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Critiques de Robertson Davies (29)
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Un homme remarquable

Francis Cornish est un homme remarquable. Du moins est-ce son daimon qui l’affirme, son daimon, c’est-à-dire son génie protecteur. Non pas sa conscience qui, coiffée d’une auréole, l’inciterait à suivre l’ennuyeuse morale chrétienne, mais son destin providentiel, sa « conscience artistique ».

Car « Corniche », comme il lui arrive d’être affectueusement appelé, est un peintre. Ce qui permet à Robertson Davies de renouveler le roman d’apprentissage : il ne s’agit plus de suivre un individu pour lui voir perdre sa naïveté et acquérir de l’expérience, il s’agit rien de moins que de comprendre comment on devient un artiste.

La recette:

Un certain don pour le dessin

Peu d’aptitudes scolaires par ailleurs, pour que ce don ne passe pas inaperçu

Une enfance solitaire

Une enfance doublement religieuse, catholique et surtout catholique honteuse, pour faire le plein de symbolisme en contournant les chromos saint-sulpiciens

Une recherche de l’âme sœur vouée à l’échec

Un thanatopracteur qui vous ouvre les yeux sur l’au-delà et vous fournit en modèles peu farouches

Un secret de famille

Un maître, sévère mais juste comme il se doit, qui place la technique au-dessus de tout: « […] il y a des imbéciles qui disent […] que la conception est tout. Foutaises ! Un tableau, ce n’est pas une conception bâclée. » et qui doute beaucoup de l’art moderne: « Si l’artiste [autrefois] avait de l’envergure, du génie, il trouvait Dieu et Son œuvre en lui-même et il les peignait pour que le monde puisse les reconnaître et les admirer. Mais les modernes [qui représentent leur monde intérieur] ne dépendent que d’eux-mêmes; ils ne sont plus aidés par la religion et par les mythes, et ce que la plupart découvrent n’est une révélation que pour eux-mêmes. […] Ce sont des morceaux saignants de la psyché exposés sur une toile. Ce n’est pas très joli et pas très soucieux de communication, mais ces artistes doivent parvenir à transcender cela pour atteindre les autres, quoique je doute que leurs œuvres seront nécessairement jolies. »

Davies se livre à un étourdissant jeu de cache pour nous questionner sur les liens entre art et vérité : la peinture peut-elle se passer de l’allégorie ? Le sens que l’on donne aux différents incidents qui émaillent notre vie peut-il être autre chose qu’une reconstitution a posteriori ? Peut-on comprendre un tableau ? Existe-t-il de faux tableaux ? Une fausse interview de Picasso peut-elle dire la vérité ?

Bien sûr, c’est un vieux débat que le « vrai-mentir » en art. Mais Robertson Davies est drôle, profond, humain, il écrit un page-turner qui nous donne l’impression d’être intelligents… Je crois qu’il m’apporte tout ce que j’attends d’un livre, cette familiarité étrange qui fait qu’un univers nouveau s’offre à nous mais nous accueille.

Bon, le tome 1 de la trilogie Cornish parlait de littérature, le tome 2 de peinture… Bien sûr, le tome 3 sera musical et il pleut suffisamment pour que personne ne puisse m’emm… à me proposer une balade ou une excursion. Alléluia. Mon daimon à moi aussi fait bien les choses.
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Les grands esprits

Le grand écrivain et érudit Robertson Davies, ce sérieux directeur d’un collège de l’université de Toronto, s’est essayé à des histoires de fantôme. J’irais même jusqu’à dire qu’il s’est prêté au jeu avec ce recueil, Les grands esprits. C’est qu’ils ne font pas si peurs, ces fantômes. Ils sont mêmes plutôt inoffensifs (à une ou deux exceptions). C'est parfois un doctorant désespéré qui s'était suicidé avant de présenté sa thèse, une autre fois une journaliste cherchant à dénoncer le sexisme des milieux universitaires canadiens (des années 1970) mais bien plus souvent des invités de marques comme l'ancien premier ministre Mackenzie King. Aussi, les fantômes ne sont pas restreints à toujours hanter les mêmes lieux, ils peuvent se déplacer. Et parfois ils viennent de très loin. En effet, la reine Victoria fait une apparition, puis le roi George V cherche un timbre de collection que son secrétaire a malencontrueusement collé à une lettre à destination du Canada. Quand au dramaturge Henrik Ibsen, il vient lancer un pied de nez.



Ces histoires de fantômes, Robertson Davies s’amusait à les raconter lors de la fête de Noël. D’abord un petit divertissement anodin, elles devinrent vite un des moments attendus de la soirée. Ceci dit, on est très loin des récits horribles, de l’esthétique gothique (ou même gore), où le suspense règne en maitre. Pas de frissons garantis! Disons qu’on est plus dans le genre Un conte de Noël, de Charles Dickens. Et le style est un brin intellectuel. Donc, le lecteur est surtout curieux de connaître quel esprit, quel personnage viendra hanter les murs du collège Massey le temps d’une nuit. Le spectre d’un professeur invité ? L’ombre d’un inconnu en quête de célébrité ? Les évanescences des enfants de la littérature ? Peut-être même le diable en personne ! Bref, Les grands esprits consituent un recueil agréable à lire et, à coup sur, original. Toutefois, quiconque veut passer une nuit blanche à frissoner à la lecture d’histoires de apeurantes, passez votre tour.
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Le monde des merveilles

Qui d'autre que Magnus Eisengrim, le plus grand illusionniste de tous les temps, pourrait incarner à l'écran le grand Jean-Eugène Robert-Houdin ? Financé par la BBC, le projet est en passe de devenir réalité et les dernières scènes sont tournées à Saint-Gall, dans la somptueuse demeure de Liesl Naegel. Les journées se passent donc en tournages et les soirées en bonne chère et bavardages, pour le plus grand plaisir de Dunny Ramsay, toujours à l'affût d'informations susceptibles d'étayer sa future biographie d'Eisengrim. Car même pour lui qui le connaît depuis le jour de naissance prématurée, l'homme reste un mystère et cache bien des secrets. Celui dont on ne sait plus rien depuis le jour où il s'est enfui de Deptford dans le sillage d'un cirque semble enfin vouloir se livrer à quelques confidences. C'est l'occasion pour Dunny d'en apprendre plus sur son ami et de peut-être enfin découvrir comment est mort Boy Staunton. Tué par Eisengrim comme il le suppose depuis toujours ou par sa propre volonté comme l'enquête l'avait conclu ?



Après Dunny Ramsay, les Saints et les mythes dans L'objet du scandale, David Staunton et la psychanalyse dans le Manticore, place à Magnus Eisengrim et le théâtre dans ce dernier tome qui clôt la trilogie de Deptford.

L'illusionniste n'a pas toujours été cet homme sûr de lui, arrogant, aux allures de monarque. C'était un enfant triste, marqué par le sceau de la honte, élevé par une mère folle et un père fanatique. Quand il tombe sous la coupe d'un pédophile, il se résigne et accepte son calvaire comme une punition divine. le monde des merveilles n'a de merveilleux que le nom, dans les faits c'est un cirque sans prestige, un simple chapiteau où se croisent des monstruosités de la nature. C'est pourtant là que Magnus fait ses armes et apprend les bases de la prestidigitation. Quand il réussit à quitter cet enfer, il trouve refuge à Londres et se fait embaucher dans une troupe théâtrale victorienne. Doublure de Sir John Tresize, il sera fidèle au grand homme et à sa femme, Milady, jusqu'à leur mort. Avec eux Magnus découvre les coulisses du théâtre, les tournées mondiales, les chicaneries entre acteurs mais aussi la fin d'une époque, une manière de jouer vouée aux oubliettes, remplacée par des représentations plus modernes, voire le cinéma.

Toujours passionnante et érudite, la fin de la trilogie réserve son lot de surprises et de révélations et, bien sûr, répond à la question cruciale : qui a tué Boy Staunton ? Mais pour connaître le fin mot de l'histoire, il faudra lire jusqu'au bout cette fantastique saga où Robertson Davies joue avec Dieu et le diable, le rêve et la réalité, la cruauté et la fantaisie. Une trilogie et un auteur à découvrir.

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Les anges rebelles

Si, selon Platon, l’âme ne cesse de voyager de corps en corps, il y a fort à parier qu’à chaque naissance ça se bouscule pas mal au portillon du ciel des idées pour être le premier à se précipiter entre les jambes de la parturiente. J’ai comme dans l’idée que quand le jeune Robertson Davies a pointé le bout de son nez, François Rabelais et Oscar Wilde, lassés de copuler ensemble depuis un bon moment déjà, se sont précipités sur le nouveau-né en oubliant de se desenchevêtrer d’abord. Umberto Éco, toujours prêt à voir des signes partout, penché sur le couple dans sa frénésie de notations, ne put s’écarter à temps, et c’est donc ce trio improbable qui dégringola avec assez peu de dignité dans le corps potelé de bébé Davies juste avant qu’il ne poussât son premier cri. Ces étourderies furent ô combien fécondes puisqu’elles nous valent ce roman étourdissant, débordant d’esprit victorien, d’érudition humaniste et d’impudente grivoiserie.

On y apprendra donc avec profit

à reconsidérer le sacerdoce. « …comment devient-on moine ? Vous faites le tour des monastères pour voir qui veut bien vous accepter. Or, ça, ce n’est pas évident du tout. Les religieux se méfient en effet des gens qui veulent soudain mener leur genre de vie ; ils ne se considèrent pas comme une alternative à la Légion étrangère. ».

à profiter des opportunités du monde moderne pour simplifier la recette des philtres d’amour. « - … comment t’es-tu procuré le sang de Maria? - Grâce à ces trucs, tu sais, ces trucs gadje qu’elle introduit en elle chaque mois. Tu en mets un dans le presse-ail et pffft! Le tour est joué. »

à réviser les évangiles apocryphes. « Ô Simon, vous devez tout de même vous rappeler les anges rebelles ! C’étaient de vrais anges: Samahazai et Azazel. Ils trahirent les secrets célestes au profit du roi Salomon, et Dieu les chassa du Ciel. Que firent-ils alors ? Passèrent-ils leur temps à se morfondre et à comploter contre le Seigneur ? Pas du tout! A la différence de Lucifer, ce n’étaient pas des narcisses rancuniers… Ils descendirent sur terre où ils enseignèrent les langues, l’art de guérir, les lois et l’hygiène… »

Mais le meilleur est sans doute que Davies, conscient de ce que cette triple hérédité pouvait engendrer de fatuité dopée aux hormones mâles, a placé ses trois mandarins sous l’autorité de cette chère Jane Austen qui en a profité pour exiger que l’histoire finisse par un mariage en bonne et due forme. Avec une mariée qui soit une vraie jeune fille. « Quand même pas! » a rugi en ricanant la sainte trinité des érudits . Allez… Va pour une demi-vierge.

Définition du bonheur : 1) avoir fini un roman de Robertson Davies, et 2) savoir que ce roman n’est que le premier tome d’une trilogie de 1400 pages. Alléluia.

Et encore merci à l’amie babeliote (est-ce vous, Bilodoh?) qui m’avez glissé son nom au détour d’une critique. Je vous dois mille remerciements.

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L'objet du scandale

Par une fin d'après-midi exceptionnellement enneigée dans le village canadien de Deptford, Dunstable Ramsey et Percy Boyd Stauton, deux garnements d'une dizaine d'années, ennemis de toujours, rivaux perpétuels, se disputent au sujet d'une luge. Prudent, Dunstable préfère rendre les armes et rentrer chez lui mais Percy le poursuit de ses foudres et l'attaque d'une boule de neige au lancer parfait. Dunstable l'évite, Percy rate sa cible mais touche Mary Dempster, la jeune épouse du pasteur baptiste. Touchée à la tête, elle s'effondre dans un cri et, plus tard, met au monde prématurément un petit Paul, malingre et fragile. Traumatisée, Mary perd la tête et devient la risée du village qu'elle choque par un comportement parfois inconvenant. Les deux garçons se gardent bien de raconter leur implication dans cet événement fâcheux et Percy finit même par oublier sa participation active. Mais il n'en va pas de même pour Dunstable qui s'attache au petit Paul et à sa pauvre mère, s'occupant de l'un et de l'autre avec ferveur et un intense sentiment de culpabilité.

Quand bien des années plus tard, alors qu'il s'apprête à quitter l'enseignement après plus de quarante ans de bons et loyaux services, Dunny Ramsay se retourne sur son passé et évoque Mary, qu'il a fini par voir comme une sainte, Paul qu'il a initié à la magie et qui, très jeune, s'est enfui avec un cirque de passage, la première guerre mondiale qui l'a laissé gravement brûlé et amputé d'une jambe, sa passion pour les saints auxquels il a consacrés plusieurs livres très estimés et ses rapports complexes avec Boy Stauton qui lui ravit la belle Leola mais devînt son ami, son conseiller financier en même temps qu'un des hommes d'affaires les plus riches du pays.



Une délicieuse causerie, à la fois érudite et drôle, sur le hasard, les coïncidences et l'influence que l'on peut exercer, sans y penser, sur son prochain. Un peu à la manière de John Irving, Robertson Davies promène son personnage, de l'enfance à la maturité, à travers les mystères de la vie, ces moments anodins qui ont d'énormes conséquences. Une boule de neige fait boule de neige, décidant de l'existence toute entière d'un garçon qui pourtant l'a évitée, de celle qui a été percutée et de ses proches et bien sûr de celui qui l'a lancée, même s'il croit pouvoir y échapper.

Grâce à son narrateur, à la fois excentrique, bienveillant et attachant, L'objet du scandale est un livre original et séduisant, une exploration de l'âme humaine, du bien et du mal, du poids des convenances et de la religion, dans un Canada qui traverse le XXè siècle, attaché à la Couronne d'Angleterre mais l'esprit d'entreprise américain chevillé au corps.

Une lecture passionnante, sans temps morts, à l'humour de bon aloi, une très belle découverte et un auteur à découvrir.
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La lyre d'Orphée

La trilogie Cornish, acte III. Retour chez Arthur et Maria qui sont devenus de scrupuleux mécènes et s’efforcent de monter un opéra d’après quelques notes éparses laissées par E.T.A. Hoffmann et une brillante absence de livret.

La musique finira néanmoins par être écrite, le livret sera livré en temps et en heure avec la participation aussi involontaire que fructueuse de Sir Walter Scott, le spectacle sera monté, révélant à nouveau les amours adultérines de Guenièvre et Lancelot, sous les regards attentifs d’Hoffmann qui commente depuis les Limbes et d’Arthur qui signe des chèques depuis son bureau.

Arthur qui, bien sûr, s’avisera trop tard qu’il porte le même nom que le cocu magnanime de la Table ronde.

On l’aura compris, entre la vie et l’opéra se tisseront de multiples liens; l’art étant prémonition et mise en évidence du mythe caché au fond de chacun d’entre nous. Et qui découvre son personnage mythique gagne mieux qu’un ange gardien: un modèle fécondant qui ouvrira de nouvelles perspectives à sa vie.

Voilà le rideau qui retombe sur les Cornish. Le 3° tome a la charge de conclure: rôle ingrat qui l’oblige à trop souvent résumer les épisodes précédents et dont l’intrigue, à trop baguenauder, manque parfois de consistance. Mais du moins bon de cette qualité-là, j’en veux bien tous les jours.

Je vais reprendre quelques forces. La trilogie de Deptford m’attend
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Le manticore

Voilà déjà un an que Boy Staunton est mort dans les eaux du port de Toronto, les mains crispées sur le volant de sa Cadillac, et dans la bouche un caillou de granit rose. Son fils David n'a jamais cru à la thèse du suicide retenue par la police et reste perturbé par ce mystérieux décès. Au cours d'une représentation de Magnus Eisengrim, le célèbre prestidigitateur, il crie haut et fort : ''Qui a tué Boy Staunton ?'' Bien sûr, il soupçonne Eisengrim d'être l'assassin de son père, mais son comportement obsessionnel l'inquiète et il décide de s'en débarrasser en se lançant dans un travail d'analyse. Dans un souci de discrétion, le riche avocat se rend à Zurich, à l'Institut Jung et est pris en main par le docteur Johanna von Haller. Avec elle, il entame son analyse, selon les principes jungien, cherchant, en racontant les épisodes les plus marquants de sa vie, les archétypes qui la régissent. A l'approche de Noël, David va mieux, ayant même réussi à contrôler son alcoolisme. Il est confronté au choix de continuer sa thérapie en Suisse ou de rentrer au Canada. Alors qu'il s'accorde quelques jours de vacances à Saint-Gall pour réfléchir, il tombe par hasard sur Dunstan Ramsay, son ancien professeur et meilleur ami de son père. Le vieil original, accompagné de Liesl Naegel, l'invite au château de Sorgenfrei qui, surprise, appartient à Magnus Eisengrim.



Personnage secondaire de l'objet du scandale, David Staunton est le narrateur de ce deuxième opus de la trilogie de Deptford. Il n'est plus un enfant mais un homme de 40 ans, avocat renommé à la Cour de Toronto, alcoolique à ses heures perdues, célibataire endurci et traumatisé par la mort mystérieuse du grand homme qu'était son père.

Le ton n'est plus à la badinerie mais à l'introspection et l'on se perd parfois dans les méandres de l'analyse jungienne. Pourtant, l'ensemble reste plaisant. Certains évènements rapportés dans le premier tome sont ici repris sous l'angle de David et là où Dunstan Ramsay savait discerner les failles et défauts de son ami Boy, son fils vit dans son ombre, le pare de toutes les vertus et s'efforce de ne pas le décevoir. Cependant la tache est rude. Malgré son amour et son admiration, David, inconsciemment, s'efforce de devenir l'opposé de son modèle. Boy est un séducteur, coureur de jupons, David est abstinent. Le père brasse des affaires, fait de l'argent, se mêle de politique, le fils vit chichement et discrètement.

Parsemé de mythes, de légendes, de rêves, ce Manticore se lit avec plaisir. L'écriture de Robertson Davies est définitivement magnifique, à la fois érudite, drôle et puissante. Les créatures qu'il convoque, comme le manticore -tête humaine, corps léonin et queue fourchue-, les mythes auxquels il se réfère, participent à une sorte de réalisme magique à la mode canadienne. Une trilogie passionnante, à lire absolument.
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Les anges rebelles

Un roman du siècle dernier, dans le décor gothique d’un collège ontarien.



Avec des personnages savoureux :



- des professeurs d’université, obnubilés par leurs domaines de recherches pointus (parfois même un peu merdique…)



- une jeune étudiante géniale mais trop jolie qui a du mal à se faire prendre au sérieux et qui a du mal à concilier son scepticisme scientifique et ses origines tziganes…



- un théologien, pasteur et très croyant, dont les convictions sont parfois bousculées…



- un ancien du collège, un être original et complètement déjanté, revenu hanter ses vieux amis et surtout leur emprunter de l’argent…



Avec aussi des envolées philosophiques, des explications scientifiques et des discours littéraires, des alliances et des rivalités, des amitiés et des jalousies, des amours et du sexe, et même une mort suspecte !



Un roman multiforme qui traite avec humour de ce tout petit monde (comme dirait David Lodge…)

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L'objet du scandale

Quelle agréable découverte! Je dois admettre que la littérature canadienne anglophone m'est presque inconnue et encore plus Robertson Davies. Donc je suis content de m'être lancé dans L'objet du scandale, le premier tome de sa trilogie de Deptford, qui doit son nom au petit village imaginaire d'Ontario du début du 20e siècle d'où sont originaires les personnages principaux.



Dès le début du roman, Dunstable Ramsay et Percy Boyd Staunton se disputent. Ramsay, jugeant plus sage de ne pas entrer en conflit, décide de rentrer mais Staunton le poursuit et lui lance des balles de neige. L'une de ces balles atteint Mary Dempster, la très jeune femme enceinte du pasteur du village, qui accouche prématurément de Paul peu de temps après puis perd la raison. Cet événement hantera les deux garçons toute leur vie et fera en sorte qu'ils garderont contact malgré les chemins très différents qu'ils prendront.



Aussi, l'histoire des deux garçons croisera celle de la grande Histoire. Première guerre mondiale, dépression, etc. Ramsay, le narrateur, tente de s'occuper du petit Paul Dempster qui disparaitra, va se battre en Europe où il perd une jambe, revient au Canada pour devenir un universitaire assez cérébral, s’intéressant à la vie des saints homme. Un peu de mysticisme. Mais toujours le sentiment de culpabilité qu’il ressent à l’endroit de Mary Dempster, dont il continue à s’occuper après la mort du pasteur, le retient prisonnier. Il va jusqu’à idéaliser la femme, la confondant avec la vierge Marie.



Heureusement, une certaine amitié/rivalité complexe avec Staunton, devenu un homme d’affaires prospère et un politicien en pleine ascension, le ramène toujours à la réalité. Il développe aussi des relations avec le fils de ce dernier, David Staunton, devenu son pupille, puis avec le magicien Magnus Eisengrim.



L’écriture de Davies me fait beaucoup penser à celle de John Irving : des personnages intéressants, originaux mais surtout complexes, qui combattent des démons intérieurs et dont les destins s’entrecroisent. On ne peut que se sentir concerné par leurs histoires. Malgré quelques moments magiques, l’ensemble du récit demeure très réaliste. Tellement que j’avais presque l’impression de lire une autobiographie. L’auteur sait décrire aussi bien la vie rurale du début du siècle dernier que les horreurs de la guerre et les pérégrinations d’un universitaire.



Bref, une grande œuvre! Il en va de même pour les deux tomes suivants, que j’ai déjà dévorés. La narration passe alors à David Staunton puis à Magnus Eisengrim qui, en plus de raconter l’histoire de leur point de vue, comblent les trous et permettent de tout comprendre.
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Les anges rebelles



C’est un roman dans le milieu fermé de l’université, au Canada.

Une jeune femme, d’origine hongroise, à demi-gitane, est une très bonne étudiante en fin de parcours, son sujet de recherche est Rabelais. Justement un leg a été fait un collège St John et Holly, par un collectionneur brouillon qui a choisi trois professeurs pour exécuteurs testamentaires. Et parmi les centaines de toiles, sculptures et documents écrits, un manuscrit de Rabelais mais qui disparaît très vite.

Par ailleurs Parlabane, ancien élève et professeur revient et jette un grand trouble dans ce microcosme. La lutherie, la divination ont aussi leur place dans ce roman (trop) touffu.



J’ai été un peu déçue. Je préfère les romans de David Lodge.





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L'objet du scandale

Quel curieux livre ! Son style semble hors du temps. Ce pourrait être un ouvrage de la fin du XIXe siècle, du début du XXe, de l’entre-deux guerres…qu’importe puisqu’il est tout cela à la fois et qu’il raconte la vie d’un homme sur presque un siècle.

L’objet du scandale est un titre paradoxal pour un livre qui nous déroule le fil d’une vie on ne peut plus conformiste, celle de Dunstan Ramsay, professeur d’histoire, invalide de guerre et hagiographe distingué. Je crois que le titre anglais du roman est bien plus révélateur du rôle mystérieux joué par Ramsay, celui de cinquième emploi : c'est le personnage qui, à l'opéra précipite l’action entre les principaux protagonistes du drame.

Dunstan Ramsay est un homme secret, aux abords rigides, et dont la vie semble aussi peu passionnante que les ouvrages sur les saints qu’il écrit. Mais, il refuse l’image terne que donne de lui l’un de ses confrères le jour de son départ en retraite. Il entreprend donc de faire le récit de son passé.

Tout commence à Deptford, dans un comté rural du Canada anglophone. Mme Dempster, la jeune et fragile épouse du nouveau pasteur méthodiste, accouche prématurément suite à la peur qu’a déclenché une boule de neige qu’elle a reçue et qui était destinée à Dunstan Ramsay. Cet incident anodin va lier à jamais les destins de Mary Dempster, de Paul Dempster son fils, de Dunstan Ramsay et du lanceur de boule de neige, Boy Staunton.

Le mystère vient d’entrer dans la vie de Ramsay, en même temps que le merveilleux incarné par la conduite étrange de Mme Dempster. Est-elle une sainte, un être bienveillant dépêché par Dieu et faiseur de miracles ? La faiblesse de son esprit est-elle le signe d’une élection divine particulière ? Ramsay, élevé dans la rigueur presbytérienne, se met en traquer sur tous les continents les créatures étranges que sont les saints. Mais, le mystère n’est jamais loin : il n’a jamais révélé qui était le lanceur de la malencontreuse boule de neige et ce secret précieusement gardé va peser sur les protagonistes de l’histoire. Qu’est devenu Paul Dempster ? Est-ce le magicien dont Ramsay croise la route en Autriche ? La magie et l’illusion peuvent-elle remplacer le mystère et le vaincre pour accomplir la vengeance ?

L’habileté de Robertson Davies est de jongler avec les contrastes, de nous présenter des personnages taillés comme des bouchons de carafe, ils réfléchissent la lumière selon que les doigts qui les tiennent les rapprochent ou les écartent de la lumière. Les destins s’accomplissent et les hommes n’en sont que les maillons involontaires.

Ce livre possède aussi tout l’humour nécessaire à ceux qui doutent que la maîtrise de leur existence passe par leurs propres mains.
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Fantômes et cie



Le roman débute par la mort de Connor Gilmartin, rédacteur en chef d’un quotidien canadien. Il a été froidement tué par l’amant de son épouse qui est également son collègue. Devenu subitement un fantôme, il accompagne son assassin au Festival de film de Toronto. Il aura droit à une projection toute particulière, soit l’histoire de sa famille immigrée au Canada sur plusieurs générations.



Une agréable lecture que ce livre de Robertson Davies, auteur que je découvrais pour la première fois. J’ai bien apprécié l’humour qui ressort des réflexions du narrateur qui se retrouve parfois témoin de drôle de situations de par son état. Bonne idée que de retracer le passé de Connor Gilamrtin par la projection de différents films. J’ai adoré remonter le temps en découvrant l’histoire des ancêtres du personnage principal et les coutumes des époques traversées. Au fil des pages et des générations, on reconnaissait des traits de caractère de notre héros. Malgré quelques petites longueurs, c’est un livre que je vous recommande!
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Un homme remarquable

J'ai aimé et compris beaucoup de chose sur la vie dans ce roman, un grand coup de coeur.
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Les anges rebelles

Plaisir remarquable à la lecture de ce roman plutôt drôle.

Par contre, j'ai essayé sans joie de lecture d'autres romans du même auteur ("Le manticore", "l'objet du scandale") donc je m'arrête sur celui-ci.
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Fantômes et cie

Le titre est trompeur, ce n'est qu'un artifice pour permettre eu narrateur de nous présenter ses ancêtres Américains et Gallois qui en ont fait un Canadien. On suit ses personnages dans des contextes historiques très instructifs qui ne sont pas sans rappeler les sagas de Follett, avec toutefois une écriture plus caustique et humoristique à la fois. Davies, en bon érudit qu'il était, parsème ce roman de références culturelles et philosophiques sans surcharger les histoires ni sombrer dans la pédanterie. Il en résulte un ouvrage plaisant, dense, mais gratifiant. Un auteur que je revisiterai sûrement.
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L'objet du scandale

Dunstan Ramsay, professeur d’histoire à l’aube de sa retraite décide de revenir sur son passé et nous raconte sa vie. Le livre commence avant la première guerre mondiale à Deptford, petite ville d’Ontario. Dunstan s’amuse avec un copain à se lancer des balles de neige jusqu’à ce qu’une balle atteigne Mrs Dempster et la fera accoucher prématurément. On verra ce que cet incident aura comme répercussions.



J’ai tout simplement adoré ce premier tome de la trilogie de Deptford. La vie de Dunstan Ramsay est loin d’être ennuyante, mais plutôt remplie de surprises et tout à fait captivante. L’auteur exploite ici le thème des coïncidences parfois banales qui changent le destin des personnes qui nous entourent. C’est fascinant toutes ces influences! Robertson Davies a un véritable talent de conteur, un style vivant qui a du rythme et une touche d’humour irrésistible.
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L'objet du scandale

Ce cyle est spendide, il nous fait plonger dans le canada et aussi l'angleterre de 39-45, avec des histoire passsionnantes de voleurs de tableaux, de faussaires, des aventures dont j'aurais aimé être le héros.
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Le monde des merveilles

Dernier ouvrage de La Trilogie de Deptford, Le Monde des Merveilles nous permet de retrouver le magicien Magnus Eisengrim, Dunny Ramsay et Liesl.

Ce livre nous permet de découvrir enfin l'histoire de Magnus. Alors que tous les protagonistes sont réunis en Suisse pour le tournage d’un film sur la vie de Robert Houdin, Eisengrim accepte de raconter la vie qu’il a menée après son départ de Deptford. Enlevé par un artiste de cirque pédophile qui lui apprend quelques trucs, il mène une vie errante au Canada et aux États-Unis avant de s’enfuir en Suisse avec Willard, son tourmenteur, réduit à l’état d’épave par la drogue. Après de nombreuses tournées en Suisse, dans le Tyrol et dans le sud de la France, la mort de Willard lui donne enfin la liberté qu’il attendait. À vingt-deux ans, il décide de rejoindre l’Angleterre. Il commence alors une carrière théâtrale sous l’égide de Sir John Tresize et de sa femme Annette de La Borderie en tant que doublure du grand comédien. Ce n’est qu’après la disparition de ce dernier, au cours d’une tournée au Canada, qu’il mettra enfin au point son numéro de magicien.

La fin du livre nous révèle l’énigme de la mort de Boy Stanton. Tour à tour cruel, loufoque, attachant, le récit nous baigne dans l'univers très particulier qu'a su créer Robertson Davies pour sa trilogie.
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L'objet du scandale

Adressant un mémoire à son directeur afin de définir les sources auxquelles sa vie s'est nourrie, et en guise de témoignage pour ne point tombé dans l'oubli afin qu'on lui rende justice, un professeur d'histoire se livre. Héros et invalide de la Grande Guerre Dunstan Ramsay, par un curieux accident de la vie dont il a tiré une fâcheuse propension à la culpabilité, est devenu amateur d'art religieux et érudit en hagiographie ce qui l'incline à voir le côté miraculeux et mythologique de son existence. Ce personnage fait office de cinquième emploi, le rôle surnuméraire mais indispensable sans lequel aucune intrigue n'est possible dans le théâtre de la vie.



J'ai trouvé l'Objet du scandale assez inégal, certains passages sont intéressants d'autres traînent en longueur, la fin est assez bien amenée. Pas sûr que sa m'incite à poursuivre la lecture de la Trilogie de Deptford .
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Le manticore

Un roman atypique, entre intrigue et fantastique.

Quelquefois un peu perdu mais toujours retrouvé, qui ne laisse pas indifférent
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