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Critiques de Michèle Pedinielli (133)
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Sans collier

Le quatrième opus des enquêtes de la détective privée Ghjulia Boccanera, dite Diou, la ramène dans sa ville, Nice, également celle de l’auteur, où un ami inspecteur du travail la charge de retrouver un ouvrier roumain, subitement disparu alors qu’il travaillait sur un chantier de construction immobilière. Mais voilà qu’elle reçoit des menaces dans sa boîte aux lettres, la visant semble-t-il autant que son colocataire, Dan, galeriste homosexuel…





A cette trame principale s’entrelacent deux autres récits. L’un nous fait revivre les années de plomb en Italie, aux côtés de jeunes activistes, jusqu’à l’attentat de la gare de Bologne, l’attaque terroriste la plus importante et la plus meurtrière du XXe siècle en Europe. L’autre nous plonge dans la mémoire défaillante d’une femme qui tente désespérément de se souvenir des raisons qui l’ont menée, de cela elle est sûre, à tuer.





Avec son ironie, sa verve qui coule comme elle pense, dans une langue très orale, et sa cinquantaine travaillée par les impasses sentimentales et par une ménopause omniprésente dans la narration, Diou en friserait presque la version vieillie d’une héroïne de chick lit. Heureusement, le mélange de trois intrigues venu brouiller les pistes en de trompeurs concours de circonstances, le prolongement contemporain d’authentiques faits historiques qui ont marqué durablement l’Italie, et le regard lesté de colère que porte l’auteur sur les dérives de sa ville et, à travers elle, de la société toute entière, s’allient plus honorablement pour rendre le livre intéressant.





De l’activité terroriste en Italie dans les années quatre-vingts à l’attentat de Nice en 2016, Michèle Pedinielli évoque ainsi la difficulté de se reconstruire sur un passé sanglant. Entre promoteurs véreux et frénésie immobilière qui bétonne la périphérie de Nice, elle s’en prend aux conditions de travail sur les chantiers, à l’exploitation des sans-papiers, aux marchands de sommeil. Toute une misère sur laquelle grandit comme un cancer le trafic de stupéfiants et le mortifère mirage de l’argent facile. Toute une criminalité qui se paye au prix fort dans le monde d’en-bas, mais s’en tire parfois en toute impunité dans celui d’en-haut. Ne reste plus que l’homophobie pour alimenter les révoltes de Diou, dans un tumulte émotionnel qui lui fait prendre parti, encore et toujours, pour les cane sciolti, ces chiens sans collier, comme on appelait les jeunes Italiens des années soixante-dix qui récusaient toute appartenance politique pour mieux rêver de changer le monde.





Malgré quelques réserves sur la tendance à la dilution dans les hormones de l’intellect de son personnage principal, ce polar à l’ironie mordante qui ne bâillonne pas ses coups de gueule reste une lecture agréable, pour un portrait tout en contraste et en zones d’ombre de la ville de Nice, si chère à l’auteur.


Lien : https://leslecturesdecanneti..
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La patience de l'immortelle

C'est le troisième et dernier livre de l'autrice Michèle Pedinielli que je lis. Je trouve que son écriture à évoluer dans le bon sens. Son premier "Boccanera" est pas mal, c'est un polar de bonne facture. Son. deuxième "Après les chiens" est nettement mieux. Les deux premiers romans se passe dans le Vieux-Nice où Diou Boccanera, l'héroïne qui est détective privée enquête sur des meurtres. Ce troisième opus se passe en Corse. Son ex, Joseph Santucci, vient de perdre sa nièce, Letizia, elle a été assassinée et brûlée dans une voiture. Il se rend à l'enterrement en Corse et emmène Diou avec lui pour qu'elle fasse son enquête et confonde le meurtrier avant la police . Diou est native de Corse par ses grands parents, mais cela faisant longtemps qu'elle n'était pas revenue sur l'île et ne maîtrise plus les codes. C'est à travers cette magnifique région, qui sent bon les épices et le maquis que Diou va enquêter. Entre les terres qui brûlent, les spéculations immobilières et le mutisme des habitants de l'Alta Rocca, Diou à fort à faire. Heureusement qu'il y a quelques personnes sympathiques qui vont l'aider, l'air de rien.

Un très bon polar qui sent bon le Sud.

Je vous le conseille bien volontiers.
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Après les chiens

Quelle agréable surprise que ce polar m'a donné ! J'ai lu, ça et là, quelques bonnes critiques de ce livre et cela m'a donné envie de le lire. Je me suis vite aperçu que c'était son deuxième roman, la suite du premier, mais ce n'est pas trop gênant même si elle relate quelques souvenirs de son premier roman "Boccanera".

L'histoire se passe à Nice en 2017. L'héroïne Ghjulia, surnommée Diou, est une détective privée. Elle garde le chien "Scorsese" d'une amie, et profite de bon matin, pour le promener sur les hauteurs de Nice. Mais le chien s'éloigne, elle le suit et découvre un cadavre d'un jeune Érythréen. Parallèlement, une jeune adolescente majeure disparaît et sa mère, Marina, charge Diou de la retrouver.

J'ai beaucoup aimé son style d'écriture, haletant, drôle et terriblement humain. On rentre dans ce polar très facilement et on ne le lâche plus. Diou, me fait penser au héros Nestor Burma de Leo Malet: son humour pince-sans-rire et caustique à la fois.

Pour les Babelio et Babeliotes qui connaissent bien la ville de Nice, il y a de belles descriptions des quartiers et rues de la Baie des Anges.

Michèle Pedinielli est une autrice à suivre, elle est née à Nice d'un mélange corse et italien.

Pour ma part, une belle découverte.
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La patience de l'immortelle

Troisième enquête pour Ghjulia Boccanera (Diou pour les intimes) et troisième réussite pour Michèle Pedinielli.

C’est du roman noir, comme les deux premiers opus, avec la touche d’humour qu’il faut pour faire passer les traumatismes et la violence psychologique. Et dans le genre, c’est très réussi.

Jo Santucci, flic de Nice et ex de notre détective privée lui demande d’enquêter sur la mort de sa nièce, dont le corps a été brûlé dans une voiture. Le point de départ est très classique, me direz-vous et vous aurez raison ! Sauf que l’affaire se déroule en Corse. Diou qui est originaire de l’île mais qui n’y était jamais retournée depuis des lustres (trop de souvenirs), doit faire avec la famille, le silence, les opérations plus ou moins légales. Et dans un décor de rêve, excellemment rendu par l’autrice dont on sent bien qu’elle connaît intimement les lieux.

En vérité l’intrigue, comme souvent dans les romans noirs, n’est pas importante. On aimerait bien savoir ce qui est arrivé à la nièce journaliste qui semble s’être intéressée d’un peu trop près à une affaire louche (et ça en Corse, ça pardonne pas!), mais c’est surtout la découverte de l’île qui retient l’attention. Pas celle des guides touristiques, celle des habitants, des relations sociales, des relations familiales empruntes de tradition et de modernité, du rôle des femmes ...

L’enquête progresse lentement, entre fausses pistes et faux semblants dans un style toujours aussi vif et dynamique. Un polar d’un peu plus de 200 pages qui se dévore d’une traite et qu’on oublie pas.
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Boccanera

En octobre dernier, j'avais lu le second polar de l'autrice Michèle Pedinielli "Après les chiens" qui m'avait beaucoup plu. Celui-ci "Boccanera" est son premier. Je pensais me régaler autant, mais peut-être en attendais je trop ?

Je l'ai lu avec intérêt mais pas aussi avidement que son deuxième même si c'est un bon polar de qualité. L'héroïne est une quinquagénaire, Ghjulia Boccanera, surnommée par ses proches "Diou", sans enfant et avec une sacrée répartie. Elle est très sympathique, un peu/beaucoup frondeuse et terriblement humaine. Voilà pour le portrait.

L'histoire : Un jeune homosexuel se fait assassiner sauvagement. Il est riche et travail dans le monde de l'art. Est ce pour son argent, sa renommée ou pour sa sexualité qu'il est mort ?

Diou va enquêter coûte que coûte pour trouver le meurtrier à l'aide de Jo son ex qui est policier.

L'histoire se passe à Nice et si vous connaissez bien cette ville vous allez vous régalez. Les descriptions des différents quartiers y sont bien croqués.

Un polar de bonne facture.
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Boccanera

C'est Diou qui nous raconte oui Ghjulia Boccanera (faut dire Dioulia ou Diou tout court) la détective privée . Une quinquagénaire, divorcée, un brin rebelle, mais totalement bienveillante, vivant avec Dan son coloc. Une femme de coeur avec qui j'aimerais bien prendre un café.

Les services de Diou seront requis par un jeune homme dont le compagnon est mort. Une mort que la police a qualifié de mort par jeu sexuel, justification qui ne fait aucun sens pour ce beau jeune homme , Dorian. Puis, Dorian lui même deviendra une victime, Diou sera agressée en rentrant chez elle et on prendra pour cible un capitaine de police... ça en fait, disons, beaucoup.

C'est donc un récit haletant, il se passe toujours quelque chose et les promenades auxquelles nous sommes conviés dans le vieux Nice sont délicieuses. C'est un plus pour ce récit, ce cadre enchanteur avec sa vie de quartier, ses amitiés forgées au café du coin, ses habitants qui sont là depuis toujours, cette langue fleurie, cette identité propre. Mais au-delà des beautés du lieu, Michele Pedinielli n'hésite pas à dénoncer les "phobes" de tout. Elle le fait sans complaisance, plutôt avec véhémence. C'est aussi, malheureusement, un récit sur les malversations, les tricheries , les magouilles pour que celui-ci ou celui-là en ait toujours plus au détriment des autres, toujours. Et donc, j'ai aimé me promener à Nice et j'ai aimé côtoyer Diou, cette belle humaine.
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La patience de l'immortelle

Une fois n’est pas coutume : je lis un polar corse.



Nous sommes du côté de Propiano, dans des paysages magnifiques. Une jeune journaliste de France 3 Corse, Letizia, très appréciée des siens comme de ses collègues, est sauvagement assassinée et son corps brûlé dans un coffre.

Son oncle Jo Santucci, flic à Nice, aimerait s’occuper de l’enquête, mais c’est impossible. Alors il se résout à en parler à Ghjulia Boccanera, qu’on appelle plus simplement Diou, 50 ans environ, née en Corse mais travaillent elle aussi à Nice, et native de Corse, et détective privée de son métier.

Diou est aussi l’ex compagne de Jo, et connaît très bien Letizia et sa mère Antoinette. Elle ne peut refuser d’aider son ex, même si cela signifie retourner sur ses terres natales et retrouver des gens qu’elle a quittés comme à regret il y a quelques temps.



Commence alors une enquête en parallèle de celle que mène la police : Letizia a-t-elle été tuée à cause de ses enquêtes en tant que journaliste ? De mystérieux feux démarrent sur des parcelles ciblées, et pourraient faire l’affaire de promoteurs peu scrupuleux. Mais il y a aussi des oliviers centenaires sauvagement déracinés et replantés fort opportunément dans des jardins somptueux : un trafic qui semble rapporter gros à ces malfrats qui saccagent ces arbres qui ne résisteront pas longtemps à ce déménagement.

Diou est têtue. Sa ténacité est nécessaire, parce que nombreux sont ceux qui essayent de la détourner de son enquête en sous-main. Mais elle le fait pour son ex belle famille, et notamment pour la petite Marie Stella, deux ans et demie, la fille de Letizia, privée subitement d’une mère que tout le monde aimait dans son village.



La vérité éclatera dans les dernières pages. Comme toujours elle se cache derrière des apparences trompeuses. Mais l’intérêt principal n’est pas là, mais plutôt dans la description fidèle de paysages corses, de personnages secondaires savoureux – à l’image du maire du village, octogénaire, érudit, qui donne à Diou les clefs pour comprendre ce qui se passe autour d’elle.

Une écriture plutôt râpeuse et non sophistiquée mais efficace pour mener un bon polar jusqu’au bout.

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Après les chiens

J’avais vraiment bien aimé Boccanera de Michèle Pedinielli et je me suis lancé plein d’enthousiasme dans la deuxième enquête de Ghjulia Boccanera, Diou pour les intimes (donc pour nous lecteurs). Et bien, j’ai eu mille fois raison. Ce second opus est dans la même veine que le premier.

Alors qu’avec son jogging matinal, elle essaye de cracher tout le tabac et le café qu’elle s’envoie à longueur de journée, Diou tombe sur le cadavre d’un jeun noir, roué de coups. Pendant que son ex, le commissaire Santucci, mène l’enquête, elle ne peut pas s’empêcher de suivre ses propres pistes.

Par amitié, elle se lance aussi à la recherche d’une adolescente fugueuse qui a totalement modifié son comportement en quelques semaines avant de disparaître.

Une plongée dans le passé nous fait revivre le sort des émigrés et des Juifs de la région lors des années 30 et pendant la Seconde Guerre mondiale. Toutes ces histoires ont-elles un lien ? Ces histoires d’émigration sur un siècle se font en tout cas échos l’une l’autre.

Comme dans le premier roman, l’écriture est fluide et rythmée. L’humour très présent, et parfois dans un contre-emploi surprenant y côtoie l’émotion, le drame et l’espoir.

Boccanera, amoureuse de sa ville, Nice, y est confrontée au racisme et à l’intolérance, mais fait pourtant aussi de superbes rencontres.

Les personnages sont, en effet, toujours aussi attachants et possèdent tous une vraie profondeur. Ils sont la force de ce roman dont l’enquête, soyons clair, ne révolutionne pas le genre. On est vraiment dans le roman noir à l’ancienne. L’ambiance du vieux Nice, les relations entre les personnages, la dénonciation de la haine et des discriminations, l’humour des dialogues permettent de prendre un vrai plaisir à cette lecture.
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Boccanera

Les romans de Michèle Pedinielli m’ont tout de suite attiré . Les histoires tiennent la route comme les scénarios qui ne manquent pas de consistance comme de rythme. Mais ce qui fait que l’on plonge aussitôt dans les romans de l’auteure d’origine corse , c’est la qualité de ses personnages et notamment celui de son héroïne, Ghjulia Boccanera.

Une détective privée doublée d’une femme au caractère bien trempé qui ne lâche pas le morceau malgré les difficultés. Il est vrai qu’elle peut compter sur l’aide bienveillante de certains enquêteurs mâles de la Brigade Criminelle niçoise avec qui elle possède quelques accointances et pas seulement parce qu’ils sont d’origine corse comme elle.

Dans ce roman, elle va enquêter à la demande d’un jeune homme qui a découvert son compagnon assassiné, un certain Mauro Giannini, ingénieur dans une importante société de travaux publics internationale.

Une enquête qui va mener notre enquêtrice de choc dans les milieux interlopes homosexuels niçois avant que ses investigations s’ouvrent sur de nouveaux horizons beaucoup plus troubles , rebattant ainsi les cartes des suspects potentiels.



Ce livre est mon deuxième de l’auteure après « La patience de l’immortelle » et il offre autant de vitalité que le précédent. Enfin cette vitalité c’est à “Diou“ Boccanera que ce roman le doit essentiellement. Un personnage plus vrai que nature avec ses défauts et ses moments de faiblesse mais qui ne déserte pas une enquête en cours quand elle s’est engagée auprès d’un client. Elle va jusqu’au bout ! J’ai également beaucoup aimé la tonalité de ce polar qui sait parsemer quelques notes d’humour aux bons endroits. Enfin c’est cette humanité crevant les pages qui offre ce petit plus qui fait la différence. Une femme qui respecte les différences qu’elle soient d’origine sexuelle ou religieuse. Dans le même esprit je n’oublie pas de mentionner ce second rôle qui prend la forme d’un papy , voisin de palier de Ghjulia, qui perd parfois la boule et la notion du temps mais qui ne manque pas de ressources ….

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La patience de l'immortelle

Michèle Pedinielli délocalise, si on peut dire. La dernière enquête de Ghjulia Boccanera (prononcez Diou, comme tout le monde), détective privée, se déroule en Corse, dans l'île où elle a vécu avec le commandant Joseph Santucci, maintenant son ex. C'est lui qui est venu la voir, au petit matin, pour lui annoncer un vrai drame : Letizia est morte. On a retrouvé son corps carbonisé dans le coffre d'une voiture. Letizia, c'est la nièce de Jo, celle que Diou a pris dans ses bras quand c'était encore un bébé, celle qui venait sur ses genoux pour écouter des histoires. Letizia avait vingt-six ans, elle était journaliste, elle avait épousé Jean Noël, un journaliste sportif. Jo ne peut pas enquêter sur place, il aura les mains liées, et en plus, il craint des tiraillements entre les gendarmes et les policiers. Diou peut-elle faire quelque chose ? Bien sûr, il est évident qu'elle ne sera pas toujours bien reçue…

***

Amateurs de thrillers trépidants, ce bon polar n'est pas pour vous. L'enquête prend son temps, l'ambiance se construit petit à petit. Il faut apprivoiser les habitants, d'autant que les questions de Diou dérangent parfois. Et puis on est en Corse, une terre de taiseux. Diou connaît bien pourtant : elle y a vécu avec Jo, et sa famille est originaire d'une vallée voisine, mais il y a longtemps qu'elle n'est pas venue. Elle a perdu certaines manières de se comporter, elle a parfois l'impression d'être une intruse, mais elle saura s'attirer les sympathies et se faire accepter.

***

J'ai retrouvé Diou avec beaucoup de plaisir. J'aime vraiment son ton, son humour, sa lucidité envers elle-même, et le regard critique et clairvoyant qu'elle pose sur les gens et sur les événements. C'est valable pour l'image qu'elle nous donne de la Corse, de ses paysages d'hiver, de cette île désertée par les touristes, mais pas par les spéculateurs ni les trafiquants d'oliviers millénaires. On ne retrouve Dan, le coloc gay de Diou, qu'au téléphone, et j'avoue qu'il m'a manqué ! En revanche, on rencontre un octogénaire fort sympathique, amateur de poésie, qui amène une vraie respiration dans cette sombre histoire. La Patience de l'immortelle est un bon roman, avec un final déroutant qui laisse Diou aux prises avec un terrible dilemme.

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Stop

68 textes. Quelques 300 pages. 68 hommes et femmes pour jeter une bouteille à la mer, dire leur colère, leur amertume, leur désespérance.

Un combat, ou 10, ou 100... L'anthropocène devenu capitalocène et anthropocide; la folie guerrière qui jette ses filets pour prendre les dollars des marchands de guerre; l'ineptie d'empoisonner la terre au principe de nourrir les populations; l'injure faite aux majorités dans l'injonction de faire plus et mieux quand ils donnent quasiment tout; le mépris jeté à la face de jeunes qui n'ont d'avenir assuré que leur lendemain; l'abrutissement orchestré dans une virtualisation offerte comme un pis aller rassurant; la compétition stérile et injurieuse sans cirque mais nourris de pouces baissés...

68 textes, cela fait beaucoup de mots et pourtant si peu quand il faudrait reboiser les esprits de milliers de gens.

Mais peu de mots au carré, au cube, à la puissance de 1000 lecteurs, voilà que cela devient une marée, un tsunami.

Romanciers, poètes, dessinateurs, réalisateurs, journalistes, sociologues, ces hommes et femmes ont joué le jeu d'un appel lancé par Oliviet Bordaçarre. Ecrire pour marquer un Stop, pour dire la colère et la peur.

Bribes de réflexion, manifestes, poèmes, courtes nouvelles, ces textes empoignent le cœur, rallument l'effroi ou offrent un peu d'espoir. Mais tous sans exceptions, secouent la torpeur insouciante qui sait que la situation est grave mais veut croire que l'humanité, en bonne élève, poursuivra sa course, persuadée de l'impossibilité de son extinction.

Collapsologie, pourront penser certains, oublieux des chiffres qui disent chaque jour la disparition de nos voisins aquatiques, volatiles, férus de froid, ou de forêts luxuriantes.

C'est peut-être un coup d'épée dans un océan d'impossibles, mais il a le mérite d'exister.

Alors, je sais gré à chacun de ces hommes et femmes, sentinelles, qui posent des mots comme on gratte une plaie, pour qu'elle suppure, gangrenne, et qu'enfin on coupe le membre.

Qu'importe le temps qu'il nous reste. Toutes les civilisations se sont éteintes un jour, mais, sans doute pouvons nous gagner un peu de temps avant que, pour citer cette belle expression de Mouloud Akkouche, la planète ne baisse définitivement ses paupières.

Un grand coup de chapeau à l'éditeur, la manufacture des livres, qui a joué le jeu.

Et, cerise sur le gâteau, tous les droits du livre dont reversés à des associations et collectifs locaux qui, en fourmis travailleuses, œuvrent sans relâche pour faire leur part du colibri.
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La patience de l'immortelle

Comme j’en avais marre du temps froid, j’ai choisi un polar qui se déroulait en Corse. À moi le soleil chaud !



Putain de merde, l’enquête se déroule en janvier et même si les températures sont plus hautes que celles qui règnent, en ce moment, dans notre Nord, il n’en restait pas moins que ce début d’année, c’est bingo, Lotto et quinté+ dans mes choix de lectures : c’est le sixième roman qui se passe, comme dans la réalité, en janvier et/ou dans le froid.



En commençant par la troisième opus des enquêtes de Ghjulia – Diou – Boccanera, j’ai fait connaissance avec une enquêtrice privée spéciale, attachante et qui, bien que se plantant durant son enquête, n’en reste pas moins une bonne enquêtrice. Parce que enquêter sur l’assassinat de la nièce de son ex, ce n’est pas chose facile.



Dans ce polar régional, il n’y a pas que les décors, grandeurs nature, de la Corse, qui font de l’effet. Il y a aussi les autres personnages, leur histoire, leur culture et surtout, des émotions fortes, notamment lors des funérailles de Letizia, 26 ans, trop jeune pour mourir et maman d’une gamine de 2,5 ans.



J’ai apprécié l’écriture de l’autrice, simple à lire (sans être simpliste), agréable, sans oublier les petites touches d’humour qui parsèment certains dialogues ou dans les réflexions de notre Diou, qui est revenue dans sa Corse natale, après l’avoir quittée il y a longtemps et en avoir perdu les codes. Pas facile quand tout le monde vous reconnaît, mais que vous, vous n’arrivez plus à remettre les personnes qui vous sourient.



Dans son enquête, notre Diou va se frotter à des maisons qui sentent mauvais le fromage (gaffe à ne pas faire exploser le tout en allumant une bougie) ou qui sentent bon les épices, mais aussi, sur des terrains qui puent les incendies volontaires, les magouilles et tout ce qui va avec, dans le but de se faire plein de fric, comme toujours.



Non, ce polar n’est pas qu’une énième enquête, même si oui, il faut découvrir qui l’a fait, qui l’a commis, ce crime horrible, affreux, dégueulasse, dans cette région où l’on parle de vendetta, de règlements de comptes entre soi, de mafia ou de promoteurs immobiliers sans scrupules (synonyme, sans doute). C’est aussi un polar qui parle d’écologie, de dureté de la vie, de violences et d’homophobie.



Non, ceci n’est pas un polar trépident, c’est un polar qui prend son temps, même s’il se lit, lui aussi, sur une grosse soirée (difficilement lâchable, lui aussi), tant les ambiances sont corsées, prégnantes.



C’est un roman qui met en scène un crime atroce, dans une île de beauté, qui cache bien la noirceur des Hommes… Il faudra beaucoup de ténacité et de courage à Diou pour trouver le coupable et vivre avec un terrible dilemme.



Un très beau roman policier !


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Sans collier

La détective privée héroine des romans de Michele Pedinelli Ghjulia Boccanera nous enchante depuis quatre romans, maintenant, publiés aux Éditions de l'Aube



Dans cette aventure, Ghjulia Boccanera part à la recherche d'un ouvrier à Nice et trébuche sur l'histoire des cane sciolti, ces jeunes italiens des années 70 qui refusaient d'appartenir à une organisation politique.



Une double enquête avec un humour noir plutot subtil, et ou se dessine humanité au fil des pages, avec, pour ne rien gâcher au plaisir, une aventure qui nous balade dans le bel arrière pays nicois
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Boccanera

Polar sympathique qui s’inscrit dans le genre de manière très classique sans pour autant se soustraire aux clichés, Boccanera possède ce quelque chose de singulier et d’extravagant qu’on aime mais qu’on ne peut pas toujours expliquer. Michèle Pedinielli révèle alors son art du rythme, du décor et du portrait, sans aucune condescendance sociale mais avec une brute acuité du monde et une économie des mots.



Nous insisterons sur l’aspect solaire et divertissant du livre, qui pour une raison que j’ignore encore, peut s’avérer être une tare littéraire : laissons cela de côté et abandonnons-nous à la visite touristique d’une Nice qui, bien sûr, camoufle de façon à peine tacite la radiographie d’une ville et de son système, l’exploration du milieu gay et de l’hostilité qui en résulte. Boccanera est donc un polar, oui. Mais c’est surtout un roman qui, sans implicite, offre un sens des dialogues éclairant et intransigeant. À juste titre, son apparente simplicité se dérobe dans une langue choisie, précise et révélatrice. À l’insolite (et tout à fait sensationnel) bagout de Diou, l’enquêtrice qui nous embarque parfois malgré nous, nous prenons conscience des révoltes des uns et les privilèges des autres, la franche solidarité des communautés contre l’avarice d’un petit nombre.



L’autrice ne se soustrait pas au dispositif du roman policier et l’utilise ainsi comme une composante politique, un outil pour accueillir les marginaux et leurs questionnements hautement actuels. Avec Diou et Pedinielli, tout est dans la mesure du rythme qui, par sa vigilance accrue, permet de nouvelles unions, romantiques et amicales, entre les personnages qui se libèrent d’identités trop définies. Il faut dire qu’on s’est entichés d’elleux, même à l’excès. Alors on s’y prend, ça fonctionne et on en redemande (ça tombe bien, il y a une suite !).
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La patience de l'immortelle



Un polari corsu ? Pourquoi pas ? Une héroïne qui se retrouve rapidement en ligne de myrte après être retournée au pays pour tenter d'élucider un crime odieux et familial.

Nous suivons donc Ghjulia dans le maquis. L'intrigue policière, qui ne casse pas trois pattes à un âne fût-il local, est avant tout un prétexte pour dresser un inventaire sans concession de quelques spécialités insulaires : l'incendie volontaire, le braconnage des oliviers, l'homophobie, le détournement des subventions agricoles…

Bien sûr, le lecteur apprendra ce qui est arrivé à cette pauvre Letizia, occasion d'aborder une autre problématique dont on ne peut que soutenir la cause.

A la lecture de la biographie de l'auteur, il semble que les personnages de la narratrice et la défunte parente empruntent beaucoup de la vie de Michèle Pedinielli. Impression personnelle qui n'est peut-être que pure spéculation, mais qui crée un indéniable sentiment de sympathie.

Le récit est fluide, ponctué de bons mots même si parfois Pedinielli a la main un peu lourde. On pourra également regretter que trop des différents protagonistes ressemblent à des caricatures de Corses, une version écrite d'Astérix en Corse, en quelque sorte, avec une référence obligée à Mérimée.

Néanmoins, ce livre se dévore assez facilement, de préférence accompagné d'un assortiment de charcuteries corses (attention aux contrefaçons) et d'une 3 Monts bien fraîche (je veux bien être tolérant mais la Pietra c'est quand même franchement dégueulasse).

Si vous projetez de passer le mois d'août quelque part entre Bastia et Bonifacio, cet ouvrage peut se glisser dans votre valise… La concomitance du littéraire et du voyage occasionne presque toujours de belles sensations.

Attention, cependant, vu que « La patience de l'immortelle » évoque quelques laideurs de l'Ile de Beauté, s'exhiber avec ce livre pourrait froisser certains autochtones, dont la susceptibilité est excessive, c'est bien connu.

Coluche prétendait que si l'on chasse le naturiste, il revient au bungalow. L'assertion n'est valable que si la construction n'a pas été malencontreusement plastiquée. A bon entendeur, salute !
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Après les chiens

Mon avis sera atrocement banale.

Tout d’abord, j’ai pris un grand plaisir à lire ce livre. J’ai aimé la narratrice à la première personne, qui elle-même aime Andrea Camilleri et son enquêteur Montalbano. J’ai aimé qu’elle ne soit pas (elle ne l’est déjà pas dans la première enquête) une personne « molle », politiquement correcte et bien gentille. Heureusement, il en est d’autres qui sont comme elles, ce qui ne rend pas supportable pour autant ceux qui sont prêts à rejeter les autres.

Ghjulia enquête officiellement sur la disparition de sa famille. Elle se prénomme Mélody, avec un y. Elle était en rupture avec sa famille, beau-père, mère, petit frère. Elle avait même rompu avec son petit ami, et dénoué son amitié avec sa meilleure amie. Qu’est-ce qui a pu la motiver ? Ghjulia a bien des idées, des pistes, reste à les vérifier. Mais ce n’est pas l’affaire qui la préoccupe le plus. Elle et Scorcese, le toutou de ses amies parties en vacances, ont en effet découvert le cadavre d’un jeune homme qui a été battu à mort.

Parallèlement, une autre histoire tout aussi bouleversante nous est racontée. Elle nous parle de ses personnes qui ont osé s’engager, mettre leur vie en jeu pour en sauver d’autres. Elle nous parle de ceux qui ont survécu, ceux qui veulent transmettre leur histoire – pour ne jamais oublier ceux qui sont morts pour que d’autres puissent vivre libres. Et que l’on ne nous dise pas que ce n’est plus possible de nos jours. Il suffit d’ouvrir les yeux et de regarder autour de soi. Et Ghjulia a les yeux grands ouverts sur les horreurs ordinaires du monde qui l’entoure.

Un roman admirable.
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La patience de l'immortelle

Les rapports familiaux ne sont jamais chose facile. Ceux qui animent les familles corses peuvent prendre des tournures dramatiques quand on connaît leur caractère bien trempé et leur sang chaud.

Gjhulia (Diou pour les intimes) Boccanera a quitté depuis longtemps le nid et l’Ile de Beauté pour s’installer sur le continent, à Nice, où elle exerce le métier de détective privée. C’est justement à ce titre que Jo Santucci - commandant de police à Nice et l’ancien compagnon de Gjhulia -lui demande de l’aide. Sa nièce, journaliste à FRANCE 3 Corse, vient d’être sauvagement assassinée et il a besoin de son concours pour découvrir son meurtrier.

Direction la Corse donc et la région de l’Alta Rocca où la famille Santucci est installée depuis plusieurs générations. Lors de son enquête Gjhulia va ainsi (re)découvrir les us et coutumes d’un pays qu’elle a perdu de vue mais aussi que la journaliste tenait un blog évoquant différentes affaires sur lesquelles elle avait investigué de manière confidentielle. Une de ces enquêtes privées recèlerait-elle une des raisons qui pourrait expliquer ce crime ? À moins qu’en arrivant à briser l’omerta elle découvre un secret de famille bien gardé pouvant également la mener vers une piste sérieuse…



J’ai immédiatement été conquis par l’écriture lumineuse de l’auteure. Une prose qui vous plonge dans ce passionnant récit d’où transpirent d'odorantes senteurs , de magnifiques couleurs qui donnent envie de partir dans cette île si captivante par sa beauté authentique entre montagne et mer au bleu azuréen .

On y suit notre héroïne qui fait un come-back remarqué dans sa terre natale. Elle qui se plaît dans l’urbanité, retrouve le maquis et une certaine ruralité revendiquée , l’âpreté des habitants comme cette suite de virages à n’en plus finir , à l’image du caractère tortueux des corses. Elle va également faire connaissance de beaux personnages qui ont de fascinantes histoires à raconter et qui sont aussi la mémoire vive du village. Côté face cachée, elle va apprendre ce qu’est l’écobuage immobilier, cette pratique qui consiste à brûler une terre non constructible que l’on veut transformer en futur paradis pour promoteurs. L’imagination et l'appât du gain n’ayant aucune limite, certains ont également eu la riche idée de déterrer des oliviers millénaires pour les vendre à des bobos ou à des collectionneurs.

Un roman qui s’engloutit en quelques heures avec l’impression de ne pas avoir vu le temps passer et d’avoir redécouvert à travers ces pages cette Corse éternelle qui peut abriter malgré elle de sombres drames.

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Sans collier

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VOULEZ VOUS QUE ZE VOUS DIZE ...



Michèle Pedinielli, j'avais bien aimé ses deux premiers.



Cela me rappelait un peu Izzo, mais sur Nice que je ne connais pas, bien que soeur et neveu y habitent, Marseille non plus, me direz vous. Et c'est vrai. Moi, je suis encore plus au Sud. Valence, vous connaissez ? Non pas celle de la Drome.



Alors je me disais, puisque la source Izzo étant malheureusement tarie, CHIC ! On va pouvoir avoir une sorte de suite, Izzo, c'était si bon. Et connaitre Nice.



Patatras. La voila dans son troisième tome qui nous fit d'un polar une sorte d'étude socio-ethno-antropo-trucmucho-bobo sur la Corse (j'aime bien la Corse, je devance les objections) qui frise la thesarde du CNRS (CanNot Research Something).



J’espérais une trilogie, voila que ça se barrait du polar pour de l'intello. Alors je me dis (passé simple) à la découverte cette semaine du quatrième opus, CHIC ! On va pouvoir peut être en revenant sur le continent avoir une vraie suite polarde.



Patatras. Ça m'a pris trois longs jours pour terminer ce machin. Tout était bon pour reposer la tablette tellement c'était passionnant. J'ai vraiment eu un mal de chien d'aller au bout. Mais je suis comme Pivot, sans son allant, pour parler d'un bouquin, faut honnêtement que j'en aie lu toutes les pages. Heureusement qu'elle, Michèle Pedinielli, ne nous ait pas fait du James Joyce, parce que mille pages, je serais mort derechef tout de go.



Donc je suis là pour vous en parler, heureusement pour moi, malheusement pour elle, instructivement pour vous. Elle nous a fait un salmigondi de trois anecdotes. Le tout "corsé" à sa sauce hormonale. A croire que la salade nicoise, elle ne sait pas ce que c'est.



Dans l'ordre vous avez, ses reflexions melenchonesques sur la politique sociale et locale, un fond mafieux, trois histoires courtes qui se recoupent vous ne savez pas trop comment. Comme si Michèle Pedinielli n'ayant même pas le début de trois bouts de sinopsis voulut néanmoins faire un bouquin pour honorer ses obligations ayant reçu un à valoir, ou faire plaisir à son éditeur, mais assurément pas le nôtre.



Sans spoiler, ni se poiler, elles sont, si cela vous intéresserait, c'est si peu banal, une histoire de mafieux dans l'immobilier, une histoire de mafieux en Italie dans les années 60/70, une histoire de mafieux sur le marché niçois de l'art.



Et pour amalgamer le tout, on a droit aux bouffées de chaleur de la Julia. Que c'est original ! Comme si la moitié de la population mondiale n'était pas sujette à ménopause. Je vous parle moi de mes problèmes de prostate ?



Pour conclure. Vous avez deviné. C'est nul. Alors si vous voyez malgré tout des lecteurs qui mettent des 4 ou 5 étoiles à ce machin, posez vous des questions. Si vous ne vous en posez pas, ne mettez pas [Apprecier] à ce commentaire.



Faites comme vous voulez.

Ciao Ciao.







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Boccanera

On ne peut pas tout lire. Un fait indéniable qui prend parfois la forme d'une frustration avec cette sensation détestable de passer à côté d'ouvrages formidables à l'instar des romans policiers de Michèle Pedinielli qui met en scène, depuis trois ans, la détective privée Ghjulia (il faut prononcer Dioulia) Boccanera officiant dans la région de la Côte d'Azur et plus particulièrement à Nice que la romancière célèbre avec la poésie du mot juste comme Nougaro savait chanter Toulouse. Journaliste de formation, Michèle Pedinielli a exercé le métier durant une quinzaine d'année à Paris avant de retourner à Nice, sa ville natale, afin de se consacrer à l'écriture. Récipiendaire en 2015 du troisième prix du concours de nouvelles Thierry Jonquet, l'une des récompenses du festival Toulouse Polar du Sud, Michèle Pedinielli publie en 2018 Boccanera pour les éditions de l'Aube, collection Aube Noire, premier opus d'une série comptant désormais trois romans engagés qui mettent en exergue les turpitudes des puissants à l'égard des personnes défavorisées ou discriminées quand ce ne sont pas tout simplement les deux. Quinquagénaire à la forte personnalité, mélange savant d'origines corses et italiennes, toute vêtue de noire, Ghjulia Boccanera emprunte beaucoup de traits de caractère à la romancière en évoluant dans le dédale des ruelles du vieux Nice, recelant toute une mosaïque de personnages à la fois attachants et hauts en couleur et qu'elle dépeint avec une affection assaisonnée d'une pointe d'humour corsé comme le café noir que son héroïne ingurgite à longueur de journée afin d'entretenir ses insomnies.



Ghjulia Boccanera tout le monde la surnomme Diou dans le vieux Nice où elle vit en travaillant comme détective privée. Un métier qui convient parfaitement à cette cinquantenaire insomniaque, indépendante et forte en gueule qui a décidé de ne pas avoir d'enfant par conviction. C'est Dan, son colocataire qui lui fournit parfois des clients, comme Dorian Lasalle qui veut que l'on fasse la lumière sur la mort de son compagnon Mauro Giannini, que l'on a retrouvé étranglé dans son appartement. Pour la police, il ne fait aucun doute qu'il s'agit d'un jeu érotique qui a mal tourné. Affaire classée, circulez, il n'y a rien à voir. Mais Dorian est persuadé que son compagnon ne l'aurait jamais trompé et qu'il ne se serait jamais adonné à de telles pratiques. Désormais mandatée par le jeune homme, Diou va tenter d'éclaircir les circonstances de ce crime qui prend une toute autre tournure, lorsqu'elle apprend le décès de son commanditaire qui a également été étranglé après avoir été torturé. Sillonnant une ville en chantier, la détective privée, chaussée de ses Doc Martens, va donner un grand coup de pieds dans la fourmilière pour bousculer l'ordre établi afin de résoudre ces deux meurtres. Ce d'autant plus que le tueur a décidé de s'en prendre à elle.



Sans jamais rien céder au cliché bon marché ou au folklore de pacotille, Michèle Pedinielli restitue l'atmosphère pittoresque de cette belle ville de Nice autour du microcosme composant l'entourage de Ghjiulia "Diou" Boccanera, cette détective mémorable et captivante qui balance son ironie saignante comme Philip Marlowe enquillait les verres de Four Roses. On retrouve d'ailleurs chez Diou cette indépendance et cette décontraction qui caractérisait la personnalité du célèbre détective de Raymond Chandler. Mais loin d'être solitaire, on apprécie la belle déclinaison de personnages qui gravitent autour de cette enquêtrice à l'instar de son colocataire Dan, qui semble tout connaître de l'activité nocturne de la cité, de son ex compagnon Joseph "Jo" Santucci, flic de son état, auquel elle est toujours attachée, de Monsieur Amédée Bertolino, son voisin gâteux qui va se révéler d'un grand secours ou de tout le staff qui compose le café Aux Travailleurs où Diou a ses habitudes. Au niveau de l'enquête on part sur un schéma à la fois classique et solide autour d'une succession de meurtres et autres tentatives qui conduisent notre détective à investiguer auprès des entreprises de construction qui s'attellent à la mise en oeuvre du tramway, du percement d'un tunnel et de l'effondrement d'un mur de soutènement un soir d'orage. Un prétexte efficace pour mettre à jour les dérives dans ce milieu et dont on prend la pleine mesure par l'entremise de Shérif, un syndicaliste bedonnant mais perspicace qui va servir de guide pour notre détective privée. Une partie tellement réaliste que l'on se demande si Michèle Pedinielli ne s'est pas inspirée de faits réels qui auraient défrayé la chronique. On trouve d'ailleurs un article évoquant un effondrement du tunnel qui s'est produit au mois de juillet 2017. Quoi qu'il en soit on ne peut qu'apprécier ce polar dynamique et efficace qui nous entraine dans les différents quartiers de la ville à la rencontre de tout un panel de protagonistes détonants qui mettent en valeur, au gré d'échanges tonitruants, cette détective privée atypique que l'on se réjouit de retrouver dans Après Les Chiens (Aube noire 2019) et La Patience de L'Immortelle (Aube noire 2021), qui font suite ce premier opus très réussi.





Michèle Pedinielli : Boccanera. Editions de l'Aube. Collection Aube Noire 2021.



A lire en écoutant : Good Fortune de PJ Harvey. Album : Storie from the City, Stories from the Sea. 2000 Universal Island Records Ltd.








Lien : https://monromannoiretbiense..
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La patience de l'immortelle

Cela fait un bout de temps que j'attendais pour lire ce roman : je voulais de la couleur locale pour mes vacances en Corse, et je n'ai pas été déçue ; j'ai eu la chance de l'ouvrir juste après avoir visité certains des lieux cités et décrits dans cette fiction très plaisante à lire : Olmeto, Propriano, Sartène...  Un polar de bonne facture, une détective privée corse, installée depuis des années à Nice et qui revient sur l'île de Beauté pour mener à bien une enquête spéciale de par l'identité de la victime : la nièce de l'ex-compagnon de l'héroïne, journaliste sur la chaîne France 3 Corse.  Ghiulia Boccanera, Diou pour les intimes, est très humaine : ce n'est pas l'héroïne sans failles et sans défauts, elle fonce sur de fausses pistes, mais sait faire machine arrière, reconnaître que son intuition n'est pas toujours excellente, retomber sur ses pattes avec beaucoup de modestie.  Elle possède un humour qui dépote et qui l'aide à surmonter les angoisses, les horreurs et frayeurs de son métier.  Vous ajoutez insomniaque, droguée au café, sensible au charme masculin mais toujours un peu amoureuse de son ex-compagnon, capitaine de police à Nice, désobéissante et cachottière envers la police, ce qui pimente l'enquête, et vous obtenez une héroïne attachante.



L'ambiance et l'âme corses sont bien restitués, je m'y serais crue !  Ah, mais au fait, j'y étais... Et j'ai doublement apprécié ! 



Lorsque j'ai débuté la lecture, j'ignorais que c'était le troisième tome d'une trilogie, et cela ne m'a pas du tout perturbée.  J'ai d'ailleurs enchaîné sur les premier puis deuxième tomes, tout aussi savoureux.  Les trois romans se lisent rapidement, les enquêtes sont accrocheuses, classiques, bien construites.



Les deux autres enquêtes, Boccanera et Après les chiens, se déroulent à Nice : par chance, j'y suis allée il y a quatre ans, ce qui m'a rappelé de beaux souvenirs.

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