Citations de Mikhaïl Boulgakov (466)
— Comment avez-vous réussi, Philippe Philippovitch, à séduire un chien aussi nerveux ? […]
— Par la gentillesse : le seul moyen qu'on puisse employer avec des êtres vivants. La terreur ne sert à rien avec un animal, quelque degré d'évolution qu'il ait atteint. Je l'ai affirmé, je l'affirme et je continuerai à l'affirmer. Ils imaginent en vain que la terreur les aidera. Non, non, elle ne les aidera pas, quelle qu'elle soit : blanche, rouge ou même brune ! La terreur paralyse complètement le système nerveux.
Chapitre II.
Ce sont des faits. Et les faits sont la chose la plus obstinée du monde.
Aucune force au monde ne peut obliger une foule à se taire tant qu'elle n'a pas exhalé tout ce qui s'est accumulé en elle et qu'elle ne se tait pas d'elle-même.
Non. Plus jamais, même en m'endormant, je ne marmonnerai orgueilleusement que rien ne saurait m'étonner. Que non. Une année a passé, une autre passera qui sera tout aussi riche de surprises que la première... Autrement dit, il faut humblement apprendre.
Il est intelligent, pensa Ivan. Il faut reconnaître que, parmi les intellectuels, on rencontre parfois, à titre exceptionnel, des gens intelligents. On ne peut le nier.
"En quoi réside le mécanisme du sommeil ?... Je l’ai lu jadis dans un livre de physiologie... mais c’est un machin pas clair... je ne comprends pas ce que veut dire le sommeil... comment les cellules du cerveau s’endorment-elles ?! Comprends pas, soit dit entre nous."

"Si tu viens me voir, pourquoi ne me souhaites-tu pas le bonjour, ex-percepteur d'impôts ? dit Woland d'un ton sévère.
- Parce que je ne veux rien te souhaite de bon ! répliqua l'autre avec audace.
- Mais il y a une chose dont il faut que tu prennes ton parti, répondit Woland dont la bouche dessina un sourire ironique. A peine est-tu apparu sur ce toit que tu as commis une bourde, et je vais te dire laquelle. Le ton sur lequel tu as parlé semblait signifier que tu refusais les ombres, ainsi que le mal. Aie donc la bonté de réfléchir à cette question : à quoi servirait ton bien, si le mal n'existait pas, et à quoi ressemblerait la terre, si on en effaçait les ombres ? Les ombres ne sont-elles pas produites par les objets, et par les hommes ? Voici l'ombre de mon épée. Mais il y a aussi les ombres des arbres et des êtres vivants. Veux-tu donc dépouiller tout le globe terrestre, balayer de sa surface tous les arbres et tout ce qui vit, à cause de cette lubie que tu as de vouloir te délecter de pure lumière ? T'es bête.
- Je ne discuterai pas avec toi, vieux sophiste, répondit Matthieu Lévi.
- Et tu ne peux pas discuter avec moi, pour la raison que je viens d'indiquer : tu est bête, répondit Woland, puis il reprit : Bon, sois bref, car tu m'ennuies. Pourquoi est-tu venu ?
Depuis longtemps déjà les gens intelligents ont noté que le bonheur c’est comme la santé : quand il est là, on ne s’en aperçoit pas. Mais que les années viennent à passer, et alors comme on s’en souvient du bonheur, oh, comme on s’en souvient !
[Incipit de Morphine]
Parmi d’autres, un voyageur convenablement vêtu, portant une petite valise de fibre, descendit de la voiture 9, un wagon de première classe réservé. Ce voyageur n’était autre que l’oncle du défunt Berlioz, Maximilien Andreïevitch Poplavski, économiste-planificateur, qui habitait à Kiev, dans l’ancienne rue de l’Institut. L’arrivée de Maximilien Andreïevitch avait pour cause directe un télégramme, qu’il avait reçu l’avant-veille, tard dans la soirée, et ainsi libellé :
VIENS D’AVOIR TÊTE COUPÉE PAR TRAMWAY AU PATRIARCHE
OBSÈQUES VENDREDI 15 HEURES VIENS — BERLIOZ
Et le Maître et Marguerite virent se lever l’aube promise. Elle succéda immédiatement à la pleine lune de minuit. Le Maître marchait avec son amie, dans l’éblouissement des premiers rayons du matin, sur un petit pont de pierres moussues. Ils le franchirent. Le ruisseau resta en arrière des amants fidèles, et ils s’engagèrent dans une allée sablée.
- Écoute ce silence, dit Marguerite, tandis que le sable bruissait légèrement sous ses pieds nus, écoute, et jouis de ce que tu n’as jamais eu de ta vie - le calme.
Ces citadins ont-ils changé intérieurement ? Cupidité, avidité, jeu : « Eh bien…répondit celui-ci d’un air pensif, il faut prendre ces gens comme ils sont… Ils aiment l’argent, mais il en a toujours été ainsi… L’humanité aime l’argent, qu’il soit fait de n’importe quoi : de parchemin, de papier, de bronze ou d’or. Ils sont frivoles, bien sûr… mais bah !… la miséricorde trouve parfois le chemin de leur cœur… des gens ordinaires… comme ceux de jadis, s’ils n’étaient pas corrompus par la question du logement… »
Elle arracha un feuillet à un bloc et y inscrivit au crayon ce message, d'une grosse écriture rapide, sans ratures :
" Pardonne-moi et oublie-moi le plus vite possible. Je te quitte pour toujours. Ne me cherche pas, c'est inutile. Je suis devenue une sorcière à cause du chagrin et des malheurs qui m'ont frappée. Je dois partir, c'est l'heure. Je te dis adieu,
MARGUERITE "
Ecoute ce silence, dit Marguerite, tandis que le sable bruissait légèrement sous ses pieds nus, écoute, et jouis de ce que tu n’as jamais eu de ta vie – le calme.
Certes, l'homme est mortel, dit-il, mais il n'y aurait encore là que demi-mal. Le malheur, c'est que l'homme meurt parfois inopinément.
*
Il faut reconnaître que, parmi les intellectuels, on rencontre parfois, à titre exceptionnel, des gens intelligents.
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Qui prend son temps n'en manque jamais.
Les patients qui ne lisent pas les journaux se sentent parfaitement bien. Au contraire ceux que je forçais à dessein à lire la Pravda perdaient du poids.
La seule chose qu'il a dite, c'est que, parmi tous les défauts humains, il considérait que l'un des plus graves était la lâcheté.
Concevez que l’horreur consiste en ceci qu’il n’a plus un cœur de chien mais d’homme, et c’est le plus répugnant de tous ceux qui existent dans la nature !
Nous avons affaire maintenant à bien plus terrible que la guerre, que les Allemands, que n'importe quoi au monde. Nous avons affaire à Trotski.
« Il ne faut pas se raconter d'histoires, se lamentait le chien en reniflant. J'ai pris des habitudes. Je suis un chien de seigneur, un être intellectuel, j'ai goûté à la douceur de vivre. D'ailleurs qu'est-ce que la liberté ? Rien du tout : fumée, mirage, fiction… Un délire de ces misérables démocrates… »
Le Maître et Marguerite (1940) Traduit du russe par Claude Ligny
- Mais voici la question qui me préoccupe : si Dieu n’existe pas, qui donc gouverne la vie humaine, et, en général, l’ordre des choses sur la terre ?
- C’est l’homme qui gouverne ! se hâta de répondre le poète courroucé [...].
- Pardonnez-moi, dit doucement l’inconnu, mais pour gouverner, encore faut-il être capable de prévoir l’avenir avec plus ou moins de précision, et pour un délai tant soit peu acceptable. Or – permettez-moi de vous le demander –, comment l’homme peut-il gouverner quoi que ce soit, si non seulement il est incapable de la moindre prévision, ne fût-ce que pour un délai aussi ridiculement bref que, disons, un millier d’années, mais si, en outre, il ne peut même pas se porter garant de son propre lendemain ?