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Critiques de Robert Lalonde (63)
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Le monde sur le flanc de la truite

Il existe des livres qui, après la lecture, ne sont jamais délaissés car ils obsèdent le lecteur : autant de petits papiers multicolores marquent les pages à relire, à retrouver et c'est un signe quand, prenant le livre dans les mains, on se surprend à empoigner un arc-en-ciel.

Ce livre est de ceux-là et peut-être le premier de tous et, aussi, le premier d'une longue série qu'il me faudra désormais lire...





Robert Lalonde convie le lecteur à l'accompagner pendant quatre saisons, à méditer sur l'écriture, sur la nature, sur la vie aussi, finalement. Juste un séjour en compagnie de ce guide, de son chien toujours compagnon, de sa chatte toujours capricieuse, des oiseaux toujours symboles d'évasion et de vastitude, de la nature toujours en mouvement, de ses couleurs et de ses concerts.



Vaste programme quand il s'entoure des écrivains qu'ils admirent – Flannery O'Connor, Annie Dillard, Margaret Laurence, Barry Lopez, Pierre Morency, Emily Dickinson, Jean Giono, Colette... et bien d'autres -, introduit le lecteur auprès d'eux, les traduit, le cas échéant, dans une prose personnelle et imagée. Il les fait s'exprimer, converser tentant de faire des échanges une tentative de définition de ce qu'est "écrire", de ce qu'est la littérature...

Toujours regardant la nature, s'il a des yeux de peintre - comme son père - pour l'observer, c'est en poète qu'il devient naturaliste. S'il décortique la vie et les sentiments qui visitent l'Homme, c'est toujours en approfondissant, en allant au delà des perceptions, qu'il ressent.

" Ecrire, voir, c'est pareil ! Cela exige la même vigilance tranquille. (...) cette espèce de fl ânerie circonspecte, libre et exacte, qu'est la vraie chasse, la lecture enchantée, l'écriture qui transcende."



Ainsi, si Robert Lalonde explique son idée de l'écriture, il ne la sépare pas d'une idée de vie : le talent qu'il met à observer, pressentir et transcrire au mieux ses "visions précises", il le met à choisir un rythme de vie qui lui donne l'autorisation de laisser libre-cours à une liberté d'être, seul état autorisant l'adéquation entre éprouver et écrire, entre percevoir et dire.





Le livre refermé - mais il ne le sera jamais, vous l'avez compris ! - laisse le lecteur orphelin. La compagnie de tous ces écrivains lui manque, le voilà perdu, desoeuvré, la tête bouillonnante d'idées, de questions, de phrases, de mots qu'il faut redire et réciter pour avancer plus loin dans la réflexion et tenter de saisir ce qu'est "écrire".





Un livre donné comme un trésor, un livre qui devient comme un refuge, un livre comme un compagnon évident qui enrichit l'autre de son érudition : un livre qui ne se résume pas puisqu'il n'est jamais lu en totalité tant la profondeur de son propos reste vaste. (Reste à espérer ne pas l'avoir trahi en tentant d'en parler.)

Un livre à garder dans la poche, définitivement...





(Mai 2021)
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La reconstruction du paradis

C’est suite a l’incendie qui a rasé la maison de campagne de Lalonde qu’il a écrit ce livre où il est question de détachement, de l’essentiel, et d’abandon. Un livre qui donne envie d’épurer, d’abandonner le superflu et de s’attarder sur ce qui est important et qui est au fonds de soi et autour de soi. Tout au long du livre c’est l’œuvre de Walt Withman ( Leaves of grass) qui accompagne le narrateur.

J’ai adoré comme d’habitude.

Une phrase m’a particulièrement marquée, l’auteur dit: « les deux pires inventions de l’humanité sont le miroir et le calendrier ».

Je cite à peu près mais l’essentiel est la
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Un poignard dans un mouchoir de soie



Robert Lalonde, Un poignard dans un mouchoir de soie - 2018



« Et tout de suite, je les ai aimés, démesurément, comme il convient au cœur éclaté d’aimer. »



Un jeune délinquant-poète, perdu dans son brouillard et son mal-être, s’attache à deux vieux bien sympathiques, Irène et Romain qui ne se connaissent pas. Qu’adviendra-t-il de ce trio improbable, de ces personnages pour qui « le cœur meurt en dernier » ? Qui sauvera l’autre dans ce chassé-croisé haletant ?



J’ai eu un peu de mal au début à comprendre les enjeux de ce roman, le style me paraissant un peu obscur puis, au bout d’une vingtaine de pages, j’ai senti qu’il se passerait là quelque chose d’important et que je ne sortirais pas de ma lecture sans un frisson et peut-être même une petite boule au cœur.



Cette œuvre, au style éclaté, parle des ressorts par lesquels naissent les affinités du cœur et les rencontres singulières et dit les blessures que seule l’amitié peut guérir. J’ai bien aimé.



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Le monde sur le flanc de la truite

D'emblée, je peux vous révéler que ce dernier mérite d’être lu par tous les amoureux de la littérature, de l’écriture, de l’acte de création, de la nature…



Dans son chalet à Oka, en compagnie de son chien et de sa chatte, Lalonde partage avec son lecteur ses observations durant les quatre saisons canadiennes sur la nature qui l’entoure et il fait des liens, entre autres, avec les auteurs qu’il aime et il médite sur le processus de création littéraire. Ainsi, au fil des pages, le lecteur découvre des extraits de Jean Giono, de Gabrielle Roy, d’Annie Dillard, de Flannery O’Connor, d’Aubudon, de Gustave Flaubert, de Montaigne, pour ne mentionner que ces derniers et il est amené à réfléchir sur le monde qui l’entoure à travers les pensées de ces grands auteurs. C’est un éveil par rapport à la vie que propose Lalonde. Par exemple, il cite Flannery O’Connnor :



Écrire n’est pas, à mon sens, une simple discipline, encore que c’en soit une ; c’est plutôt une certaine façon de regarder le monde, la réalité, et aussi l’art de faire usage de ses sens afin de déchiffrer le mieux possible la signification des choses…(p. 24)



Il est à noter que Lalonde traduit lui-même les textes de ses auteurs fétiches pour le plus grand plaisir de son lecteur qui retrouve ainsi sa touche personnelle.



Ou encore, comme il le mentionne à propos des œuvres littéraires :



Dans les livres des autres, tout est rassemblé, réconcilié, unifié, disponible : le passé, les saisons, l’amour, la mort, le monde vaste, les hommes, la vérité, les actions, les voix, la certitude d’un accomplissement possible. (p. 42)



De surcroit, l’auteur va à la rencontre de ses sens pour redécouvrir son rapport aux mots…  Grâce à ses réflexions sur l’écriture, Lalonde ouvre la porte de son instant présent à son lecteur pour l’amener ailleurs, là où la beauté des mots résonne plus fort que le tumulte qui entoure l’être humain.



J’écris pour célébrer l’orage, celui du ciel de ce soir, celui qui grandit en moi, tous les orages du monde dont on espère qu’ils nous délivreront de nos tensions, qu’on dit insoutenables. Mais on soutient tout, toujours, orgueilleux et plus forts que nos tourments. J’écris pour que rien ne se perde, de tous les actes d’une journée, importants, insignifiants, à la fois matière à toucher Dieu, ou bien le vrai, tentatives d’ouvrir l’œil, parfois le bon. J’écris avec une gravité songeuse, une tendresse inconnue, embusquée, sur le qui-vive, l’espoir d’aimer les hommes, en les comprenant, en les montrant comme je les vois. Il m’arrive d’écrire comme on jette un cri dans la tempête, ou dans la forêt en feu. (p. 86)



Ce livre m’a profondément marquée… Je sors grandie de cette lecture…. Robert Lalonde est un grand écrivain. Sa plume s’avère sublime, ses réflexions sont profondes et empreintes de poésie. J’ai vraiment pris le temps de lire Le Monde sur le flanc de la truite. C’est une lecture qu’il faut déguster, savourer, laisser de côté et puis retrouver. Lalonde m’a permis de découvrir encore plus l’acte de création à travers sa perception, mais également à travers celle d’un auteur comme Paoustovski.



Chaque instant, chaque mot, chaque regard jeté au hasard, chaque pensée profonde ou badine, chaque tressaillement à peine perceptible du cœur humain, de même que le duvet aérien des peupliers ou le feu d’une étoile dans une flaque d’eau nocturne, sont des grains de poussière d’or…. Il est étonnant que personne ne se soit donné la peine d’observer comment, de ces grains de poussière, nait le flot vivant de la littérature…  (p. 113)



Donc, il y a des livres pour rire, d’autres pour pleurer, pour frémir et il y en a pour ramener le lecteur à l’essentiel… Le Monde sur le flanc de la truite fait partie de cette dernière catégorie… J’ai noté beaucoup de citations dans mon cahier de lecture… Je vous convie à découvrir ce bouquin de Robert Lalonde pour réapprendre à voir, à écrire et à lire….



À partir du moment où l’on cesse d’inventer le monde, être mort ou vivant, c’est presque la même chose. (p.101)



Un autre livre de cet auteur que j’ai adoré est Le dernier été des Indiens et je vous le recommande sans hésitation.



https://madamelit.me/2016/12/08/madame-lit-le-monde-sur-le-flanc-de-la-truite/
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Le vaste monde

Je quitte, à regret, l'écriture de Robert Lalonde et peut-être aussi un peu Robert Lalonde lui-même parce que Vallier, c'est tout de même bien, sûrement, peut-être, un peu lui.

Un garnement qui entend et ausculte les paroles, les dictons, observe les animaux, les oiseaux, la végétation, écoute la nature, les hommes, pourchasse le fil des histoires et des mots ! Un garnement parce que sa tête remplie d'étoiles l'entraîne toujours sur le fil entre raison et bêtise, entre sagesse et imprudence

.

S'il rêve de voler, certain de réussir, il s'élance de tous les promontoires rencontrés et tant pis, si les ailes lui manquent, il est tellement persuadé d'être un volatile qu'il a déjà traversé le ciel tout entier et a déjà survolé maintes fois le toit de la maison...

S'il découvre les secrets du cordonnier, c'est d'abord pour l'écouter raconter son histoire, faire revivre ses frères de sang et de misère, sentir la chaleur de l'été lui caressait le visage alors qu'il neige dehors, c'est pour mieux faire chanter l'harmonica, visiter les contrées inconnues, partir, rencontrer...

S'il vous parle de la fête foraine, ce n'est pas la joie de voir les lampions, les couleurs, la musique qu'il décrit mais bien la détresse du vieux lion, la solitude de la "grosse femme" et celle tout aussi réelle de cette jeune fille horrifiée par le manque de respect des hommes devant les "différents" et qui court vers sa folie pour quitter ce monde ...





Parce que Vallier parle de l'enfance, de ce trépignement, de ces années où il faut piétiner sur place avant de prendre son envol, de courir voir ce qui se cache derrière la colline, partir, marcher, s'éloigner et rencontrer d'autres Cultures, d'autres idées.

Il est fantasque, espiègle, téméraire, farceur, mais il cache aussi un coeur d'une grande bonté, prenant soin de celui qui est seul - homme ou bête -, écoutant celui que tout le monde a oublié, celui qu'on a relégué loin parce que sa folie visionnaire met trop mal à l'aise, il est aussi celui qui, malgré lui, joue les passeurs pour d'autres mondes...



Robert Lalonde est un écrivain-poète-conteur qui vous prend dans son filet, ses mots qui le tissent, chantent, hurlent, galopent, pirouettent, et finissent par exploser dans une pluie d'étoiles pour ne vous laisser que le souvenir d'une histoire qui, sous des allures de drôlerie et de rires étouffés, cachent bien des questions sur l'existence. On repose le livre lu, si vite, ressentant la rencontre si éphémère, le coeur cependant encore un peu léger parce que la magie opérera, c'est certain, dès les premiers mots, dès les premières phrases du prochain livre de l'écrivain qu'on ouvrira : c'est cela , le pouvoir des mots !



(Mai 2021)
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Le monde sur le flanc de la truite

Repéré dans l’ouvrage Le sens de la marche de David Le Breton, Le monde sur le flanc de la truite de l’écrivain canadien Robert Lalonde est venu s’échouer sur mes étagères sous un torrent de livres. Un jour, j’ai repêché le livre avec sa belle couverture noire et luisante. Transporté dans mon sac à dos comme un viatique, le livre s’est défraîchi, écorné, froissé mais sa laitance a étoilé mes longues marches solitaires. Beaucoup de personnes sont convoquées par Robert Lalonde au fil des 190 pages : Annie Dillard, Gabrielle Roy, Flannery O’Connor, Emily Dickinson, Audubon, Barry Lopez, Rick Bass mais aussi Colette, Giono, Flaubert, Montaigne et tant d’autres. Québécois né en 1947, Robert Lalonde est bilingue et se nourrit littéralement à travers les mots français et anglais pourvu qu’ils fassent sens et aident à voir, lire, écrire et vivre. Quatre saisons au Canada alimentent notes, aphorismes, citations, entretiens imaginaires. « Ca parle d’oiseaux, de livres, de chevreuils… de désir, d’espérance, de lueurs aperçues… Ca parle de moi, en scribouilleur obsédé… » (p. 188). Ca aide aussi le lecteur qui peut laisser infuser des phrases comme : « Le mal, c’est peut-être l’impatience, tout simplement » (p. 95) ou encore : « A partir du moment où l’on cesse d’inventer le monde, être mort ou vivant, c’est presque la même chose… » (p. 35).
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Le monde sur le flanc de la truite

Jolie façon de démarrer un billet non ?

Parmi les livres que l’on lit, que l’on accumule, certains s’imposent par leurs qualités. N’y a t-il pas, parmi les écrivains que vous avez lu, des hommes ou des femmes dont vous voudriez être l’ami ? Robert Lalonde fait partie de ces gens là.

Je l’ai lu pour la première fois en 1997, j’avais par hasard trouvé son livre sur le stand du Québec au Salon du livre.

Je n’ai eu que du bonheur à le lire et cela s’est répété trois fois. Alors je vous fait aujourd’hui un joli cadeau en vous livrant ses trois livres.



Robert Lalonde est un grand lecteur, il livre dans ces trois livres ses amours pour des auteurs, pour la littérature mais pas seulement...

Il est aussi un observateur assidu de son entourage, des paysages, des animaux, voici ce qu’il dit

« Voir, regarder, déceler est une obsession d'écriture, comme celle de faire des liens entre des choses qui ne se touchent pas.»



Liens, correspondances au sens où l’entend Baudelaire, dialogues avec ses écrivains préférés dont il nous livre des citations à profusion nous gratifiant de ses propres traductions.Une véritable orgie de citations.



Ses livres sont des journaux de bord d’un écrivain sensible qui parfois se retire « en ermite » et qui se veut comme le dit Giono « un professeur d’espérance »

Il aime méditer, observer, fidèle en ça à Flaubert qui disait « Pour qu’une chose soit intéressante il faut la regarder longtemps »

Il prend des chemins de traverse, il exerce son oeil, sa patience, sa

modestie.

C’est bon de se plonger dans cet hymne païen à la littérature, d’être un peu submergé par l’avalanche de citations qui sont là pour nous nourrir, pour nous éblouir.

Lui a fait de Proust, de Montaigne, d’Annie Dillard, de Jean Giono, de Rick Bass, d’Emily Dickinson, de Rimbaud, de Rousseau, de Schopenhauer, de Flannery O’Connor et de Gabrielle Roy, ses amis.

Je vous propose de faire de Robert Lalonde votre ami en littérature.
Lien : http://asautsetagambades.hau..
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Le dernier été des Indiens



Michel a treize ans. C'est l'été. En Septembre, il entrera au Séminaire, ainsi en a décidé la famille, le clan.



C'est une saison où l'enfance s'évapore de son être, c'est la perte de la liberté pour cet adolescent qui ne vit que par et à travers la nature, les balades sur la rivière, dans les bois, l'observation des oiseaux ou l'émerveillement suscité par la rencontre d'un ours, les chatoiements du soleil sur les feuilles des arbres, l'irisation de l'eau.



Il n'a que deux alliés dans sa révolte, son refus de se conformer.

Son grand-père, disparu un peu plus d'un mois auparavant, et qui l'a enjoint de résister avant de fermer les yeux. Ce grand-père qui, lui aussi, a transgressé les lois du clan en épousant une indienne et en choisissant de s'unir à elle selon les rites de la Tribu et non ceux de l'Eglise.

Et l'indien, cet homme fort, irradiant avec lequel Michel a noué une relation intime : un amour au delà de toute imagination, un amour qui transcende.



Le clan et tout le village vont ostraciser ces deux êtres purs. Les indiens chassés de leurs terres n'ont que le droit de vivre en marge, à l'écart.



Michel sait, qu'à la fin de l'été, la rigidité des pensées, le repli sur soi, l'étroitesse du jugement essayeront de prendre la place de son esprit critique, de son ouverture au monde, de sa tolérance dans le regard indulgent qu'il porte sur les créatures qui l'entourent.

Comment faire pour résister, écouter la voix de ce grand-père, ne pas perdre son âme devant ceux que les croyances, la religion autorisent à chasser les occupants ancestraux des terres convoitées, à refuser leur Culture, à s'absoudre des méfaits qu'ils commettent à leur égard ?

Comment faire pour garder encore et toujours ce sentiment qui le consume et le maintient en vie au delà de toutes les injonctions à rejoindre ce clan tiède, égoïste, sans couleurs, sans sentiments, sans affection ?







C'est un roman d'initiation, il porte la perte du regard naïf et confiant de l'enfance, il décrit la découverte des rochers qui pavent le chemin de l'âge adulte. C'est la remise en question d'une croyance qui légitime tous les manquements quand elle devrait ouvrir les yeux et le coeur sur ceux qui souffrent, qui vivent dans la misère , qui sont exclus. En miroir, c'est la découverte d'une Culture qui sait vivre en communion avec tout ce qui l'entoure, qui prône patience et bienveillance.

Deux regards sur la vie qui s'affrontent : la rigidité des coeurs et des jugements qui barbouille tout de noir et l'empathie universelle comme une palette de couleurs innombrables.





Quand son regard se posera sur les outardes en partance pour leur migration, Michel saura que la vie intérieure, la seule qui doit gouverner l'être en dépit de toute contrainte, est comme l'oiseau qui s'envole. Il déplie ses ailes pour tenter de rejoindre ses points de félicité et qu'importe si le voyage est ardu, seules comptent les escales, sources de tranquillité et d'appel à la renaissance.



(Mai 2021)
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Fais ta guerre, fais ta joie

Comme les livres de la rentrée étaient à l’honneur en septembre pour le Défi 2019 de Madame lit, j’ai demandé à recevoir en service de presse Fais ta guerre, fais ta joie de Robert Lalonde publié chez Boréal. Je tiens d’ailleurs à remercier la maison d’édition pour cet envoi. J’aime énormément la plume de Robert Lalonde et comme il est question de peinture, d’écriture et de processus créatif, je ne pouvais résister à cette histoire. Mais, ce roman est avant tout un très bel hommage au père de l’écrivain qui peignait. D’ailleurs, dans une entrevue publiée dans la Tribune, l’auteur mentionne à propos de son père :



« Il est beaucoup question d’héritage. De ce qu’on reçoit, de ce qu’on en fait, ensuite. Sans mon père, je ne me serais sans doute pas tourné vers la création. Je lui dois beaucoup. »



Jeune garçon, Robert Lalonde observait son père peindre. À travers ses souvenirs, il médite sur l’Art, celui de peindre, celui d’écrire. Il fouille au plus profond de lui-même, fait des liens, découvre, donne des couleurs à cet autre, trouve des mots pour décrire, pour comprendre ce qui a façonné son devenir. Il raconte son héritage.



Alors, vous l’avez aperçu qui travaillait, seul, dans le hangar. Seul. Vous étiez seul, il était seul. Mais il y avait ce brasillement, ce chatoiement, ce diaprement, cette translucidité du ciel. Vous avez pensé, sans comprendre : tous les deux, on a de quoi voir, faire voir, lui avec ses couleurs, moi avec mes mots. Il y avait là tout à coup comme une façon de salut, une sorte de délivrance, vous ne saviez pas. (p. 56)



Cependant, au fil des pages, il aborde d’autres grands comme Monet, Van Gogh, Cézanne, Zola, Marc-Aurèle Fortin, etc., car un artiste ne devient pas ce qu’il est seul. Il s’est imprégné de l’imaginaire des autres et certains lui ont donné envie d’écrire. À cet égard, son regard voit loin, très loin. Il dit aussi aux créateurs qu’ils doivent faire la chasse au doute, faire la guerre, pour ressentir la joie, faire la joie, pour accoucher d’une œuvre.



Je ne peux que vous recommander ce livre. C’est un hommage au père et aux artistes. C’est une façon d’observer, de sentir, de comprendre, de ressentir. Du grand Robert Lalonde. À lire!



De plus, j’adore la couverture de ce livre…



https://madamelit.ca/2019/09/30/madame-lit-fais-ta-guerre-fais-ta-joie/
Lien : https://madamelit.ca/2019/09..
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Fais ta guerre, fais ta joie

Robert Lalonde, Fais ta guerre, fais ta joie - 2019 - ⭐️⭐️⭐️⭐️



Ce fut une lecture un peu ardue pour moi, le style étant un peu trop recherché à mon goût, mais il y a de très beaux passages sur la création autant picturale que littéraire et un lien très émouvant sur ce plan entre le père et le fils. C’est un récit. On a droit à des faits vécus par d’autres peintres connus comme Gauguin, Monet, Van Gogh pour ne nommer que ceux-là. Ce qui m’a plu surtout, c’est cette quête vers la beauté, désespérante parfois, mais qui anime les créateurs qui ne démissionnent jamais, passionnés qu’ils sont de leur art et de ce désir de s’approcher un jour de ce qu’ils voient en rêve, en attente de leur vision idéale sur la toile ou le papier.
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Un jardin entouré de murailles

Robert Lalonde a mis en scène dans des romans quelques écrivains qu’il admire. Dans Le Petit voleur, le lecteur retrouve Anton Tchékhov. Dans Monsieur Bovary ou Mourir au théâtre, il suit Gustave Flaubert en tant qu’être de fiction et dans Un jardin entouré de murailles, le lecteur accompagne la grande Marguerite Yourcenar et sa compagne Grace Frick dans leur périple à Montréal après avoir quitté leur domicile de Petite Plaisance à l’automne 1957.



Tout comme Robert Lalonde, je suis une grande admiratrice de Marguerite Yourcenar. Il fallait que j’achète ce livre qui a été rédigé en plus par un écrivain dont j’admire l’œuvre. Dans ce bouquin que j’ai beaucoup aimé, j’ai retrouvé des thèmes comme le processus de création, le couple, le travail de l’écrivain, l’écriture, les éléments tributaires de l’œuvre de Yourcenar, l’amour de la langue française, le temps, l’admiration de Yourcenar pour Gide et Montherland, etc. Je crois qu’Un jardin entouré de murailles s’avère particulièrement captivant pour ceux s’intéressant au processus de création littéraire et à la place de l’écrivain dans le monde.



Est écrivain celui qui est en contact, celui à travers lequel passe un courant, le même qui traverse la plupart des humains, mais à leur insu! Est écrivain celui qui peut faire le vide en soi pour ne considérer que l’objet, le rêve ou le souvenir qui seul importe! Est écrivain celui dont toute la substance nerveuse est étoilée de cette braise incandescente et qui le brûle tout entier! (p. 123)



Ou encore :



Alors je me mettrai au travail, avec une joie indicible, persuadée que mon personnage me mène et que je n’ai qu’à lui obéir. Vois-tu, il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre. Il suffit d’être attentif, fidèle, disponible, et de consentir joyeusement à sortir de soi, quand le personnage appelle. (p. 185-186)



J’ai aussi apprécié les liens avec les romans de Yourcenar que j’ai lus comme les Mémoires d’Hadrien, L’Oeuvre au Noir ou encore Un homme obscur. D’ailleurs, plonger dans Un jardin entouré de murailles m’a donné le goût de relire Les Mémoires d’Hadrien pour retrouver la passion que vouait l’empereur romain au bel Antinoüs.



Il est aussi question d’amour dans ce roman. D’un amour entre deux femmes. D’un amour exceptionnel confrontant le temps, le désir, les tabous, le mystère car chaque amour n’est-il pas «un jardin entouré de murailles?»



Si vous doutez encore du talent de Robert Lalonde, sachez qu’il a remporté des distinctions comme le Prix Québec-Paris (1985) et le Prix littéraire du Gouverneur général (1994).



https://madamelit.ca/2019/05/04/madame-lit-un-jardin-entoure-de-murailles/
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On est de son enfance

Dans ce carnet rédigé à North Hatley de février 2022 à septembre 2023, Robert Lalonde invite sa lectrice ou son lecteur à emprunter les chemins de traverse en compagnie, entre autres, de ses auteurs fétiches comme Giono, Dillard, Colette, etc. Sur un sentier, il regarde autour de lui la nature environnante et il cherche à reconnecter avec la profondeur de son âme. Pour ce faire, il aborde le thème de l’enfance. D’ailleurs, le titre de son carnet réfère à une phrase de Saint-Exupéry : « On est de son enfance comme on est d’un pays. » Ce pays de l’enfance est tantôt lumineux et parfois, il apparaît sombre. Comme il le mentionne : «C’est que l’enfance qui convoque la merveille charroie aussi le mal-être». (p. 194) L’auteur se souvient, oublie, se souvient, oublie… Sa quête est celle d’un chercheur d’or qui tente de percer l’immuabilité de ses émotions tributaires de l’enfance. Sur ce sentier, il pense aux siens, à ses disparus, aux leçons apprises et ce, même sur un lit de mort (celui de son grand-père). À cet égard, il est parfois mélancolique par rapport au temps. Par exemple, lorsqu’il repense à son ami Dominique, décédé aujourd’hui, à qui il doit, comme il le soulève, sa «révolution intranquille», son «réveil nécessaire», il remarque :



«On n’a jamais le temps de manifester notre reconnaissance aux anges comme aux démons providentiellement apparus sur notre chemin, camarades qui nous ont tiré de pièges plausiblement mortels, avant de s’évanouir comme des spectres dès qu’on a eu le dos tourné.» (p.113)



J’adore ce type de réflexion qui m’entraîne dans mes souvenirs pour en arriver à cette conclusion, un peu comme Lalonde, : «Que reste-t-il de nos beaux jours […]». ( p.60).



La faune et la flore



Lorsque nous lisons du Robert Lalonde, il faut s’attendre à plonger dans un univers marqué par la faune et la flore. Qu’il pense à son passé ou encore qu’il soit dans le moment présent de son écriture, l’auteur présente des éléments de la nature. Ainsi, en causant avec un bruant chanteur, il entend la voix de son grand-père décédé alors qu’il était un jeune garçon :



«Puis, comme dans un rêve qui se déchire, apparaît grand-père Léopold, appuyé au plus costaud des peupliers trembles, sa casquette de guingois, les bras croisés sur sa poitrine. Il secoue la tête comme il le faisait quand, étourdi, je refusais de voir ou d’écouter. Il dit :



Les grands gestes heureux des arbres, les ombres flottantes dans l’eau vive, l’odeur soûlante de la sève de pin qui perle sur l’écorce comme une rosée… La commune de ton enfance, les aiguilles qui chantent la langue du coeur, celle de l’esprit…Je vois battre ton coeur à grands coups, ta chemise palpite… Jamais tu ne dois oublier qui tu es, si tu ne veux pas que le malheur fasse jaillir de toi le son creux du bâton contre l’arbre mort…»(p. 74).

La nature apparaît indissociable de la vie de Lalonde. Elle a forgé son identité, elle l’anime, elle est son référent en tout temps. Mais encore, alors que les forêts canadiennes brûlent, Lalonde pleure. Il apparaît habité par un chagrin relié à son impuissance devant le mode de vie des habitants de la Terre axé sur la surconsommation.



«Au nord les forêts flambent, au sud on navigue en canot dans les rues des villages, un peu partout des tornades sillonnent le territoire. Et, bien sûr, nous n’y sommes pour rien. » (p. 211)



Cette nature, c’est la beauté, c’est l’immensité, c’est sa maison. En ce sens, je me retrouve dans les dires de Lalonde, car je ne peux pas vivre sans mes animaux, sans regarder les chevreuils venant nous saluer, sans observer les dindons qui sautent sur notre galerie pour se nourrir, sans voir les canards et les outardes nageant dans notre baie en été. Les animaux vivent. Ils rendent notre monde meilleur. Alors, ne tuons pas la beauté du monde.



La littérature et l’écriture



Robert Lalonde est un grand lecteur. Pour lui, la littérature s’avère importante. Elle s’infiltre dans ses pensées, dans sa perception de la vie et dans ses émotions. Ainsi, dans ce carnet, Lalonde n’hésite pas à placer des citations de ses auteurs préférés afin peut-être d’appuyer ses réflexions et c’est beau. Cette façon de faire donne vie au carnet, elle agit comme un baume pour penser nos blessures. Elle s’avère reliée à l’écriture. Comme il le soulève :



«Je lis et relis souvent, en parallèle, du texte frais et du texte bien conservé. Ce matin, Véronique Côté – La Vie habitable, 2014 – et Gabrielle Roy – La Route d’Altamont, 1966. Soeurs jumelles éloignées l’une de l’autre, toutes deux, à cinquante ans d’écart, interrogent le mystère de la beauté, celui de la création. » (p.147)



En abordant ces autrices ou ces auteurs fétiches, Lalonde nous les fait découvrir avec un autre regard. J’ai envie maintenant de lire La Vie habitable car je ne connais pas ce bouquin, pas plus que son autrice. La littérature, c’est contagieux!



De plus, Lalonde traite de l’écriture dans ce carnet. Comment doit-on écrire? Combien de temps doit-on consacrer l’écriture? Qu’est-ce que l’inspiration? Quelle est la perception des écrivains de l’acte d’écrire? Autant de questions auxquelles tente de répondre, entre autres, Lalonde. «L’écriture a toujours été pour moi le lieu d’un seul instant». (p. 25). En plus, c’est son grand-père qui lui a permis de développer une force, une persévérance par rapport à l’écriture.



«En écriture, comme en tout, je souscris au catégorique et honnête aphorisme de grand-père :

Ça coûtera ce que ça coûtera.

Ça prendra le temps que ça prendra.

Ça donnera ce que ça donnera. » (p. 53)



Ce carnet se veut surtout une réflexion sur l’écriture. Alors, il faut écrire, il faut se tromper, il faut lire, il faut prendre son temps… il faut…



Merci M. Lalonde pour ce merveilleux carnet. J’ai adoré vous lire, comme toujours. En marchant, je penserai à vous et à celui qui vous accompagne dans vos balades, le Chien.



Que pensez-vous de ce genre de carnet? Aimez-vous ce type de réflexions autour de la littérature, de l’écriture, de la vie de la part des autrices et des auteurs?





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La reconstruction du paradis

Robert Lalonde, La Reconstruction du paradis, Récit - 2023 - ⭐️⭐️⭐️⭐️



Journal de lecture - 18-21 janvier 2024 -



« Écrire pourquoi ? M’y adonnerais-je si je savais ? »



Je laisse cette plongée en lui-même, après avoir perdu sa maison dans un incendie, faire son chemin en moi comme on se reconstruit une vie et un espace à soi après une déconvenue. Il y a ici de très belles descriptions du nouveau paysage, de l’ancienne maison, du moins de ce qu’il en reste dans les débris, des livres qu’on y trouve encore tout cela assorti de citations qui ponctuent, comme souvent chez Lalonde, le récit et donnent à réfléchir. J’aime ces deux mouvements vers l’ici et l’ailleurs de soi, son retour vers sa démarche d’écriture. C’est un carnet de lectures et de reconstruction écrit dans un style méditatif et très poétique. Son enfance et sa jeunesse s’immiscent parfois dans le récit, éclatement du temps et retour aux sources de soi : appel de la nature et de la lecture et de l’écriture.



Quatre étoiles pour la beauté des descriptions et cette intimité avec la nature et les saisons. Trois étoiles aussi, car je ne peux dire que j’ai été vraiment interpellée par la démarche, je suis restée un peu à distance de tout. Seul demeure le goût de découvrir Karen Blixen peut-être…qu’il apparente à l’écriture de Gabrielle Roy, mon auteure fétiche. Vous connaissez ?



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Le dernier été des Indiens

Ceux qui sont familiers avec la littérature québécoise savent que dès la Nouvelle-France la représentation des mœurs et coutumes autochtones permet aux auteurs (d'abord français, puis québécois) de critiquer leurs propres cultures. C'est bien ce que fait Robert Lalonde avec Le dernier été des Indiens. Le jeune narrateur s'indigne du traitement que l'on a fait aux autochtones et décrit comme absurde la décadence de la civilisation occidentale : « il y a eu surtout l'esprit de la terre, de la forêt, qu'on a volé à l'Indien et, maintenant tout va pour le pire et personne ne semble plus s'en apercevoir. » Ce n'est pas un hasard si la narration se déroule en 1959. C'est effectivement l'année de la mort de Maurice Duplessis, celui que l'on considère généralement comme le responsable de la « Grande noirceur ». Mais le narrateur n'est pas dupe. Si l'on ressent un changement imminent, il y a bien des promesses que ne pourra pas tenir la Révolution tranquille, ou comme le dit le narrateur, « l'histoire est passée tout droit ». Le malentendus entre autochtones et québécois est trop grand, et ce sera toujours un handicap à une réelle réconciliation entre les peuples. Voir à cet égard la page 147 qui ne peut être plus claire. L'intimité que le narrateur entretient avec un autochtone « d'en haut de la côte » permet de comprendre une connaissance différente du monde, une connaissance qui serait une relation à la fois intime et passionnelle, décrite comme un voyage intérieur : « Et si, moi aussi, je connaissais cette vraie furie, cette propulsion vers mon moi, plus loin, mon plus que moi? » Dans le roman, le lyrisme ne fait pas défaut : « Comme des étincelles blanches échappées du soleil, les oiseaux de la rivière dessinent, au-dessus [...], une auréole toute en spirales, une fête de plumes et d'indépendance ».



Si les bons coups de ce roman sont nombreux, nous voyons que c'est un roman d'un auteur encore très jeune. Robert Lalonde avait 25 ans lors de sa publication. Il ne manque donc pas de ferveur et d'indignation. Si le romantisme fiévreux de cette jeunesse fougueuse permet des pages empreintes d'un doux lyrisme et une sublime ode à la nature, il ne peut empêcher une certaine caricature et du personnage l'Indien et de la société catholique prérévolution tranquille (mais est-ce que les choses ont réellement changé ?). La jeunesse hait sans ménagement. Le narrateur à 13 ans, donc c'est plus une réussite pour l'auteur, mais le lecteur se rit de tant de quétaineries, d'absurdes révoltes, de naïveté sentimentale et de ressassements sans fin des hypocrisies quotidiennes de la société. Ce que propose Robert Lalonde dans Le dernier été des Indiens n'est pas de nouveaux griefs contre un système idiot et étouffant, en cela il manque définitivement d'originalité, mais bien une voix sincère, intransigeante et une âme à la recherche de la joie et de l'accomplissement de soi. Personnellement, je goûte très peu les récits qui présentent bien trop les atermoiements d'un « je » limite tyrannisant, car ils offrent une vision tronquée d'un monde beaucoup plus complexe. Le sentiment est fort, certes, mais n'est pas tout.

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À l'état sauvage

Je suis un peu déçu de la forme que prend ce roman. Je m'attendais à une structure plus classique mais il s'avère être une suite de chapitres sans réel lien entre eux, sauf exception du personnage principal qui porte toutes ces rencontres. Plus à la manière recueil de nouvelles, d'où l'appellation de l'éditeur "Roman mosaïque"

Par contre on y retrouve toujours la verve de l'auteur, son style organique qui enchante, sa connaissance et son amour profond de la nature qui tapissent tout le roman et influencent les personnages.

Lalonde est le peintre de la littérature québécoise où la nature a toujours sa place comme figure principale donnant de l'amplitude à toute la galerie de personnages.



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Le Diable en personne

Un texte qui serait l'écrin de l'amour vrai, celui qui transgresse, celui qui peut déranger, celui qui fait jalouser parce que trop pur, trop noble, trop rassasiant. Un amour pas choisi, pas délibérément consenti mais foudroyant comme une évidence, comme une attente enfin comblée : c'est là, le sentiment qui lie Jos et Florent.

Des phrases pour "écrire" le mot liberté en autant de renoncements, de fuites nécessaires et obligées pour ne pas se corrompre, ne pas céder, toujours garder le regard droit.



Quand Warden fuit les siens, sa tribu, il ne sait pas encore que c'est le début d'une longue suite de disparitions, de renaissances, une vie maintes fois recommencée et réécrite comme tout juste débutée encore et encore...

Quand Laurel se sauve à travers les champs le jour de l'enterrement de sa femme, il ne sait pas que c'est la dernière fois qu'il souffre pour s'éloigner encore de ceux qui ne le comprennent pas, qui le jugent sans vouloir le connaître, qui le méprisent, ceux qui le nomment le boiteux, le métis, l'étranger, tout suspicieux qu'ils sont devant son caractère secret et indompté.



Warden, Jos, Laurel, trois noms, signes de renaissances pour le même homme farouche, passionné, qui se tait, qui se fait silence, libre de ses actes et de ses pensées.

Le fil du livre dit la rencontre de Jos avec Florent parce qu'elle conditionne tout le reste de leurs existences , elle légitime la jeunesse de cet homme, la détermination de celui-ci toujours en quête de ce qu'il ne parvient pas à nommer.

Florent, l'innocent, le pur, celui qui ne calcule jamais mais donne tout et plus encore, celui qui est à la transition de deux mondes : entre imaginaire de l'enfance et constance de l'âge adulte , celui qui aime les livres, les mots écrits ou prononcés, qui sait les utiliser pour en faire des passerelles comme autant de fils qu'il tisse vers un ailleurs aux côtés de celui qu'il ne veut plus quitter, vers un lieu où la nature prendrait le visage placide de la félicité. Ce sont ces mêmes mots qui vont devenir le trésor de Jos, son secret toujours davantage enfoui avant de devenir une permission de sérénité, de constituer un fil tendu entre l'autrefois et le demain : comme si tous ses visages n'étaient plus qu'un, tranquille, solitaire mais qui a enfin pu trouver la paix.



Un texte magnifique qui dit la rencontre des êtres touchés par la grâce, d'êtres isolés parce que différents et qui se reconnaissent. Un texte bouleversant qui bouscule et qui dérange parce que nos coeurs ne bondissent plus, que nos yeux ne s'illuminent plus, que nous avons cessé de croire en l'existence de l'Autre, miroir de notre âme.





Je ne sais pas très bien parler de cette lecture juste dire que c'est un livre précieux qui ébranle et dont l'émotion ne peut que germer dans le coeur de celui qui le découvrira.





(Août 2021)

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Le seul instant

J’ai bien aimé ce livre. Une sorte de journal de bord de l’écrivain, un été dans sa campagne. Apprendre à regarder à ce qui existe autour et en soi. Un livre parsemé de ses aquarelles et de nombreuses citations de différents auteurs.
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Un coeur rouge dans la glace

Probablement ne pourrai-je jamais lire un livre de Robert Lalonde de façon détachée, c’est-à-dire en faisant abstraction de ce que je sais de l’auteur. Parce que même si nous ne nous sommes pas assis ensemble depuis plusieurs années, il y aura toujours dans mes souvenirs ces moments où nous avons pu parler d’écriture, de cette passion de dire, de ce besoin viscéral des mots qui le pousse, qui me pousse à aller au delà du déjà dit.



Il y aura toujours, surtout, le souvenir de cet après-midi d’été à une terrasse de la rue Prince-Arthur, où nous avions échoué, l’endroit où nous avions rendez-vous ne pouvant nous accueillir à cause d’une panne d’électricité. Et cette longue promenade dans Montréal pour arriver là, son émerveillement continu, ses gestes pour m’indiquer une fenêtre, un oiseau, que sais-je encore. Et tous ces auteurs qu’il aimait et qu’il me fallait lire. La liste était inépuisable.



Ce jour-là, je me souviens, il avait parlé de Virginia Woolf, le personnage principal de Souvent je prononce un adieu, la nouvelle qui ouvre Un cœur rouge dans la glace, que j’ai étirée le plus longtemps possible, tant je ne voulais pas arriver à cet adieu entre elle et le narrateur. Une nouvelle qui plairait sûrement à Caroline et à tous ceux et celles qui aiment Virginia Woolf et pour qui elle est une source continue d’inspiration.



Dans cette nouvelle, comme dans les deux autres, de longues nouvelles, chacun des narrateurs est aux prises avec ses fantômes, son enfance, les mots qu’il n’a pas su dire, ses fuites et les raisons (fausses ou pas) qui ont motivé celles-ci. Des nouvelles touchantes, fortes, déstabilisantes par moments.



Un recueil important dans la liste des livres qu’a fait paraître Robert Lalonde. Je ne dirai pas « dans l’œuvre », comme l’avait fait un critique alors qu’il n’avait que peu de livres à son actif, car un jour il m’a dit on parle « d’œuvre » quand les écrivains sont morts. Une remarque que j’ai toujours retenue.



Un cœur rouge dans la glace. À lire. Absolument.
Lien : http://lalitoutsimplement.co..
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Le monde sur le flanc de la truite

Beaucoup de longueurs. Si je l'ai terminé, c'est uniquement parce que Lalonde sait écrire joliment. J'ai noté quelques passages intéressants, ce n'était pas ça le problème pour moi.



Les irritants dans cette lecture me sont très personnels. D'abord, c'est un essai sur sa démarche d'écriture personnelle et, les essais m'ennuient généralement.



Ensuite, j'ai été vraiment agacée tout au long de ma lecture par deux choses : premièrement, il fait constamment référence à des citations d'auteurs qu'il adore, qui sont la plupart anglophones et qu'il traduit en français devant nos yeux.



Deuxièmement, je trouvais la position de l'auteur un peu égocentrique sur sa démarche d'écriture, ce qui me laissait à l'extérieur comme une simple spectatrice de ses réflexions. J'aime bien qu'un auteur me laisse la liberté de réfléchir sur ses sentiments et idées. Malheureusement, ça n'a pas été le cas pour moi avec ce livre.
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Une belle journée d'avance

En partant je dois dire que je sors de ma zone de confort. C’est une lecture particulière, très sensuelle qui se lis tôt le matin à la presque noirceur dans une maison silencieuse. On partage des moments dans une journée de plusieurs personnes raconté par un embryon en devenir et qui va faire le lien entre tous ses gens et aussi des animaux qui sont traités comme des presqu’humains. Un très beau moment de lecture très matinale.
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