Citations de Rabindranath Tagore (607)
Les rires, les bavardages, les plaisanteries, les petites attentions quotidiennes pour se faire respectivement plaisir ne nécessitent pas beaucoup d'efforts. Le bonheur qui pourtant en découle est immense.
La lampe s’était éteinte prés de mon lit
La lampe s’était éteinte prés de mon lit ;
au matin je m’éveillai avec les oiseaux.
Je m’assis à ma fenêtre ouverte
et entourai mes cheveux défaits
d’une couronne de fleurs.
Le jeune voyageur vint le long de la route
dans la brume rosée du matin.
Un collier de perles était à son cou
et les rayons du soleil brillaient sur sa couronne.
Il s’arrêta devant ma porte
et ardemment me demanda : « Où est-elle ? »
Honteuse, je ne pus lui dire :
« Elle, jeune voyageur, c’est moi, c’est moi. »
Le jour tombait et la lampe n’était pas allumée.
Distraitement, je tressais mes cheveux.
Le jeune voyageur vint sur son char
dans le rayonnement du soleil couchant.
Ses chevaux écumaient et son vêtement était couvert de poussière.
Il descendit à ma porte
et demanda d’une voix fatiguée : « Où est-elle ? »
Honteuse, je ne pus lui dire :
« Elle, voyageur lassé, c’est moi, c’est moi. »
Par une nuit d’avril, la lampe brûle dans ma chambre.
La brise du sud souffle doucement.
Le bruyant perroquet dort dans sa cage.
Mon corsage a la couleur d’une gorge de paon
et mon manteau est vert comme de la jeune herbe.
Je suis assise à terre près de la fenêtre,
surveillant la rue déserte.
À travers la nuit sombre, je murmure constamment :
« Elle, voyageur désespéré, c’est moi, c’est moi ! »
À I'évidence, aucun dieu ne saurait être plus malveillant qu'un homme qui se fait dieu. Les immortels sont à mille lieues de causer de pareils problèmes. Cueillez une fleur pour la leur offrir, ils seront contents ; abstenez-vous-en, ils ne vont pas s'en plaindre. Les dieux humains exigent bien davantage. À la moindre petite négligence de votre part, ils fondent aussitôt sur vous, les yeux rouges de fureur, ce qui, soit dit en passant, n'en fait pas des figures divines.
Fée-du-logis
Je sais qu'un soir obscur le soleil me fera son dernier adieu.
Les bergers joueront de la flûte à l'ombre des banyans; les troupeaux brouteront près de la rivière, tandis que mes jours s'en iront aux ténèbres.
Voici ma prière : puissé-je savoir, avant de la quitter , pourquoi la terre m'a appelé en son sein.
Ô femme …
Ô femme tu n’es pas seulement le chef-d’œuvre de Dieu,
tu es aussi celui des hommes : ceux-ci te parent de la beauté
de leurs cœurs.
Les poètes tissent tes voiles avec les fils d’or de leur fantaisie ;
les peintres immortalisent la forme de ton corps.
La mer donne ses perles, les mines leur or,
les jardins d’été leurs fleurs pour t’embellir et te rendre plus
précieuse.
Le désir de l’homme couvre de gloire ta jeunesse.
Tu es mi-femme et mi-rêve.
/Traduction Mme Sturge Moore
Alors, glissant une main à l'intérieur de son ample kurta, il tira de dessous son vêtement un morceau de papier chiffonné. Il le déplia et le lissa avec le plus grand soin, puis l'étala sur mon bureau, révélant l'empreinte d'une main toute menue : ce n'était ni une photographie, ni une peinture à l'huile, il semblait que la menotte eut été frottée avec de la suie, avant d'être pressée contre le papier. Chaque année, quand il arrivait à Calcutta pour vendre son raisin dans les rues, il serrait donc dans sa poche de poitrine, tout contre son coeur, ce menu souvenir de sa fille. Comme si le seul contact de cette petite main enfantine, si tendre, pouvait en quelque sorte apaiser la brûlante nostalgie qui dévorait sa vaste poitrine.
Ma famille ayant perdu depuis peu quelques-uns de ses membres , l'obscurité devait naturellement m'acheminer vers la mort .
Tagore; Aux bords du Gange.
Tu m'a grandi de ton amour, moi qui ne suis qu'un homme parmi les autres, flottant dans l'ordinaire courant, agité au gré de la changeante faveur du monde .
Tu m'a donné place là où les poètes de tous les temps apportent leurs offrandes , où les amants au nom impérissable se saluent l'un l'autre à travers les âges .
Des hommes pressés passent devant moi au marché ---sans remarquer comme mon corps est devenu précieux de ta caresse, sans savoir qu'en moi je porte ton baiser, comme le soleil porte en son orbe le feu du divin toucher, dont il brille à jamais.
Tous les gens du village passaient leur temps à se disputer, à comploter les uns contre les autres, à propos de plantations de cannes à sucre, de procès illégaux, de commerce de jute; les seuls qui s'intéressaient aux idées et à la littérature étaient Sashibhusan et Giribala.
(Nuage et soleil)
Le médecin prétend que tous les organes se bataillent dans ce petit corps, de sorte qu'il n'a pas grand espoir de vivre. Le médecin dit que le seul moyen de le conserver, c'est de le maintenir à l'abri du vent et du soleil d'automne. Mais vous, vous êtes terrible : qu'est-ce que c'est que cette manie, à votre âge, d'emmener tout le temps les enfants dehors ?
Je serre ses mains ; je la presse contre ma poitrine.
J’essaie d’emplir mes bras de sa beauté, de piller avec mes baisers son sourire, de boire avec mes yeux ses regards.
Hélas! mais où est tout cela? Qui peut forcer l’azur du ciel?
J’essaie d’étreindre la beauté : elle m’élude, ne laissant que le corps entre mes mains.
Confus et lassé, je retombe.
Comment pourrait le corps toucher la fleur que seule l’âme peut toucher?
Il avait plu la veille, mais ce jour-là il n’y avait aucun signe de pluie et un pâle soleil et des nuages dispersés s’amusaient à colorer des longues traînées de leurs pinceaux les champs où la moisson d’automne était déjà mûre. Le vaste paysage vert était touché un moment par la lumière qui lui donnait une blancheur éclatante, et l’instant suivant il était barbouillé par des ombres profondes et fraîches.
Ce jour -là. , Bhupati n'avait rien à donner ni rien à dire. Il était venu auprès d'elle les mains vides, tel un suppliant. Une simple question prononcée sur un ton d'inquiétude affectueuse, une quelconque marque de tendresse auraient été un remède à ses blessures. (p. 71)
ATTACHEMENT
Je vis de si peu qu’ainsi,
Une perte vaut une perte :
Même celle d’une miette pousse
Mon esprit à se lamenter.
Telle l’une des rives du ruisseau, en vain,
Je tâche de m’accrocher à ses courants,
Une par une, les vaguelettes disparaissent
En cognant contre ma poitrine,
Je vis de tellement peu qu’ainsi,
Une perte vaut une perte :
Si, à Tes pieds, je savais soumettre
Tout ce que je perds et tout ce qui me reste,
Il n’y aurait pas d’usure, tout existerait
Magnanime en Toi.
En Toi brillent tant de soleils et de lunes,
Nul atome ni molécule ne s’y égare :
Tous mes trésors de babioles perdues
Ne trouvent-ils pas refuge à Tes pieds ?
Je vis de tellement peu qu’ainsi,
Une perte vaut une perte.
Je dormais et je rêvais que la vie n'était que joie.
Je m'éveillais et je vis que la vie n'est que service.
Je servis et je compris que le service est joie.
La terre n'est pas un astre mort comme la lune. Elle respire. Ses rivières et ses océans exhalent des vapeurs dont elle se revêt. Elle est couverte du manteau de sa propre poussière qui vole à travers les airs. Celui qui regarde la terre du dehors ne voit que la lueur de cette poussière et de cette vapeur : le contour des grands continents est à peine visible.
L'homme est vivant comme est vivante la terre. Il est, comme elle, enveloppé toujours dans le brouillard des idées qu'il exhale. Sa vraie nature reste cachée, et il semble fait seulement de lumières et d'ombres.
Tu m'as fait infini, tel est Ton bon plaisir. Encore et encore, tu vides ce fragile esquif que je suis pour l'emplir d'une vie neuve et fraîche.
Je suis cette petite flûte de roseau que tu as portée par-delà collines et vallées, dans laquelle tu as joué des mélodies toujours renouvelées.
A l'attouchement d'immortalité, au contact de Tes mains, mon cœur limité explose de joie et prononce l'ineffable.
Tes dons infinis se déposent dans ces mains minuscules qui sont les miennes. Les années passent et toujours Tu verses, et toujours Tu trouves de la place pour verser.
L’étonnant n'est pas qu'il existe en ce monde des obstacles et des souffrances, mais qu'on y trouve la loi et l'ordre, la beauté et la joie, la bonté et l'amour. Que l'homme possède dans son être une notion de Dieu, voilà le miracle des miracles.
L'homme a senti dans les profondeurs de sa vie que ce qui paraît imparfait est la manifestation du parfait...
L'amour est l'ultime signification de tout ce qui nous entoure. Ce n'est pas un simple sentiment, c'est la vérité, c'est la joie qui est à l'origine de toute création.
Je paye en amour la dette illimitée
que je te dois, pour ce que tu es