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Citations de Paolo Bacigalupi (129)


L’équipe se rassembla autour d’un feu de joie, fit passer la bouteille de bouche en bouche. Pima s’éloigna et revint un peu plus tard avec une casserole de riz et de haricots, et Moon Girl fit cette fois-ci à Nailer la surprise d’une brochette de pigeon grillé. Devant son air étonné, elle déclara :
– D’autres gens veulent se rapprocher de Dieu et du Destin. Des gens t’ont vu sortir du bateau. Personne n’a une chance pareille.
Il ne posa plus de questions et mangea avec avidité, heureux d’être vivant et de dîner aussi bien.
Ils burent en se passant la lame rouillée qui avait failli le tuer, envisageant la possibilité de la transformer en talisman, un bijou à accrocher à son cou. La griserie de l’alcool le réchauffait, rendait le monde encore meilleur. Il était vivant. Sa peau chantait la vie. Même la douleur dans son dos et dans son épaule lui semblait douce. Se retrouver si proche de la mort rendait la vie d’autant plus belle. Il fit rouler son épaule et savoura la douleur.
Pima le regardait, de l’autre côté du feu.
– Tu crois que tu peux bosser avec l’équipe demain ?
Nailer se força à hocher la tête.
– Écorcher du câble, c’est rien.
– On aura qui pour fouiller les conduites ? demanda Moon Girl.
Pima grimaça.
– Je pensais que ce serait Sloth. Il va falloir faire prêter serment à quelqu’un d’autre pour la remplacer. Trouver un raccroc, putain !
– Pour ce que ça change, marmonna Tick-Tock.
– Ouais, mais il y a encore des gens qui tiennent parole.
Ils tournèrent tous les yeux vers l’endroit où Sloth avait été abandonnée. Elle aurait bientôt faim et besoin de quelqu’un pour la protéger. Quelqu’un avec qui partager la récup, quelqu’un pour la couvrir quand elle ne pourrait pas travailler. Sans équipiers, la plage n’était pas un lieu facile où survivre.
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Depuis le pont du tanker, Bright Sands Beach s’étirait au loin, étendue goudronneuse de sable et de flaques d’eau, bordée de vestiges d’autres pétroliers et de cargos. Certains étaient encore entiers, comme si leurs capitaines, pris de folie, avaient simplement décidé de les ensabler avant de les abandonner. D’autres étaient écorchés, dénudés, n’offrant plus que leur carcasse d’acier rouillé. Des coques gisaient comme des poissons vidés : un poste de commandement ici, un quartier d’équipage là, la proue d’un vieux pétrolier pointant vers le ciel.
C’était comme si le Dieu Ferrailleur était descendu parmi les vaisseaux, tailladant et hachant, découpant en morceaux les énormes structures d’acier, avant de laisser leurs cadavres s’étaler derrière lui. Et, où que reposent ces immenses tankers, des gangs de ferrailleurs comme celui de Nailer grouillaient comme des mouches. Arrachant la viande de métal et ses ossements. Traînant la chair du vieux monde le long de la plage pour rejoindre les centres de pesage et les hauts fourneaux de recyclage qui brûlaient 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, pour le profit de Lawson & Carlson, l’entreprise qui transformait le sang et la sueur des ferrailleurs en argent liquide.
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Nailer rampait dans une conduite de service pour en arracher le câblage électrique, soulevant un nuage de fibres d’amiante et de déjections de souris chaque fois que le câble se détachait. Il progressait en faisant sauter les agrafes d’aluminium qui retenaient le câblage. Les attaches tintaient dans le conduit étroit comme des pièces offertes au Dieu Ferrailleur, et Nailer fouillait le sol pour les ramasser et les enfourner dans le sac en cuir qu’il portait à la ceinture. Quand il tira une nouvelle fois sur le câblage, un bon mètre du précieux cuivre se libéra entre ses doigts dans un nuage de poussière.
La peinture LED décorant le front de Nailer éclairait le passage d’un vert pâle phosphorescent. Le sel de sa propre sueur mêlée de poussière lui piquait les yeux et gouttait sur son masque filtrant. D’une main couverte de cicatrices, il essuya les rigoles salées en faisant bien attention de ne pas effacer la peinture LED. Le marquage lumineux le démangeait et le randait fou, mais il n’avait aucune envie de devoir retrouver son chemin à l’aveuglette dans le labyrinthe de conduites. Il résista donc à l’envie irrépressible de se gratter et vérifia une nouvelle fois sa position.
Des tuyaux rouillés disparaissaient dans la pénombre. Un peu de fer, un peu d’acier – les équipes de lourds s’en occuperaient. Nailer ne se souciait que des trucs faciles à transporter – le blanc : le câblage en cuivre, l’aluminium, le nickel, les attaches d’acier qu’il pouvait entasser dans sa besace et traîner dans le conduit pour rejoindre l’équipe de légers qui l’attendait dehors.
Il se redressa pour reprendre sa progression et son crâne heurta le plafond trop proche, provoquant un bruit sourd qui résonna dans la conduite, comme si Nailer s’était trouvé à l’intérieur d’une cloche d’église chrétienne. La poussière cascada sur ses cheveux et s’insinua sous les bords mal ajustés de son masque filtrant. Il éternua, une première puis une seconde fois, la larme à l’œil. Il retira le masque pour s’essuyer le visage et le remit en place, souhaitant sans beaucoup d’espoir que la bande autocollante fasse son effet.
Offert par son père, le masque était de deuxième main. Il démangeait et tenait mal en place parce qu’il n’était pas à la bonne taille, et, sur un côté, on pouvait lire « À jeter après 40 heures d’utilisation », mais comme ses compagnons, Nailer n’en possédait qu’un. Alors il s’estimait chanceux de disposer de celui-ci, même si les microfibres commençaient à se déliter après de nombreux lavages dans l’océan.
Sloth, son équipière, se moquait de lui chaque fois qu’il le nettoyait – elle ne comprenait pas pourquoi il se fatiguait à le faire. Elle prétendait que le masque était inutile et que ça rendait le travail dans les conduites encore plus étouffant et inconfortable. Nailer pensait parfois qu’elle avait raison. Mais la mère de Pima insistait pour que sa fille et lui en portent quoi qu’il arrive, et il n’y avait qu’à juger de l’épaisseur de crasse noire accumulée sur les filtres quand il plongeait l’objet dans l’océan, pour comprendre que c’était ça de moins qui pénétrait dans leurs poumons. Alors Nailer gardait le masque, même s’il avait l’impression d’étouffer chaque fois qu’il aspirait l’air tropical humide à travers les filtres détrempés par sa propre respiration.
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Ce n’était pas mauvais, mais ça me chiffonnait un peu que le vendeur ait été à ce point dérouté par l’obligation de me rendre la monnaie, et j’avais même été obligé de piocher dans son tablier pour compter l’argent qu’il me devait
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La tempête se jeta sur la côte avec la puissance implacable d’un tank du vieux monde.
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[Miguel] C’était trouillant.
[Rabi] Quoi ?
[Miguel] Comment tu es entré dans la tête de Joe. Il ne voulait pas y aller et, PAF, il croit qu’il est un héros de comics et il pédale comme un fou pour retourner en ville.
[Rabi, après un instant de réflexion] On a tous envie d’être importants. J’imagine qu’il suffit d’aider les gens à voir en quoi ils le sont.
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Les hommes de Pracha enquêtent. L’angoisse et la colère planent dans l’air, une politesse aiguisée avec un tranchant exquis dans ce moment des plus humiliants et des plus effrayants. Dans une pénombre étrange, chargée d’électricité, les pièces donnent la sensation que la mousson va éclater. (p. 469.)
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Elle est un animal. Aussi servile qu’un chien. Pourtant, s’il prend garde de ne rien demander, s’il laisse une ouverture entre eux, une autre version de la fille automate apparaît. Aussi précieuse et rare qu’un arbre bo vivant. Une âme émerge des fils emmêlés de son ADN remanié. (p. 312.)
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Dans un monde ou les énergies fossiles ont pratiquement disparues , ou les tornades et la montée des eaux sont monnaie courante ou la pauvreté touche une grande partie la société , Nailer un ferrailleur qui vit avec un père violent , découvre un voilier échoué avec à son bord une jeune fille ...Une riche , avec de beaux bijoux et plein de richesses ...
Que faire d'elle ? Il va choisir de la sauver et s'enfuir avec elle ; c'est le début d'une grande aventure .
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Alix connaissait la puissance des mots. Papa la lui avait suffisamment enfoncée dans la tête quand elle était petite. Les mots étaient spécifiques, avec des nuances et des couleurs subtiles. On les choisissait afin de peindre exactement l'image désirée dans l'esprit de quelqu'un d'autre.
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Les Cités englouties : littoral rendu marécageux par la montée des eaux et les haines politiques, lieu de décombres et d'incessants échanges de feu. Autrefois fière capitale, les gens qui alors circulaient dans ses couloirs de marbre dominaient une bonne partie du monde. Aujourd'hui, l'endroit avait à peine sa place sur les cartes, et encore moins au cœur des réunions des personnes civilisées.
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Les bons chiens avaient des maîtres et les maîtres choyaient les bons chiens.
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ils n'ont aucune idée de ce qu'ils font. Ils sont censés tirer toutes les ficelles, mais ils inventent au fur et à mesure.
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Les êtres humains ont faim de tuer, c'est tout. Il suffit de quelques politiciens pour entretenir la division et de quelques démagogues pour encourager la haine et vous dresser les uns contre les autres. Et, avant de s'en rendre compte, on se retrouve avec une nation entière qui se mord la queue, qui tourne en rond jusqu'à ce qu'on n'entende plus que des claquements de dents. Détruire un endroit comme les Cités englouties est facile quand on travaille avec des humains. Ton espèce adore suivre. La mienne, au moins, a une excuse, mais la tienne? Je n'ai jamais vu de créature plus avide d'égorger son voisin.
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Vous avez passé un accord avec la Californie et on ne m’a rien dit ? Ils sont propriétaires de votre eau et je n’ai pas été prévenu ? Parce que, de mon point de vue, vous pompez grâce à des droits de pacotille que vous avez achetés en seconde main à un fermier du Colorado occidental et vous n’avez plus une seule carte en main. Cette eau aurait dû nous revenir depuis longtemps. C’est écrit sur les papiers que je viens de vous donner.
Yu lui décocha un regard maussade.
— Allez, Yu, reprit Angel avec légèreté en lui donnant une petite claque sur l’épaule. Ne faites pas cette tête. Nous connaissons tous les deux les règles depuis assez longtemps pour savoir quand on a perdu. La Loi du Fleuve dit que les droits plus anciens gagnent le jackpot. Les plus récents ? (Angel haussa les épaules.) Pas grand-chose.
— Quelle patte avez-vous graissée ? demanda Yu. Stevens ? Arroyo ?
— Ça a de l’importance ?
— C’est la vie de cent mille personnes !
— Ils n’auraient pas dû parier sur d’aussi mauvais chevaux alors, commenta Gupta depuis l’autre côté de la salle de contrôle où elle vérifiait les moniteurs de pompage.
Angel cacha un sourire satisfait tandis que Yu se tournait vers la jeune femme d’un air méchant.
— La soldate a raison, Yu. Vous avez votre notification. Nous vous offrons vingt-cinq minutes supplémentaires pour sortir. Après cela, je vais lâcher mes Hades et mes Hellfire. Vous feriez mieux de vous tirer avant le feu d’artifice..
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Les liens du sang ne valaient rien. Seuls les gens étaient importants. S'ils protégeaient vos arrières, si vous protégiez les leurs, ils pouvaient être considérés comme une famille. Le reste n'était que mensonges et fumée
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Tu es une toute petite souris dans un grand vieux désert, reprit-il. J’aurais cru que tu l’aurais compris, maintenant. Il y a des faucons, des chouettes, des coyotes et des serpents et tout ce qu’ils veulent c’est te manger. Alors, rends-moi service, quand tu croises des types comme Cato ou Esteban. Souviens-toi que tu es la souris. Tu baisses la tête et tu restes hors de vue. Tu oublies ça une seconde et ils te boufferont du bout de ton nez au bout de ta queue, ils ne se rendront même pas compte qu’ils t’ont avalée. Ils n’en roteront même pas. N’auront pas la moindre indigestion. Tu n’es qu’une bouchée sur la route vers leur vrai dîner.
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- S’ils n’essayaient pas de me faire exploser la tête, j’aurais vraiment pitié d’eux. Tous ces… gens fiévreux, si gonflés de leur… (Elle s’interrompit, cherchant ses mots.) gonflés de leur foi. Oui, leur foi. (Elle hocha la tête, à l’aise avec le mot qu’elle avait choisi.) Ils pensent que, parce qu’ils ont la foi, le monde devrait être tel qu’ils le désirent, que leurs prières suffisent à apporter le changement. Quand on y pense, ce sont des innocents. Tous ces garçons et ces filles jouant les combattants de la liberté du bout de leurs carabines au milieu du désert. Ce ne sont que d’innocents petits enfants.
- Des petits enfants avec des flingues.
- Selon mon expérience, les enfants avec des flingues ont tendance à se tirer dessus.
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Elle écrivit sur les corps. Elle écrivit sur Ray Torres et la nageuse qu'il lui avait conseillé d'ignorer tant d'années auparavant. Elle écrivit ce qu'il était devenu, la tête couchée sur le volant après une fusillade. Un homme qui connaissait trop de choses sur trop de gens, qui savait où étaient enterrés les cadavres. Elle parla de Jamie et du cadavre oublié qu'il était devenu. Elle en parla comme d'une personne, un individu, fou, passionné, bourré de défauts. Lubrique, brillant, en colère. Elle en parla comme de quelqu'un qui pouvait survivre à ses rêves et à ses ambitions, comme d'une personne qui refusait d'être effacée, bien que son tueur ait tenté de lui arracher le visage.
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Lucy eut un rire amer.
- Je serais folle de vous faire confiance.
- Je viens en paix.
- Vous seriez plus paisible avec une balle dans la tête.
- On n'apprend rien d'un cadavre.
- Je pourrais me contenter de vous tirer dans les genoux, rétorqua-t-elle. On pourrait voir si vous souriez encore sans vos genoux.
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