues

Au prix d'un régime qui m'était inconnu.



J'ai lu ce livre, eu un peu de mal à le finir malgré mon intérêt pour cette athlète sacrifiée, que petite fille j'admirais à la télé, et qui de la gloire n'a gardé que ses secrets. C'est un ouvrage mi-reconstitution, mi-fiction, entre régime communiste et sport de haut niveau, tant les informations ont pu être déformées, reformées, transformées.

Elle seule détient sa vérité, mais elle nous avait bien fait rêver avant que l'on ne découvre toutes les atrocités.



La fin justifiait-elle les moyens à ce point ?



Ci-joint le lien de la vidéo de ses exploits, 1976
Lien : https://youtu.be/Yi_5xbd5xdE
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Quand tu écouteras cette chanson

Alors qu'elle pose ses valises dans cet hôtel d'Amsterdam, une carte lui promet qu'ici elle oubliera tout, alors que précisément elle est venue passer une nuit au musée, pour ne rien oublier : le musée Anne Franck. Un hommage vibrant, de toute beauté, d'une précision ahurissante : sur une première partie, plus émotionnelle, on retient son souffle, tant les réflexions sont renversantes quand elles ne font pas ou froid. Chaque phrase dit quelque chose, d'elle ou d'elle, ou de nous. Sur une seconde partie, c'est plus contemporain, plus historique, sur les procès faits à ce journal et à son écrivaine notamment. On en ressort tout autre de cette lecture : voilà pourquoi j'aime lire, quand il y a un avant et un après. je m'arrête là : à vous de faire le voyage dans ce lieu chargé... Cette collection une "nuit au musée" tient toujours ses promesses, et ce récit plus particulièrement encore : il est an-thro-po-lo-gique. Je m'arrête disais-je. Deux prix en 2022 : Prix Décembre et Prix les Inrockuctibles.
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Chavirer

Cléo, 13 ans, est inscrite à la MJC de son quartier, elle rêve comme beaucoup de jeunes filles des années 1980-1990, de devenir danseuse de modern jazz. Elle y fait la rencontre d'une certaine Cathy représentante de la « fondation » Galatée censée aider des adolescents disposant de capacités exceptionnelles en leur offrant une bourse. Elle fait cette rencontre pour le meilleur, c'est ce qu'elle croit dans un premier temps, mais c'est surtout le pire que cette femme amène dans son sillage.

Le personnage de Cléo est celui d'une jeune fille qui se sent insignifiante au sein de sa famille d'abord ; elle est issue d'un milieu médiocre étriqué, en repli et qui manque vraisemblablement de lumière. Elle ne rencontre pas non plus un franc succès auprès du groupe social représenté dans le roman par le collège et le lycée. Ce manque d'écoute, de reconnaissance, de visibilité va servir sur un plateau les desseins de la « fondation » Galatée. Cathy et sa « fondation » s'immiscent dans sa vie au bon moment. Dans le mythe, Galatée est la statue que Pygmalion façonne à sa manière et dont il tombe amoureux.

La jeune fille est immédiatement éblouie par cette femme et les promesses de gloire qu'elle lui fait miroiter ; Cathy représente la classe, le luxe, l'emmène dans des lieux chics, fastueux et connus du tout Paris et du show business, elle la couvre de cadeaux et d'argent, elle lui fait découvrir tout un univers des paillettes qui participeront à son aveuglement. Tout ceci se fait avec l'assentiment des parents, la jeune fille est dès lors lancée dans la gueule du loup, un réseau de prostitution. Elle est nue face à ces prédateurs, sans bouclier. Tout le monde autour d'elle ferme les yeux.

Les déjeuners auxquels elle est invitée et l'appartement dans lequel elle est accueillie avec d'autres filles sont glauques, la prestation devant le jury ne vient jamais, la bourse elle-même lui est refusée, peut-être plus tard lui promet-on. Pire encore, elle est elle-même chargée par Galatée de recruter d'autres jeunes filles venant de milieux modestes bien sûr ! Et cela plait bien à Cléo qui devient ainsi une vraie vedette au collège. Elle devient une « Cathy » mais culpabilise fortement lorsqu'elle enrôle Betty, l'une de ses amis et d'autres aussi, dans cette galère, elle aide à construire tout un réseau de jeunes filles qu'on mène à l'abattoir. Cette culpabilité va la hanter, elle se transformera en un sentiment envahissant qui fera surgir la question lancinante de l'impossible pardon même à l'âge adulte car ce pardon selon la narratrice ne peut défaire le passé. Puisqu'il s'agit de danse, le corps malmené est lui aussi mise en scène, il souffre tout autant que les esprits, on doit le réparer. Tout est cassé.

Le mérite du roman de Lola Lafon est de pouvoir mettre en lumière des événements dramatiques, sous la forme d'une fiction avec des allers-retours entre passé, présent, futur et toute une galerie de personnages précisément construits gravitant autour de Cléo et mettant en cause le personnage qu'elle incarne ou ses actes passés, chacun à sa manière. Ce sont des amis qui la quittent lorsqu'ils apprennent le scandale qui l'entoure, des amants de passage en lien avec le show business, un(e) grand amour de jeunesse qui ne lui ressemble pas, elle est militante, cultivée, féministe, elle met en cause son rôle de recruteuse mais aussi le silence sur l'affaire et les dommages subis pat les victimes. Les professionnels avec qui elle travaille ont un comportement ambigu, amis parfois mais pas toujours solidaires quand il faut oser parler et agir. Sa famille descendante, notamment sa fille qui admire mais pointe aussi parfois du doigt sa participation en tant que danseuse à l'émission de Drucker.

Ce qui permet de développer ces personnages, leur manière de penser, c'est la construction particulière de ce roman dans lequel chacun des chapitres se centre sur un personnage en entremêlant les époques et les discours. le fil de la narration peut échapper au lecteur : le récit n'est pas linéaire, le lecteur doit reconstituer un puzzle défait. C'est une narration éclatée. Comme si tout avait volé en éclat autour du personnage de Cléo et de ses camarades et que la romancière nous donnait l'occasion de reconstruire les choses en accompagnant Cléo et les autres personnages à chaque chapitre.

Il n'y a pas que le destin des individus qui vacille, c'est toute une société qui chavire ; A Carpentras on profane des tombes, les discours des politiques dénigrent certaines « minorités », les grévistes contestent le pouvoir établi. Les professionnels de la danse font circuler des pétitions dénonçant leurs conditions de travail au sein du showbiz. Bien d'autres événements déstabilisants des années 1980-1990 sont dépeints et construisent la toile de fond du roman.

Ces paroles, ces actes sociaux extériorisant la souffrance sont à l'unisson de ce que vivent de l'intérieur les personnages blessés. A un moment donné la parole doit surgir car c'est le silence qu'on impose aux victimes, qu'elles s'imposent elles-mêmes qui a permis toutes ces destructions et machinations. Les femmes mettront plus de 30 ans après les faits pour s'exprimer sur ce que la « fondation leur a fait subir. » le silence a été aidé par l'indifférence. Ce livre est aussi une réflexion sur le consentement.

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Une fièvre impossible à négocier

Landra la jeune héroïne quitte sa Roumanie natale pour la France, très vite les espoirs d’une vie meilleure se transforment en cauchemar. La jeune femme est victime d’un viol. Brisée, perdue elle rejoint un groupe d’altermondialiste prêt à en découdre avec un système qu’ils rejettent.

Le premier roman de Lola Lafon est un coup de gueule contre les injustices en tout genre. Sur des sujets difficiles, elle n’évite pas toujours les maladresses, mais on ne pourra pas en revanche lui reprocher une sincérité indéniable. Son récit est constamment animé par l’urgence. Entre désespoir et colère, Landra cherche une échappatoire dans ce combat radical. On est ému par cette jeune femme blessée dans sa chair qui choisit une cause extrême et violente pour rester dans ce monde qui l’a rejeté de la pire des manières. Un roman musclé, dur, plein de rage et de fureur.
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