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Critiques de Patrice Franceschi (181)
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S'il n'en reste qu'une

Rentrée littéraire 2021 #36



Rachel, une journaliste australienne décide de partir dans le Rojava ( Kurdistan syrien ) sur les traces des combattantes kurdes qui y ont affronté dans Daesh et les milices turques. Dans le cimetière de Kobané, elle découvre une extraordinaire tombe qui renferme deux corps, celui de Tékochine et Gulistan. Elle part sur leurs traces pour découvrir ce qui leur est arrivé.



Contrairement à beaucoup de lecteurs, je n'ai pas aimé le dispositif narratif qui consiste à hacher le récit puisque l'histoire de Tékochine et Gulistan est racontée par bribes à mesure que Rachel rencontre et interroge les différents témoins. Cette discontinuité fait perdre en intensité et bride l'émotion, freinée par les passages consacrées au ressenti de Rachel, archétype attendu de l'Occidentale en Orient. J'ai eu tendance à voir envie de survoler ces passages, attendant avec impatience de retrouver les deux Kurdes et leur folle amitié hors norme née de la guerre et de l'omniprésence de la mort.



Leur histoire est passionnante et rend un vibrant hommage à tous ces combattants kurdes yézidis abandonnés par les Occidentaux puis contraints à l'exil dans les pays voisins comme l'Iraq, triste écho aux événements récents en Afghanistan. Les Yapajas, les combattantes femmes, ont été plus de 36.000 à mourir. Et c'est formidable de voir renaître leurs idéaux de liberté et d'égalité à travers les traits de Tékochine et Gulistan. Avec une sincérité et une authenticité frappantes, Patrice Franceschi tend ainsi un miroir à nous, Occidentaux. Sommes-nous prêts à jouer notre peau pour sauver nos valeurs comme le font ces Yapajas ? C'est une vraie leçon de vie qui défile sous nos yeux.



Si le procédé narratif du roman dans le roman autour de la journaliste Rachel est un peu lourd durant les deux tiers du récit, il a la vertu de faire naître le dialogue entre femmes kurdes et occidentales, ce qui accentue l'effet miroir. En respirant le même air presque mystique que ces combattantes qu'elle côtoie, Rachel connaît une remontée aux sources, vers elle-même, à mesure qu'elle découvre le destin de Tékochine et Gulistan qui ont refusé de vivre au rabais. Elles en sont peut-être mortes, mais elles savaient pourquoi elles vivaient, pourquoi elles souffraient et au final pour quoi elles étaient prête à mourir. Rachel découvre que la grandeur peut naître de l'échec.



Le dernier tiers du roman est superbe, moins haché, plus incarné, plus poignant du coup. Les dernières heures de Tékochine et Gulistan relèvent de la tragédie, révélant toute le pathétique et la dignité que peut revêtir la condition humaine lorsqu'elle est poussée dans ses ultimes retranchements par la guerre. Jusqu'à un épilogue assez inattendu, très convaincant qui donne un autre sens au titre. Cette fois, l'émotion se libère et touche au coeur.
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S'il n'en reste qu'une

Le Kurdistan a depuis l'antiquité le tort d'être situé au mauvais endroit : dominant le « centre de la terre », il contrôle les routes qui relient l'Afrique, l'Asie et l'Europe. C'est dans cette région que ce sont affrontés l'empire d'Assyrie et le royaume égyptien, Mèdes et Perses y ont vaincu le royaume de Babylone, les Croisés et les Turcs s'y sont entretués.



C'est à Kobané, ville bâtie le long de la ligne de chemin de fer reliant Berlin à Bagdad par les allemands au début du XX siècle, que nous entraine Patrice Francheschi en compagnie de Rachel Casanova, journaliste québécoise envoyée par un quotidien australien, couvrir la résistance kurde face aux exactions de Daech.



Rachel va s'intéresser au destin de deux femmes extraordinaires la Commandante Tékochine et sa garde du corps Gulistan dont nous suivons la tragédie en trois actes : Kobané, Raqua et Sérikani. Batailles sanglantes, séries de crimes contre l'humanité ou mieux vaut ne pas tomber vivant entre les mains des islamistes. Chaque combattant conserve près du coeur une dernière cartouche … au cas où.



Des observateurs de l'ONU sont sur place et parmi eux des français commandés par le Colonel Bonnaventure (que j'imagine fort bien être sous les ordres du Général Gerfaut, le héros du roman « Article 36 »).



Trahis par les dirigeants occidentaux (songeons à l'Afghanistan), les kurdes sont abandonnés à la soldatesque turque et nos deux héroïnes tombent glorieusement face à l'ennemi.



Leur destin convertit Rachel, qui « volait vers l'Orient compliqué, avec des idées simples » aurait dit le Général de Gaulle et découvre progressivement «les vérités qu'il faut aller chercher au péril de sa vie pour pouvoir les transmettre avec force».



Magnifique hommage aux femmes kurdes en lutte contre la barbarie, ce roman est incontournable en cette rentrée marquée par l'asservissement de leurs soeurs afghanes.



PS : mon analyse du roman "Article 36" qui débute au Kurdistan.
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S'il n'en reste qu'une

Envoyée en Syrie par le groupe de presse australien qui l’emploie, la journaliste québécoise Rachel Casanova y cherche le sujet d’un grand reportage, et pourquoi pas, de son premier livre. Elle se lance sur les traces de deux sœurs d’armes kurdes, Tékochine et Gulistan, qui, tuées dans de terribles mais mystérieuses circonstances alors qu’elles combattaient au sein d’un bataillon féminin, alimentent une véritable légende quant à leur courage et à leur engagement pour la liberté. Bien décidée à retracer leur destin, la reporter occidentale devra se confronter à la réalité du terrain kurde : une expérience dont elle n’imaginait pas qu’elle la transformerait autant…





A travers l’enquête de Rachel, c’est la dernière décennie de leur histoire qui nous parvient du point de vue des Kurdes eux-mêmes : des années de combat éperdu contre la haine islamiste, dans un affrontement inégal, fatalement jusqu’au-boutiste puisque toute défaite ou abandon entraînerait leur destruction, atroce et acharnée. Hommes et femmes luttent pied-à-pied, avec le courage et la détermination de ceux qui mènent un combat existentiel, et qui n’ont d’autre choix que le sacrifice pour tenter de repousser l’innommable. Trahis en 2019 par le retrait de la coalition internationale qui les soutenaient depuis cinq ans contre Daesh, les Kurdes continuent seuls le combat, désespéré pot de terre contre barbare pot de fer…





Le parcours de baroudeur et l’engagement humanitaire de l’auteur en zones de guerre ne sont sans doute pas pour rien dans le réalisme de sa restitution de la guérilla et des batailles décisives en Syrie, qu’il s’agisse du Stalingrad Kurde de Kobané en 2014 ou de la prise de Raqqa en 2017. Et si, par ailleurs, la construction du roman peut paraître artificielle dans son souci de maintenir jusqu’au bout un suspense somme toute superflu, nombreux sont les passages forts du récit. En particulier ceux qui mettent en avant l’engagement lucide et sans haine des femmes kurdes, souvent très jeunes, condamnées à attaquer sans cesse et à ne jamais reculer, sûres de rencontrer tôt ou tard la mort au combat puisqu’elles se sacrifieront plutôt que de tomber aux mains de ceux qui les démantèleraient vivantes.





Patrice Franceschi a choisi de confronter deux femmes kurdes et une Occidentale, dans une rencontre posthume symboliquement destinée à nous rappeler la valeur de cette liberté autrefois chèrement conquise, et que, dans notre confort, nous laissons peu à peu s’éroder par peur d’en payer le prix. « Vivre libre ou se reposer, il faut choisir. » Et si, à force de préférer notre sécurité matérielle à la défense de nos idéaux, nous étions en train de devenir « des sortes d’animaux domestiques » ?


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Patrouille au Grand Nord

A l’instar d’Isabelle Autissier, Sylvain Tesson, Eric Orsenna, Patrice Franceschi est « écrivain de marine » comme le furent Jean Raspail, Simon Leys ou Pierre Schoendoerffer et, à ce titre, est Capitaine de Frégate de la réserve citoyenne engagé à promouvoir la dimension maritime de la France.



C’est ainsi qu’en 2018 il se retrouve à Saint Pierre et Miquelon et embarque à bord du Fulmar, un chalutier converti en patrouilleur. Onze hommes constituent l’équipage qui se dirige vers Nuuk, capitale du Groenland, pour rejoindre le Rasmussen, un batiment danois, pour un exercice au nom de code Argus soutenu par les avions des alliés. Nuuk où Astrid, une jeune VSNE représente notre pays, et se porte volontaire pour embarquer.



Cette mission, à proximité du cercle polaire arctique, au nord du Labrador, affirme la présence française et danoise dans une région qui s’ouvre au trafic maritime et pourrait être pour les chinois une nouvelle route de la soie. Le Groenland, aujourd’hui province du Royaume de Danemark, pourrait accéder à l’indépendance et les richesses de son sous sol aimantent américains, canadiens, chinois et russes …



L’exercice Argus permet de simuler divers scénarios (incendie, voie d’eau, secours à des randonneurs, etc.) et met en évidence les forces et les faiblesses des équipages et de leurs navires (le Rasmussen dispose d’un imposant canon, mais est privé de radar de tir). Il permet aussi d’enrichir la cartographie d’une zone où les icebergs évoluent et présentent un risque majeur pour les bateaux. Argus ayant lieu en septembre, l’exercice est rafraichissant, voire glacial, est souvent noyé dans la brume ou les précipitations, et le Fulmar est secoué et son équipage essoré !



Patrice Franceschi pratique les « trois temps ». « … j'essaye de ne jamais séparer passé, présent et avenir pour me donner le sentiment de vivre plusieurs vies en même temps - et l'illusion, sans doute, d’être plus libre encore. (…) Ça veut dire que si j'écris le livre de cette mission, je parlerai de l'équipage au présent - dans ce qu'on va vivre ensemble -, de moi au passé - par rapport à un certain nombre d'événements que j'ai vécus - et de nous tous pour notre futur commun». «Je veux aussi associer les livres que j'aime à notre aventure commune ; je compte en parler beaucoup. Pour moi, la littérature et la vie c'est la même chose... ».



Le lecteur navigue donc en compagnie de Conrad et Lawrence d’Arabie, de Cendars et Saint-Exupéry, dans une époque où « l’effacement de l’histoire apparait comme possibilité du futur », mais où des sentinelles comme Patrice Franceschi veillent sur les remparts.



J’ai apprécié ce récit d’expédition sur le Fulmar, aux cotés d’un équipage totalement investi dans sa mission mais curieux de savoir ce qu’un « écrivain de marine » allait en écrire.



PS : l'hommage de l'auteur aux combattantes kurdes :
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Première personne du singulier

Quatre nouvelles nous mènent successivement :

- sur le cargo du commandant Flaherty au coeur d’une tempête, la veille de Noel ;

- en juin 40, sous les ordres du sous-lieutenant Vernaud, face à aux panzers de la Wehrmacht ;

- au large de Lampedusa avec le lieutenant Wells, en vue d’un radeau de migrants africains en péril ;

- sur les quais de la gare de l’est, à l’aube du 22 novembre 1943, avec Madeleine et ses filles ou Pierre-Joseph et ses fils, face à la Gestapo.



Vont ils respecter le « principe de précaution », faire profil bas et s’éclipser prudemment ?

Ou vont ils faire un choix plus radical, plus exigeant, pour eux et leurs proches ?



Quatre nouvelles, quatre choix cornéliens, quatre tragédies rédigées d’une plume sèche, factuelle, créant une atmosphère pathétique qui place le lecteur au coeur du drame et qui interpelle, car la fin justifie-t-elle les moyens (Wells) ?



Ces nouvelles de Patrice Franceschi complètent le tableau du monde initié avec « S’il n’en reste qu’une » ou « Patrouille au grand nord » et posent l’éternelle question « qu’est ce qu’un homme libre ? ».



L’image d’Ange, Matéo, Pauline et Charlotte, partant avec treize minutes de retard sur l’horaire prévu, le 22 novembre 1943, est inoubliable.



PS : S'il n'en reste qu'une
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Quatre du Congo

Patrice Franceschi nous convie à une expérience initiatique, celle du désespoir total lorsqu’on est perdu dans la grande forêt équatoriale. Cette expérience, vécue quand il a 20 ans, lui apprend qu’elle est le ciment entre lui et ses 3 autres compagnons aventuriers. Ils se sentent soudés après avoir vécu au Congo sur la trace des pygmées, à la recherche d’un lac maudit y compris par ces derniers. L’inexpérience et l’inconscience de la jeunesse lui suggère aussi qu’il continuera à vivre ces moments de recherches aventureuses, ce qu’il fera toute sa vie.

Patrice a pris des notes, et les retransmet jour après jour. Ce n’est pas un livre d’ethnologie, c’est un livre porteur de l’idée que la vie c’est le risque.

Il faut vivre dangereusement.

L’aventure, donc, en commençant par les petites mésaventures.

Les pygmées entretiennent des rapports ambigus avec les Bantous, qui les méprisent : ils sont les maitres de la forêt, mais ne pratiquent ni élevage ni pêche ni culture. Ils récoltent le miel, parfois venant de fleurs vénéneuses, nos quatre compères en feront les frais. Ce sont eux les principaux interlocuteurs, pas plus fortunés que nos quatre aventuriers, qui filment pourtant, et essaient de protéger leurs bobines des formidables tornades. Ils dorment dans des hamacs, recouverts de plastique, connaissent la faim, sont assaillis par les fourmis, les abeilles, les poux, les pieds mangés par les tiques, et heureux car participant à la beauté de l’univers.

Leur fin est proche, ils vivent l’enfer, pourtant pas assez pénible pour que Patrice rentre dans le rang.

L’aventure, c’est l’aventure.

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S'il n'en reste qu'une

Voilà un livre coup de poing.

Coup de poing dans l’estomac, dans nos vies occidentales bien ouatées.

Tékochine et Gulistan : retenez bien ces deux noms.



Elles sont deux « sœurs d’armes », combattantes kurdes pour la liberté. Du style résistantes à tout – y compris à la peur de mourir. De vraies soldates engagées de tout leur être dans la lutte contre Daech.

Alors quand Rachel Casanova, journaliste australienne, vient enquêter à Kobané, et qu’elle tombe sur les photos côte à côte elle sent qu’elle tient là un récit hors du commun. Elle n’aura de cesse de comprendre ce qui leur est arrivé.



Pour cela il faudra rencontrer une série de personnages : Bérivan Kobané - « la femme qui ne sourit jamais « - qui les a bien connu et qui lui dévoilera une partie de l’histoire autour d’un verre de whisky, puis le Général Qaraman qu’il faudra aller chercher dans les montagnes de Qandil et enfin Tulin Clara, qu'elle devra aller rencontrer clandestinement, au mépris du danger, cette Générale qui lui racontera dans quelles circonstances ces deux femmes ont péri.



Je l’avoue, je n’étais pas jusqu’ici fan de Patrice Franceschi. Mais avec « s’il n’en reste qu’une », il réussit ici un récit poignant, où « la tragédie côtoie le romanesque ».

On se remémore en effet l’abandon qu’on connut ces combattants kurdes, et notamment les femmes, prises en étau entre les sanguinaires de Daech, d’une part, et les forces turques d’autre part. Au péril de leurs vies, ces femmes dotées d’un courage exceptionnel ont réussi l’exploit notamment de permettre à des familles Yézidies de s’enfuir et d’échapper aux massacres horribles que leur réservaient les islamistes.



Il y a de très beaux personnages secondaires, comme ce Mohamed, au départ chauffeur de Rachel, mais dont la vie va être bouleversée par l’arrivée de la journaliste.



Et quel courage de la part de Tékochine et Gulistan, deux femmes exigeantes qui ne mettent rien au-dessus de la liberté ! L’une ayant vingt ans de plus que l’autre, l’une veillant sur l’autre dans une sorte de fraternité ou de sororité comme seule la guerre peut en connaître.



Elles forcent le respect et nous couvrent de honte à l’idée que nous, Occidentaux, n’avons pas réussi à les soutenir dans leur guerre contre Daech. Elles nous donnent une véritable leçon de vie, à nous qui sommes confortablement installés dans nos vies occidentales, avec cet hymne à la liberté qu’elle proclame quel qu’en soit le prix.



Un beau récit donc, saisissant, dont je suis ressortie bouleversée à l’idée de la cruauté qu’avait pu subir la dernière survivante livrée aux forces du mal.

Tous mes remerciements donc à Patrice Franceschi d’avoir donné vie à ces deux héroïnes qui forcent le respect. Chapeau bas devant ces combattantes kurdes dont je me souviendrai encore longtemps, sans aucun doute.

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Il est minuit monsieur K

La nuit sera longue pour messieurs les agents secrets O et K...

Alors, K.O. ou O.K. ?

O, après vingt ans de traque a coincé K dans son bar de la Dernière Chance...

Nom symbolique, s'il en est, pour ce rade du bout du monde.

Ce satané dossier Alpha, paraît valoir les ressources dépensées pour le retrouver: C'est de la bombe! Il faut que ces vingt pages (pas une de plus, secret absolu...) retournent dans le coffre de la Centrale.

K s'est barré avec le dossier Alpha, et O doit se le faire restituer. Il n'y a pas à sortir de là!

Mensonges, vérité, manipulation,les deux hommes vont s'affronter jusqu'à neuf heures trente tapante, dernier carra! Monsieur O se fait fort d'obtenir le si précieux dossier Alpha sans violence! Il a carte blanche pour offrir à Monsieur K tout ce qui ira au-delà de ses rêves et désirs supposés.... Sinon, ben Monsieur O et son équipe utiliseront des procédés moins agréables pour l'avoir, le dossier!

À la fin, tout sera dit et la vérité (du moins une certaine ou supposée vérité) apparaîtra... enfin, un dénouement. C'est Monsieur K qui le dit.

En attendant, causons!.. Dialoguons dans la chaleur de la nuit. Échangeons des vues acérées sur l'état du monde livré au mensonge-roi.

Le livre se lit bien, chapitré court avec de belles relances... Il y a même une tentative d'évasion de Monsieur K, dont on (le lecteur) ne sait trop quoi penser... Parce qu'on commence à penser (que l'on peut croire) comme Monsieur K...

C'est qui qui va gagner? Bien malin qui le devinera avant les dernières pages!

Et j'ai même relu plusieurs fois la fin... Pas parce que je n'avais rien compris, mais pour me régaler, me repaître encore une fois, deux fois...

Pensez! Un roman pareil, qui se termine sur "Néant, néant, néant"...
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S'il n'en reste qu'une

Merci à NetGalley et aux éditions Grasset pour cette lecture

Grand Reporter à Sydney Match, Rachel se voit proposer une mission : partir en Syrie pour retrouver les femmes kurdes qui ont combattu et découvrir ce qu’elles sont devenues.

C’est de Kobané que la grande reporter de Sydney Match va rayonner pour en apprendre plus. L’auteur décrit le quotidien des combattants et leurs luttes.

Si j’ai aimé l’hommage rendu aux combattantes kurdes, j’ai aussi malheureusement trouvé l’intrigue artificielle et le personnage principal, Rachel, difficile à appréhender.

Un livre néanmoins à lire pour que ces combattantes ne tombent pas dans l’oubli.


Lien : https://dequoilire.com/sil-n..
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S'il n'en reste qu'une

Avec ce livre, je découvre la plume de Patrice Franceschi et ce ne sera pas la dernière fois.

Dès le début de ce livre, on est pris dans les mailles du filet de cette histoire. Rachel, reporter australienne est mandatée par son Directeur de journal, pour enquêter sur les combattantes kurdes et delà elle écrira un livre pour donner la parole à deux yapajas célèbres pour leur peuple, dont la fin sera tragique.

Rachel va découvrir un cimetière fermé au public, à la sortie de Kobané et s'y introduira. Parmi le vestiges de ces tombes profanées, elle est attirée par l'une d'elle où le portrait de deux femmes figure. Elles sont enterrées ensemble sous le nom de Tékochine et Gulistan, deux célèbres combattantes kurdes, des yapajas.

Elle va donc partir sur leurs traces et effectuée son travail de journaliste. De rencontre en rencontre, les vies de ces deux femmes sont explorées et racontées.

Un récit simple, moderne et émouvant sur ces yapajas qui combattent pour la liberté. Dès le début, on sent que l'auteur s'est bien documenté, ce qui permet aux profanes de bien suivre le récit et de comprendre pourquoi ces kurdes se battent. Après avoir combattu Daesch, c'est face aux islamistes turcs qu'ils doivent se battre.

Un livre que j'ai énormément aimé et qui ne laissera personne indifférent.

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S'il n'en reste qu'une

S'il a le mérite de parler longuement du quotidien éprouvant et sanglant des combattants kurdes, ce roman reste en surface, échoue à faire pénétrer le lecteur dans la matière des choses. Le récit de la vie des deux Yapajas à l'existence et à la mort romanesques est livré par bribes, par éclats d'informations confiées à Rachel, la narratrice superficielle et très Occidentale, pas à sa place dans ce pays. Cela en fait un livre haché, discontinu et, de fait, peu immersif ou même touchant (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2021/09/27/sil-nen-reste-quune-patrice-franceschi/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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Ethique du samouraï moderne

Ethique du samouraï moderne...Voilà un titre qui a suscité en moi de la curiosité, qui sonnait comme une exigence, une ambition, et une approche originale et dynamique, vantant une ligne de vie fondée sur le sens de l'honneur de ces guerriers nippons.



Il y a un peu de cela dans ce texte qui est une sorte d'OLNI, objet littéraire non identifié, même s'il s'autodéfinit en sous-titre, "petit manuel de combat pour temps de désarroi". le problème, c'est qu'on attendrait d'un manuel qu'il soit pratique, progressif, de compréhension immédiate et intuitif dans la forme. Ici, nous allons parcourir pas moins de 327 propos tout au long de ces 170 pages, insérés dans six "livres" (c'est pour la touche stylée ésotérique, dans la droite ligne d'une introduction bien mystérieuse). Ces livres titrés "des choses..." qui seront successivement qualifiées d'essentielles, principales, difficiles, du quotidien et diverses...pas rassurant, ça sent la déconfiture au fil des pages !



Au risque d'être impitoyable, la lecture confirme assez vite les appréhensions. Premièrement, les propos ne sont finalement pas hiérarchisés, ce qui ne permet pas aisément de retenir une ligne directrice claire et des conseils essentiels. Ce qui apparaît tout aussi rapidement, c'est que la répétition incessante, employée sciemment pour nous interpeller, nous lecteurs, "Elèves du dojo d'Ishen", produit des effets dévastateurs : c'est absolument saoulant ! Plus généralement, la mise en scène de ce maître Isoguchi qui n'a jamais existé, et qui assène ses sentences a un côté pompeux voire prétentieux. Tout cela pour enfoncer beaucoup de portes ouvertes sur la manière de diriger sa vie. J'avoue que contre toute attente initiale, j'ai eu bien du mal à le finir...



On retiendra au fond que l'auteur, grand bourlingueur et franc-tireur qui a manifestement voulu théâtraliser son propos nous invite à une indépendance d'esprit, à ne pas avoir un comportement de mouton, à prendre le risque de vivre ses passions, à vivre libre et autonome dans les temps difficiles. Si le livre ne le dit pas, il pourrait participer d'une préparation à ce que nous commençons à vivre collectivement, à l'échelle mondiale, entre crises sanitaires, migratoires, environnementales...



Un livre qui sans doute se voulait assez piquant voire provocateur, et qui ne l'est pas beaucoup. Il aurait gagné à mon avis à éviter les artifices stylistiques employés pour un texte plus dépouillé sans ce côté martial qui n'apporte pas grand-chose d'autre que de l'agacement. Bon, au moins, on peut dire qu'il détonne et se distingue parmi la multitude de livres proférant des conseils de conduite de vie sur le mode zénitude ou humoristique !





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Mourir pour Kobané

Que vous dire ? Qu'il faut lire et très vite FAIRE CONNAITRE (de tous) ce tout petit "très grand livre", témoignage poignant et fruit d'un grand courage... et de pas mal d'obstination !



Trois événements persos, pour ma part et dans l'ordre :

(1°) Entendu par hasard Patrice FRANCESCHI parler de ses amis kurdes sur une chaîne radio du "service public" (France Inter, je crois) : le gars était concis, parlait sans cesse des autres, n'était pas un de ces foutus Narcisses chatouillés par les flagorneurs professionnels et putassiers des radios/télés françaises... Il nous emmenait si loin de là en trente secondes de parole : si authentique et (hélàs) si rare, le bonhomme !!!

(2°) Lu en deux jours l'ouvrage (aussitôt commandé chez ma libraire)... et été totalement conquis par la FORCE de ce témoignage exceptionnel...

(3°) Découvert ensuite l'emballante et émouvante critique de notre amie babéliote Heval [dont je vous engage à très vite lire l'intégralité de son beau texte critique ci-dessous] : "Les organisations kurdes "croient en la légitimité de leur combat [...], ils savent la difficulté de leur tâche dans une région qui ne se nourrit pas de l'idéal démocratique. Ils s'arment donc en conséquence parce qu'ils ont digéré la leçon apprise à leurs dépens : la guerre impose ses lois et ce n'est pas en jouant aux bisounours qu'on la gagne [...]" [soit un petit EXTRAIT de sa talentueuse critique].



On n'oubliera pas de sitôt la longue galerie de portraits vivants des "Yapagués" (YPG : Unités de défense du peuple), puis celle des "Yapajas" (YPJ : Unités de défense féminines) : Esrin, Rodja, Beriwan, Rona, Zivan, les "amazones de feu" -- qui ont les prénoms des héroïnes courageuses du romancier kurde (écrivant en langue turque) Yachar KEMAL...



Profonde dichotomie existant entre le nord syrien et le nord irakien... Entre des territoires gérés depuis 1991 -- à la faveur d'une zône d'exclusion aérienne, valant une quasi-autonomie kurde de ce Nord irakien -- par les forces de l'UPK de Jajal Talabani et celles du PDK rival de Massoud Barzani et... ces territoires du Nord syrien, nés de la "révolution" (sanglante) de 2012 -- ce pays kurde en formation qu'est le "Rojava" charnel, formé de trois territoires encore séparés dans le Nord syrien, où la société civile tente de s'organiser autour des territoires libérés par le PYD (une émanation syrienne du PKK turco-kurde clandestin d'Abdullah Öcallan... ).



Puzzle complexe, comme on le voit... Un peuple kurde spolié puis oublié depuis le traité de Sèvres (1921, et jamais appliqué) et désormais entouré d'ennemis féroces qui souhaiteraient bien le voir disparaître ou, au mieux, le voir définitivement "assimilé" (Je pense au nationalisme turc obtus [pléonasme] de l'andouille cynique Erdogan, ce nouveau "pacha" mégalo anatolien, islamiste dit "modéré", plutôt peu regardant sur les nuisances de Daech jusqu'à récemment...)



Voilà, ce livre est magnifique et tout empli d'humilité : il retrace deux années de présence sur le terrain par un témoin "écrivain" (on aurait dit "aventurier" il y a quelques décennies) entre 2013 et le début de cette année 2015... jusqu'à la "libération" de Kobané (c'est-à-dire des ruines de ce qui fut une grande cité de 100.000 habitants au nord de la Syrie) : libération par les Kurdes eux-mêmes, facilité bien sûr par l'appui aérien de la coalition occidentale ! Plus de 2.000 kurdes ont déjà perdu la vie dans cettte guerre pour simplement rester en vie en tant que peuple avide de démocratie, et prêt à offrir sa protection aux citoyens chrétiens, sunnites, ou yézidis (etc.) : bref, à tous ceux qui ne leur ressemblent pas par leur langue, leur religion, leur ethnie -- leur culture et leur être, donc...



Lisez, et faites lire "Mourir pour Kobané" (édition "Equateurs", 2015) de Patrice Franceschi : un tout petit livre teinté de rouge-sang, vendu 13 euros... Pouvoir fragile de la plume pour faire connaître ce beau combat des forces kurdes contre le sabre des psychopathes daechiens déchaînés, oui...
Lien : http://www.regardsfeeriques...
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Dernières nouvelles du futur

C'est effectivement entre Orwell et Huxley comme il est dit en préambule. Et j'y rajoutrai aussi Globalia de Ruffin et toute la science-fiction que j'ai oubliée sur les sociétés totalitaires.

Au fil des chapitres nous assistons à un monde devenu totalitaire, dont tout le monde s’accommode, devenu invivable où les valeurs sont inversées.

En fait il ne s'agit tout au plus qu'une extrapolation de notre monde actuel. Sur le plan sécuritaire, écologique, sociétal… Le monde décrit par Franceschi n'est que le résultat de nos erreurs actuelles.

C'est magistral et j'espère pas trop prémonitoire. Il est peut-être encore temps de réagir.
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Dernières nouvelles du futur

STOP les amis, on arrête tout !!!

On se déconnecte des réseaux sociaux abrutissants, on essaye de sauvegarder ce qui nous reste de vie privée, on modère notre frénésie de surconsommation, et bien sûr on oublie les délires transhumanistes et les bidouilles génétiques, de toute urgence ! J'ai reçu quelques nouvelles du futur, et elles ne sont pas bonnes...



Dans le rôle du lanceur d'alerte, je vous présente Patrice Franceschi, aventurier, cinéaste, marin et pilote, et un peu écrivain aussi.

Alerte souvent loufoque, alerte en forme de fictions (plus ou moins réussies), mais alerte ROUGE quand même !



En ouvrant ce recueil de nouvelles, je m'attendais à quelque chose d'obscur et de glaçant, façon "Black Mirror" : je dois avouer que dans l'ensemble ces 14 textes assez inégaux n'ont pas tout à fait répondu à mes espérances. Je n'ai pas retrouvé ici la tension et la profondeur angoissante de l'incroyable série TV, mais j'ai découvert plutôt des fables un peu faciles et trop farfelues - des extraterrestres qui se payent notre tête en inscrivant à la surface de leur planète des messages géants visibles depuis la Terre ? Vraiment ? - qui ne m'ont pas véritablement convaincus.

Il n'en demeure pas moins que les dérives qu'elles pointent (restrictions des libertés individuelles, prolifération à outrance de la vidéo-surveillance, culte de la célébrité et de la performance, économie totalement virtualisée) restent malheureusement très plausibles, et que le monde devenu fou qu'elles dépeignent (où le joli mot de "citoyen" a été remplacé par celui de "consommateur"...) fait vraiment froid dans le dos.



Dans ce cauchemar, un seul motif d'optimisme : le mystérieux "Réseau Sénèque" qui fait office de dénominateur commun à tous ces textes et qui oeuvre dans l'ombre pour tenter de ramener l'humanité à la raison. Eux seuls ont compris que "le progrès technologique n'a de sens qu'accompagné du progrès humain". Cela va sans dire, n'est-ce pas, mais cela va encore mieux en le disant et Patrice Franceschi a le mérite de nous avoir prévenu en anticipant le pire.

Noble intention.

Dommage que la réalisation pêche un peu, notamment en ce qui concerne les dénouements de ces petites histoires. Chacun sait que la qualité première d'une nouvelle tient souvent dans sa chute, et ici bien souvent les chutes tombent à plat.

Un peu comme dans cette chronique, quoi ! ;-)
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Un capitaine sans importance

C’est un rêve qui a initié l’écriture de ce roman, c’est donc une fiction de guerre même si les descriptions sont d’un réalisme effrayant.



P. Franceschi avait suivi la résistance afghane durant quatre ans dans le camp des moudjahidines ; pour ce roman, il est passé du côté russe. Du coup, son livre n’a pas de parti pris, sauf celui d’être anti-guerre, la vodka ayant remplacé le pinard des poilus. Nous mesurons la détermination des combattants Duchmans "antirévolutionnaires" qui luttent avec leur foi et des armes dérisoires face à des chars et des hélicoptères.



J’avais en tête les images de la B.D. "Le photographe" de Guibert. Le texte montre la violence d’une sale guerre, avec des réflexions toujours actuelles sur la guerre "ingérante".

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Première personne du singulier

Première nouvelle : Un fanal arrière qui s'éteint

L'évènement phare de l'histoire se passe les jours avant Noël à bord d'un grand voilier de commerce nommé "La providence".

Le capitaine Flaherty a embarqué avec son équipage familier et son fils Tim.

Ils vont devoir affronter un ouragan et le capitaine se trouvera confronté à un choix terrible à effectuer seul.

L'écriture est magnifique, presque musicale. Les termes techniques pourraient constituer un frein à notre lecture mais il n'en est rien. Ils servent la beauté des phrases, pourtant sans emphase, avec une grande spontanéité.

Le suspense fait penser aux romans de Frison-Roche.



Deuxième nouvelle : Carrefour 54

Les évènements se passent aux premiers jours de la seconde guerre mondiale quand les troupes françaises reculent devant l'armée allemande.

Le lieutenant Vernaud est conditionné par un poème de Victor Hugo l'encourageant à rester le dernier même seul.



Troisième nouvelle : Le naufrage du lieutenant Wells

Un journaliste australien fait une enquête pour savoir ce qu'est devenu le lieutenant Wells lors du naufrage de son bateau.

Après avoir dû subir le refus de son capitaine de porter secours à des naufragés au large de l'île de Lampedusa, Wells décidera de faire justice lui-même.

Très lourd cas de conscience. Belle découverte de personnages hors du commun.



Quatrième nouvelle : Le train de six heures

Madeleine et Pierre-Joseph se rencontrent sur un quai, à Paris en 1943, en compagnie de leurs enfants. Ils sont arrêtés par les allemands et sont soumis à une souffrance insupportable infligée par les nazis.

Un drame, trop gros, moins prenant que les deux autres. L'histoire est plus bâclée.



J'ai beaucoup apprécié ce livre de nouvelles pour les situations difficiles qu'il aborde, les choix philosophiques bien que les nouvelles ne soient pas mon premier choix de lecture en général.

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S'il n'en reste qu'une

Rachel, une journaliste du Sydney Match est envoyée dans le nord de la Syrie pour faire un reportage sur les combattantes kurdes qui se sont illustrées notamment dans la conquête de Manbij et de Kobané face l’État islamique.



Dans cette zone nommée Rojava par les Kurdes lorsqu’ils l’ont libérée en août 2016, la situation politique a été bouleversée trois ans plus tard. En octobre 2019, l’ancien président américain Donald Trump annonçait que les troupes américaines se retireraient de Syrie, où elles s’étaient alliées aux Kurdes pendant des années. Une volte-face totalement incompréhensible pour les populations locales comme pour les observateurs internationaux dotés d’un minimum de sens moral...



Au printemps 2020, Rachel débarque à l’aéroport de Kobané désormais en mains turques. Alors que son guide la conduit à son hôtel, elle remarque en contrebas de la route ce qui ressemble à un grand cimetière. Mohamed lui explique qu’il s’agit de l’ossuaire militaire kurde où sont enterrés celles et ceux qui se battent depuis 2012 contre les islamistes. Après la reprise de la zone par l’armée d’Erdogan appuyée par ses supplétifs arabes, la nécropole a été saccagée et les tombes profanées. Quelle classe...



À l’insistance de l’Australienne, Ahmed le chauffeur finit par s’arrêter et la reporter en profite pour se faufiler entre les mausolées écroulés. Finalement, au milieu des gravats, elle repère une grande sépulture presque intacte au pied de laquelle subsiste un cadre en bois avec la photo de deux Yapajas (combattantes) kurdes côte à côte : la première semble avoir quarante ans alors que la seconde doit en avoir vingt de moins.



Désormais, Rachel tient son sujet. Elle va essayer de reconstituer l’histoire de ces deux femmes mortes ensemble pour défendre une certaine vision occidentalisée du monde face à Daech. En partant à la rencontre de celles et ceux qui ont connu Tékochine et Gulistan, c’est leur nom, l’envoyée du Sydney Match va permettre au lecteur de vivre de près l’âpreté des affrontements dans la région. À travers le portrait de ces deux héroïnes, elle narre la disparition de milliers de jeunes Kurdes qui ont eu l’envie de croire la vague promesse américano-européenne : pouvoir enfin construire un état indépendant où ils cesseraient d’être au mieux des citoyens de seconde zone sous le joug arabe ou turc.



Patrice Franceschi est un vrai baroudeur qui risque sa vie depuis plus de quarante ans pour soutenir des causes auxquelles il souscrit. Dès 1980, il s’engage dans les rangs de la résistance afghane contre l’armée soviétique. À partir de 2015, il signe plusieurs tribunes dans Le Monde pour essayer de sensibiliser les Français à l’importance de ne pas abandonner le seul peuple du Moyen-Orient qui se sacrifie pour défendre nos valeurs : égalité homme-femme, laïcité, multiculturalisme et respect des droits humains.



J’ai été surpris par les souffrances et le dévouement sans borne de ce peuple martyr dont les médias ont finalement si peu parlé. En s’introduisant dans leur intimité, ce roman permet (dans la douleur) de comprendre ce qu’ils ont vécu et continuent de subir. Une prise de conscience salutaire, même si on se sent profondément ébranlé en refermant cet ouvrage.
Lien : https://www.lemonde.fr/idees..
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S'il n'en reste qu'une

Alors que je terminais l’épilogue de S’il n’en reste qu’une, un des six romans obtenus avant l’été grâce à ma participation au Prix du roman FNAC, je savais qu’il s’agirait de mon coup de cœur, du roman que je défendrais sans bafouiller. Je venais de traverser près de 250 pages d’un voyage initiatique incroyable qui m’avait transporté au Moyen-Orient et j’étais déjà convaincu de tenir là une de mes plus belles lectures de l’année.



Rachel Casanova est une journaliste canadienne travaillant au Sydney Match en Australie qui est envoyée dans le nord de la Syrie pour enquêter sur le devenir de ces combattantes kurdes ayant lutté contre Daech. C’est à Kobané, tout au nord de la Syrie à la frontière de la Turquie, qu’elle découvrira dans un cimetière fermé au public le portrait de deux de ces combattantes, Tékochine et Gulistan.



Elle débutera son enquête sur le destin tragique de ces deux femmes dont les noms accolés sonnent un peu comme la promesse d’une histoire incroyable, d’un conte moderne. De fil en aiguille et à force de patience, elle gagnera la confiance des combattant.e.s kurdes de cette province du Rojava, au nord de la Syrie, afin d’en apprendre plus sur l’histoire extraordinaire de ces deux camarades d’armes. Au cours de son périple, il lui faudra même braver la répression de l’armée turque pour rencontrer la cheffe d’un des camps cachés de la résistance kurde, afin de découvrir l’émouvant dénouement de leur ultime bataille.



Quel roman ! Quelle aventure ! De la première à la dernière page, j’ai été happé par ce récit, par le destin aussi intriguant qu’incroyable de Tékochine et Gulistan. Il en faut du talent pour faire vivre en si peu de pages une histoire si dense, transformée au fil des pages en un mythe guerrier. Le destin de ces combattantes kurdes, d’abord utilisées pour lutter contre Daech puis ensuite persécutées par la Turquie au nom de la lutte contre le terrorisme est un grand coup de cœur littéraire, un voyage chahuté qui chamboule, émeut, et ne devrait pas vous décevoir. Ne le ratez pas !
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Mourir pour Kobané

Je ne pouvais passer à côté de ce témoignage. Kurde d'origine, j'ai suivi la lutte des forces kurdes contre les intégristes musulmans en Syrie, j'ai été alarmée par l'avancée rapide et instantanée de Daech au Kurdistan, j'ai été horrifiée par le sort des Kurdes yezidis, j'ai été meurtrie par ces histoires de femmes et d'enfants capturées, vendues et violées. J'ai regardé, de là où j'étais, assise dans un fauteuil douillet, mon peuple encore une fois se faire massacrer, attaquer.



Moi qui pensais que les Kurdes ne connaîtraient plus jamais les horreurs du passé - persuadée qu'ils avaient survécu en silence et loin des regards aux crimes les plus atroces, moi qui pensais à un avenir plus heureux - persuadée qu'au pire succédait toujours le mieux, j'ai été frappée par la dure et triste réalité: les Kurdes sont encore une fois confrontés à l'horreur qui les avait un peu oubliés. Un peu oubliés, oui, car si le sort des Kurdes, avant l'arrivée de Daech, n'était pas à envier - toujours confrontés à la dure répression des autorités et incapables de vivre dans la pleine jouissance de leurs droits et libertés - ils vivaient mieux que par le passé. Mais voilà que la monstruosité de l'humanité vient, de nouveau, les frapper. Et on se dit alors que les Kurdes n'aurons jamais le droit de respirer. A chaque souffle, chaque respiration, à chaque relèvement de tête, les Kurdes doivent payer le prix: leur sang doit couler. Plus d'un siècle de luttes et de combats acharnés contre les autorités turques, iraniennes, irakiennes et syriennes pour obtenir un peu de liberté et vivre librement de son identité mais rien n'y fait. Il faut encore lutter contre des ennemis toujours plus féroces et impitoyables dans cette région d'une grande instabilité. Que croyez-vous que l'on ressente? De la colère qui va parfois friser la haine, de la tristesse, du désarroi, du pessimisme, du désespoir. Fatiguée d'entendre des "experts" raconter des stupidités sur les Kurdes, lasse de voir les politiques "agir" quand il en va seulement de leurs intérêts, épuisée par le travail plus que pitoyable des journalistes longtemps - pour ne pas dire toujours - restés sous silence, j'ai fini, très jeune, par abandonner tout espoir, par ne plus croire aux déclarations des institutions nationales, internationales, gouvernementales, médiatiques. Très vite, j'ai appris en effet que les intérêts qui guidaient ce monde n'étaient pas de ceux que l'on avouait. Quand Kobané a été attaqué, je n'attendais donc rien des pays étrangers. Ils sont finalement venus aider. Par les frappes aériennes, ils ont apporté le soutien qui manquait aux Kurdes mais faut-il les en remercier? Certainement pas. Dans le sort du peuple kurde, ils ont une très lourde responsabilité. Et s'ils viennent à l'aider, c'est toujours pour sauvegarder leurs intérêts et exiger une contrepartie. La solidarité, on le sait, a un prix à payer.



En lisant le témoignage réussi de Patrice Franceschi, j'ai vécu sous le coup des émotions. Tantôt en colère, tantôt triste, tantôt fière et pleine d'espoir, tantôt pessimiste et inquiète. Je me suis énervée contre l'Histoire et ses effets, contre la stupidité tragique de l'humanité, contre toutes celles et ceux qui n’avancent qu'en fonction de leurs intérêts politiques et économiques, contre la triste réalité de notre monde, contre les partis politiques kurdes incapables de faire l'unité. J'ai pleuré pour les Kurdes, pour cet ancien combattant qui, jusqu'à sa mort, gardait dans sa poche un morceau de pain, reste de son triste passé. J'ai sangloté parce que je suis une privilégiée que ses parents ont su protéger de la misère, de la guerre et de la pauvreté en s'enfuyant dans un pays étranger. La culpabilité mine toujours mon esprit. Je me sens coupable, comme d'autres, de vivre dans la paix quand les miens ailleurs luttent sans rechigner. Que faire? Comment les aider? Je suis coupable de ma passivité, de mon incapacité à penser une action sur le monde.



La douleur ressentie pendant la lecture a laissé place quelque fois à une immense fierté. Je suis fière, en effet, de ces Kurdes qui face à Daech défendent leur projet politique, exigent une démocratie laïque, respectueuse des minorités, de la diversité et de l'égalité entre les hommes et les femmes. Je suis fière de leur combativité, de leur sens du sacrifice, de leur foi en leur combat mais ai-je le droit de ressentir cette fierté? Qu'avons nous de commun en dehors de l'identité? Je ne suis pas de celles qui luttent et qui sacrifient sa vie pour le peuple et la patrie, je suis de celles qui s'intéressent à leurs causes et leurs combats, qui veulent voir venir leur succès mais à part ça? Ma fierté est toujours triste parce que je ne fais rien pour la mériter, parce que leur projet politique, pour exister, fait couler leur sang et celui de tous ces gens innocents qui n'ont que peu de moyens pour se défendre. Dois-je enfin vous écrire mon inquiétude? Inquiète, je le suis. Que va-t-il se passer quand les Kurdes auront obtenu ce qu'ils ont toujours tant espéré? L'ivresse de la victoire et du pouvoir va-t-elle les gagner au point de les éloigner des idéaux pour lesquels ils ont lutté? Sauront-ils, tant bien que mal, éviter les dérives d'un autoritarisme obligé puisqu'il s'agit d'établir et de protéger une démocratie dans une région et un territoire hostile à leur projet?



Le témoignage de Patrice Franceschi, vous l'aurez compris, m'a émue par bien des aspects. Il m'a secouée, chamboulée parce que l'auteur connait. Il sait l'histoire des Kurdes, leurs luttes, leur combat, leurs problèmes, leurs difficultés. Il sait les problèmes internes et externes à la société kurde. Et parce qu'il sait, son témoignage gagne en respect et crédibilité. Certain(e)s pourraient contester sa "partialité". Je ne le ferai pas. Il a choisi son camp. Il soutient les Kurdes, on le sait. Mais il n'est pas aveugle. Il sait que les Kurdes devront, dans le cas d'une éventuelle victoire, avancer avec prudence et intelligence pour ne pas perdre le contrôle et tuer à petit feu leur projet révolutionnaire. Il suffit de se pencher sur l'Histoire pour percevoir les dangers qui courent après une Révolution. Les dirigeants kurdes en sont conscients. Ils savent les risques qu'ils encourent, les difficultés auxquelles ils sont et seront confrontés. Et il faudra les aider à les surmonter parce que tous nous savons qu'un projet politique, surtout quand il est de type révolutionnaire, ne se construit pas sans obstacles ni contrariétés. L'Histoire et la Vie nous ont maintes fois prouvé l'existence de la complexité, en tout point et en toute chose. A tous ces "experts" qui écrivent perchés sur leur bureau sans jamais avoir connu le terrain et qui se promènent de plateau en plateau pour dire que le P.K.K et le P.Y.D sont des organisations autoritaires voire totalitaires pour mieux les dénoncer, je citerai donc Patrice Franceschi qui écrit au mieux ce que j'ai toujours pensé:



"On reproche souvent son autoritarisme au principal parti Kurde, le P.Y.D, fédérateur de ce mouvement d'unité. On se méfie aussi de son affiliation au P.K.K d'origine marxiste. Mais c'est une guerre totale que le P.Y.D doit gérer. Une guerre de survie. Les atermoiements ne peuvent être de mise en cet instant, non plus que les facteurs de division. C'est cette unité, même imposée parfois, qui a fait la victoire de Kobané. Nombre d'Arabes, de chrétiens ou d'Arméniens combattent dans les troupes kurdes parce que cette unité existe. Sans cela, ils auraient tous connu le même délitement mortifère que l'Armée syrienne libre." (p.139)



Patrice Franceschi est loin de la frilosité et je l'en remercie sincèrement et profondément. Merci à lui de défendre sans sourciller les Kurdes, merci d'écrire leur lutte et leur combat qui ne se fait pas sans doute ni incertitude. Les organisations kurdes croient en la légitimité de leur combat, défendent les idéaux qui sont ceux a priori des "occidentaux" mais ils savent la difficulté de leur tâche dans une région qui ne se nourrit pas de l'idéal démocratique. Ils s'arment donc en conséquence parce qu'ils ont digéré la leçon apprise à leur dépens: la guerre impose ses lois et ce n'est pas en jouant aux bisounours qu'on la gagne. Celles et ceux qui ne l'ont pas compris sont prié(e)s de se rendre sur le terrain pour parler d'un autre lieu que celui de leur fion, excusez ma vulgarité, et/ou doivent lire avec attention Nelson Mendela qui disait avec une malheureuse lucidité:



"Un combattant de la liberté apprend de façon brutale que c'est l'oppresseur qui définit la nature de la lutte, et il ne reste souvent à l'opprimé d'autres recours que d'utiliser les méthodes qui reflètent celles de l'oppresseur." (MANDELA, Nelson, Un long chemin vers la liberté, Le livre de poche, p. 203)



Les Kurdes savent ce qu'il en est:



"Les islamistes nous mettent une pression considérable et seule cette unité nous sauvera. Concilier cette unité avec la démocratie est un défi en tant de guerre, il ne faut pas se faire d'illusions. Mais nous sommes attentifs à ne pas perdre sur ce terrain." Aldar Khalil, membre du P.Y.D. (p.94)



Il y a tant de choses à dire, tant de choses à exprimer, à dénoncer mais j'en resterai là. Merci à Patrice Franceschi pour son témoignage et sa solidarité. Merci sincèrement.
Lien : http://mezelamin.blogspot.fr..
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