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Citations de Marie-Hélène Lafon (932)


".....ses seins qui avaient surgi l’année précédente, en quelques mois.Et aussitôt le regard aimanté des mâles, tous, les vieux les jeunes, les possibles et les impossibles, les longs maigres et les courts suiffés, les très ordinaires qui n’oseront pas et les très remarquables qui vous foudroient d’un œil souverain, tous, confinés dans leur viande et nantis du fatidique instrument."
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Il préfère que Gabrielle soit loin, mais il se tait. Il l'a embrassée à la gare, il a senti son parfum de Paris, le parfum des arrivées et des départs, qu'il garde dans le nez et la gorge, il le respire encore, le mâche, l'avale et le déglutit. A Figeac, l'été, sa mère ne se parfume pas ;

page 60
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Dans une ferme les employés doivent avoir ce qu’il faut à table, sinon ils ne restent pas, surtout si le patron est pénible. C’est vrai pour les vachers, moins pour les commis comme Félix qui se fixent quelque part et n’en bougent plus.
(page 46)
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Il se souvient qu’il avait été vexé de ne pas l’avoir senti, qu’elle pourrait partir comme ça, avec les trois gosses, sans affaires, sans rien, alors qu’il croyait la tenir, surtout par l’orgueil ; elle aimait faire la patronne, et se promener en voiture dans le bourg pour aller à la messe ou aux courses avec les gamins bien habillés. Il ne la pensait pas capable d’un coup pareil, elle avait de la gueule, elle était bonne pour bramer et se plaindre toute la journée, mais décider, partir et ne pas remonter, non, il n’y croyait pas, surtout quand on avait commencé à parler d’argent avec les avocats.
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En juin le pays était un bouquet, une folie. Les deux tilleuls dans la cour, l'érable au fond du jardin, le lilas sur le mur, tout bruissait frémissait ondulait ; c'était gonflé de lumière verte, luisant, vernissé, presque noir dans les coins d'ombre, une gloire inouïe qui, les jours de vent léger, vous saisissait, vous coupait les mots, les engorgeait dans le ventre où ils restaient tapis, insuffisants, inaudibles. Sans les mots on se tenait éberlué dans cette rutilance somptueuse. C'était de tout temps; cette confluence de juin, ce rassemblement des forces, lumière vent eau feuilles herbes fleurs bêtes, pour terrasser l'homme, l'impétrant, le bipède aventuré, confiné dans sa peau étroite, infime.
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"il s'était avancé vers elle, en pyjama bleu (...) Elle avait enfoncé en lui l'éclat cru de ses yeux clairs, elle avait dit, d'une voix presque rieuse, recouchez-vous jeune homme on est presque toujours bancal sur trois jambes."
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Il avait aussi appris ça, avec elle ; que les fastes affaires des corps et cette confiance muette qu'elles supposent n'empêchent pas d'être seuls.
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Gordana ne croise pas les jambes, la position deviendrait intenable. Elle se tient droite, la blouse, courte rouge gansée de blanc, ouverte sur ces cuisses efficaces. Et que dire des seins. La blouse fermée n'y suffirait pas. Ils abondent. Ils échappent à l'entendement ; ni chastes ni turgescents ; on ne saurait les qualifier, ni les contenir, ni les résumer. Les seins de Gordana ne pardonnent pas, ils dépassent la mesure, franchissent les limites, ne nous épargnent pas, ne nous épargnent rien, ne ménagent personne, heurtent les sensibilités des spectateurs, sèment la zizanie, n'ont aucun respect ni aucune éducation. Ils ne souffrent ni dissidence ni résistance. Ils vous ôtent toute contenance. On se tient devant eux, on voudrait penser aux produits, faire les gestes dans l'ordre, sortir déposer ranger, vider remplir, la carte le code. On s'efforce on se rassemble on s'applique, tous, plus ou moins, femmes et hommes, vieux et jeunes et moyennâgés ; mais ça traverse, ça suinte, c'est organique. C'est une lueur tenace et nacrée qui sourdrait à travers les tissus, émanerait, envers et contre tout, de cette chair inouïe, inimaginable et parfaitement tiède, opalescente et suave, dense et moelleuse.
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On ne saisit pas Cézanne, on ne l'épuise pas, il résiste, on l'effleure, il glisse, il disparaît dans le sous-bois. On l'espère. On l'attend.
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Elle n’aura pas d’autre enfant, il sera le dernier, elle aime le tenir contre elle, le garder, il est doux, il sent le sucre chaud et le bébé, encore. Il rit quand il se réveille, il est joyeux le matin quand ils sont seuls dans la chambre elle et lui. Les filles s’échappent déjà, elle le sent ; elles courent, elles sautent, elles sont sérieuses, elles se taisent.
(pages 14-15)
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Il devint attentif à la voix grave voilée chaude moirée veloutée. Il épuisa ses adjectifs. Il s'appliquait, les yeux fermés, divagant et ramassé dans sa peau. Granuleuse, peut-être, la voix de Mademoiselle Léoty, mais pas rocailleuse, ni éraillée ; caressante ; non, pas caressante, le contraire, presque le contraire, ça vous passait dessus, vous passait au travers, vous rentrait dedans, vous touchait à l'intérieur, sous la peau. Le troisième jour, le mercredi, il s'arrêta sur chaude et granuleuse, et sut exactement à quel point c'était aussi sexuel.
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Restent, dans le désordre des années et de ma mémoire, le vivant velours des sous-bois, des baigneuses, des Sainte-Victoire inlassables, des Grands Arbres au Jas de Bouffan, de Madame Cézanne à la jupe rayée, dans la serre ou au fauteuil jaune, de la Neige fondue à l'Estaque, de la Fillette à la poupée, des pots, des pichets, des cruchons, des compotiers, des fruits éternels, des Joueurs de cartes, du Paysan en blouse bleue, du jardinier Vallier sous son tilleul, des Marronniers du Jas de Bouffan en hiver, des portraits de Louis-Auguste Cézanne, père de l'artiste, d'Achille Emperaire, d'Ambroise Vollard, de Victor Chocquet ou de l'Artiste au bonnet blanc; reste, sous le soleil effrayant de l'Estaque, la carte à jouer des toits rouges sur la mer bleue.
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Il conduira vite, alors qu’ils ne seront pas en retard. Il aime appuyer sur le champignon, c’est son expression, mais elle croit qu’il aime surtout sentir qu’elle a peur à côté de lui et n’ose pas le dire, lui demander de se calmer, parce que les trois enfants sont derrière, et qu’il n’est pas tout seul, et que c’est de la folie de couper les tournants, comme ça, et que ça finira mal, forcément, ça finira mal, on sait comment ; on croirait qu’il le cherche, qu’il le fait exprès ; et en plus il bousillera l’Ami 6 ; il aura tout gagné.
(page 59)
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Il y a de la douceur dans les routines qui font passer le temps, les douleurs, et la vie, les gestes du matin, par exemple, les premiers au sortir du lit, la radio en sourdine la ceinture du peignoir le rond bleu du gaz sous la casserole le capiton usé des pantoufles les cheveux que l'on démêle avec les doigts, les gestes du matin font entrer dans les jours, ils ordonnent le monde, ils manquent si quelque chose les empêche, on est dérangé, et ils sont plus que tous les autres difficiles à partager.
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Paul aime ses rivières, il les connaît par cœur et par corps, la Santoire surtout, qui porte le nom de sa lignée maternelle, à moins que ça ne soit l’inverse, une vraie rivière à truites, têtue alerte drue charnue. Un frisson le parcourt entre les draps lourds et frais ; la pêche, la chasse, il en a toujours eu le goût forcené, à l’égal de celui des femmes. D’ailleurs, il l’a senti très tôt, c’est la même chose, le même jeu, semblable traque et semblable ivresse.
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Il envierait presque à son frère la rutilante origine grecque de son prénom, Georgos, le laboureur ; mais il donnerait bien davantage encore pour s’appeler André depuis que le Père Michon leur en a jeté en pâture la mâle étymologie. André, c’est l’homme qui bande ...
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La nuit de Fridières ne tombait pas, elle montait à l'assaut, elle prenait les maisons les bêtes et les gens, elle suintait de partout à la fois, s'insinuait, noyait d'encre les contours des choses, des corps, avalait les arbres, les pierres, effaçait les chemins, gommait, broyait. Les phares des voitures et le réverbère de la commune la trouaient à peine, l'effleuraient seulement, en vain. Elle était grasse de présences aveugles qui se signalaient par force craquements, crissements, feulements, la nuit avait des mains et un souffle, elle faisait battre le volet disjoint et la porte mal fermée, elle avait un regard sans fond qui vous prenait dans son étau par les fenêtres, et ne vous lâchait pas, vous les humains réfugiés blottis dans les pièces éclairées des maisons dérisoires.
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Il aurait dû rester au Maroc ; oui, mais à l’armée, il aurait toujours été commandé, il aurait fallu obéir, même si c’était moins difficile d’obéir au colonel qu’à son propre père. À la ferme, ici, c’est lui le colonel, il commande et il paye, il est le patron.
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La guerre était finie, on ne jetterait pas sa gourme, il eût voulu s’enflammer, s’illustrer de virile façon, terrasser l’ennemi, le pourfendre et l’étriper, triompher de la mort elle-même et crouler sous les lauriers, sanglé dans un uniforme glorieux. (page 32)
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Il y a comme ça des périodes où les plaques tectoniques de nos vies se mettent en mouvement, où les coutures des jours craquent, où l'ordinaire sort de ses gonds; ensuite le décor se recompose et on continue; c'est plus ou moins grave, on en parle parfois à la télévision, à la radio, dans les journaux, ou ça ne sort pas du cercle de la famille, des amis et du voisinage; ça survient, ça arrive, ça entre dans la cage du temps pour n'en plus ressortir.
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