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Citations de René Guy Cadou (223)


L'ALLÉE DU CALVAIRE



extrait 2

     Malgré tout, mon élan ne me menait jamais plus loin que la grille d'entrée ; parmi les fleurs jetées à gauche du portillon, je découvrais des débris de couronnes, j'en défaisais les perles avec lesquelles, le soir venu, je faisais des bracelets sous la lampe. Inquiet de mon larcin et délicieusement troublé, je revenais en hâte sur mes pas qui, invariablement, me conduisaient dans l'allée du calvaire.
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L'ALLÉE DU CALVAIRE



extrait 1

     Ai-je dit que de la petite fenêtre là-haut, dans la chambre de mes parents, la vue donnait sur un quadrilatère de murs de -l'autre côté de la route ? Sur la route, toujours pleine de crottin, mon père tirait les moineaux ; quelquefois, l'un d'eux, seulement blessé, allait choir à l'intérieur du cimetière. Le voisinage de celui-ci m'apaisait, je trouvais comme un réconfort dans la présence de ces tombes, de ces croix ; j'accrochais mon regard aux angles de l'unique chapelle funéraire, demeure de la comtesse de X...
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Femmes d'Ouessant

Un soir de pauvreté comme il en est encore
Dans les rapports de mer et les hôtels meublés
Il arrive qu'on pense à des femmes capables
De vous grandir en un instant de vous lancer
Par-dessus le feston doré des balustrades
Vers un monde de rocs et de vaisseaux hantés
Les filles de la pluie sont douces si je hèle
A travers un brouillard infiniment glacé
Leur corps qui se refuse et la noire dentelle
Qui pend de leurs cheveux comme un oiseau blessé
Nous ne dormirons pas dans des chambres offertes
A la complicité nocturne des amants
Nous avons en commun dans les cryptes d'eau verte
Le hamac déchiré du même bâtiment
Et nous veillons sur nous comme on voit les pleureuses
Dans le temps d'un amour vêtu de cécité
A genoux dans la gloire obscure des veilleuses
Réchauffé de leurs mains le front prédestiné.
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Bonjour Federico

Federico je n'ai vu qu'une fois ton visage

Dans un journal à trente centimes d'avant la guerre

De celui-là je ne me souviens guère

Mais ta race éternelle est partout chez moi



Dans le geste obstiné de l'homme qui regarde

Sans cesse vers la mer le même galop blanc

Et sourit en voyant les portes de Grenade

S'ouvrir sur les haillons lumineux d'un enfant



Dans l'éventail de fleurs qui cache dans ses rides

La route et la misère bleue des posadas

Dans les bobines des chemins qui se dévident

Pour tromper la fatigue et la faim du soldat



Dans le ciel mesuré par un chant d'alouette

Dans l'herbe encore humide où demeure le cri

Du premier voyageur du triste véhicule

Qui roule vers le soir sa grossesse d'ennui


Dans l'homme abandonné de l'homme par la crainte

Quand douze fois honteux l'oeil mauvais l'étoila

Dans la grande étendue de plaines et de plaintes

Bonjour Federico Garcia Lorca
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L'AMOUR

La double pêche de tes seins
Dans la coupe de la journée
Voici que ton ventre se lève
Entre les branches du figuier
Que la chambre se met à battre
Comme une tempe délicate
Et qu'un versant du ciel inonde
Étendue la plus belle au monde
Sous ta douce main déroulée
Pareille aux crosses de fougère
Pénétrerai-je le mystère
D'une chair à l'âme gagnée
Comme une eau très fraîche qu'on tire
Avec lenteur du fond du puits
Tu te recouvres d'une buée
Qui dissimule ton sourire
Mes doigts possèdent le secret
De t'éveiller de t'épanouir
De te perdre avant de dormir
Comme une enfant dans la forêt.

(extrait de "Les sept péchés capitaux") p. 248
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[...]
Tu ne remuais encor que par quelques paupières
Quelques pattes d'oiseaux dans les vitres gelées
Je ne voyais en toi que cette solitude
Qui posait ses deux mains de feuille sur mon cou

Et pourtant c'était toi dans le clair de ma vie
Ce grand tapage matinal qui m'éveillait
Tous mes oiseaux tous mes vaisseaux tous mes pays
Ces astres ces millions d'astres qui se levaient

Ah que tu parlais bien quand toutes les fenêtres
Pétillaient dans le soir ainsi qu'un vin nouveau
Quand les portes s'ouvraient sur des villes légères
Où nous allions tous deux enlacés par les rues

Tu venais de si loin derrière ton visage
Que je ne savais plus à chaque battement
Si mon cœur durerait jusqu'au temps de toi-même
Où tu serais en moi plus forte que mon sang.

(extrait de "Quatre poèmes d'amour à Hélène") p.212
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Je crois en toi
Visage parmi les pierres veinées de soie
Le plus seul avec son courage
Le plus près de la terre
Sous sa taie de soleil
Tu glisses avec les algues de douceur
Entre les rameaux blancs les mains
L'humus découvert des saisons
Tu portes sur le front le tatouage des tempêtes
Les stigmates du fleuve
Derrière toi il y a tout un passé qui s'ouvre
Une enfance incertaine
Des pas inachevés
Le meilleur de toi-même que tu croyais perdu

(extrait de "Retour de flamme") - p.19
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Bientôt l'arbre

Verdoyante fumée

Demain je serai l'arbre

Et pour les oiseaux froids

La cage fortunée



Les grandes migrations

Sont parties de ma bouche

De mes yeux pleins d'épis

Les éclairs de santé



Je te suis dans l'air bleu

Flèche douce à la paume

Bel arbre que j'éveille

Au bord de mes genoux

Tronc si blanc qu'il n'est plus

Qu'une neige attentive



Tu courbes vers le toit

Tes brandons de lumière

Ta sève jour et nuit

Chante dans les gouttières



On te fête déjà

Dans les rues de villages

Ainsi qu'une saison

Inconnue de la terre



Et toi dans les sillons

Sans borne où les perdrix

Gaspillent pour la joie

Des poignées de sel gris

Tu marches répondant

De la douceur des pierres.
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sans titre


La beauté des arbres tient à l'hiver. Dès la première chute des feuilles ils s'incarnent, s'appliquant à n'être plus une délicieuse surcharge comme en avril ; ils font corps avec le ciel qu'ils supportent et qui leur donne cette géographie lumineuse comme un lys dans l'épaule de la terre.
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Celui qui entre par hasard


Celui qui entre par hasard dans la demeure d'un poète

Ne sait pas que les meubles ont pouvoir sur lui

Que chaque nœud du bois renferme davantage

De cris d'oiseaux que tout le cœur de la forêt

Il suffit qu'une lampe pose son cou de femme

À la tombée du soir contre un angle verni

Pour délivrer soudain mille peuples d'abeilles

Et l'odeur de pain frais des cerisiers fleuris

Car tel est le bonheur de cette solitude

Qu'une caresse toute plate de la main

Redonne à ces grands meubles noirs et taciturnes

La légèreté d'un arbre dans le matin.
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23 avril 46


Mon amour ! Il y aura demain quatre ans

Que nous sommes dans cette même chair

Quatre ans que je promène à la surface de ton corps

Les lourds hameçons de la tendresse !

Et tout peut s'écrouler

Tout est pollué

Tout suit l'enterrement

Tu es toujours plein d'arbres

Mon amour !
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La nuit ! La nuit surtout je ne rêve pas je vois
J'entends je marche au bord du trou
J'entends gronder
Ce sont les pierres qui se détachent des années
La nuit nul ne prend garde
C'est tout un pan de l'avenir qui se lézarde
Et rien ne vivra plus en moi
Comme un moulin qui tourne à vide
L'éternité
De grandes belles filles qui ne sont pas nées
Se donneront pour rien dans les bois
Des hommes que je ne connaîtrai jamais
Battront les cartes sous la lampe un soir de gel
Qu'est-ce que j'aurai gagné à être éternel ?
Les lunes et les siècles passeront
Un million d'années ce n'est rien
Mais ne plus avoir ce tremblement de la main
Qui se dispose à cueillir des œufs dans la haie
Plus d'envie plus d'orgueil tout l'être satisfait
Et toujours la même heure imbécile à la montre
Plus de départs à jeun pour d'obscures rencontres
Je me dresse comme un ressort tout neuf dans mon lit
Je suis debout dans la nuit noire et je m'agrippe
À des lampions à des fantômes pas solides
Où la lucarne ? Je veux fuir ! Où l'écoutille ?
Et je m'attache à cette étoile qui scintille
Comme un silex en pointe dans le flanc
Ivrogne de la vie qui conjugue au présent
Le liseron du jour et le fer de la grille.
---

Une lampe naquit sous la mer
Un oiseau chanta
Alors dans un village reculé
Une petite fille se mit à écrire
Pour elle seule
Le plus beau poème
Elle n'avait pas appris l'orthographe
Elle dessinait dans le sable
Des locomotives
Et des wagons pleins de soleil
Elle affrontait les arbres gauchement
Avec des majuscules enlacées et des cœurs
Elle ne disait rien de l'amour
Pour ne pas mentir
Et quand le soir descendait en elle
Par ses joues
Elle appelait son chien doucement
Et disait
« Et maintenant cherche ta vie ».







Chargeme
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Destin du poète
Le soir qui bouge son oreille
Comme un vieil âne abandonné
Le dernier corset d'une abeille
Oublié sur la cheminée
La cloche triste de l'asile
Et le pas qui répond au pas
Dans la mesure où ce qui veille
Encourage ce qui n'est pas
L'oiseau qui tombe sur la pierre
Le sang qui tombe sur le cœur
La bonne pluie des réverbères
Qui donne à boire au malfaiteur
Le trou d'aiguille par où passe
Le fil ténu de la clarté
La bobine du temps qui roule
Sous les lauriers sous les sommiers
Mais se savoir parmi les hommes
En un présent aventureux
Une petite lampe à huile
Qui peut encor mettre le feu.
---
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Le chant de solitude
Laissez venir à moi tous les chevaux toutes les femmes et les bêtes bannies
Et que les graminées se poussent jusqu'à la margelle de mon établi
Je veux chanter la joie étonnamment lucide
D'un pays plat barricadé d'étranges pommiers à cidre
Voici que je dispose ma lyre comme une échelle à poules contre le ciel
Et que tous les paysans viennent voir ce miracle d'un homme qui grimpe après les voyelles
Étonnez-vous braves gens ! car celui qui compose ainsi avec la Fable
N'est pas loin de trouver place près du Divin dans une certaine
Étable !
Et dites-vous le soir quand vous rentrez de la foire aux conscrits ou bien des noces
Que la lampe qui brûle à l'avant du pays très tard est comme la lanterne d'un carrosse
Ou d'un navire bohémien qui déambule
Tout seul dans les eaux profondes du crépuscule
Que mon Chant vous atteigne ou non ce n'est pas tant ce qui importe
Mais la grande ruée des terres qui sont vôtres entre le soleil et ma porte
Les fumures du Temps sur le ciel répandues
Et le dernier dahlia dans un jardin perdu !
Dédaignez ce parent bénin et maudissez son Lied !
Peut-être qu'un cheval à l'humeur insolite
Un soir qu'il fera gris ou qu'il aura neigé
Posera son museau de soleil dans mes vitres.
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Aller simple
Ce sera comme un arrêt brutal du train
Au beau milieu de la campagne un jour d'été
Des jeunes filles dans le wagon crieront
Des femmes éveilleront en hâte les enfants
La carte jouée restera tournée sur le journal
Et puis le train repartira
Et le souvenir de cet arrêt s'effacera
Dans la mémoire de chacun
Mais ce soir-là
Ce sera comme un arrêt brutal du train
Dans la petite chambre qui n'est pas encore située
Derrière la lampe qui est une colonne de fumée
Et peut-être aussi dans le parage de ces mains
Qui ne sont pas déshabituées de ma présence
Rien ne subsistera du voyageur
Dans le filet troué des ultimes voyages
Pas la moindre allusion
Pas le moindre bagage
Le vent de la déroute aura tout emporté.
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30 mai 1942
Il n'y a plus que toi et moi dans la mansarde
Mon père
Les murs sont écroulés
La chair s'est écroulée
Des gravats de ciel bleu tombent de tous côtés
Je vois mieux ton visage
Tu pleures
Et cette nuit nous avons le même âge
Au bord des mains qu'elle a laissées

Dix heures
La pendule qui sonne
Et le sang qui recule
II n'y a plus personne
Maison fermée
Le vent qui pousse au loin une étoile avancée

Il n'y a plus personne
Et tu es là
Mon père
Et comme un liseron
Mon bras grimpe à ton bras
Tu effaces mes larmes
En te brûlant les doigts
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Si mes yeux si mes mains
Si ma bouche encor tiède
Si la terre et le ciel
Venaient à me manquer
Si le vent n’allait plus
Porter dans sa nacelle
Mes oiseaux et la part
Infime du secret
Si les tiges de blé
Qui ferment ton visage
N’éclairaient plus la route
Où j’avance à pas lents
Si ce poème enfin
N’était rien qu’un poème
Et non le cri d’un homme
En face de sa nuit
Mon Dieu serait-ce alors
Besoin de tant de larmes.
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René Guy Cadou
Toute poésie qui coule de source, se jette dans la mer, tend à rejoindre l’universel.
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René Guy Cadou
Le temps qui m'est donné que l'amour le prolonge
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Oh vieilles pluies souvenez-vous d'Augustin Meaulnes
Qui pénétrait en coup de vent
Et comme un prince dans l'école
A la limite des féeries et des marais
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