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Citations de Philippe Jaccottet (680)


La première luciole !
En allée, envolée,
Le vent m'est resté dans la main.

ISSA - Été
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Philippe Jaccottet
Toute fleur n'est que de la nuit
qui feint de s'être rapprochée

Mais là d'où son parfum s'élève
je ne puis espérer entrer
c'est pourquoi tant il me trouble
et me fait si longtemps veiller
devant cette porte fermée

Toute couleur, toute vie
naît d'où le regard s'arrête

Ce monde n'est que la crête
d'un invisible incendie
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Ce tintement "sous les nuages de mars", il fallait bien que j'en range l'écoute au nombre des surprises, en fin de compte assez nombreuses, qui m'ont ému de façon si secrète et si profonde qu'aujourd'hui encore, quand même le grand âge serait venu aggraver mes doutes de toute nature, je ne puis m'empêcher d'y voir quelques-uns des signes capables de presque les dissiper.
Et avec cela, tout de même, il faut bien préciser que c'était une vraie cloche, si humble fût-elle, qui avait résonné là; et je savais où elle se trouvait, à quoi elle devait servir. Je pourrais même imaginer qu'en l'entendant, les rares sœurs habitant ce couvent au beau nom de "La Clarté Notre-Dame" devaient quitter, l'une un jardin dont elle ameublissait le sol pour quelques semis de printemps, d'autres leur atelier de reliure ou la cellule à l'abri de laquelle, peut-être, la plus âgée d'entre elles s'était un instant reposée, ou recueillie; à l'image de ces petits troupeaux qu'un enfant berger essaie de conduire à l'abreuvoir avant de les rassembler dans leur enclos; sauf que c'étaient là quelques agnelles silencieuses, obéissantes et cherchant à maintenir ou à accroître encore au fond d'elles-mêmes la mansuétude et la pureté de leur maître ...
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Philippe Jaccottet
Sur les Pas de la Lune



M'étant penché en cette nuit à la fenêtre,
je vis que le monde était devenu léger
et qu'il n'y avait plus d'obstacles.

Tout ce qui nous retient dans le jour semblait
plutôt devoir me porter maintenant d'une ou-
verture à l'autre à l'intérieur d'une demeure
d'eau vers quelque chose de très faible et de
très lumineux comme l'herbe :

j'allais entrer dans l'herbe sans aucune peur,
j'allais rendre grâce à la fraîcheur de la terre,
sur les pas de la lune je dis oui et je m'en fus...


Phillippe Jaccottet nous a quitté le 24 février 2021.
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Raisins et figues
couvés au loin par les montagnes
sous les lents nuages
et la fraîcheur :
sans doute, sans doute...

Vient un moment où l'aîné se couche
presque sans force. On voit
de jour en jour
son pas moins assuré.

Il ne s'ait plus de passer
comme l'eau entre les herbes :
cela ne se tourne pas.

Lorsque le maître lui-même
si vite est emmené si loin,
je cherche ce qui peut le suivre :

ni la lanterne des fruits,
ni l'oiseau aventureux,
ni la plus pure des images ;

plutôt le linge et l'eau changés,
la main qui veille,
plutôt le cœur endurant.

(Leçons)
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J'ai toujours eu dans l'esprit, sans bien m'en rendre compte, une sorte de balance. Sur un plateau il y avait la douleur, la mort, sur l'autre la beauté de la vie. Le premier portait toujours un poids beaucoup plus lourd, le second, presque rien d'impondérable. Mais il m'arrivait de croire que l'impondérable pût l'emporter, par moments.
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Peut il y avoir une lumière née du soleil et de l'usure.
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Les nuages se bâtissent en lignes de pierres
l'une sur l'autre,
légère voûte ou arche grise.

Nous pouvons porter peu de choses,
à peine une couronne de papier doré ;
à la première épine
nous crions à l'aide et tremblons.
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Je pense quelquefois que si j'écris encore, c'est, ou ce devrait être avant tout pour rassembler les fragments, plus ou moins lumineux et probants, d'une joie dont on serait tenté de croire qu'elle a explosé un jour, il y a longtemps, comme une étoile intérieure, et répandu sa poussière en nous. Qu'un peu de cette poussière s'allume dans un regard, c'est sans doute ce qui nous trouble, nous enchante ou nous égare le plus ; mais c'est, tout bien réfléchi, moins étrange que de surprendre son éclat, ou le reflet de cet éclat fragmenté, dans la nature. Du moins ces reflets auront-ils été pour moi l'origine de bien des rêveries, pas toujours absolument infertiles.
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Choses qui fuient, brillent ou s'exhalent, émanations du Temps, apparitions du fond des choses perçant le brouillard de l'indifférence quotidienne, formes, graves ou souriantes, prises par l'Insaisissable, faute de pouvoir parler plus clair...
     
p. 110
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Chaque fois que je suis passé, en cette fin d’hiver, devant le verger d’amandiers de la colline, je me suis dit qu’il fallait en retenir la leçon, qu’ils auraient tôt fait de se taire comme chaque année ; sans cesse autre chose m’a distrait de cette tâche, de sorte qu’à présent je ne peux plus me fier qu’au souvenir que j’en ai, déjà trop vague, presque effacé, incontrôlable. Néanmoins, je ne me déroberai pas.
C’était comme si je découvrais une espèce différente d’amandiers (probablement du seul fait de leur nombre, ou de leur répartition, du lieu ou même de la couleur du ciel durant ces jours-là).
Leur floraison semblait plus confuse, plus insaisissable ; et surtout d’un blanc moins pur et moins éclatant que celui d’une fleur isolée, observée de près. Aurais-je dû regarder mieux, m’arrêter, réfléchir ? Ou est-il préférable de ne l’avoir pas fait, justement ? De toute façon, à présent, c’est trop tard. Il ne me reste plus dans la mémoire qu’un brouillard à peine blanc, en suspension au-dessus de la terre encore terreuse, devant les sombres chênes-verts, en ce bas de pente ; ce bourdonnement blanc...
Mais « blanc » est déjà trop dire, qui évoque une surface nette, renvoyant un éclat blanc. Là, c’était sans aucun éclat (et pas transparent pour autant). Timide, gris, terne ? Pas davantage. Quelque chose de multiple, cela oui, un essaim, de multiplié : des milliers de petites choses, ou présences, ou taches, ou ailes, légères – en suspens, de nouveau, comme à chaque printemps -, une sorte d’ébullition fraiche ; un brouillard, s’il existait un brouillard sans humidité, sans mélancolie, où l’on ne risque pas de se perdre ; quelque chose, à peine quelque chose ….
Essaim, écume, neige : les vieilles images reviennent, elles sont pour le moment les moins disparates. Rien de mieux.
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LA SEMAISON
VII

Je m'impatiente et je suis soucieux;
qui sait les plaies et qui sait les trésors
qu'apporte une autre vie ? Un printemps peut
jaillir en joie ou souffler vers la mort.
- Voici le merle. Une fille timide
sort de chez soi. L'aube est dans l'herbe humide.
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Songe à ce que serait sur ton ouïe,
toi qui es à l'écoute de la nuit,
une très lente neige
de cristal.
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Réflexion faite : qui lit Dostoïevski ne voit pas grande chose de la Russie ; non seulement presque rien des paysages, de la nature, mais pas grand chose même des villes, même des intérieurs où l'action se déroule ( si l'on songe aux descriptions d'un Balzac, par exemple); Il n'a pas l'âme assez tranquille, assez sereine pour s'attarder à cela. Sa fièvre intérieure ne lui en laisse pas le temps. Quand je repense à ses livres, je nevois guère que la nuit, de la neige, de la boue, des rues et des escaliers sombres (...) des êtres dont les ténèbres intérieures reflètent , redoublent celles dont ils se dégagent à peine, des visages à la fois intensément présents et insaisissables ..
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J’écris ces lignes aujourd’hui 8 novembre 2012 ; au-delà de ma fenêtre les arbres, à peine commençant à jaunir ici ou là, les quelques nuages toujours changeants mais clairs comme des ballots de neige en voyage dans le grand ciel, restent encore aussi parfaitement beaux et paisibles et comme pleins de bonté tout involontaire.

C’est, une fois de plus et jusqu’à en devenir décourageant, désespérant, le « combat inégal » de mon vieux poème d’il y a un demi-siècle… Comme si je n’avais fait depuis lors aucun progrès. Au moment où il me faudrait intituler ces pages, plutôt, « Fin de partie ». Une fois de plus aussi, une vague de fatigue roule sur moi, comme pour m’éviter le constat de mon impuissance à me confronter avec cette fin.

De sorte que chaque mot tracé ici sur la page serait comme une de ces brindilles dont Char lui-même avait rêvé de se bâtir un rempart. Tracer encore des lignes comme on jetterait des filins à la surface d’une étendue d’eau, mare infime ou mer à perte de vue, afin qu’ils supportent une espèce de filet qui nous éviterait la noyade. « Poèmes de sauvetage »… Paroles, n’importe lesquelles même peut-être, pour différer l’effondrement, pour vous faire croire qu’il y aurait encore une chance de s’en tirer…
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Le vin avait coulé en abondance dans les verres,
tel un sang plus léger qui ne naîtrait pas des blessures.
"A la beauté du monde !" fut-il dit, et "A telle beauté
parmi nous, grave ou rieuse !" " A la douleur du monde !"
eût-on pu entendre en écho, si tout ce vin
était redevenu du sang dans nos verres ébréchés
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Philippe Jaccottet
L’HIVER



J’ai su pourtant donner des ailes à mes paroles,
je les voyais tourner en scintillant dans l’air,
elles me conduisaient vers l’espace éclairé…

Suis-je donc enfermé dans le glacial décembre
comme un vieillard sans voix, derrière la fenêtre
à chaque heure plus sombre, erre dans sa mémoire,
et s’il sourit c’est qu’il traverse une rue claire,
c’est qu’il rencontre une ombre aux yeux clos, maintenant
et depuis tant d’années froide comme décembre…

Cette femme très loin qui brûle sous la neige,
si je me tais, qui lui dira de luire encore,
de ne pas s’enfoncer avec les autres feux
dans l’ossuaire des forêts ? Qui m’ouvrira
dans ces ténèbres le chemin de la rosée ?

Mais déjà, par l’appel le plus faible touchée,
l’heure d’avant le jour se devine dans l’herbe.
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Les larmes quelquefois montent aux yeux
comme d'une source,
elles sont de la brume sur des lacs,
un trouble du jour de l'intérieur,
une eau que la peine a salée.
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INTERIEUR

Il y a longtemps que je cherche à vivre ici,
dans cette chambre que je fais semblant d'aimer,
la table, les objets sans soucis, la fenêtre
ouvrant au bout de chaque nuit d'autres verdures,
et le cœur du merle bat dans le lierre sombre,
partout des lueurs achèvent l'ombre vieillie.

J'accepte moi aussi de croire qu'il fait doux,
que je suis chez moi, que la journée sera bonne.
Il y a juste, au pied du lit, cette araignée
( à cause du jardin ) , je ne l'ai pas assez
piétinée, on dirait qu'elle travaille encore
au piège qui attend mon fragile fantôme.
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A la cime des arbres le vent ne cesse pas
Le feuillage marmonne
A croire qu’un ruisseau coule au dessus de nous

Le soir cette eau se tait
et le temps un instant est suspendu
La terre se réconcilie avec le ciel

Jan Skacel
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