AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Olivier Truc (495)


Comme à chaque fois qu'il était face à un tel spectacle, Klemet repensait à son oncle, Nils Ante, connu comme l'un des chanteurs de joïks les plus doués de la région. De son chant de gorge lancinant, son oncle poète racontait les merveilles et les mystères du monde.
Commenter  J’apprécie          20
Lundi 10 janvier.
Nuit polaire.
9 h 30. Laponie centrale.
C'était la journée la plus extraordinaire de l'année, celle qui portait tous les espoirs de l'humanité. Demain, le soleil allait renaître. Depuis quarante jours, les femmes et les hommes du vidda survivaient en courbant l'âme, privés de cette source de vie.
Klemet, policier et rationnel, oui rationnel puisque policier, y voyait le signe intangible d'une faute originelle. Pourquoi, sinon, imposer à des êtres humains une telle souffrance ? Quarante jours sans laisser d'ombre, ramenés au niveau du sol, comme des insectes rampants.
Et si, demain, le soleil ne se montrait pas ? Mais Klemet était rationnel. Puisqu'il était policier. Le soleil allait renaître. Finnmark Dagblad, le quotidien local, avait même annoncé dans son édition du matin à quelle heure la malédiction allait être levée. Que le progrès était beau. Comment ses ancêtres avaient-ils pu supporter de ne pas lire dans le journal que le soleil allait revenir à la fin de l'hiver ? Peut-être ne connaissaient-ils pas l'espoir ?
Demain, entre 11 h 14 et 11 h 41, Klemet allait redevenir un homme, avec une ombre. Et, le jour d'après, il conserverait son ombre quarante-deux minutes de plus. Quand le soleil s'y mettait, ça allait vite.
Les montagnes allaient retrouver leur relief et leur superbe. Le soleil se coulerait au fond des vallons, donnant vie à des perspectives endormies, réveillant l'immensité douce et tragique des hauts-plateaux semi-désertiques de la Laponie intérieure.
Pour l'instant, le soleil n'était qu'une lueur d'espoir, se reflétant sur les nuages orangés et rosâtres qui couraient au-dessus des sommets à la neige bleuie.
Commenter  J’apprécie          20
Et aujourd'hui, tout le monde savait lire, c'était une calamité tous ces gens qui lisaient.
Commenter  J’apprécie          22
La Suède, un pays égalitaire ? C’est une illusion, d’après la responsable d’un réseau d’accueil de femmes en difficulté, pour qui on parlera d’égalité le jour où une femme qui aura bu trois verres de vin un samedi soir pourra rentrer chez elle sans avoir peur d’être considérée comme une proie facile. Ce n’est pas le cas aujourd’hui en Suède. Les femmes tuées et les différences de salaires (les hommes gagnent toujours 20 % de plus que les femmes en moyenne) sont deux expressions d’une même oppression. Les Suédois croient qu’ils sont égaux. Alors, quand on leur dit qu’ils ne le sont pas, le débat se durcit.
Commenter  J’apprécie          20
La Suède doit rester en guerre! Aussi serions-nous enchantés que vous repreniez votre relation avec la jeune princesse. On dit que la vie à la cour de Stockholm est bien sinistre pour une fillette de son intelligence, et j'ai lu que vous saviez la faire rire. Voilà une riche qualité. Le rire enlaidit les gens et les abrutit, mais il les rend plus accessibles et réceptifs. Faites rire Kristina! C'est un ordre !
Commenter  J’apprécie          20
Heureusement, le renne lui donnait tout ce dont il avait besoin.Depuis toujours, il était né pendant une transhumance, voilà bien longtemps. La première fois qu'il avait tété le sein de sa mère, il faisait moins quarante degrés. Sa mère en était morte. Il avait alors été nourri à la graisse de renne fondue.
Commenter  J’apprécie          20
un voyage extraordinaire ce livre
Commenter  J’apprécie          20
- Tu seras content d’apprendre que les populations scandinaves sont les derniers descendants purs de la race Cro-Magnon.
- Je suis tellement heureux que tu peux passer sur le reste, je crains d’étouffer de bonheur.
Klemet vint se placer derrière Nina pour lire en même temps qu’elle. Odeur fraîche, discrète. Il ignorait quelle eau de toilette elle utilisait. S’en fichait.
- Tu vois, on s’intéresse aussi à l’amélioration de la race, dit-elle.
- Tu sais que les nazis avaient pensé améliorer la race allemande en important des jeunes Norvégiennes bien blondes dans ton genre pour aryaniser les Allemands de Bavière jugés trop bruns et trop bâtards. Toi et moi, ça pourrait marcher, tu ne crois pas, pour le progrès de la race je veux dire.
- Très drôle.
Commenter  J’apprécie          20
Que s'était-il passé? Un tour de passe-passe bureaucratique.par petites touches impressionnistes sous forme de décrets, d'ordonnances, d'arrêts, des siècles durant. C'est à vous, mais plus tout à fait de la même façon, rien n'est grave, tenez, signez là et repartez dans votre toundra, on s'occupe du reste. Vous ne savez pas lire? rien de grave, les papiers, on sait y faire, faites confiance, nous sommes l' Etat. Faites confiance. Et au final, les Samis qui bénéficiaient d'un droit de propriété sur les terres de Sapmi, par la grâce d'un roi trop intéressé que les Sami chassent et pêchent pour son compte et lui payent l'impôt, s'étaient retrouvés démunis, dépouillés, quand les colons étaient arrivés, par la grâce d'un autre bon roi, puis d'un autre, puis d'un autre, quelque soit son numéro.
Commenter  J’apprécie          20
-"Donc pour vous, les Sami n'ont pas à prétendre qu'ils ont droit à ces paturages d'hiver le long de la vallée.

Qu'ils y aient droit de nos jours n'est pas de mon ressort, monsieur le Président, c'est l'affaire entre eux et les fermiers d'aujourd'hui. Je réponds seulement à l'affirmation selon laquelle les Sami auraient été dans la vallée longtemps avant les scandinaves. Rien ne vient le prouver.
Commenter  J’apprécie          20
Il se faisait un point d'honneur à paraître devant les juges dans son plus bel apparat, avec son costume traditionnel des Sali du Jämtland qu'il ne sortait que dans les grandes occasions, comme tous les Sami.
(p.49)
Commenter  J’apprécie          20
Quand elle se retourna, elle ne vit plus Klemet. Quelques secondes plus tard, il apparut en ombre chinoise. Il grattait des allume-feux. Il attendit trois secondes.
Puis mit le feu à sa tente.
(p.494)
Commenter  J’apprécie          20
- Et alors, tu la veux ma saucisse ou je te la fume ?
La gouaille d’Elizabeth les arracha à leur tête-à-tête. Elle tirait avec énergie sur sa cigarette en attendant la commande, bonnet en tricot rouge à cheval sur les oreilles. Les deux hommes se décidèrent pour une paire de saucisses et un petit pain chacun – ketchup et moutarde – et Justina vint prêter main-forte, chantonnant à ses côtés.
- Et la vieille, la ferme, lança Elizabeth, pour une fois que j’ai deux beaux messieurs rien que pour moi, tu vas me les faire déguerpir.
Justina adressa un large sourire plein de tendresse à son amie, et Petrus lui fit un clin d’œil. Quelle équipe !
Commenter  J’apprécie          20
Depuis le début du procès, il portait sa croix. La cour ne se réunissait pas tous les jours heureusement, adaptant son rythme à celui des plaignants et des accusés, les uns et les autres tout aussi mal lotis. Sa croix à lui pesait plus lourd. Il se faisait un point d’honneur à paraître devant les juges dans son plus bel apparat, avec son costume traditionnel des Sami du Jämtland qu’il ne sortait que dans les grandes occasions comme tous les Sami. Des cuissardes en peau, une tunique en feutre bleu foncé largement ouverte en V sur le thorax, les branches du V ornées de broderies qui couraient jusqu’au col relevé. A cela s’ajoutait un plastron en feutre de même couleur surmonté d’un tour de cou d’un quart de cercle également tout en broderies où dominaient le rouge, le vert, le bleu et le jaune, les couleurs que l’on retrouvait sur le drapeau sami. Les manchettes reprenaient les mêmes dessins chamarrés, tout comme un sac en peau de renne accroché à une ceinture de tissus dont le rabat dessinait de ces motifs inspirés dans anciens tambours de chamans. Petrus Eriksson était sami et à Stockholm il entendait que cela se sache.
Commenter  J’apprécie          20
Mardi 27 avril.
Lever du soleil : 3 h 02. Coucher du soleil : 21 h 43.
18 h 41 d’ensoleillement.
Refuge de Skaidi. 7 h 30.
Klemet s’était levé tôt pour préparer les motoneiges, remplir les jerricans d’essence et les bidons d’eau à la station-service du croisement. Skaidi était le nœud d’où partaient les routes vers Hammerfest, au nord-ouest, vers le cap Nord au nord-est et Alta au sud-ouest. Une cabane en bois de la police leur servait de quartier général lors de leurs missions de printemps.
Le temps se couvrait mais la luminosité demeurait forte. Le thermomètre cloué près de la porte affichait à peine plus de deux degrés. Il faudrait encore plusieurs semaines pour que l’herbe trouve la force de se redresser et l’envie de verdir. Klemet languissait de cette période magique où la nature reprenait d’un coup ses droits. Dans ces moments-là, il regrettait de ne pas avoir le talent de son oncle Nils-Ante pour célébrer d’un joïk ou même de mots simples la victoire de la nature sur la dureté du climat.
Commenter  J’apprécie          20
En voyant l'homme arriver avec son marteau souillé, Aslak avait compris. Le ciel se chargeait de nuages gris foncé. La tempête allait venir. Comme ce jour où son grand-père était parti. Il était parti seul, un soir de tempête d'hiver, comme le faisaient les vieux devenus des fardeaux pour le clan. Ils partaient seuls dans la toundra, et on ne les revoyait jamais. Aslak détaillait les nuages. La même tempête que quand Aslak avait sept ans, à l'internat de Kautokeino. Le même jour. Son grand-père était parti. Et lui aussi était parti. Il avait sauté. À sept ans. Dans la tempête. Sans se retourner.
Commenter  J’apprécie          20
L'étranger évoquait à Aslak un renard. Il fouinait, tous les sens en éveil. Prêt à mordre et à fuir. Comme il l'avait fait avec lui. Mordre, et prendre ses distances. Se réfugier derrière une menace invisible. Il repensait au signe qu'avait tracé sa femme. Cet homme était un renard. Mais Aslak était un loup. Il les avait trop côtoyés pour en être éloigné. Il avait trop pisté les bêtes, étudié leur comportement, pour les voir comme des étrangers. Et un loup pouvait mordre, et ne pas lâcher prise. Il attendait juste le bon moment. Longtemps s'il le fallait. Le loup était bien plus patient que le renard. Le renard se décourageait s'il n'était pas satisfait rapidement. Pas le loup.
Commenter  J’apprécie          20
Aslak n'était pas éduqué. Il n'était pas de ceux, de ces jeunes qu'il avait pu croiser parfois les jours de marché à Kautokeino, qui idéalisaient cette vie. Il n'y avait rien à idéaliser. C'était sa vie. Il avait compris qu'il était différent des autres. Et il avait aussi compris qu'en vivant comme il l'avait toujours fait, comme l'avaient fait les siens auparavant, il suscitait souvent des réactions violentes. On lui demandait souvent pourquoi il refusait le progrès. Aslak ne comprenait pas très bien ce que cela signifiait. Il voyait les autres éleveurs qui faisaient le même travail que lui avec des scooters, des quads, des hélicoptères même, des colliers électroniques équipés de GPS. Pour payer tout leur matériel, il leur fallait de gros troupeaux qui avaient besoin de territoires énormes pour paître. Et tout ça entraînait des conflits entre bergers, sous l'œil malicieux des autorités qui avaient là un moyen idéal de maintenir la pression sur les Sami et d'en faire ce qu'ils voulaient, sous prétexte de maintenir la paix sur le vidda. C'était ça le progrès ? Devenir esclave de déclarations à remplir, rendre des comptes à des gens qui ignoraient tout de leur vie ? Les petits bergers comme Mattis, qui avaient voulu vivre leur vie tranquillement, sans faire de bruit, on ne leur avait pas laissé le choix. Aslak s'arrêta un instant et s'appuya sur ses bâtons.
Commenter  J’apprécie          20
Nina balayait du regard le modeste gumpi de ses yeux grands ouverts. Elle aurait voulu prendre des photos, mais n'osait pas. C'était sale, repoussant. Et fascinant. Elle réalisait qu'elle venait de mettre un pied dans un monde inconnu. Cela dépassait son entendement. Comment, en Norvège, pouvait-on vivre comme ça ? Dans son propre pays ? Ça lui rappelait un reportage qu'elle avait vu à la télévision sur un campement tzigane en Roumanie. Il ne manquait plus que les enfants à moitié nus. En même temps, Nina se sentait gênée. Elle ne savait pas très bien pourquoi. Klemet paraissait à l'aise. Mais il était de cette région. Il savait. Ça aussi, c'était donc un visage du royaume scandinave. Klemet lui avait expliqué que Mattis ne vivait pas de façon permanente ici. Mais tout de même ! Ça, la Norvège ?
Commenter  J’apprécie          20
Demain, entre 11 h 14 et 11 h 41, Klemet allait redevenir un homme, avec une ombre. Et, le jour d'après, il conserverait son ombre quarante-deux minutes de plus. Quand le soleil s'y mettait, ça allait vite. Les montagnes allaient retrouver leur relief et leur superbe. Le soleil se coulerait au fond des vallons, donnant vie à des perspectives endormies, réveillant l'immensité douce et tragique des hauts-plateaux semi-désertiques de la Laponie intérieure. Pour l'instant, le soleil n'était qu'une lueur d'espoir, se reflétant sur les nuages orangés et rosâtres qui couraient au-dessus des sommets à la neige bleuie.
Commenter  J’apprécie          20



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Olivier Truc Voir plus

Quiz Voir plus

Adieu Paul, maudit mardi 30 avril 2024

Certains esprits chagrins m'avaient mis en garde, le titre de ce roman disaient-ils constitue le déclenchement d'un compte à rebours dont nous connaissons tous l'issue ...???....

5,4,3,2,1
5,4,3,
4,3,2,1
3,2,1

10 questions
23 lecteurs ont répondu
Thème : Paul AusterCréer un quiz sur cet auteur

{* *}