Citations de Maud Mayeras (203)
Mes yeux se ferment presque, dans l’attente du soulagement. Puis le vide. Rien d’autre que la douleur. Et vient le hurlement. Non, soyons plus honnête, le braillement. Je suis en train de brailler.
《La lumière de la mémoire hésite devant les plaies.》
[Louis Aragon]
On reconnait les monstres à cette gueule qu'ils exhibent, pleine de dents et prête à dévorer les enfants. Mais certains la portent juste parce qu'ils n'ont pas le choix, comme un boulet, un masque affreux. Et, monstres ou non, ils terrifient malgré eux tout ce qui se trouve sur leur passage.
L’acier pénètre ma chair avec une force presque animale. Je ne peux hurler, l’obscurité recouvre chacun de mes souffles d’un voile noir et épais. Je suis aveugle et sourde. Aveugle et sourde …
Swan n’était pas le plus sage des petits garçons, mais c’était mon petit garçon. Je l’aimais par-dessus tout. J’aurais tué pour lui. Je serais morte pour sauver sa peau. Mais voilà, c’est moi qui suis encore là. À penser à lui chaque jour que le bon Dieu fait. Ses yeux et la fossette creusant sa joue gauche. Ses mains toujours froides et ses pieds tordus. Son ventre ferme et ses épaules cagneuses. Ses piaillements et sa langue rose. Son haleine. Tous ces souvenirs qui affleurent dans mes rêves et mes cauchemars, ces sensations que revis chaque nuit et qui me donnent l’impression de crever dès que ce putain de soleil se pointe tous les matins.
Je n'aime pas l'autorité. Cette forme de toute-puissance qu'une voix seule peut exercer sur vous. Ces mots simples qui vous tordent le ventre et que vous n'avez pas envie d'écouter. Ces ordres que vous suivez malgré vous, parce que vous n'avez jamais su faire autrement.
Je sens également une pression à l'arrière de ma nuque. Une vraie gueule de bois à la morphine. Comme si je m'étais pleinement intégrée au comité de fantômes de mon rêve. Ma bouche est pâteuse, encore pleine de leurs odeurs, plus écoeurante les unes que les autres.
Je remarque qu'il n'y a pas de miroir dans cette chambre. Pour laisser aux malades leur imagination, je suppose. Ou l'espoir de croire aux compliments hypocrites de tous ceux qui viennent leur rendre visite _ oh, ma chérie, comme tu as l'air resplendissante !
Reflex, un roman que l'on ne peut qualifier que d'étrange.
Une histoire intrigante, mais un personnage principal et un monde complexe dans lequel le lecteur a du mal à trouver sa place.
Ces petits bémols suffisent à perturber la lecture, mais le roman reste quand même intéressant et envoûtant de par cette complexité dérangeante.
Je n'aime pas les lueurs vives du matin, celles qui rendent vos peurs moins visibles. Elles les planquent jusqu'à la nuit tombée, où elles vous abandonnent avec délectation à vos terreurs délaissées.
Je n'aime pas le souffle des fantômes. Souvent prisonniers des murs que je visite, ils caressent mes épaules. Ils m'invitent à rester. Ils tirent sur mes manches et mendient mon temps.
Je n’aime pas l’autorité. Cette forme de toute-puissance qu’une voix seule peut exercer sur vous. Ces mots simples qui vous tordent le ventre et que vous n’avez pas envie d’écouter. Ces ordres que vous suivez malgré vous, parce que vous n’avez jamais su faire autrement.
Je ne réponds pas. Ses yeux restent fixés sur moi pendant quelques secondes. II attend qu'un mot sorte de ma bouche. N'importe lequel. Pour se jeter dessus et le déchiqueter en petits morceaux. La moindre phrase et il me fera chialer comme une gamine. Alors je me tais je regarde mes pieds qui pèlent en grimaçant, histoire de changer de sujet. Il souffle soudain entre ses dents et abandonne.
Elle se pavanait devant lui. Comme si elle voulait le séduire, vous voyez ?
Madame Masel, une enfant, ça ne séduit pas son propre père.
Vous n’étiez pas là.
Lucie, abattue par la fatigue, ne se nourrissait plus que de l'odeur de son fils, enfouissant son nez dans la courbe rebondie d'une épaule souvent nue. Henry, lui, n'en finissait pas de dévorer sa mère, pressant son sein entre ses lèvres arrondies, la suçant jusqu'à la moelle.
Je n'aime pas l'autorité. Cette forme de toute-puissance qu'une voix seule peut exercer sur vous. Ces mots simples qui vous tordent le ventre et que vous n'avez pas envie d'écouter. Ces ordres que vous suivez malgré vous, parce que vous n'avez jamais su faire autrement.
Je n'aime pas l'été. Il est l'excuse qui dénude vos corps et le leurre qui les rapproche.
La plupart des présents n'avaient jamais vu de macchabée de leur chienne de vie. Ou juste dans les films, quand la pellicule les leur a montrés sous leurs plus beaux atours, la peau blanche, les yeux clos, le sang encore rouge. La mort n'a rien à voir, elle donne aux corps des couleurs insensées, elle ne ferme jamais tout à fait les yeux de ses victimes, et le sang rouge n'est que noir et collant. La mort donne dans le détail, elle ne cherche pas à faire beau, elle fige l'homme dans toute sa plus ridicule simplicité.
Je n'aime pas les retrouvailles. Ces moments de silence que vous avez toujours fantasmés, gâchés par la gêne et la promiscuité. Ces instants que vous avez tant attendus et qui, lorsqu'ils arrivent enfin, vous font l'effet d'une bière tiède que vous n'avez plus vraiment envie de boire, ni de partager.
Ce soir, Maman est la truie et nous sommes les porcelets, bienheureux, pâles et prêts à trouver le sommeil insondable des ventres pleins.